Arrêtons d'opposer métiers techniques et professions intellectuelles !

J'étais à Bordeaux vendredi dernier pour les finales régionales de Worldskills. De quoi s’agit-il ? Worldskills est une compétition mondiale des métiers, à l’image des Jeux olympiques pour les sports. Tous les deux ans, près de 700 jeunes, quel que soit leurs statut, âgés de moins de 23 ans, et originaires de tous les continents, se mesurent dans près de 50 métiers de différents domaines économiques : bâtiment, travaux publics, industrie, automobile, services, agriculture, alimentation ou encore nouvelles technologies.

Et cette année à Bordeaux, les épreuves concerneront également les métiers de la vigne et du vin, les métiers de la poissonnerie et de la propreté. En organisant une compétition internationale sur un même site pour donner une vision globale et concrète des métiers et compétences de l'époque, Worldskills entend promouvoir les métiers, reconnaître et valoriser les jeunes qui font le choix de la formation professionnelle. La compétition se déroule en 3 étapes : des sélections sont organisées au niveau régional puis national dans chaque pays-membre avant une finale internationale organisée pendant 4 jours sur un site unique.

Cette compétition est pour moi essentielle. Elle permet de valoriser les talents des jeunes qui ont choisi ces métiers. Et de remettre les pendules à l’heure, particulièrement dans notre pays qui a une fâcheuse tendance à privilégier l’enseignement théorique et académique, indépendamment de son efficacité à déboucher sur un métier, voire un emploi, et à mépriser les métiers dits techniques, la formation professionnelle et l’apprentissage. Or la performance et l’excellence des entreprises reposent sur ces métiers.

Notre pays a une fâcheuse tendance à privilégier l’enseignement théorique et académique et à mépriser les métiers dits techniques

Worldskills permet également de lever un malentendu. Les métiers dits « techniques » – une formulation révélatrice – sont souvent dévalorisés  car identifiés au travail manuel qui serait un travail du corps, mécanique, sans réflexion, à l'exception toutefois de ce qui relève des arts appliqués, alors que le  travail intellectuel ferait appel à ce qu’il y a de plus noble dans la nature humaine, la pensée, la faculté de conceptualiser. Outre que tout travail nécessite une conscience, une réflexion et donc présente un caractère intellectuel, cette opposition n’est plus pertinente aujourd’hui et ne relève que de préjugés paresseux qui ne résistent pas à l’analyse de l’évolution des formes de  travail.  A mesure que la technique progresse, et elle progresse à grands pas avec la révolution numérique, elle mobilise de plus en plus de concentration intellectuelle et des compétences sans cesse renouvelées. Il y a longtemps que les robots ont remplacé l’homme pour les gestes contraints, répétitifs et pénibles. Et c’est heureux.

Les formes d’intelligence sont diverses et tout le monde n’a pas la même appétence pour les études théoriques

Pour cela, comme pour le reste, il est grand temps que notre pays regarde la réalité en face, sorte de sa vision normative, égalitaire. Les formes d’intelligence sont diverses et tout le monde n’a pas la même appétence pour les études longues ou essentiellement théoriques. Notre pays a besoin de toutes les compétences, de tous les talents, et ils sont nombreux en France, pour réussir. Nous avons besoin de tous ses jeunes pour créer et façonner la France de demain.

Vive l'apprentissage !