La Cité de Calvin, futur centre d’attractivité technologique des gouvernements ?
Christopher Fabian

La Cité de Calvin, futur centre d’attractivité technologique des gouvernements ?

Dans un contexte géopolitique où la confiance entre les États-Unis et leurs alliés historiques s’érode, la question de la souveraineté numérique s’invite au cœur de tous les débats. Genève apparaît comme un centre stratégique et une place technologique de confiance qui pourrait se développer au service et avec le soutien des gouvernements, en d’autres termes un « hub GovTech ».

Dès le début des années 1990, les États-Unis ont emprunté la voie rapide des technologies de l’information conduisant plus de trente ans plus tard à l’hégémonie des géants du web. Et, quand le lien euro-atlantiste s’effiloche, notre extrême dépendance numérique à leur égard saute aux yeux. La situation de quasi-monopole des GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) inquiète désormais autant la sphère économique que les milieux politiques.

Pour les pays du vieux continent et au-delà, il est plus que jamais l’heure de la coopération et de l’innovation, ingrédients indispensables de la souveraineté numérique.

GENÈVE, PLACE INTERNATIONALE ET TECHNOLOGIQUE

Les gouvernements le savent, ils ne pourront acquérir leur souveraineté numérique sans la mise en place de coalitions.

Dans cette optique, Genève a les atouts pour exceller dans le domaine des GovTech et devenir le centre d’attractivité technologique des gouvernements. Sa neutralité, sa position géographique centrale et son rôle en tant que terre d’accueil des missions diplomatiques et des ambassadeurs en font un lieu stratégique pouvant soutenir les négociations et les prises de décisions multilatérales ainsi que les développements technologiques du futur.

La présence de l’Union internationale des télécommunications (UIT) place la Genève internationale comme un réseau actif de la connectivité. L’institution spécialisée des Nations Unie pour les technologies numériques rassemble 194 États membres et plus de 1 000 entreprises, universités et organisations internationales et régionales.

Pour Christopher Fabian, ingénieur et cofondateur de Giga*, c’est le moment de transformer ce terreau en un hub GovTech. L’ambition est de créer une place de confiance technologique, avec des partenariats publics-privés, un cadre juridique facilité ainsi qu’une pépinière GovTech. Cette dernière attirerait et rassemblerait de nouvelles start-up et des entreprises étrangères qui travaillent à des solutions innovantes répondant aux défis de la transformation numérique des gouvernements.

« Nous avons eu de nombreuses conversations avec la Trust Valley - pôle de compétences en matière de confiance numérique et de cybersécurité -, la Fondation Genevoise pour l’Innovation Technologique (FONGIT), le Forum économique mondial (WEF), ainsi que d’autres acteurs qui joueront un rôle clé dans cette initiative. L’objectif n’est pas de reproduire ce qui existe déjà, mais de mettre en place un cadre et une base commune pour soutenir ces acteurs, notamment lorsqu’il s’agit d’évaluer des technologies destinées aux gouvernements. En effet, ces technologies présentent des caractéristiques spécifiques qui les distinguent des logiciels commerciaux traditionnels, qu’ils soient B2B ou B2C », déclare Christopher Fabian.

Ce hub permettrait aux gouvernements d’acquérir, de maîtriser et d’améliorer leur connectivité dans de nombreux domaines : la santé, l’éducation, les transports et bien d’autres.

DÉVELOPPER UN CATALYSEUR TECHNOLOGIQUE

Le hub GovTech deviendrait ainsi un catalyseur technologique dont l’une des branches aurait pour rôle de « construire un réseau de composants, petits mais vitaux, qui, mis bout à bout, aideraient le monde à mieux fonctionner. Chaque module, logiciel, outil open source, protocole sécurisé… jouerait un rôle de rail d’un chemin de fer », indique Christopher Fabian.

À titre de comparaison, les encres de sécurité SICPA, qui protègent des documents sensibles, tels que les billets de banque ou les passeports, constituent un bel exemple. En effet, SICPA, dont le siège est situé dans le canton de Vaud, fournit des encres à plus de 180 États, renforçant considérablement la confiance dans les systèmes financiers mondiaux.

Les composants développés au sein de ce futur hub constitueraient des cartes stratégiques sur les plans tant géopolitique, économique que social, comme autant de voies sur l’autoroute numérique.

Ainsi, il est nécessaire d’attirer et fédérer les acteurs du monde entier qui œuvrent au développement de nouveaux logiciels et de technologies open source, éthiques et équitables, à destination d’entités gouvernementales.

Depuis le campus Biotech à Genève, Christopher Fabian favorise les rencontres entre les acteurs de l’innovation - chercheurs et entreprises - et les décideurs du Canton et de la Ville pour conduire le projet vers une nouvelle échelle.

Christopher Fabian

Ingénieur et expert mondial des technologies émergentes appliquées aux enjeux de la géopolitique, Christopher Fabian a conseillé deux secrétaires généraux de l’ONU, fondé l’unité d’innovation de l’UNICEF et dirigé des projets pionniers tels que la téléphonie mobile open-source, les couloirs de drones du secteur public et le premier fonds libellé en crypto-monnaie dans le secteur public. Reconnu en 2013 par le Time Magazine comme l’une des 100 personnes les plus influentes du monde, il siège aujourd’hui dans plusieurs conseils internationaux liés à l’art, l’innovation ou l’IA.

SAVE THE DATE

En marge du Sommet «AI for Good», du 8 au 11 juillet 2025 se tiendra le Giga Global Connectivity Forum (GCF) au campus Biotech, événement commun avec la CCIG.

Rassemblant une centaine d’acteurs clés dans le domaine de l’éducation et du numérique, le GCF informera sur de nouvelles approches et visera à faire grandir, à partir de Genève, un avenir numérique équitable.

*Giga

Initiative conjointe de l’UNICEF et de l’UIT lancée en 2019 par Christopher Fabian, Giga vise à connecter chaque école du monde à Internet d’ici 2030 en vue de réduire la fracture numérique. Depuis sa création, Giga a connecté plus de 24 000 écoles touchant plus de 11 millions d’élèves en collaborant avec 40 pays.

Joel Myhre

Humanitarian Technology Innovator

3 mois

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