Le point sur la main-d’œuvre : portrait démographique du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons, 2017 à 2023

Le point sur la main-d’œuvre : portrait démographique du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons, 2017 à 2023

Remerciements

L’auteur tient à remercier Lily Jiang et Cael Thomas de leur contribution à ce projet.

Les entreprises du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons sont directement touchées par la conjoncture économique, les facteurs saisonniers et les dépenses discrétionnaires des ménages. Ce sous-secteur joue un rôle de premier plan dans l’économie du Canada, enrichit la culture nationale et assure une présence importante sur le marché du travail canadien. Il a toujours été une source essentielle de postes de premier échelon, offrant des horaires de travail flexibles et des possibilités de travail saisonnier, ce qui en fait un segment incontournable du marché du travail.

Le présent article, qui s’inscrit dans une série plus vaste sur les tendances de l’emploi dans l’ensemble des industries de services Note, vise à explorer les tendances financières et les caractéristiques démographiques de la main-d’œuvre du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons au Canada. Au cours des dernières années, ce sous-secteur a connu d’importantes perturbations en raison de la pandémie de COVID-19, de la hausse des coûts d’exploitation et de l’évolution des comportements des consommateurs.

Les données administratives sur lesquelles s’appuie cet article permettent d’examiner la répartition de la main-d’œuvre du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons selon le genre Note, l’âge, le statut de travail à temps plein Note et le statut de résidence Note au cours de la période de 2017 à 2023. Les résultats sont fondés uniquement sur les employés qui ont reçu un feuillet T4 de leur employeur. Les travailleurs autonomes sont exclus.

Sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons

Le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons est composé de quatre industries : les restaurants à service complet, où les clients sont servis aux tables et règlent l’addition après avoir mangé; les établissements de restauration à service restreint, y compris les établissements de restauration rapide, les comptoirs de mets à emporter et les cafétérias; où les clients paient avant le repas; les services de restauration spéciaux, comme les traiteurs, les camions de restauration et les services de restauration contractuels, qui servent des repas dans divers contextes; et les débits de boissons, y compris les bars, les tavernes et les boîtes de nuit, qui servent principalement de l’alcool Note. Ces industries dépendent grandement de l’affluence de la clientèle, du tourisme et des déplacements, activités qui ont toutes été considérablement touchées par les restrictions imposées pendant la pandémie.

Tout au long de la pandémie, la classe des restaurants à service complet a fait face à d’immenses défis. Étant tributaires du tourisme, des déplacements et des ventes en personne, les entreprises de cette classe ont été durement touchées par la pandémie, dont l’incidence s’est faite rapidement sentir. Les revenus d’exploitation des restaurants à service complet ont reculé de 33,1 % de 2019 à 2020 et sont demeurés inférieurs de 20,0 % aux niveaux de 2019 en 2021 Note. En raison de la fermeture de nombreuses salles à manger dans l’ensemble du pays, ces restaurants se sont tournés vers les options de commandes à emporter, de livraison et de commerce électronique, dans la mesure du possible Note. Par conséquent, leurs ventes en ligne ont plus que triplé (+228,6 %) pour atteindre 3,9 milliards de dollars et faire passer leur part des ventes du commerce électronique de 3,7 % en 2019 à 20,8 % en 2020 Note. Toutefois, bien que le commerce électronique ait été une véritable bouée de sauvetage pour les restaurants à service complet, la reprise au sein de cette classe ne sera possible qu’à compter de 2022, lorsque les restaurateurs ont pu de nouveau remplir les salles à manger et tirer parti de l’augmentation des ventes à marge plus élevée, comme celles des boissons alcoolisées Note.

Les exploitants d’établissements de restauration à service restreint ont moins été touchés par la mise en place des restrictions liées à la pandémie. Déjà équipés pour les commandes à emporter et les livraisons, les établissements de restauration à service restreint ont vu leurs revenus d’exploitation totaux diminuer de 12,0 % en 2020. La reprise au sein de cette classe a également été rapide, les revenus d’exploitation s’étant pleinement rétablis en 2021 pour revenir aux niveaux observés avant la pandémie Note. Les entreprises ont rapidement étendu leur présence en ligne en tirant parti de services de livraison tiers et d’applications mobiles pour améliorer l’accessibilité à leurs services. Les ventes du commerce électronique pour cette classe étaient passés de 2,0 milliards de dollars en 2019 à 4,5 milliards de dollars en 2023 Note. Ce virage numérique a non seulement soutenu la reprise à court terme, mais il a également transformé les habitudes de consommation et fait des commandes en ligne un aspect essentiel de la croissance future.

Au sein du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons, les entreprises des groupes des services de restauration spéciaux et des débits de boissons alcoolisées ont été les plus durement touchées au cours de cette période. En 2020, les revenus d’exploitation des services de restauration spéciaux et des débits de boissons ont diminué de près de moitié (-48,3 % et -49,4 %, respectivement) par rapport à ceux enregistrés en 2019. Puisqu’ils sont fortement tributaires des grands événements et des rassemblements sociaux, ces deux groupes du sous-secteur ont aussi connu une lente reprise, leurs revenus d’exploitation ne s’étant redressés qu’en 2023 pour atteindre les niveaux observés avant la pandémie Note. Compte tenu de l’ampleur de la baisse de revenus, le gouvernement fédéral a mis en œuvre diverses mesures de soutien, notamment des subventions et des programmes comme la Subvention salariale d’urgence du Canada et la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer Note, Note.

En 2023, l’emploi dans les quatre industries du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons n’avait pas retrouvé le niveau observé avant la pandémie et était demeuré inférieur de 2,4 % au niveau observé en 2019 Note. Malgré cet état de fait, les exploitants ont continué de faire face à des pressions salariales croissantes, les salaires, traitements et commissions ayant augmenté de 22,2 % au cours de la même période. En outre, de 2019 à 2023, la hausse du coût des aliments et des opérations a entraîné l’augmentation du coût des biens vendus (+20,8 %) et les frais de location et de location à bail (+15,9 %) observée dans le sous-secteur Note. Par conséquent, la marge bénéficiaire d’exploitation du sous-secteur a diminué pour s’établir à 3,6 % en 2023. Il s’agit de la marge bénéficiaire la plus faible ayant été enregistrée depuis 2003 (3,2 %) Note. En raison de la baisse des marges et de l’augmentation des pressions exercées sur les salaires et les coûts dans le sous-secteur, les restaurateurs ont réagi en ajustant les prix pour veiller à la durabilité des activités. En décembre 2023, le prix des aliments achetés dans un restaurant avait augmenté de 21,2 %, comparativement à décembre 2019 Note. Malgré une croissance de 21,2 % des revenus, la hausse des prix souligne une baisse de l’activité au sein du sous-secteur. Les défis liés au coût de la vie et l’évolution des habitudes de consommation, en partie attribuables à l’adoption du mode de travail hybride, ont contribué à la baisse de l’activité économique, le produit intérieur brut réel du sous-secteur ayant diminué de 7,8 % en 2023 par rapport aux niveaux de 2019 Note.

Tendances de la main-d’œuvre dans le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons : composition selon le genre

Au cours de toutes les années à l’étude, les femmes composaient la plus grande part de la main-d’œuvre de l’ensemble des industries; elles représentaient en moyenne 57,9 % de l’emploi total. Cette proportion a légèrement diminué pour passer de 59,0 % en 2017 et à 56,7 % en 2023. La plus grande proportion de femmes employées faisait partie du groupe des services de restauration spéciaux, où elles représentaient en moyenne 61,6 % de la main-d’œuvre. Tableau 1

Tendances de la main-d’œuvre dans le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons : composition selon l’âge

Le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons employait une main-d’œuvre principalement jeune. En 2023, plus des deux tiers des employés avaient moins de 35 ans et 43,8 % avaient moins de 25 ans. Cette répartition contraste fortement avec celle de l’ensemble de la main-d’œuvre canadienne, au sein de laquelle 36,2 % des employés avaient moins de 35 ans et 13,1 % avaient moins de 25 ans. Note La classe des établissements de restauration à service restreint enregistrait la plus forte proportion de jeunes travailleurs, 49,8 % de sa main-d’œuvre étant âgée de moins de 25 ans. Parmi les employés de ce groupe d’âge, 94,3 % travaillaient à temps partiel, comparativement à 72,1 % chez ceux de 25 ans et plus. Au cours de toutes les années à l’étude, la composition de l’effectif selon l’âge variait entre les industries : le groupe des services de restauration spéciaux comptait la main-d’œuvre la plus âgée (44,8 % du personnel âgé de 35 ans et plus); venaient ensuite les débits de boissons alcoolisées (34,8 %), les restaurants à service complet (30,8 %) et les établissements de restauration à service restreint (24,7 %). Tableau 2

Tendances de la main-d’œuvre dans le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons : statut d’emploi

Le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons compte fortement sur l’emploi à temps partiel. Tout au long de la pandémie, cette dépendance à l’égard de la main-d’œuvre à temps partiel s’est accentuée : la proportion d’employés à temps partiel est passée de 84,6 % en 2019 à 88,2 % en 2020. Toutefois, avec la reprise graduelle des activités, la proportion de cette main-d’œuvre est revenue aux niveaux observés avant la pandémie. Observé dans l’ensemble des quatre industries du sous-secteur, ce phénomène était probablement en partie attribuable à la réduction des heures de travail tout au long de la pandémie. Bien que la répartition de la main-d’œuvre selon le statut d’emploi ait été homogène entre les industries, le groupe des services de restauration spéciaux employait uniformément une plus grande proportion de personnes à temps plein (18,1 % en moyenne). Tableau 3

Comme ce fut le cas dans le sous-secteur des services d’hébergement Note, la demande de main-d’œuvre non comblée a posé un défi important au sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons à l’issue de la pandémie. Tout au long de 2021 et 2022, les taux de postes vacants dans le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons ont considérablement augmenté; un nombre important d’employés déplacés en raison de la pandémie ont choisi de ne pas retourner dans ce sous-secteur, lequel a connu un rebond de la demande de services de restauration au fur et à mesure que les restrictions liées à la pandémie ont été assouplies ou levées. Après avoir atteint un sommet de 13,4 % au troisième trimestre de 2021, le taux moyen de postes vacants dans le sous-secteur est demeuré élevé en 2022 (10,2 %) et 2023 (7,1 %), comparativement à celui enregistré sur le marché du travail canadien, lequel s’établissait à 5,4 % en 2022 et à 4,2 % en 2023 Note.

Tout au long de cette période, la proportion de résidents non permanents employés dans le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons a augmenté pour atteindre 20,8 % comparativement à 11,3 % en 2019. Cette hausse a été la plus prononcée au sein de la main-d’œuvre de la classe des établissements de restauration à service restreint, la proportion de résidents non permanents y ayant augmenté pour se chiffrer à 25,2 %, comparativement à 13,0 % en 2019. La disponibilité de résidents non permanents au sein de l’offre de main-d’œuvre s’est accrue en raison de la forte croissance de l’immigration temporaire tout au long de 2022 et 2023 Note, ce qui a contribué à réduire le taux de postes vacants et à atténuer la pénurie de main-d’œuvre dans le sous-secteur Note. Tableau 4

Conclusion

Le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons est une composante essentielle de l’économie canadienne. Il constitue l’une des plus grandes industries du Canada sur le plan de l’emploi total. En outre, il contribue de façon marquée à la croissance économique, aux dépenses de consommation et à la participation communautaire. Malgré les effets négatifs importants de la pandémie, le sous-secteur a connu une reprise financière à l’issue de celle-ci. Toutefois, les niveaux d’emploi en 2023 sont demeurés inférieurs à ceux de 2019 dans les quatre industries. Malgré cet état de fait, la répartition de la main-d’œuvre selon le genre, l’âge et le statut de travailleur à temps plein est demeurée en grande partie inchangée de 2017 à 2023. Le sous-secteur a maintenu une main-d’œuvre principalement composée de jeunes, au sein de laquelle la plupart occupaient un emploi à temps partiel. Toutefois, le statut de résidence de la main-d’œuvre a changé pendant et après la pandémie en raison de la dépendance accrue du sous-secteur à l’égard des résidents non permanents — notamment les étudiants étrangers, les travailleurs étrangers temporaires et d’autres personnes n’étant pas citoyennes ni résidentes permanentes du Canada—, dont la présence ne cesse de croître au sein de l’offre de main-d’œuvre. En 2023, le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons employait une plus grande proportion de résidents non permanents que celui des services d’hébergement Note.

Les exploitants du sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons font face à des conditions économiques changeantes à court terme. Les répercussions économiques des tensions commerciales avec les États-Unis vont bien au-delà des entreprises participant à des activités commerciales transfrontalières. Les fournisseurs de services, y compris les restaurants, peuvent connaître des changements liés aux coûts, aux salaires et aux dépenses de consommation Note. De plus, comme 1 emploi sur 5 dans le sous-secteur des services de restauration et des débits de boissons était occupé par un résident non permanent en 2023, la réduction du nombre de résidents non permanents à 5 % de la population canadienne totale prévue d’ici la fin de 2026 Note pourrait avoir une incidence sur l’offre de main-d’œuvre. Le 1er avril 2025, le Canada comptait 2 959 825 résidents non permanents, ce qui représente 7,1 % de la population totale. Cette baisse par rapport à la proportion de 7,4 % enregistrée le 1er octobre 2024 se traduit par une diminution de 61 111 résidents non permanents depuis le début de l’année Note, Note.

Enfin, au fur et à mesure que les progrès technologiques continuent de transformer divers secteurs, les préoccupations que suscitent l’automatisation et l’intelligence artificielle (IA) en ce qui concerne la réduction des effectifs ont augmenté. Toutefois, une récente analyse empirique Note  montre que la main-d’œuvre d’industries comme les services d’hébergement et de restauration est relativement moins exposée à la transformation et à la rationalisation des emplois liées à l’IA.

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