PREMIER MINISTRE




Novembre 2009




                                      Rapports et documents
Le développement du télétravail
dans la société numérique de demain
Centre d’analyse stratégique
18, rue de Martignac – 75700 Paris cedex 07

        www.strategie.gouv.fr
Le développement du télétravail
dans la société numérique de demain

               Cabinet Roland Berger
   Jérôme Ferhenbach, Frédéric Granel et Damien Dufort


              Centre d’analyse stratégique

             Tristan Klein et Jean-Loup Loyer


            avec le concours des Ambassades
Le développement du télétravail dans la société numérique de demain
Introduction ................................................................................................................................ 7

Messages clés .......................................................................................................................... 9

Chapitre 1
De grands espoirs, un développement faible .............................................................. 12
      1. La notion de télétravail a changé au gré des évolutions technologiques
         et s’est stabilisée grâce aux accords entre les partenaires sociaux............................. 12
      2. Un retard français par rapport aux autres pays de l’OCDE, en particulier
         pour le secteur public ....................................................................................................... 16

Chapitre 2
De nombreux obstacles ........................................................................................................ 26
      1. L’examen des appréhensions à l’égard du télétravail fournit un cadre d’analyse
         des freins à son essor ....................................................................................................... 26
      2. Un relatif manque de confiance entre partenaires sociaux expliquerait en partie
         les faibles avancées du télétravail en France.................................................................. 28
      3. Des obstacles culturels souvent à l’origine de blocages organisationnels .................. 32
      4. La diffusion des technologies explique en partie le développement du télétravail ..... 37
      5. La géographie n’est pas un obstacle majeur au développement du télétravail .......... 39
      6. Récapitulatif des principaux obstacles à l’essor du télétravail ..................................... 39

Chapitre 3
Les risques d’abus .................................................................................................................. 44
      1. Les abus restent rares, bien que probablement sous-estimés ..................................... 44
      2. La protection contre les abus en France et dans les pays de l’OCDE ......................... 49
      3. Les télétravailleurs se déclarent majoritairement satisfaits et disposent
         généralement de meilleures conditions de travail .......................................................... 55
      4. Les abus liés au télétravail restent marginaux mais quelques incertitudes
         de nature juridique demeurent ......................................................................................... 57

Chapitre 4
Un fort potentiel de développement ................................................................................ 61
      1. Le télétravail pourrait concerner jusqu’à 50 % de la population active en 2015,
         contre 30 % aujourd’hui ................................................................................................... 61
      2. Le télétravail ne peut augmenter que marginalement le taux d’emploi des seniors ... 68
      3. Sous certaines conditions, le télétravail peut être une alternative aux congés maladie . 71
      4. Le télétravail peut contribuer à mieux concilier activité professionnelle
         et périodes prénatale et postnatale (hors congé maternité) .......................................... 75
Chapitre 5
La nécessaire implication de tous les acteurs ............................................................ 77
      1.   Le télétravail procure des avantages décisifs dans de nombreux domaines ..............                                                   77
      2.   Les « success stories » et les bonnes pratiques ............................................................                             81
      3.   Les initiatives des pouvoirs publics contribuent à l’essor du télétravail.......................                                         87
      4.   Les facteurs de développement et les cinq facteurs clés de succès d’un projet
           de télétravail .......................................................................................................................   96

Recommandations .................................................................................................................. 100



ANNEXES

Annexe      1 : Lettre de saisine ......................................................................................................... 121
Annexe      2 : Liste des personnes interrogées .............................................................................. 123
Annexe      3 : L’évolution des définitions du télétravail depuis 1993............................................ 126
Annexe      4 : Tableau récapitulatif des définitions du télétravail pour la France ........................ 128
Annexe      5 : Quelques définitions du télétravail à l’étranger ....................................................... 129
Annexe      6 : Les éléments de jurisprudence ................................................................................. 132
Annexe      7 : Tableau détaillé des chiffres relatifs au télétravail, par catégorie
                 de télétravailleurs ...................................................................................................... 135
Annexe      8 : Les corrélations entre l’essor du télétravail et quelques indicateurs
                socioéconomiques ..................................................................................................... 138
Annexe      9 : Liste des tableaux et figures ..................................................................................... 141
Annexe      10 : Abréviations, sigles et acronymes.......................................................................... 143
Annexe      11 : Références bibliographiques .................................................................................. 146
1
Au regard de la situation dans de nombreux pays industrialisés, le télétravail est
encore peu répandu en France. Pour favoriser son développement tout en évitant les
éventuels abus liés au télétravail subi, la secrétaire d’État à la Prospective et au
Développement de l’Économie numérique a demandé au Centre d’analyse stratégique
d’étudier la situation en France et dans les pays de l’OCDE.

Le télétravail préfigure sous bien des aspects les nouvelles formes du travail de
demain, à l’ère du numérique et de la société de la connaissance. Le terme même de
« télétravail » est d’ores et déjà dépassé dans les pays qui le pratiquent avec
enthousiasme, au profit de celui, plus englobant, plus flexible aussi, de « travail
mobile » ou de « e-travail ».

Les technologies numériques modèlent chaque jour davantage nos modes de vies et
par conséquent nos façons de travailler : Internet, les ordinateurs portables et les télé-
phones mobiles trouvent des applications dans tous les domaines d’activité et sont
déjà porteurs de transformations importantes du travail. Elles ouvrent des opportunités
inédites à l’essor du télétravail : dans les années à venir, l’amélioration de la capacité
d’innovation et les gains de productivité permis par les évolutions technologiques
seront considérables, que ce soit à travers les applications collaboratives (virtuali-
sation, cloud computing et Software as a Service) ou les outils de mobilité (netbooks
et smartphones, 4G, LTE/WiMAX, réseaux sans couture…). Ces technologies
devraient non seulement s’appliquer aux télétravailleurs, au sens de la loi, mais
également permettre à la plupart d’entre nous de bénéficier d’une plus grande
flexibilité dans le travail.

De ce fait, les technologies numériques remettent en cause les schémas établis,
                                                 e
instaurés par l’industrialisation à partir du XIX siècle, de l’unité de temps et de lieu.
Des questions telles que le découplage entre activité professionnelle et locaux de
            2
l’entreprise ou encore les nouvelles porosités entre vie privée et vie professionnelle se
posent avec une plus grande acuité dans le cas du télétravail. Ainsi, son
développement ne peut se faire sans que soient étudiés les bouleversements sociaux
induits par l’usage des TIC.

Dans de nombreux domaines, le télétravail présente des avantages importants : il
améliore les conditions de travail des salariés et la conciliation entre vie personnelle et
1
  Ce rapport adopte la définition suivante du télétravail, large et consensuelle : « Le télétravail peut être
défini comme étant le travail qui s’effectue, dans le cadre d’un contrat de travail, au domicile ou à
distance de l’environnement hiérarchique et de l’équipe du travailleur à l’aide des technologies de
l’information et de la communication ». Source : Forum des droits sur l’Internet (décembre 2004),
Recommandation « Le télétravail en France ».
2
    Déjà en 1995, moins de 40 % des actifs travaillaient en un lieu fixe, uniquement du lundi au vendredi.


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vie professionnelle ; il contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ; il
bouscule les modèles organisationnels et managériaux obsolescents ; il favorise
l’accès à l’emploi des populations exclues du marché du travail, contribuant de ce fait
à l’inclusion sociale ; il permet de réduire les impacts sanitaires de la pollution dans les
centres urbains… Bref, le télétravail contribue à une meilleure qualité de vie, à la
réduction des dépenses sociales ou encore à la compétitivité de notre économie.
Dans tous ces domaines, il apporte des éléments de réponse adaptés aux défis
socioéconomiques des prochaines décennies.

Parmi ces défis figure en bonne place l’amélioration des relations et des conditions de
travail. Le télétravail est ici un instrument de souplesse entre employeur et employé. Il
va de pair avec le travail intellectuel, la société de la connaissance, une économie de
services à forte valeur ajoutée. Ses prérequis sont la confiance entre employeur et
employé, le management selon des objectifs concertés, le dialogue entre tous les
acteurs de l’organisation.

Néanmoins, le télétravail ne constitue pas le remède miracle. En particulier, il remet en
cause trois aspects fondamentaux du travail salarié et de manière plus générale le
Code du travail :
–    l’employeur d’un salarié, voire son supérieur hiérarchique direct, peuvent se
     trouver sur un autre continent, à des milliers de kilomètres de distance. Dès lors,
     c’est la notion de subordination et surtout ses modalités qui se trouvent
     profondément modifiées, en particulier pour les « travailleurs du savoir ». Cette
     subordination peut aussi bien diminuer que s’accroître pour prendre la forme
     d’une « télédisponibilité généralisée » ;
–    la notion de temps de travail est remise en cause, notamment par le
     débordement du travail sur la sphère privée. Surtout, ce sont les modalités de
     contrôle du temps de travail qui sont remises en cause, bien que les outils
     technologiques peuvent assurer un contrôle très précis et détaillé ;
–    les TIC peuvent affaiblir les collectifs de travail, par la constitution de réseaux
     multiformes, horizontaux et transversaux, introduisant parfois une porosité entre
     l’espace de l’entreprise et d’autres communautés de travail ou de non-travail.

Par conséquent, pour que les gains apportés par le télétravail soient significatifs et
pérennes, son déploiement dans une organisation doit être progressif et adapté,
suivant certaines étapes bien identifiées. À cette condition, ses inconvénients
potentiels sont largement contrebalancés par de formidables opportunités.

Ce rapport tente d’esquisser une vue d’ensemble du télétravail, de ses avantages
comme de ses désagréments, en adoptant une démarche pragmatique et systémique.
Le premier chapitre expose la situation de la France au regard de ses partenaires de
l’OCDE, le deuxième présente les principaux obstacles à la mise en place du
télétravail. Le troisième chapitre examine le cadre juridique du télétravail et les abus
constatés. Le potentiel du télétravail, aujourd’hui et à l’horizon 2015-2020 fait l’objet
du quatrième chapitre. Le cinquième et dernier chapitre expose un certain nombre de
bonnes pratiques rencontrées dans les pays étrangers, les administrations et les
entreprises, préparant ainsi la transition vers les recommandations.




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1. Depuis au moins dix ans, la France est en retard sur les principaux pays de
     l’OCDE en matière de développement du télétravail, quelles que soient les
     sources ou les approches statistiques. Dans les pays scandinaves et anglo-
     saxons notamment, il concerne deux à trois fois plus de salariés. En particulier, la
     France apparaît très en retard pour le déploiement du télétravail dans
     l’administration, puisque dans la plupart des pays de l’OCDE, le cadre juridique
     du télétravail s’applique aussi aux agents publics.

    Les principaux leviers pour le développement du télétravail en France se
    situent hors du cadre juridique et sont au nombre de quatre :
    –    une évolution de la culture managériale française en lien avec des
         transformations des modes d’organisation du travail et de la production pour
         les adapter à l’économie de la connaissance ;
    –    une meilleure connaissance des gains envisageables grâce au télétravail,
         et plus généralement grâce aux TIC, favorisée par le développement
         d’informations de référence sur le sujet ;
    –    la mise à disposition d’infrastructures numériques de qualité à l’échelle de
         l’ensemble du territoire, mixant haut débit, 3G et télécentres ;
    –    la diffusion d’outils techniques performants, accessibles, fiables et de
         moins en moins onéreux, préalable à tout télétravail formalisé au sein des
         entreprises. Les questions de sécurité des données et de gestion de la vie
         privée doivent cependant faire partie des réflexions sur les technologies.


2. Le     télétravail et plus largement le travail avec des outils numériques
     transforment profondément les relations de travail. En effet, ils mettent à mal
     les concepts usuels du temps de travail et les frontières entre vie professionnelle
     et vie privée. Par ailleurs, ils interrogent le lien de subordination du travail salarié.

    L’un des enjeux majeurs du développement du télétravail aujourd’hui est de
    donner une plus grande flexibilité du travail au salarié en lui permettant de
    mieux concilier vie familiale et vie professionnelle, par exemple, d’interrompre sa
    journée de travail pour aller chercher un enfant à l’école ou rendre visite à une
    personne âgée puis de reprendre son travail en soirée.

    Les marges principales de progression du télétravail en France, comme à
    l’étranger, résident dans la diffusion du télétravail partiel, un à deux jours par


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semaine. En effet, un temps complet peut poser des problèmes d’isolement du
    salarié et réduire les gains de productivité associés au télétravail, le maximum de
    productivité étant atteint pour un ou deux jours de télétravail par semaine. A
    contrario, les effets positifs pour les entreprises (immobilier) et pour la collectivité
    (déplacements) sont plus nets en cas de diffusion de ce mode d’organisation à
    une grande partie des salariés (20 % ou 30 % minimum).


3. Pour prendre son plein essor, le télétravail doit continuer à bénéficier de la
     règle actuelle du « double volontariat ». Il serait donc préjudiciable de vouloir
     l’encadrer trop strictement et de manière trop uniforme par la loi. Le télétravail
     répond aux attentes spécifiques de nombreux salariés (conciliation vie familiale et
     vie professionnelle) et requiert une confiance entre les deux parties. Au-delà, des
     principes adaptés à chaque entreprise devraient être négociés avec les
     représentants des salariés.


4. La      proposition de loi actuelle constitue un socle propice pour le
     développement du télétravail sans explosion d’un télétravail subi ; elle apparaît
     relativement protectrice pour les salariés sans pour autant dissuader les
     entreprises qui souhaiteraient mettre en place le télétravail. L’enjeu aujourd’hui
     réside dans l’effectivité des instances de contrôle des abus et de non-respect du
     cadre légal et conventionnel : institutions représentatives du personnel,
     Inspection du travail et conseils de prud’hommes. Une formation de ces acteurs
     au cadre juridique du télétravail apparaît nécessaire.

    Une clarification des règles d’accidents du travail (affirmation du principe de
    présomption d’accidents du travail au bénéfice du télétravailleur) et du
    régime d’assurance habitation et de sa prise en charge par l’employeur
    pourraient toutefois constituer deux ajustements possibles à la proposition de
    loi. Ces clarifications sont demandées par les entreprises françaises ayant adopté
    le télétravail. En effet, jusqu’à présent prévalent des principes simples de prise en
    charge par l’employeur tandis que les problèmes sont réglés au cas par cas.


5. Le potentiel de développement du télétravail, pour une partie de l’exercice
     de la profession, pourrait concerner jusqu’à 40 % à 50 % des emplois à
     l’horizon de dix ans. Toutes les fonctions ne sont pas « télétravaillables »,
     notamment dès lors qu’elles n’utilisent pas les TIC. À cet égard, les données
     disponibles en matière de prospective des métiers et des qualifications montrent
     que les métiers qui vont se développer le plus ne sont pas en général propices au
     télétravail (assistantes maternelles, aides à domicile, aides-soignants, infirmières,
     ouvriers qualifiés des industries de process, ouvriers qualifiés de la manutention,
     employés de maison, etc.). Le développement du télétravail repose donc sur une
     diffusion large et importante dans les métiers qui lui sont particulièrement
     propices (emplois de cadres et d’ingénieurs, fonctions administratives support,
     fonctions intellectuelles, etc.).


6. Dans aucun des pays de l’OCDE étudiés n’ont été mentionnés des abus de
     télétravail subi lors d’un congé maternité ou d’un arrêt maladie :
    –    le congé maternité est un droit de la femme qui ne saurait être remis en
         question ; le télétravail peut néanmoins être source de progrès social


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avant ou après le congé maternité. Il permet en effet à la future mère
         d’économiser ses efforts en diminuant le temps de transport avant son congé
         maternité, ou à l’un des deux parents de passer plus de temps avec le jeune
         enfant dans la période postérieure. Il appartient à l’État non de légiférer sur
         un tel sujet, mais d’encourager les entreprises à proposer à leurs salariés un
         télétravail à temps partiel dans ces périodes, en s’inspirant des bonnes
         pratiques existantes tant en France qu’à l’étranger (pour les femmes
         enceintes par exemple) ;
    –    un arrêt maladie peut être accordé à un salarié empêché de se rendre à son
         travail et non de l’exercer (une entorse par exemple). Néanmoins, dans le cas
         d’un congé maladie, la pratique du télétravail doit être encadrée pour
         éviter d’éventuels abus de télétravail subi. Pour répondre à certains
         empêchements particuliers, il pourrait être envisagé de réfléchir à un
         certificat médical d’aptitude au télétravail, délivré par un médecin
         compétent, qui permettrait au salarié, s’il le souhaite, et si son entreprise en
         est d’accord, de continuer à exercer son activité. Cette situation, qui
         constituerait une solution alternative à l’arrêt maladie, reste cependant à
         approfondir : elle n’est envisageable que dans la mesure où elle apportera un
         avantage à l’État, au salarié et à l’entreprise. Il convient de souligner que la
         mission n’a repéré aucune disposition juridique de cette nature dans les dix-
         huit pays étudiés.


7. Le     télétravail n’est pas spontanément destiné à favoriser l’emploi des
     seniors. Les entreprises qui l’ont mis en œuvre n’ont pas ciblé cette catégorie de
     travailleurs, ni en France ni à l’étranger. Le cumul emploi-retraite ne constitue
     donc pas une modalité de déploiement du télétravail dans les pays pionniers.
     Quand ils travaillent, les retraités préfèrent souvent conserver un contact avec le
     collectif de travail, notamment en France.




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De grands espoirs, un développement faible




1. La notion de télétravail a changé au gré des évolutions
   technologiques et s’est stabilisée grâce aux accords
   entre les partenaires sociaux

1.1. La montée en puissance d’Internet a révélé tout le potentiel
     du télétravail

La notion de télétravail reste difficile à cerner, malgré l’existence de pratiques de
travail à distance depuis au moins trente ans et de constructions de typologies
           1
pertinentes .

Dans un premier temps, le télétravail a revêtu une acception essentiellement
           2
technique (à l’image du « telework » anglais). Au fil des rapports et des études, le
champ s’est élargi au « travail mobile », inspiré du monde anglo-saxon (« mobile
work » ou « e-work »). Ce glissement consacrait le télétravail comme un mode
d’organisation du travail parmi d’autres, plutôt que comme l’utilisation de technologies
particulières (cf. annexe 3). La définition, stabilisée depuis l’accord-cadre européen de
2002, pourrait se résumer ainsi :

Le télétravail peut être défini comme le travail qui s’effectue, dans le cadre d’un
contrat de travail, au domicile ou à distance de l’environnement hiérarchique et
de l’équipe du travailleur, à l’aide des technologies de l’information et de la
communication.




1
  Par exemple, le Forum des droits sur l’Internet (FDI) a établi en 2004 une typologie intéressante
(télétravail à domicile, nomade, alterné, en télécentre), largement reprise par les partenaires sociaux.
2
  Thierry Breton, Les téléservices en France : quels marchés pour les autoroutes de l’information ?,
rapport au ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire et au ministre des Entreprises et du
Développement économique, Paris, La Documentation française, 1994.



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Figure n° 1 : Historique du développement du télétravail en France




                               Source : Caisse des Dépôts et Consignations, AFTT, ANDT, analyse CAS



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1.2. La définition française faisant aujourd’hui consensus est basée
     en grande partie sur l’accord-cadre européen sur le télétravail

Par l’accord national interprofessionnel (ANI) du 19 juillet 2005, les partenaires sociaux
français ont transposé, dans le délai imparti de trois ans, l’accord-cadre européen de
2002, signé par les partenaires sociaux européens (CES, UNICE/UEAPME, CEEP).
Centré sur le télétravail salarié, il ne concerne par définition que le secteur privé,
excluant les agents publics et les travailleurs indépendants, bien que ces derniers
soient souvent des télétravailleurs en pratique. La définition retenue s’inspire des
travaux du Forum des droits sur l’Internet (FDI). Elle précise qu’un télétravailleur est un
salarié utilisant les TIC de manière régulière – mais pas forcément à temps complet –
pour effectuer une tâche qu’il aurait pu accomplir dans les locaux de l’entreprise. Elle
se distingue de la définition de l’accord-cadre européen en ce qu’elle reconnaît
l’existence de plusieurs catégories de télétravailleurs, en particulier les travailleurs
nomades, auxquels il est fait explicitement référence. L’ANI décrit le télétravail comme
une réalité complexe en permanente évolution, dont le FDI a produit une typologie :
–    le télétravail à domicile concerne le salarié travaillant la majorité du temps à la
     maison et se rendant de temps en temps dans les locaux de son employeur ;
–    le télétravailleur nomade conserve un poste de travail physique dans l’entreprise
     mais utilise les TIC dans ses déplacements, à la maison ou chez ses clients pour
     se connecter au système d’information (SI) de l’entreprise ;
–    le télétravail en télécentres – qu’ils soient publics ou réservés à une seule
     entreprise – permet de distinguer clairement vie privée et vie professionnelle, et
     de maintenir les contacts entre salariés ;
–    le télétravailleur en réseau peut être localisé dans un site – celui de l’entreprise,
     dans un télécentre ou chez le client – et travailler sous le contrôle d’un manager à
     distance, éventuellement au sein d’une « équipe virtuelle ».

1.3. La proposition de loi « Pour faciliter le maintien et la création
     d’emplois » ne modifie pas la définition du télétravail mais inscrit
     certaines pratiques dans la loi

La proposition de loi (texte n° 298 adopté par l’Assemblée nationale le 9 juin 2009)
reprend la plupart des termes de l’ANI. Cette initiative de l’Assemblée nationale
s’inscrit dans la continuité des travaux parlementaires menés sur la question depuis
2006. En revanche, contrairement à l’ANI, la proposition de loi ne mentionne plus les
télétravailleurs nomades de manière explicite, ce qui laisse croire que la segmentation
entre télétravailleurs nomades, à domicile, en réseau et dans des télécentres n’a plus
lieu d’être.

1.4. La proposition de loi de 2009 au regard des textes conventionnels
     récents sur le télétravail

À l’instar de la quasi-totalité des pays européens, les partenaires sociaux français ont
donc transposé au niveau national la plupart des termes de l’accord-cadre européen
de 2002. La spécificité française réside dans la volonté des parlementaires d’inscrire
les dispositions des accords entre partenaires sociaux dans le Code du travail. Le




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tableau n° 1 récapitule les différences principales entre les textes français encadrant
le télétravail.

                     Tableau n° 1 : Comparaison des principaux éléments
                        du cadre juridique français relatif au télétravail
                                                           Accord national
                    Accord-cadre européen                                                    Proposition de loi
                                                          interprofessionnel
                       2002 (ACE 2002)                                                            2009
                                                           2005 (ANI 2005)
                    Forme d’organisation utilisant
                    les TIC dans le cadre             Identique à l’ACE 2002 avec         Identique à l’ACE 2002 (le
     Définition     d’un contrat, effectué            mention explicite des               télétravail nomade n’est plus
                    régulièrement hors du local       télétravailleurs « nomades »        mentionné explicitement)
                    de l’employeur
                                                      • Identique à l’ACE 2002,           • Général, le contrat de
                                                        avec un délai de                    travail ou son avenant
                    • Volontaire pour les 2 parties
                                                        prévenance pour revenir en          précise les modalités de
    Volontariat-    • Réversibilité a priori double
                                                        arrière                             passage (ou de retour) en
    réversibilité     définie par un accord
                                                      • Identique à l’ACE 2002 et           (du) télétravail
                      individuel et/ou collectif
                                                        priorité d’accès à un poste       • Priorité pour retrouver un
                                                        dans les locaux                     emploi dans les locaux
                                                                                          Un télétravailleur est un
       Statut       Non, mêmes droits que les
                                                      Identique à l’ACE 2002              salarié (pas plus de
     particulier    autres salariés
                                                                                          précisions)
                    L’employé se conforme aux         Identique à l’ACE 2002, en
     Protection
                    règles édictées par               suivant les préconisations de       Néant
    des données     l’employeur                       la CNIL en la matière
                                                      Identique à l’ACE 2002 et
                                                                                          Pas de dispositions
                                                      plages horaires pour contacter
                    Surveillance proportionnée,                                           particulières si ce n’est la
     Vie privée     respectueuse de la vie privée
                                                      le salarié + consultation du
                                                                                          mention de plages horaires
                                                      comité d’entreprise ou des
                                                                                          pour contacter le salarié
                                                      délégués du personnel
                    Charges définies dans le
      Prise en      contrat de travail :
                                                                                          Identique à l’ACE 2002
     charge des     • équipement                      Identique à l’ACE 2002
                                                                                          et à l’ANI 2005
    équipements     • coûts de connexion directs
                    • appui technique
                                                      Identique à l’ACE 2002 et avis
                                                      aux délégués du
                    L’employé applique les
                                                      personnel/CHSCT + accord
      Santé et      directives de l’employeur,                                            Pas de mentions/dispositions
                                                      du salarié dans le cas du
      sécurité      responsable de la santé et de                                         particulières
                                                      télétravail à domicile + droit
                    la sécurité
                                                      de demander une visite
                                                      d’inspection
                    Gestion par l’employé, avec
                    des charges de travail
                                                      Mêmes principes que l’ACE
    Organisation    équivalentes à celles des                                             Pas de mentions/dispositions
                                                      2002 mais plus de précisions
     du travail     autres employés                                                       particulières
                                                      pratiques
                    L’employeur prévient
                    l’isolement (rencontres…)
                    Formation sur les
                    équipements puis mêmes                                                Pas de mentions/dispositions
     Formation      droits que les autres employés
                                                      Identique à l’ACE 2002
                                                                                          particulières
                    (carrière…)
                                                      Identique à l’ACE 2002 +
                                                      consultation des IRP +
      Droits        Mêmes droits que les autres                                           Pas de mentions/dispositions
                                                      identification du télétravailleur
     collectifs     salariés                                                              particulières
                                                      sur le registre unique du
                                                      personnel


À la lecture de ce tableau, il apparaît que l’ANI de 2005 se fait plus précis et plus
protecteur que le texte original adopté par les partenaires sociaux européens en 2002.
Plus précis car il mentionne les télétravailleurs nomades, indique que le contrat de

1
 Le choix des thèmes de comparaison du tableau provient de la structure de l’accord-cadre européen de
2002.



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travail du salarié devra fixer les plages horaires durant lesquelles il pourra être
contacté ou encore signale qu’un délai de prévenance pourra être mis en place pour
le retour du télétravailleur dans les locaux de l’entreprise. La transposition française
est également plus protectrice : elle donne au télétravailleur la priorité du retour dans
les locaux, s’inspire des préconisations de la CNIL sur la protection des données et
implique à plusieurs niveaux les institutions représentatives du personnel (IRP).

Quant aux dispositions de la proposition de loi de 2009, elle restent plus générales :
les principes fondamentaux sont présents (double volontariat, conditions de passage
et du retour du télétravail, prise en charge des équipements…) tandis que les détails
et les points pratiques sont renvoyés au droit commun du Code du travail, puisque le
« télétravailleur est un salarié comme un autre ».



2. Un retard français par rapport aux autres pays de l’OCDE,
   en particulier dans le secteur public

2.1. La France appartient à l’avant-dernier des cinq groupes
     en matière de diffusion du télétravail

Faute de définition normalisée au niveau international, la diffusion du télétravail
reste difficile à mesurer par les organismes de statistique

Il n’existe pas de définition harmonisée du télétravail à l’échelon du Bureau
international du travail (BIT), à la différence du chômage et de l’activité. En particulier,
l’accord-cadre européen n’a pas mis en place de dispositif de suivi statistique de son
application. Dès lors, les données disponibles, qu’elles soient issues d’enquêtes
internationales ou de sources nationales, sont difficilement interprétables. En outre, le
champ des études diffère, certaines ciblant les travailleurs salariés, d’autres
embrassant tous les actifs occupés. L’annexe 5 présente les définitions du télétravail
relevées dans les pays étrangers.

                      Exemples de définitions du télétravail à l’étranger

 La comparaison de quelques définitions du télétravail à l’étranger illustre la difficulté à
 mesurer cette réalité :
  –   au Japon, le télétravail est « une méthode de travail qui, grâce à l’utilisation des
      moyens d’information et de télécommunication, n’est pas soumise à des conditions
      d’exercice liées au lieu et à la durée du travail ». Par ailleurs, les statistiques japonaises
      utilisent deux définitions pour mesurer la part des télétravailleurs dans la population
      active : le télétravail au sens restreint (travailleurs utilisant des TIC à des fins
      professionnelles en dehors de leur lieu de travail au moins 8 heures par semaine) et le
      télétravail au sens large (travailleurs utilisant des TIC pour exercer leur activité en
      dehors de leur lieu de travail) ;
  –   l’Autriche considère que le télétravail est la « réalisation d’un travail à distance avec
      l’aide de systèmes de communication » ;
  –   au niveau européen également, les enquêtes comparatives harmonisées adoptent des
      définitions différentes. Ainsi, l’enquête européenne sur les conditions de travail divise
      les télétravailleurs en deux catégories : ceux travaillant en quasi-totalité à domicile et
      ceux y travaillant entre un quart et trois quarts du temps. Et selon l’enquête SIBIS de



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2002, les télétravailleurs mobiles sont ceux qui travaillent, au moyen des TIC, plus de
        10 heures par semaine à distance de leur lieu de travail ou de leur domicile.
    Enfin, comme nous l’avons vu, la France n’a pas adopté de définition « normalisée » du
    télétravail, ce qui empêche une connaissance fine de la situation et la définition de
    politiques publiques.



Sur la base de données harmonisées existantes, on peut classer les pays étudiés
en cinq groupes

Une première vision statique permet de positionner les pays selon l’essor du
télétravail. Elle se fonde sur les chiffres de l’enquête européenne SIBIS de 2002, base
de référence pour la comparaison internationale.

            Figure n° 2 : Position des pays de l’OCDE en matière de télétravail
                                 au début des années 2000




         Source : SIBIS 2002 (Statistical Indicators Benchmarking the Information Society), typologie CAS


                                                                                                                1
En se basant sur ces données harmonisées de la diffusion du télétravail – adoption
                             2
du télétravail et faisabilité ressentie par la population active – on répartit les pays en
cinq groupes :
–     les pays du Nord de l’Europe (Pays-Bas, Finlande, Danemark…) et les États-
      Unis sont en tête avec plus de 20 % de télétravailleurs actuellement en activité et
      une importante faisabilité du télétravail ;
–     suivent les pays du centre de l’Europe et/ou anglo-saxons, à savoir la Suède,
      l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Suisse, qui comptabilisent entre 15 % et 20 %
      de télétravailleurs et pour lesquels le télétravail est un levier puissant de
      modernisation du marché de l’emploi ;

1
  L’adoption du télétravail se définit ici comme la part des télétravailleurs dans l’ensemble des personnes
en situation d’emploi, autrement dit comme le ratio entre le nombre de télétravailleurs et celui des
personnes en emploi.
2
  La faisabilité du télétravail est le ratio entre le nombre d’emplois pour lesquels le télétravail s’applique et
le nombre de personnes disposant d’un emploi. En pratique, les résultats de l’enquête SIBIS se basent
sur les réponses des sondés à la question « Diriez-vous que votre travail peut se faire en télétravail, sous
l’hypothèse que vous passiez au moins une journée entière par semaine à domicile ? ».



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–       le troisième ensemble regroupe les pays pour lesquels le télétravail n’est plus
        l’objet d’importants débats, mais qui restent à la traîne dans son déploiement.
        Ces pays comptent pour la plupart entre 10 % et 15 % de télétravailleurs. Il s’agit
        de l’Estonie, de la Grèce, de l’Irlande, de l’Italie et dans une moindre mesure de
        l’Autriche et de la Belgique ;
–       le quatrième groupe – auquel appartient la France – comprend les pays où le
        télétravail est peu développé (entre 5 % et 10 % de télétravailleurs) et qui ont
        encore un effort important de sensibilisation à fournir, auprès des employeurs
        comme des employés ;
–       le cinquième groupe, enfin, rassemble les pays pour lesquels le télétravail est
        négligeable et ne fait pas l’objet d’actions de la part des pouvoirs publics.

Les pays de culture anglo-saxonne se distinguent en ce qu’ils comptent proportion-
nellement plus de télétravailleurs dans leur population active. Pour l’Europe, on peut
constater grossièrement un gradient progressif du Sud-Ouest vers le Nord-Est.

Une vision dynamique de l’évolution du télétravail vient confirmer le retard de la
France depuis dix ans (figure n° 3).

                           Figure n° 3 : Population salariée pratiquant le télétravail
                             plus de 8 heures par mois sur la période 2000-2010
                                              (données en pourcentage)
        Finlande
                                                                                                  32,4%       32,9%
        Belgique                                                                        31,6%
                                                                               30,5%
                                                                                                  30,0%       30,6%
        USA                                                                             29,2%
                                                                  28,9%
        Suède                                                                  28,1%
                                                          27,5%                         27,0%
                                                                  26,7%                           26,8%       28,0%
        Japon                                                                 26,3%                           27,2%
                                                 25,8%
                                                          25,0%   25,3%       25,3%
        UK                            24,2%                                             26,1%     24,0%       25,1%
                                                          23,6%
                                                          23,5%
        Allemagne                                22,3%            24,5%                 22,3%     22,3%       22,8%
                             21,2%               21,3%
        Europe                        20,4%                                    20,7%
                                                                  19,6%
                                                                  19,2%                 21,5%
        France               18,9%                        18,7%                20,6%              18,8%       19,5%
                   17,8%              18,2%                                             17,9%
        Italie               17,2%               17,1%    17,5%                17,0%                          18,3%
                   16,3%                                          16,0%
                                      15,4%      15,6%    15,2%                                   17,7%
    15,0%                    14,9%                                                      17,0%
    14,0%          14,4%                                                       16,1%
                   13,2%              13,3%      13,2%            15,3%
    12,6%
    12,4%                                                 14,5%
                                      11,7%      14,0%
                   10,8%     13,3%
                             10,9%
                                      12,0%
                   8,7%                                                                           8,4%
                             10,0%                                                      7,6%                  8,9%
     6,6%          8,5%                                                        6,7%
                                                                   5,8%
                                                           5,1%                                   5,0%
                                      4,0%       4,5%                                   4,3%                  5,5%
                              3,5%                                             3,7%
     2,6%          3,0%                                    2,6%    3,0%
                                      1,9%       2,3%
                   1,5%       1,7%
     1,3%


     2000          2001       2002    2003       2004      2005   2006         2007     2008      2009     2010


                                                                         Source : Gartner, analyse Roland Berger


La prise en compte de plusieurs sources, notamment publiques, permet de dresser
un état des lieux consolidant celui établi à partir des chiffres de l’enquête SIBIS

La comparaison des données issues de quatre sources différentes, portant sur une
quinzaine de pays de l’OCDE, confirme le diagnostic établi à partir des enquêtes
     1
SIBIS .

1
    On trouvera en annexe 7 un tableau plus détaillé, présentant les chiffres par catégorie de télétravailleurs.



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                                                         - 18 -
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Tableau n° 2 : Nombre de télétravailleurs dans les pays de l’OCDE,
                  comparaison des principales sources disponibles
                                      (données en pourcentage)
                                              Eurofound                                    Sources
                        SIBIS (2002)                              Gartner (2007)
                                                (2005)                                    nationales
  France                     6,3                   7                     8,4            7 (1999-2003)
  Allemagne                  16,6                 8,5                    18,8                   -
  Australie                   -                    -                       -               24 (2008)
  Autriche                   13,8                14,2                      -                    -
  Belgique                   10,6                14,7                     30                    -
  Canada                      -                    -                     12,3              9,8 (2005)
  Danemark                   21,5                 16                     17,4             25,7 (2006)
  Espagne                    4,9                  8,4                     6,2                   -
  États-Unis                 24,6                  -                     27,6                 21,5
  UE-27                       -                   8,3                    17,7                   -
  Finlande                   21,8                 13                     32,4             14* (2008)
  Italie                     9,5                  3,9                      5               7,1 (2005)
  Japon                       -                    -                      24              15,6 (2008)
  Norvège                     -                  11,6                      -               10 (2007)
  Pays-Bas                   26,4                 14                       -                    -
  Royaume-Uni                17,3                 9,6                    22,3              8,8 (2007)
  Suède                      18,7                 15                     26,8              5,4 (2005)
  Suisse                     16,8                 8,3                      -               8,7 (2006)
                                                           (*) télétravail formalisé par un accord écrit.
                    Sources : SIBIS ; Parent-Thirion et al., 2007 ; Gartner, 2007 ; Missions économiques

Comme mentionné précédemment, la définition donnée au télétravail influe sur les
statistiques. Sont donc présentées ci-après les définitions retenues par ces enquêtes
comparatives internationales :

          Tableau n° 3 : Définitions du télétravail retenues pour les enquêtes

                       Organisme                            Définition                         Champ
                                       La question posée lors de l’enquête sur le
                                       télétravail au sens le plus large est la suivante :
                      Statistical      « Avec l’aide d’un téléphone, d’un fax et d’un
                      Indicators       ordinateur, plusieurs types de tâches peuvent          Population
Enquête SIBIS
                      Benchmarking     être effectués depuis la maison. Si le résultat de       active
(2002)                                 ce travail est transféré électroniquement, cela est     occupée
                      the
                      Information      parfois qualifié de télétravail. Télétravaillez-vous
                      Society          actuellement depuis votre domicile, pour une
                                       partie au moins de votre temps de travail ? »
Enquête               Fondation        La question posée dans l’enquête ne définit pas
                      européenne       le télétravail : « Est-ce que votre emploi principal   Population
européenne sur
                      sur les          comporte du télétravail depuis le domicile à             active
les conditions        conditions de    partir d’un ordinateur ?» et prévoit une                occupée
de travail (2005)     travail          quantification du temps passé au télétravail.
                                       Synthèse des données publiées par les instituts
                      Cabinet
Gartner (2007)        spécialisé
                                       de statistique nationaux, consolidées et
                                       complétées par une connaissance des marchés.
                                                                                              Source :CAS




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Conclusion de la comparaison internationale : quelles que soient les sources,
la France est en retard dans la diffusion du télétravail

              Figure n° 4 : Diffusion du télétravail dans les pays de l’OCDE




                 Source : Instituts nationaux repris par les Missions économiques, Gartner, analyse CAS


En prenant en compte au moins trois sources de données sur les cinq dernières
                                e
années, la France se situe au 13 rang des pays de l’OCDE pour la diffusion du
télétravail.

2.2. Détail de la situation française : quasiment inexistant dans le secteur
     public, le télétravail s’est régulièrement, quoique faiblement,
     développé depuis trente ans

La progression du télétravail en France a été régulière sur les vingt dernières années

Bien qu’il faille prendre les chiffres suivants avec une grande prudence, la progression
du télétravail en France apparaît régulière depuis 1988, date des premiers chiffres
connus. La France comptait alors moins de 1 000 télétravailleurs, chiffre porté à
                   1
16 000 en 1993 (1,1 % de la population employée), puis 2,9 % en 1999. L’essor du
télétravail s’accélère entre 1999 et 2003 (la France compte alors 6,3 % de
télétravailleurs) avant de plafonner à 7 % en 2005, date à partir de laquelle les
                                                                                       2
données ne sont plus actualisées (enquête européenne sur les conditions de travail) .
Pour la période 2005-2009, si l’on en juge par les conclusions de la mission du député




1
 T. Breton, 1994, op. cit.
2
 Agnès Parent-Thirion, Enrique Fernandez Macias, John Hurley et Greet Vermeylen, Fourth European
Working Conditions survey, Fondation européenne sur les conditions de travail, 2007. D’après l’enquête
précédente, le télétravail concernait 4 % des actifs occupés en 2000 en France.



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                                                - 20 -
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Pierre Morel-à-L’Huissier (2006) et par le faible nombre d’accords de télétravail signés
            1
depuis 2005 , il est probable que ce chiffre de 7 % n’ait pas fortement changé.

L’essor du télétravail parmi les salariés est plus net d’après les enquêtes françaises
                             2
sur les conditions de travail , puisque la proportion de salariés utilisant un ordinateur à
domicile pour leurs activités professionnelles est passée de 6,5 % en 1998 à 12 % en
2005.
                                                                                                3
Pour sa part, l’enquête COI (Changement organisationnel et informatisation) estime la
part de télétravailleurs à 14,2 % des salariés en 2006, mais elle est limitée aux
                                                                   4
entreprises de plus de vingt salariés du secteur marchand . Le télétravail
exclusivement à domicile à temps complet y apparaît comme un phénomène marginal
(1 % des salariés).

Toutefois, à ce jour, aucune des sources disponibles en France n’est capable de
fournir des données en évolution. Des données actualisées tirées de l’enquête
permanente sur les conditions de vie de l’INSEE devraient être disponibles dans les
prochains mois, ce qui permettrait d’afficher l’évolution du nombre de télétravailleurs
depuis le début des années 2000, mesuré à 7 % par la DARES. L’enquête européenne
sur les conditions de travail sera reconduite en 2010 et donnera une appréciation de la
diffusion récente du télétravail en France et en Europe.

Sur le front des entreprises, la part de celles qui pratiquent le télétravail a augmenté
de 37 % entre 2007 et 2008 ; de 16 % à 22 % pour l’ensemble des entreprises, de
                                                 5
12 % à 22 % pour les services immobiliers . Il semblerait que les entreprises
françaises aient récemment pris en compte la question du télétravail ; la crise
économique et la pandémie grippale renforceraient encore ce phénomène.
Néanmoins, il est difficile de déterminer si le nombre de télétravailleurs s’est accru
depuis 2007.

Le télétravail : une pratique principalement mise en œuvre par les entreprises
du secteur des services des TIC et des services financiers ainsi que par
les entreprises de 250 salariés ou plus

Dans les secteurs des services TIC et des services financiers, une entreprise sur deux
pratique le télétravail pour au moins une partie de ses salariés, c’est-à-dire deux fois
plus que la moyenne des entreprises (tableau n° 4). A contrario, les entreprises de la


1
  D’après les bilans annuels publiés par le ministère du Travail, un seul accord de branche a été signé sur
le télétravail suite à l’ANI de 2005, dans les télécommunications (accord du 6 octobre 2006). Néanmoins,
des dispositions relatives au télétravail sont souvent présentes dans les accords d’entreprise sur l’égalité
professionnelle au titre de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale. Ces accords se
développent depuis 2006 et le vote de la loi sur l’égalité professionnelle (DGT-DARES, La négociation
collective en 2008, Paris, La Documentation française, 2009).
2
  Données DARES à partir de l’enquête Conditions de travail, disponibles sur le site Internet du ministère
du Travail.
3
  Pilotée par le Centre d’études de l’emploi, cette enquête est développée par plusieurs institutions de la
statistique publique (www.enquetecoi.net/fr2006/cadre1.htm).
4
  Sont donc écartés de cette mesure les salariés des TPE, les agents publics ainsi que les travailleurs
indépendants.
5
  Mahmoud Jlassi et Xavier Niel, « E-administration, télétravail, logiciels libres : quelques usages de
l’Internet dans les entreprises », INSEE Première, n° 1228, mars 2009. Dans l’enquête TIC, une entreprise
pratique le télétravail si elle a des salariés qui travaillent au moins une demi-journée par semaine en dehors
de ses locaux, en ayant accès au système informatique de l’entreprise par des réseaux électroniques.



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construction, du commerce de détail, des transports et de l’hôtellerie-restauration
pratiquent moins que les autres le télétravail.

                   Tableau n° 4 : Part des entreprises pratiquant le télétravail
                            selon leur secteur d’activité et leur taille
          (France, entreprises de plus de 10 salariés, 2008 ; données en pourcentage)
                                                                Entreprises   Entreprises      Entreprises
                                              Ensemble           de 1 à 19    de 20 à 249       de plus de
                                                                  salariés      salariés       250 salariés
    Commerce dont :                                25               20             29               64
        • Commerce de détail                       16               12             17               62
        • Industries*                              23               11             29               67
    Services dont :                                17               12             20               54
        • Services TIC                             55               48             58               85
        • Services financiers                      49               n.s.           44               64
        • Autres services aux entreprises          27               21             31               66
        • Services immobiliers                     22               n.s.           22               n.s.
        • Transports                               17               10             20               52
        • Hôtels et restaurants                    14               12             16               n.s.
    Construction                                   9                 6             13               72
    Ensemble                                       22               15             27               65

                                                                                        n.s. : non significatif
               Champ : entreprises de 10 salariés ou plus disposant d’un ordinateur, France métropolitaine.
                                           (*) Y compris industries agroalimentaires et secteur de l’énergie.
                                                                   Source : INSEE, enquêtes TIC 2007 et 2008

La pratique du télétravail est limitée dans les TPE et PME et demeure l’apanage des
grandes entreprises, hormis dans le secteur des services TIC. On observe que ces
secteurs et grandes entreprises sont également en avance pour la pratique des TIC et
                                     1
pour la mise en place d’un extranet . Certes, les outils de communication en réseau se
sont diffusés entre 2003 et 2006, mais le facteur taille demeure déterminant, sauf pour
les petites entreprises qui appartiennent à un groupe de taille plus importante.

Le télétravail est encore moins développé dans le secteur public, puisqu’il
                                                                                   2
concernait seulement 1 % des agents publics français au début des années 2000 .
Hormis quelques expérimentations au ministère de la Justice, dans l’Éducation
nationale et à la Caisse des Dépôts et Consignations, le télétravail, notamment dans
sa dimension formalisée, semble souffrir de l’absence de cadre juridique dans le
secteur public.

Au contraire, dans plusieurs pays de l’OCDE, le télétravail est assez courant dans les
administrations publiques. Il a atteint un rythme de croisière ou un niveau important
aux États-Unis (7 % du personnel des agences fédérales gérées par l’US Office of
Personnel Management) et en Finlande (agglomération d’Helsinki). Plusieurs
expérimentations sont conduites en Espagne (plan de développement lancé en 2007),

1
  Sonia Besnard, Pacale Chevalier, Patrice Victor, Danièle Guillemot et Yusuf Kocoglu, « Des TIC de plus
en plus diversifiées dans les entreprises », INSEE Première, n° 1126, mars 2007 ; Sonia Besnard, Chantal
Biré et Patrice Victor, « L’intégration des TIC est encore incomplète dans les entreprises », INSEE
Première, n° 1184, avril 2008.
2
  Thomas Coutrot, « Le télétravail en France : 2 % des salariés le pratiquent à domicile, 5 % de façon
nomade », Premières synthèses, DARES, n° 51.3, décembre 2004. Il s’agit là du télétravail à domicile ; en
outre, les enseignants ne sont pas comptabilisés parmi les télétravailleurs.



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en Allemagne (ministère du Travail) ou en Corée du Sud (gouvernement régional de
Séoul, Agence gouvernementale sur les systèmes d’information et les technologies
numériques).

2.3. Une réalité davantage diffusée parmi les cadres et les ingénieurs

Le profil type du télétravailleur français est celui d’un homme cadre ou ingénieur

Bien que la plupart des entreprises ouvrent la possibilité de se porter candidat au
télétravail à tous leurs salariés sans distinction a priori sur les profils souhaités, il se
dégage bien un profil type du télétravailleur en France (tableau n° 5).

Le télétravail nécessite uniquement que l’activité puisse être menée au moins
partiellement sans présence physique des collègues, superviseurs ou clients grâce
aux outils TIC. Son utilisation est donc possible pour de multiples fonctions, y compris
celles de nombreux agents de maîtrise (assistantes, par exemple). Cependant, près de
la moitié des télétravailleurs à domicile sont ingénieurs ou cadres, et un tiers sont des
                                                  1
professions intermédiaires. Alors que 10 % des cadres se considèrent ainsi
télétravailleurs à domicile (4 % à temps plein, 6 % à temps partiel), seuls 2 % des
professions intermédiaires sont concernés.

Le télétravail nomade est pratiqué par une plus grande part des salariés : c’est le cas
de 20 % des cadres, 9 % des professions intermédiaires et 3 % des employés.
D’après l’enquête Conditions de travail de 2005, le télétravail est particulièrement
utilisé par les cadres et les professions intellectuelles supérieures, puisque l’usage
d’un ordinateur à domicile à des fins professionnelles concerne 37 % d’entre eux.

Le critère principal, outre l’usage des NTIC, réside dans le degré d’autonomie dans
son activité professionnelle, plus élevé parmi les cadres et ingénieurs. La
prépondérance des cadres parmi les télétravailleurs s’explique aussi par la simplicité
relative de mise en place de cette organisation pour des salariés au forfait jour.




1
    T. Coutrot, ibid.



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Tableau n° 5 : Le télétravail selon la catégorie socioprofessionnelle, le sexe et l’âge
                        (période 1999-2003 – données en pourcentage)
                                                             Fixe       Alternant
         Formes de télétravail            Total                                        Nomade
                                                          à domicile   à domicile
                          Selon les catégories socioprofessionnelles
    Ingénieurs et cadres                  29,8               3,7          6,0             20,1
    Professions intermédiaires            11,3               1,1          1,2             9,0
    Employés                               3,6               0,6          0,3             2,7
    Ouvriers                               0,7               0,0          0,1             0,6
    Ensemble                               7,4               0,9          1,1             5,4
                                           Selon le sexe
    Hommes                                10,2               1,0          1,7             7,5
    Femmes                                4,1                0,9          0,4             2,8
                                            Selon l’âge
    15 à 24 ans                            4,5               0,4          0,4             3,7
    50 ans et plus                         6,3               1,4          0,8             4,1
                                            Source : INSEE, Enquêtes PCV 1999-2003 ; calculs DARES

La perception du télétravail par le public est souvent celle d’un aménagement des
conditions de travail favorable aux femmes qui ont des enfants ou des parents âgés à
charge. La réalité statistique est autre : les télétravailleurs sont des hommes à
57 %, alors que les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les
                                                                              1
hommes à utiliser un ordinateur à titre professionnel sur leur lieu de travail . De plus, la
probabilité qu’une femme soit télétravailleuse à domicile ne dépend pas du fait qu’elle
élève ou non des enfants, ni du nombre d’enfants à charge.
                                                                                2
À 90 %, les télétravailleurs nomades sont en CDI à temps plein , ce qui constitue
une surreprésentation par rapport aux 74 % constatés dans l’ensemble de la popu-
lation salariée. Les télétravailleurs à domicile ne présentent pas la même tendance au
CDI à temps plein et peuvent aussi bien être en contrat précaire (CDD, intérim ou
temps partiel). Ceci peut s’expliquer par le volontariat qui est souvent la règle pour le
télétravail salarié et auquel les employés plus expérimentés et ayant plus d’ancienneté
sont plus réactifs. À noter cependant que les salariés de plus de 50 ans sont moins
souvent en télétravail que l’ensemble, ce qui est dû sans doute à la barrière techno-
logique et à l’imprégnation trop profonde de l’organisation du travail traditionnelle.

En termes de profils du télétravail et des télétravailleurs, la situation française
                                                   3
s’avère très proche de celle des pays de l’OCDE

Dans la plupart des pays de l’OCDE, le télétravail est très majoritairement un télétravail
partiel. Les principaux secteurs pratiquant le télétravail en Europe sont l’immobilier, les


1
  Mais les hommes sont plus souvent multi-utilisateurs de téléphone mobile et de messagerie élec-
tronique, cf. Anca Boboc et Laurence Dhaleine, « Faire du privé au bureau, une question de genre ? »,
Réseaux, n° 145-146, 2007.
2
  T. Coutrot, 2004, op. cit.
3
  A. Parent-Thirion et al., 2007, op. cit. ; Andrea Broughton, Place of Work and Working Conditions,
European Foundation for the improvement of Living and Working Conditions, 2006.



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1
services financiers et l’éducation. Les télétravailleurs sont plus souvent des hommes
et des indépendants, tandis que parmi les salariés, les plus concernés sont les
cadres, les professions intellectuelles et scientifiques ainsi que les techniciens. Dans
les données de l’enquête européenne sur les conditions de travail, il existe une corréla-
tion très forte entre un niveau élevé de qualification formelle et la pratique du télétravail.

Les Français ne sont pas suffisamment conscients des possibilités offertes
par le télétravail

Les enquêtes montrent bien souvent que les employés comme les employeurs ne
                                                                                        2
connaissent pas les possibilités offertes par le télétravail. D’après les parlementaires ,
c’est le cas de 90 % des chefs d’entreprises. Quant aux salariés français, ils sont
moins intéressés (ou moins sensibilisés) que leurs voisins européens puisque seuls
54 % d’entre eux se déclarent intéressés par au moins une forme de travail à
                                                    3
distance, contre 66 % en moyenne pour l’UE-15 , 79 % pour le Danemark et 77 %
pour la Belgique. De plus, toujours selon l’enquête européenne SIBIS de 2002, seuls
24 % des Français interrogés estimaient que leur emploi se prêtait au télétravail,
contre 31 % pour l’UE-15, 41 % pour les Pays-Bas et 39 % pour la Finlande.




1
  La différence entre les hommes et les femmes tient essentiellement au télétravail alternant.
2
  Exposé des motifs de la loi.
3
  Enquête SIBIS 2002.



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De nombreux obstacles




1. L’examen des appréhensions à l’égard du télétravail
   fournit un cadre d’analyse des freins à son essor

Si les avantages du télétravail sont nombreux et pour certains évidents (cf. chapitre 5),
les incertitudes et les craintes restent fortes, bien que le débat ait été ouvert dès les
années 1970. Les aspects psychologiques sont considérables lors de la mise en
                                    1
place d’un projet de télétravail , comme pour toute modification importante des
conditions de travail. Ils sont donc à considérer avec le plus grand soin par les DRH et
le management intermédiaire lorsqu’un tel projet est envisagé.

Certaines craintes prennent souvent racine dans la conception française du travail et
dans la nature des relations entre partenaires sociaux. D’autres appréhensions
appartiennent plutôt au registre des incertitudes, des hésitations devant un « objet mal
identifié », quand les conséquences négatives peuvent être importantes (moindres
opportunités de carrière, flou juridique en cas d’accident du travail, etc.).

Le tableau suivant présente les principales incertitudes mentionnées dans la littérature
et identifiées par les spécialistes auditionnés. Il récapitule les appréhensions et leurs
liens avec les cadres juridique, culturel, technologique, organisationnel…




1
 Ce constat n’est pas propre à la France puisqu’il en va de même en Corée du Sud ou dans certaines
entreprises japonaises (rapports d’auditions effectuées par le cabinet Roland Berger pour le Centre
d’analyse stratégique, septembre 2009).



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Facteurs culturels (histoire des
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                                                                                                                                                                                               Promotion et connaissance
                                                                                                                                        Facteurs organisationnels
                                                                                                     Technologies et territoire




                                                                                                                                                                    Formation des acteurs
                                                                      collective du travail…)
                                                Cadre juridique




                                                                                                                                                                                                     du télétravail
       Incertitudes et craintes
          face au télétravail
                  --
      Poids des facteurs relatifs




                                            Pour l’employeur
 •   Coûts de mise en œuvre à court
     terme contre gains à long terme
 •   Calcul de rentabilité
 •   Management du travail à
     distance (contrôle, nouvelles
     formes de communication…)
 •   Sécurité et protection des données
                                            Pour les salariés
 •   Licenciement déguisé et exter-
     nalisation (passage d’un contrat
     salarial à un contrat commercial)
 •   Rupture avec le collectif de travail
 •   Aptitude du salarié à télétravailler
     (expérimentation…)
 •   Charge de travail équivalente à
     celle des autres salariés
 •   Gestion du temps de travail
     (limitation, interpénétration vie
     privée/vie professionnelle)
 •   Discrimination (primes individuel-
     les, augmentations, promotions,
     opportunités de carrière…)
                         Risques communs à l’employeur et à l’employé
 •   Gestion du risque lié aux
     accidents à domicile
 •   Contrôle du temps de travail
     (législation sur les horaires…)
 •   Utilisation du matériel (dans le
     domicile, à des fins personnelles…)
 •   Respect du rôle du CHSCT,
     implication des IRP…
 •   Réversibilité
                                                     BILAN
 Bilan de l’importance relative
 de chaque facteur

                                                                                                                                   Impact faible                                            Impact fort
                                                                                                                                  Source : entretiens, analyse CAS



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Ce tableau met en évidence les principaux blocages économiques et sociaux :
– le manque de réactivité organisationnelle face au télétravail : management par
  objectifs, identification des (non)télétravailleurs, indicateurs de performance indivi-
  duelle et collective, etc. ;
– les facteurs culturels spécifiques à la France : conception collective du travail « à
  la française », histoire des relations entre partenaires sociaux, etc. ;
– le manque de formation des acteurs, qu’il s’agisse des employés, qui sont les
  télétravailleurs potentiels, ou des managers, qui doivent acquérir de nouvelles
  compétences managériales.

Les paragraphes suivants ont pour objectif de préciser les obstacles relatifs à chacun
de ces trois facteurs.



2. Un relatif manque de confiance entre partenaires sociaux
   expliquerait en partie les faibles avancées du télétravail
   en France

Sans entrer dans le débat sur la nature et l’histoire des relations entre partenaires
                  1
sociaux français , on peut avancer que la conflictualité de ces relations est – au moins
en partie – à l’origine d’incompréhensions sur le télétravail. L’examen des négociations
entre partenaires sociaux indique les points d’achoppement, que l’on peut également
déceler dans les débats au Parlement sur la proposition de loi « Pour favoriser le
maintien et la création d’emplois ».

2.1. Les accords collectifs sur le télétravail n’ont pas conduit à un fort
     développement du télétravail en France

L’accord-cadre européen de 2002, intervenu dans le cadre de la Stratégie de
Lisbonne, correspond à une volonté de moderniser le dialogue social2
                                                                           3
Dès les années 1990, l’Europe s’est intéressée au télétravail . Ensuite, dans le cadre
de la Stratégie de Lisbonne, la Commission européenne a encouragé les partenaires
sociaux européens à négocier un accord sur le télétravail, afin de réaliser l’équilibre
entre la flexibilité et la sécurité. Au début, la plupart des syndicats se sont montrés
sinon opposés, du moins très réservés. Leurs positions tendaient à obtenir
rapidement des garanties sur des points essentiels, tels que le caractère volontaire du
télétravail, la possibilité de revenir au moins une fois par semaine sur le lieu de travail,
de communiquer aisément avec les autres salariés… Au fur et à mesure, certains
syndicats, surtout en Europe du Nord, ont paru disposés à revoir leurs positions et à
s’ouvrir à des analyses concrètes. Deux accords ont ainsi été conclus dans le secteur
du commerce en avril 2001 et dans le secteur des télécommunications (Etno

1
  Alain Supiot, Le Droit du travail, coll. Que sais-je ?, PUF, 2004.
2
  Les éléments synthétisés proviennent d’un travail de recueil et d’analyse effectué par Anna Michalik,
sous la direction de Benoît Verrier.
3
  Des projets tels que ADAPT ont été mis en place dès 1995 avant qu’un rapport de la Commission sur le
statut du télétravail européen ne paraisse en 1997, dans le cadre de la Stratégie européenne sur l’Emploi.



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Unieuropa/CES) en février 2001. C’est ce dernier accord qui a servi de base aux
négociations interprofessionnelles ouvertes le 20 septembre 2001 entre la CES,
l’UNICE/UEAPME et le CEEP, ayant abouti le 16 juillet 2002 à l’accord-cadre
européen.

Cet accord-cadre est le premier du genre : mené sous l’égide de l’article 139 du
traité d’Amsterdam, il est le résultat d’un dialogue autonome entre partenaires sociaux
européens, devant ensuite être transposé au niveau national dans un délai de trois ans.

L’accord européen, transposé en France, n’a pas eu pour conséquence
de développer fortement le télétravail

Largement associés, voire signataires de l’accord-cadre européen, les partenaires
sociaux français représentatifs ont logiquement signé l’accord national interpro-
fessionnel (ANI) de 2005 qui en a découlé. On note cependant qu’il aura fallu attendre
trois ans pour assurer une telle transposition, soit la limite fixée par l’accord européen.
Les partenaires sociaux français ne se sont pas distingués sur ce point de leurs
homologues européens. Engagés dans une logique de construction de protections,
les confédérations syndicales françaises ont toutes signé l’ANI, y compris pour des
raisons de principe, celui-ci étant une innovation conventionnelle affirmant l’autonomie
                        1
des partenaires sociaux .

Cependant, depuis 2005, l’ANI ne s’est pas concrétisé par de nombreuses
négociations sur le télétravail, et les positions des différents acteurs n’ont guère
évolué. À ce jour, seule la CFDT Cadres a édité un guide d’aide à la négociation
collective pour ses équipes, témoignant ainsi de son engagement plus ancien et plus
profond pour soutenir ce mode d’organisation du travail. Ce relatif immobilisme s’est
constaté au niveau des branches (un seul accord identifié, celui des
télécommunications en 2006) et au niveau des entreprises, même si on note un léger
                                                                    2
frémissement depuis quelques années dans les grandes entreprises :
–    après cinq ans de réflexion et d’expérimentations sur le télétravail, Alcatel-
     Lucent a signé le 18 janvier 2008 un accord avec les syndicats (CFDT, CGT,
     CFTC, CGE-CGC et FO) sur la base du volontariat et concernant 500 salariés
     répartis tout d’abord en région parisienne (phase d’expérimentation avant la
     généralisation à l’ensemble des sites). Les salariés sont formés durant 30 minutes
     (e-learning), par une plate-forme de gestion de la formation et par l’Alcatel-Lucent
     University, aux problématiques de santé (hygiène, ergonomie…) et de sécurité ;
–    France Télécom a signé le 22 juin 2009 un accord avec les syndicats (CFDT,
     CFE-CGC, CFTC, FO), après plus de treize ans d’expérimentation (les premiers
     tests ont eu lieu en 1996), faisant suite à l’accord de la branche Télécom du
     6 octobre 2006. Les points principaux sont le volontariat, la réversibilité à tout
     moment, la préservation du lien social par la formation et la présence dans les
     locaux au moins deux jours par semaine. À la fin juin, près d’un millier de salariés
     en France ont opté pour le télétravail, qui permet d’augmenter la flexibilité et de
     mieux concilier vie professionnelle et vie privée. L’opérateur prend en charge les


1
 DGT-DARES, La négociation collective en 2005, Paris, La Documentation française, 2006.
2
 Une veille intéressante et actualisée sur les accords intervenus en matière de télétravail est disponible
sur les sites des syndicats ainsi que sur divers sites spécialisés (cyberworkers.com, revues d’actualité
sociale…).



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frais d’installation, verse une indemnité unique de 150 euros et accorde un droit
       de regard aux représentants du personnel ;
–      Renault a signé début 2007 un accord sur le télétravail avec l’ensemble des
       organisations syndicales. Il permet l’accès au télétravail à domicile pour les
       salariés qui le souhaitent, en accord avec leur manager. Le télétravail s’exerce sur
       une base de deux à quatre jours à domicile avec au moins un jour de présence
       sur le site d’origine. L’entreprise équipe entièrement le salarié du matériel
       nécessaire. Une validation électrique du lieu de télétravail (7 % seulement des
       logements aux normes) et des modalités d’accès informatique sont des
       conditions nécessaires à sa mise en place. Le dispositif commence par une
       période de test de trois mois, il est ensuite réversible à tout moment. À la fin
       2007, 99 salariés sont en télétravail et 52 dossiers sont en cours. Un nombre
       équivalent de femmes et d’hommes est concerné. L’éloignement du domicile est
       un facteur clé de choix (près de 70 % des télétravailleurs), ainsi que la facilité de
       ce mode de travail (20 %) et les raisons personnelles (10 %) ;
–      l’accord négocié dans le cadre du déménagement du siège de Microsoft France
       à Issy-les-Moulineaux est restreint : il ne s’applique qu’aux seuls salariés de la
       division support aux clients, soit une centaine de personnes, et limite le télétravail
       à deux jours par semaine. La direction offre une enveloppe de 400 euros pour
       permettre aux télétravailleurs de s’équiper à domicile « d’un écran ou d’un
       fauteuil » ;
–      d’autres entreprises comme Coca-Cola France (2008), Michelin (12 mai 2009),
       L’Oréal (4 décembre 2008), Téléperformance, etc., ont également signé des
       dispositions sur le télétravail, souvent dans le cadre d’accords sur l’égalité
                                                                                    1
       professionnelle ou la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle .

2.2. Sur le télétravail, les partenaires sociaux français ont des vues
     contrastées mais pas opposées, à l’origine de quelques points
     d’achoppement

Les syndicats mettent en avant la protection des salariés et les bénéfices sociaux
du télétravail…

Les principaux syndicats de salariés (FO, CFDT, CFE-CGC, CGT, CFTC…) ont
participé activement aux négociations sur ce sujet, que ce soit au niveau européen en
2002 via la Confédération européenne des syndicats (CES), au niveau
interprofessionnel ou au niveau des entreprises. Ils ont régulièrement rappelé leur
attachement à la normativité d’un accord sur le télétravail, obtenu en 2005 par
l’ANI, transposition de l’accord-cadre européen de 2002.

Les grandes confédérations sont attachées à un encadrement collectif assez poussé
du télétravail. La plupart estiment que les instances représentatives du personnel (IRP)
doivent être consultées lorsque la mise en place du télétravail est envisagée. Leurs
autres revendications concernaient :
–      une meilleure définition du télétravailleur, qui ne distinguerait pas les télé-
       travailleurs nomades des télétravailleurs à domicile ou en télécentre ;


1
    DGT-DARES, 2009, op. cit.



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–    l’inscription de toute pratique de télétravail – qui ne peut être effectué que sur
     la base du volontariat – dans le contrat de travail ou son avenant. Ce dernier
     préciserait également les clauses de réversibilité et d’insertion ;
–    le paiement de l’équipement par l’employeur (ordinateur, frais de connexion…)
     et l’assistance technique à distance ;
–    l’amélioration des conditions de travail : mesures pour réduire un éventuel
     isolement du télétravailleur, protection des données et de la vie privée, équilibre
     entre vie privée et vie professionnelle…

Dans la mesure où un télétravailleur est un salarié comme un autre, il dispose des
mêmes droits communs, des mêmes garanties de santé et de sécurité, d’organisation
du travail, de gestion de carrière (formation, accès aux offres d’emplois…) que tout
autre salarié de l’organisation. Enfin, de nouvelles revendications telles que le droit à
la déconnexion ou le respect de la vie privée sont portées par des syndicats tels que
la CFDT Cadres.

…contre les gains de flexibilité et de productivité pour les employeurs

La position des employeurs s’exprime le mieux à travers le MEDEF, qui se démarque
                          1
de la proposition de loi , sur la forme comme sur le fond. Sur la forme, le MEDEF
considère que la méthode employée de légalisation du télétravail sans concertation
avec les partenaires sociaux va à l’encontre des principes de la loi du 31 janvier 2007
sur la modernisation du dialogue social. Quant au fond, de l’avis même des acteurs du
télétravail, il n’y a pas de vide juridique à combler, une loi pouvant même être
contreproductive, en rigidifiant le cadre juridique, ce qui dissuaderait les employeurs.
En effet, selon le MEDEF, la contractualisation de certains points figurant dans l’ANI
de 2005 peut poser problème pour certaines entreprises, notamment la clause de
réversibilité ou la sécurisation des conditions de travail de leurs salariés en situation
de nomadisme ou télétravailleurs à domicile.

La CGPME exprime une position légèrement différente de celle du MEDEF. Elle
considère que la délimitation d’une plage horaire pour effectuer son travail sécuriserait
le cadre d’exercice du télétravail (litiges liés aux heures supplémentaires, droit à la
déconnexion, litiges en cas d’accidents de travail, répartition des frais liés à
l’équipement…). Elle souhaite que soit précisée l’utilisation de l’équipement
professionnel dans le contrat de travail ou son avenant, pour éviter son usage à des
fins personnelles, sauf à considérer le matériel comme un élément de rémunération.
Enfin, comme le MEDEF, la CGPME indique que la sécurité peut difficilement être
assurée par l’employeur hors de ses locaux.

La présomption d’accident du travail et la réversibilité constituent les deux points
d’achoppement entre partenaires sociaux

Bien qu’ils souhaitent conserver leur autonomie dans les négociations sur le
télétravail, les partenaires sociaux français, hormis dans quelques entreprises, n’ont
pas cherché à assurer la diffusion de l’ANI de 2005 ni sa mise en œuvre dans les
entreprises ou dans les branches.
1
  Sa position, exprimée officiellement au début de mars 2009, répond à la proposition de loi n° 1194
d’octobre 2008, qui a été amendée à de nombreuses reprises avant d’être adoptée par l’Assemblée
nationale le 9 juin 2009.



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Certes, la quasi-totalité des dispositions de l’ANI de 2005 présente un caractère
impératif, les possibilités de dérogation défavorables aux salariés étant limitées par
l’article 12 de l’accord. Néanmoins, cet attentisme traduit également la position
d’équilibre peu stable qui résulte de l’accord de 2005. Outre des problèmes
générationnels et la faible diffusion du télétravail, qui peuvent expliquer le manque
d’intérêt des partenaires sociaux pour ce sujet, cette situation reflète aussi les
oppositions qui demeurent, notamment sur deux points clés :
–    la présomption d’accident de travail
     Selon les syndicats de salariés, la présomption d’accident du travail permettrait
     de sécuriser les conditions de travail des salariés ; rassurés, ces derniers
     opteraient plus facilement pour le télétravail. En outre, cela permettrait de
     rapprocher les conditions de travail des télétravailleurs de celles de leurs
     collègues restés dans les locaux de l’entreprise. Les organisations patronales, en
     particulier le MEDEF, y sont opposées, par peur des risques liés à des
     engagements juridiques complexes et d’une explosion des (fausses) déclarations
     d’accidents du travail, alors même que l’employeur, obligé de sécuriser le
     domicile du salarié, ne peut le faire sans l’accord de ce dernier ;
–    la réversibilité du télétravail
     Les syndicats de salariés craignent que les télétravailleurs à domicile ne soient
     isolés du collectif de travail et que leur emploi soit progressivement externalisé.
     De leur côté, les organisations patronales craignent de ne pouvoir remettre en
     question des avantages accordés temporairement au salarié. À la lumière de la
     jurisprudence sur ce sujet (arrêt du 31 mai 2006 de la Cour de cassation,
     chambre sociale, étudié en annexe 6), il apparaît en effet très difficile pour un
     employeur d’obliger unilatéralement son salarié à revenir travailler dans les locaux
     de l’entreprise.


3. Des obstacles culturels souvent à l’origine de blocages
   organisationnels
Le télétravail est plus développé dans le Canada anglophone qu’au Québec ; les
modalités de télétravail varient entre les filiales française et néerlandaise d’une même
entreprise, aboutissant à des résultats différents… On pourrait ainsi multiplier les
exemples illustrant l’importance des facteurs culturels et organisationnels sur le
développement du télétravail.

3.1. Les Français se singularisent par leur fort attachement au travail

L’analyse économique du travail reconnaît une place particulière au contexte français,
                                                      1
tant du point de vue de la relation formation-emploi que de la place de l’État dans la
                                                                                        2
construction du droit du travail et du modèle social. Selon cette approche culturaliste ,
la société conserve une grille de lecture hiérarchique des relations sociales, fondée sur
les « rangs », les grades et les statuts de chacun.



1
  Voir les travaux de Marc Maurice, François Sellier et Jean-Jacques Silvestre sur ce sujet, ainsi que
Philippe d’Iribarne, La Logique de l’honneur, Paris, Seuil, 1989.
2
  Philippe d’Iribarne, L’Étrangeté française, Paris, Seuil, 2006.



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Les travaux récents de Lucie Davoine et Dominique Méda sur les perceptions
subjectives mettent en avant la place particulière que le travail occupe en France dans
                                 1                                                     2
les représentations des individus , à partir d’enquêtes internationales sur les valeurs .
Le travail a une place importante dans l’esprit des Français, plus que dans celui des
résidents des pays protestants.

Si, en matière d’« éthique du devoir » et de rapport instrumental au travail, la France
se situe dans une position moyenne ou comparable à celle des autres pays
européens, la volonté de s’épanouir au travail marque une singularité française.
Près de 65 % de la population déclare que l’aspect intrinsèque du travail est « très
important ». Ce résultat place la France loin devant les autres pays européens et
                                3
s’avère stable dans le temps . De même, les Français sont les premiers en Europe à
se dire tout à fait d’accord avec l’idée que le travail est nécessaire pour développer
pleinement ses capacités. Cette importance du travail semble revêtir une dimension
profondément culturelle : elle ne s’explique ni par les caractéristiques de la population
en emploi, ni par le contexte, ni par la richesse de la population, et ne semble pas
résulter enfin d’un biais linguistique.

L’importance attribuée au travail parmi les principales sources de satisfaction dans la
vie est particulièrement élevée pour les catégories sociales supérieures, chefs
                                                                         4
d’entreprise, cadres, professions libérales et professions intermédiaires .

Lucie Davoine et Dominique Méda mettent également en évidence un paradoxe
français, qui pourrait être résolu par un développement du télétravail. Si le travail a
une place très importante, les Français sont également les plus nombreux à souhaiter
passer plus de temps avec leur famille, fortement plébiscitée. Il y a ainsi une réelle
attente des Français pour une meilleure conciliation entre la vie professionnelle et
la vie familiale. À cet égard, il apparaît relativement plus difficile en France que dans
le nord de l’Europe de s’absenter de son travail pour des raisons familiales,
l’organisation du travail y étant moins souple.

3.2. La structure des organisations influe sur le développement
     du télétravail

La France, comme les pays du sud de l’Europe, accuse un retard dans l’adoption de
processus modernes de production, dans l’organisation en réseau et dans la gestion
de l’autonomie, avec une persistance de formes de taylorisme par rapport aux pays
                          5
nordiques et à l’Allemagne .


1
    Lucie Davoine et Dominique Méda, « Place et sens du travail en Europe : une singularité française ? »,
document de travail, n° 96-1, Centre d’études de l’emploi, février 2008 ; Lucie Davoine et Dominique
Méda, « Travailler plus pour gagner plus ? Les avis partagés des Européens », Revue internationale du
travail, vol. 148(1-2), 2009.
2
  European Values Surveys (EVS), International Social Survey Programme (ISSP), European Social Survey
(ESS).
3
  L. Davoine et D. Méda, 2008, 2009, op. cit.
4
  Sondage TNS Sofres, « Nouveaux modèles ce croissance », réalisé par téléphone pour le Centre
                                        er
d’analyse stratégique du 20 août au 1 septembre 2009 auprès d’un échantillon de 1 001 personnes
représentatif de la population âgée de 18 ans et plus.
5
  Edward Lorenz et Antoine Valeyre, « Les formes d’organisation du travail dans les pays de l’Union
européenne », Travail et Emploi, n° 102, avril-juin 2005 ; Antoine Valeyre et al., Working Conditions in the
European Union: Work Organisation, European foundation for the improvement of Living and Working
Conditions, Dublin, 2009.



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Le télétravail est d’autant plus aisé à mettre en œuvre que la structure de
l’organisation est légère, peu hiérarchisée, réactive et que les processus internes
font appel aux TIC (taux d’équipement en ordinateur, qualité de la connexion Internet,
« taux de numérisation » des documents et dématérialisation des procédures,
disponibilité d’un extranet…). Pourtant, dans les faits, les entreprises comprenant
entre 10 et 19 salariés pratiquent deux fois moins le télétravail que les entreprises
employant entre 20 et 249 salariés, et plus de quatre fois moins que les entreprises de
plus de 250 salariés (tableau n° 4). Ce phénomène s’explique par les moindres
ressources (DRH, DSI, juristes, informaticiens…) dont disposent les petites entreprises
pour mettre en place le télétravail mais également, selon certains experts auditionnés,
par les bonnes relations de travail dans ces structures presque « familiales », qui
n’inciteraient pas les salariés à télétravailler.

L’autonomie, aussi bien dans les tâches que dans les horaires de travail, est plus
développée dans les pays scandinaves, tout comme la formation continue y est
plus répandue (plus de 50 % des salariés en Suède et en Finlande) et l’usage de
l’informatique plus massif (plus de 70 % des emplois en Suède et aux Pays-Bas). Par
rapport aux autres pays d’Europe, l’organisation du travail y est aussi plus flexible
(travail en équipe, rotation des tâches, polyvalence sur les postes de travail…), plus
« active » et le travail y est plus intensif (cette intensité continue à s’accroître en
Finlande, en Suède et au Danemark). De l’avis des chercheurs de la Fondation
                                                                    1
européenne sur l’amélioration des conditions de vie et de travail , cette organisation
du travail, tout en étant la plus productive, ne dégrade pas le bien-être du travailleur
qui, bien que soumis à une plus forte pression, dispose de plus de liberté sur ses
horaires et sur la gestion du contenu de son travail.

La flexibilité interne est moins développée en France, qui se situe parmi les
mauvais élèves européens : 36 % des travailleurs français témoignent d’une rotation
sur les postes, 50 % travaillent en équipe (contre 70 % dans les deux cas au
                                                                             e
Danemark) tandis que les salariés en équipes autonomes ne sont que 20 % (12 place
européenne, contre plus de 50 % dans les pays scandinaves). De même, l’intensité du
                                                    e
travail est comparativement faible en France (19 place dans l’UE-27). A contrario, la
pression de la demande extérieure est relativement élevée en France (74 %), signe
d’un modèle tertiaire qui a bien intégré la notion du « juste à temps ».

Enfin, au-delà des processus organisationnels, on observe une corrélation positive
                                                                                 2
entre télétravail et pratiques modernes de gestion des ressources humaines . Un
bon exemple est la plus grande flexibilité des horaires accordée aux salariés, avec la
possibilité de fractionner le temps de travail.

3.3. Le télétravail, parce qu’il remet en cause les processus établis
     d’une organisation, peut aboutir à des appréhensions
     de l’encadrement intermédiaire
            3
Une étude a mis en évidence que le télétravail accroît l’autonomie des salariés à
l’égard de leur supérieur direct et qu’il oblige ce dernier à adopter un management par
1
  A. Parent-Thirion et al., 2007, op. cit.
2
  Angel Martinez-Sanchez et al., « Telework, human resource flexibility and firm performance », New
Technology, Work and Employment, volume 22, n° 3, novembre 2007. Cette étude a été menée sur
156 entreprises espagnoles.
3
  Claire Dambrin, « How does telework influence the manager-employee relationship? », International
Journal of Human Resources Development and Management, vol. 4, n° 4, janvier 2004.


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objectifs ; les données harmonisées entre pays indiquent également une corrélation
entre taux de télétravailleurs et taux de salariés soumis au management par objectifs
(figure n° 5). Ce nouveau paradigme réduit en apparence le rôle du manager
« traditionnel », attaché à la présence physique du subordonné. Il constitue aussi une
opportunité d’acquérir de nouvelles compétences de gestion et d’animation à
distance d’équipes pluridisciplinaires.

         Figure n° 5 : Corrélation entre management par objectifs et télétravail




                                                          Source : enquête SIBIS 2002, analyse CAS


En outre, le télétravail formalise la déstabilisation et la fragmentation des équipes liées
aux TIC, en désynchronisant les cadres temporels et spatiaux, en remettant en cause
les routines informelles construites lors des échanges interpersonnels sur les sites de
            1                                                              2
production . Néanmoins, des études récentes sur le travail à distance font apparaître
que des collectifs de travail se recréent parfois via les TIC et les outils partagés, avec
un renforcement de la répartition des rôles et des compétences de chacun au sein du
cadre collectif. Dans de nombreux pays européens, ces problèmes de management
des télétravailleurs sont bien identifiés par les employeurs mais sont mis en balance
avec les résultats positifs en termes de qualité du travail et d’augmentation de la
productivité.




1
  François Silva et Stéphane Hugon, Usages des TIC et RSE. Nouvelles pratiques sociales dans les
grandes entreprises, rapport, ORSE-CIGREF, juin 2009.
2
  Jérémie Rosanvallon, « Travail à distance et représentations du collectif de travail », Interventions
Économiques, n° 34, 2006.


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Le télétravail dans les filiales française et néerlandaise d’une même entreprise

    La moindre diffusion du télétravail, d’un facteur trois, entre les Pays-Bas et la France
    peut trouver une explication à travers plusieurs cadres d’analyse des différences
    culturelles entre les pays1. Le comportement de l’encadrement dans les entreprises en
    est un des aspects essentiels. Ainsi, l’exemple de la mise en place du télétravail dans
    les filiales française et néerlandaise d’un même groupe multinational, spécialisé dans
    l’industrie des télécommunications, permet de comprendre les différences de compor-
    tement entre les cadres de ces deux pays.
    Alors que les cadres dirigeants de la filiale française se déclaraient en faveur du
    télétravail – certes plus pour des impératifs de communication que par réelle conviction
    sur les bénéfices à en attendre –, leurs homologues néerlandais se montraient plus
    circonspects, échaudés par des expériences passées malheureuses, tout en tolérant le
    télétravail informel. À l’inverse, au niveau hiérarchique inférieur, les cadres intermé-
    diaires français – par manque de formation et de « soutien » des ressources humaines –
    s’opposaient à la mise en place du télétravail, tandis que leurs homologues néerlandais
    encourageaient le télétravail informel.
    Le projet de télétravail français, bien que formalisé dans les contrats de travail, s’est
    finalement trouvé circonscrit à quelques unités de l’entreprise, choisies plus ou moins
    arbitrairement, tandis que dans le même temps la filiale néerlandaise pratiquait le
    télétravail, certes informel, à une plus large échelle. Bien que le comportement des
    cadres intermédiaires semble prépondérant, la mise en place efficace du télétravail
    nécessite l’implication des acteurs à tous les échelons de l’entreprise. La confiance
    entre employeur et salarié, les actions de formation des cadres ou encore la mise à
    niveau des systèmes informatiques sont d’autres facteurs de succès.

                                                          Source : P. Peters et al. (2009), synthèse CAS



Or les managers français se distinguent par une moindre appropriation des outils
            2
numériques et par la difficulté à faire évoluer leurs pratiques d’encadrement, par
exemple vers des modes de travail plus collaboratif. Les raisons sont culturelles mais
le manque de formation initiale et continue vient renforcer le blocage. L’exemple de la
mise en œuvre du télétravail, différente entre les filiales française et néerlandaise
d’une même entreprise, illustre les disparités culturelles dans l’encadrement, et
l’importance de celui-ci dans le succès – ou l’échec – du télétravail dans une
organisation (voir encadré).




1
  Geert Hofstede a établi un de ces cadres généraux d’analyse des différences culturelles entre les pays,
qui s’appuie sur deux dimensions de la culture nationale, à savoir le « refus de l’incertitude » et la
« distance au pouvoir ». À travers ces deux dimensions, un classement des pays est produit, qui
correspond fortement au classement du télétravail par pays présenté dans le chapitre 1.
2
  F. Silva et S. Hugon, 2009, op. cit.



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4. La diffusion des technologies explique en partie
   le développement du télétravail

4.1. Télétravail et degré d’avancement dans la société de l’information
     semblent corrélés
                                                                                                           1
Une comparaison entre différentes mesures de l’accès à la société de l’information
indique que la corrélation est forte, d’une part, entre le télétravail et la qualité des
usages numériques personnels et, d’autre part, entre télétravail et avancement de la
société de l’information. En ce qui concerne les infrastructures numériques
(déploiement du haut débit…), la corrélation est encore plus importante. L’annexe 8
indique les corrélations entre télétravail et une quinzaine de facteurs.

Corrélation n’est pas causalité. Toutefois, la qualité de l’infrastructure numérique
semble être une condition nécessaire au développement du télétravail. Ainsi, la
montée en puissance du télétravail aux Pays-Bas, dès le début des années 2000
(14,5 % de la population active en 1999 contre 26,4 % en 2003), aurait été largement
                                                                                   2
favorisée par des aides gouvernementales à l’équipement informatique des ménages .

Or, sur ce point, malgré le développement de l’usage des TIC dans les entreprises
françaises, on note des lacunes dans l’encadrement et dans l’expertise en matière de
    3
TIC . En effet, si 98 % des entreprises françaises de plus de dix salariés sont équipées
en ordinateurs, dont 71 % disposent d’un réseau local, seules 15 % d’entre elles
emploient du personnel spécialisé en informatique et télécommunications.

Parmi les entreprises industrielles, les entreprises allemandes et britanniques ont un
usage plus répandu de l’informatique par les salariés.

En outre, si la pratique des TIC s‘est fortement développée dans les entreprises
françaises, l’équipement en outils de travail collaboratif a assez peu progressé sur la
dernière période : seulement 13 % des entreprises d’au moins dix salariés disposent
de tels outils en janvier 2008. Les lacunes sont concentrées dans les TPE et PME.
Or ces outils (messageries et agendas électroniques, visioconférence) facilitent
considérablement le télétravail.

4.2. La nature du travail de certaines professions nécessite d’importants
     besoins de bande passante, et donc des infrastructures numériques
     de qualité

À l’avenir, il est probable que les besoins de débits montants seront aussi
significatifs que les besoins de débits descendants : la fibre optique – ou toute
                                                                            4
technologie de communication symétrique – est donc plus qualifiée que l’ADSL pour
contribuer à développer le télétravail.

1
  La société de l’information est caractérisée, entre autres, par l’indice de développement des usages numé-
riques individuels du World Economic Forum, le taux de pénétration d’Internet dans les ménages français…
2
  En 1998 était mis en place par le gouvernement le « PC-privéregeling » qui prévoyait le paiement d’un
ordinateur par le gouvernement à l’employé, dans la limite de 2 269 euros.
3
  S. Besnard et al., 2008, op. cit.
4
  Par nature, l’ADSL (acronyme de Asymmetric Digital Suscriber Line) est un mode de communication
asymétrique : le débit descendant est supérieur au débit montant, ce qui pénalise certains types de
communication, en premier lieu la téléprésence.



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Tableau n° 6 : Usages professionnels de l’Internet
                         et besoins de bande passante associés*

                                                          Bande passante        Bande passante
         Usage et bande passante effective
                                                             montante            descendante
     E-mail simple                                           250 Kbps               250 Kbps
     Partage de documents (> 2 Mo)                           500 Kbps               500 Kbps
     Téléconférence (VoIP entre
                                                             200 Kbps               600 Kbps
     4 utilisateurs simultanément)
     Navigation Internet simple                                 *
                                                                                    500 Kbps
     (pages web simples…)                                      * *
     Navigation Internet avancée (rapports,                     *
                                                                                    1,2 Mbps
     streaming vidéo…)                                         * *
     Ingénierie à distance (collaboration de 5
     personnes en temps réel sur une                         1 Mbps                  4 Mbps
     maquette virtuelle de CAO…)
     Vidéoconférence résolution moyenne
                                                          400-1 200 Kbps        400-1 200 Kbps
     (640*480 pixels) entre deux personnes
     Vidéoconférence multiple
                                                          400-1 200 Kbps        800 -2 400 Kbps
     (trois personnes)
     Téléprésence (vidéoconférence HD)                       5 Mbps                  5 Mbps
                                                     (*) Les chiffres indiquent les débits nécessaires
                                       pour que l’activité économique ne soit pas fortement ralentie
                                                                               Source : analyse CAS

Selon la nature et l’intensité de la pratique de télétravail, les besoins en bande
passante se situent dans la fourchette 500 Kbps-5 Mbps. Si les infrastructures
fixes sont à privilégier (fibre optique, câble, ADSL…), les infrastructures hertziennes,
qui favorisent la mobilité, sont particulièrement adaptées au télétravail. Enfin, au-delà
                                                                                        1
du simple débit, une bonne pratique de télétravail exige une connexion de qualité ,
stable et robuste.

4.3. À l’avenir, les technologies numériques seront de moins en moins
     des obstacles à l’essor du télétravail

Ces trente dernières années, les technologies n’ont jamais constitué un goulet
d’étranglement à l’essor du télétravail, sauf dans les zones dépourvues d’infra-
structures. Dans les années à venir, l’amélioration de la capacité d’innovation et les
gains de productivité permis par les évolutions technologiques seront considérables,
que ce soit à travers les applications collaboratives (virtualisation, cloud computing et
Software as a Service, synchronisation des terminaux, etc.) ou les outils de mobilité
(netbooks et smartphones, 4G, LTE/WiMAX, réseaux sans couture, etc.). De même,
les débits symétriques d’information atteints par une infrastructure de fibre optique
autorisent une véritable collaboration entre les acteurs, grâce à la téléprésence, les
vidéoconférences multiples, le transfert instantané d’importants volumes de
données…



1
 Laurence Thomsin, « Télétravail : enseignements tirés d’un observatoire topique (cas d’une filiale belge
d’une multinationale) », Innovations, n° 22, 2005.



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5. La géographie n’est pas un obstacle majeur
   au développement du télétravail
Avec 98 habitants par km², la densité de la population française est inférieure à la
moyenne de l’Union européenne. À première vue, cela pourrait constituer un facteur
explicatif du faible développement du télétravail en France. Or, comme le montre la
figure n° 6, il n’existe pas de corrélation entre densité de population et développe-
ment du télétravail.

            Figure n° 6 : Corrélation entre densité de population et télétravail




                                                         Source : Eurostat, enquête SIBIS, analyse CAS


De la même manière, climat et télétravail ne sont pas corrélés (cf. annexe 8). Ainsi,
l’influence des paramètres « physiques » (densité de population, conditions clima-
tiques…) sur le développement du télétravail semble faible.



6. Récapitulatif des principaux obstacles à l’essor du télétravail

Les freins au développement du télétravail appartiennent à quatre catégories

L’évaluation de ces freins a été réalisée de manière globale, en se fondant sur
50 entretiens réalisés en France et à l’étranger auprès d’entreprises, d’experts et
                 1
d’administrations . Quatre catégories de freins au télétravail apparaissent : freins de
nature juridique et politique, freins de nature culturelle et sociale, freins liés à
l’équipement informatique et freins liés à l’encadrement.

Les freins juridiques seront développés dans la suite du rapport (chapitre 3, point 4.2),
à travers les questions de présomption d’accident du travail et de l’assurance


1
 L’échantillon retenu étant non significatif à l’échelle d’un pays, une comparaison inter pays n’est pas
pertinente.



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Tableau n° 7 : Freins à l’essor du télétravail, classés selon quatre thèmes

                         Responsabilité assurantielle mal définie
        JURIDIQUE ET
         POLITIQUE       Discrimination de population au sein de l’entreprise
                         Protection de la vie privée
                         Clause de réversibilité à la demande des salariés
                         Décompte et paiement des heures télétravaillées
                         Absence de politique publique (État/législateur) et de promotion
                         Acceptation en tant que mode de travail à part entière
        CULTUREL
        ET SOCIAL




                         Crainte de l’isolement
                         Crainte du travail additionnel sans contrepartie réelle
                         Méconnaissance globale du télétravail
                         Protection des données échangées
            ÉQUIPEMENT




                         Gestion et maintenance de réseaux décentralisés
                         Lourdeur des investissements à consentir
                         Passage à des infrastructures haut débit
                         Maîtrise des TIC encore incomplète
            MANAGEMENT




                         Passage à un management par objectifs
                         Perception par le management encore négative
                         Vision du télétravail comme un avantage accordé arbitrairement
                         Inexistence de formations

                                                                           Impact faible       Impact fort.
                                                            Source : entretiens, analyse Roland Berger


La mauvaise connaissance des responsabilités, les ambiguïtés du cadre juridique
et le manque d’incitations fiscales de la part des pouvoirs publics sont les
principaux freins de nature juridique et politique

Les entretiens menés par la mission confirment la demande d’un cadre juridique
plus clair et plus pragmatique, permettant aux acteurs de ne pas attendre l’arrivée
de la jurisprudence au fur et à mesure que les risques, parfois attendus, se réalisent.
L’incertitude engendrée par les lacunes de la loi oblige les entreprises qui le peuvent à
réaliser des efforts supplémentaires pour prévoir les cas potentiellement litigieux dans
un accord d’entreprise. Dans certains cas, les entreprises préfèrent même parler de
« mobilité » ou de « nomadisme », se soustrayant ainsi aux obligations que leur
impose, par exemple, le télétravail à domicile.

Trois points en particulier restent flous et sources de risque pour les salariés et les
employeurs :
– la répartition des responsabilités en cas d’accident du travail à domicile ;
– la limite entre utilisation personnelle et professionnelle des outils mis à disposition ;




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–    la mise en œuvre pratique de la mesure du temps de travail pour les salariés qui
     ne sont pas au forfait jour ; en effet, le télétravail remet en cause une vision
     uniforme de calcul du temps de travail.

À cela s’ajoute de façon plus générale l’absence de définition légale du salarié, ce
qui peut poser problème dans les cas où l’on est à la limite de l’externalisation ou de
l’intérim. De même, la situation du télétravailleur indépendant n’est prise en compte
dans aucun texte. La loi est par ailleurs perçue comme contraignante par les
entreprises pratiquant le télétravail depuis longtemps, notamment par sa clause de
réversibilité sur demande des salariés.

L’absence de politique fiscale réellement incitative (c’est le cas en France) est un
frein important à l’essor du télétravail. Des pays appartenant au groupe des « pays
matures » comme la Suède ou le Danemark ont une politique incitative et proposent
de rembourser une part des dépenses du foyer liées à la pratique d’une partie de son
activité depuis son domicile.

Dans la fonction publique, l’absence de cadre juridique spécifique constitue bien
évidemment un des obstacles majeurs à une large diffusion du télétravail.

La méconnaissance et la dévalorisation sociale du télétravail, la crainte
de travailler plus sans contrepartie sont les principaux freins de nature
culturelle et sociale

Tout d’abord, la réalité et les enjeux du télétravail sont généralement méconnus et
ses avantages sociaux (e.g. augmentation de la productivité liée aux TIC ou à l’amélio-
ration des conditions de travail des salariés, diminution des coûts immobiliers) sont
sous-estimés par les employés, les employeurs et les pouvoirs publics.

De plus, le télétravail, en tant que mode d’organisation, est desservi par une
perception générale négative. Il n’est pas encore accepté comme une forme de
travail à part entière par l’ensemble des collaborateurs. Ses utilisateurs préfèrent
souvent parler de « nomadisme » ou de « mobilité ». Le télétravail est ainsi assimilé à
une absence (congés, maladie ou même chômage). Un télétravailleur à domicile
insiste sur le besoin de venir au bureau régulièrement : « sinon, mes voisins vont
penser que je suis au chômage ».

Les salariés craignent de travailler plus sans contrepartie réelle et de ne pas voir leurs
efforts récompensés (attribution de primes et de promotions). Les salariés redoutent
également d’être isolés de leur équipe et de la hiérarchie, ce qui annulerait le rôle
sociabilisant de l’emploi. Tout cela est dû à un déficit de reconnaissance du télétravail.
De facto, les managers ont souvent l’impression qu’un employé qu’ils ne voient pas
travailler ne travaille pas.

Le déficit d’infrastructures, la sécurité des systèmes, la protection des données
et la diffusion des TIC auprès des Français sont les principaux freins liés
à l’équipement et à la technologie

Un retard technologique existe dans certains territoires qui pourraient pourtant être les
premiers bénéficiaires de l’installation de télétravailleurs (territoires ruraux de déve-
loppement prioritaire et zones de redynamisation urbaine). Il y a une forte corrélation



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entre l’existence d’infrastructures permettant la connexion à haut débit à l’Internet sur
un territoire et le développement du télétravail pour lequel ces ressources techniques
sont indispensables.

Un autre frein est la sécurisation de la confidentialité des données sur le terminal du
travailleur (à domicile, en mobilité ou en télécentre) et dans les transmissions avec le
réseau interne de l’entreprise. Les entreprises recommandent ainsi couramment à
leurs employés de ne pas travailler sur des données confidentielles dans les lieux
publics potentiellement fréquentés par leurs concurrents (avions, abords de
l’entreprise). Néanmoins, la sécurisation d’un poste de travail peut ne coûter
aujourd’hui qu’une cinquantaine d’euros par mois, ce qui met cette technologie à la
portée des entreprises les plus petites.

Enfin, si la diffusion des NTIC et la croissance des investissements dans les
infrastructures est une réalité, il reste qu’en France 35 % des individus de 16 à
                                                                           1
74 ans n’ont aucune connaissance de base dans l’usage d’Internet , outil
indispensable à la pratique du télétravail.

L’absence de management par objectifs, la peur des dirigeants de perdre
le pouvoir et la crainte d’abus sont les principaux freins liés à l’organisation
et au management

Le télétravail, qui sous-entend dans la plupart des cas un relâchement du contrôle et
de la supervision de l’exécution des tâches par le management, nécessite un mode de
management par objectifs. Cette organisation moderne du travail n’est pas en œuvre
dans toutes les entreprises et certains managers sont réticents face à ce qu’ils
                                               2
considèrent comme une perte de pouvoir . Le télétravail accordé de manière
informelle à quelques salariés est souvent perçu par le manager, le salarié concerné et
ses collègues comme un avantage consenti plutôt que comme un mode normal
d’organisation. De façon générale, le poids du management traditionnel oppose dans
certaines organisations une inertie considérable à l’introduction du télétravail.

Par ailleurs, les salariés sont également confrontés aux incertitudes qui laissent la
place à la peur d’être traités comme des employés de seconde zone et à la crainte
des abus (par exemple sur le respect du temps de travail).

Au sein de la fonction publique, l’aspect excessivement personnalisé de cet avantage
consenti semble transformer un mode d’organisation en fait du prince au profit de ses
« protégés ». De plus, l’absence de doctrine officielle sur le sujet favorise
l’hétérogénéité des pratiques et une forme d’immobilisme : une brochure a été éditée
par le ministère de la Fonction publique et faiblement diffusée en 1998, et rien n’a été

1
  Source : « Enquête communautaire sur l’utilisation des TIC par les ménages et les particuliers »,
Eurostat, 2006. Le niveau de compétence de base en informatique est mesuré à l’aide d’une auto-
évaluation, sans que ces compétences soient testées. Six éléments liés à l’informatique ont été utilisés
pour répartir les répondants en niveaux de compétence informatique : copie ou déplacement d’un fichier
ou d’un répertoire, utilisation des outils « copier et coller » pour dupliquer ou déplacer de l’information
dans un document, utilisation de formules arithmétiques de base (addition, soustraction, multiplication,
division) dans un tableau de calcul, compression de fichiers, connexion et installation de nouveaux
matériels, par exemple une imprimante ou un modem, écriture d’un programme informatique utilisant un
langage de programmation spécialisé.
2
  « Chez nous, les managers sont marqués par notre culture industrielle et son management présentiel ;
ne plus voir ses équipes, c’est une révolution » - Renault, France.


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entrepris depuis. Enfin, la fonction publique fait preuve d’une certaine difficulté à
adopter la gestion par objectifs, point fondamental de l’organisation du travail en
télétravail.

À titre de comparaison, il est intéressant de noter le cas des administrations fédérales
allemandes, où le taux de télétravail est de 4 % à 10 % des équipes.

L’absence de visibilité du cadre juridique n’a pas favorisé un essor rapide
du télétravail en France

La proposition de loi « pour favoriser le maintien et la création d’emplois » traduit,
sans changement majeur dans la loi, les termes de l’ANI de 2005. Si, juridiquement,
l’extension de l’ANI par arrêté du ministère du Travail en 2006 lui donne un caractère
prescriptif pour la plupart des entreprises et salariés, la tradition française fait du
législateur le principal constructeur du droit du travail. À cet égard, au cours de la
dernière décennie, les partenaires sociaux ont souvent invité les pouvoirs publics à
transposer leur accord dans une loi.

Selon certains experts auditionnés, l’accord national interprofessionnel ne serait
actuellement pas suffisamment visible, et de ce fait mal connu et inappliqué, d’autant
plus que les partenaires sociaux ne se sont pas particulièrement investis pour le
promouvoir. L’espoir de certains partisans de la proposition de loi réside dans la
          1
visibilité accordée par l’inscription dans le Code du travail, base de référence pour
la plupart des DRH et dirigeants, notamment des PME.




1
 En complément, alors que la plupart des entreprises ont désormais accès à l’Internet, un site institutionnel
de référence sur le télétravail pourrait contribuer à diffuser la réglementation et les bonnes pratiques.



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Les risques d’abus




1. Les abus restent rares, bien que probablement sous-estimés

1.1. Les abus sont surtout le fait des employeurs mais aussi des salariés

Les abus des salariés peuvent porter sur de fausses déclarations d’accidents
de travail et sur le non-respect des clauses du contrat de travail et/ou
du Code du travail

Concernant les accidents du travail, l’ampleur des fausses déclarations est difficile à
          1
quantifier . Elles sont vraisemblablement marginales, même si l’effet « accident de
travail du lundi matin » existe. Une des craintes des employeurs est donc de voir le
                                                           2
nombre de fraudes augmenter avec le passage en télétravail .

L’absence de contrôle physique permanent, caractéristique du télétravail, a une
influence variable sur les autres abus liés au contrat de travail, à savoir l’absentéisme,
les faibles horaires de travail, le vol ou la détérioration des données de l’organisation,
les déplacements non autorisés…

Toutefois, ces abus peuvent être prévenus lors du projet de déploiement du
télétravail, à même d’identifier en amont les problèmes éventuels : remise en cause
des processus de l’organisation, identification des profils de salariés aptes au
télétravail, management par objectifs, contrôle des horaires et des plages de travail,
sécurisation des données et nouvelles méthodes d’animation managériale… De fait, la
mise en œuvre du travail formalisé nécessitant l’accord de l’employeur, les abus des

1
  Il n’existe pas de statistiques précises sur la fraude aux accidents du travail, la convention d’objectif et
de gestion de la branche AT/MP 2009-2012 prévoit d’ailleurs le lancement par la CNAMTS d’une
cartographie des risques d’abus (programme 12).
2
  Toutefois, pour toute personne – en situation de télétravail ou non –, il est déjà possible de déclarer un
accident domestique comme accident de travail. En outre, d’après les données de la CNAMTS, les
accidents du travail à domicile n’ont représenté que 0,003 % des accidents du travail avec arrêt en 2008
(18 sur 703 976 accidents avec arrêt) contre 12 % des accidents du travail pour les accidents de trajet et
moins de 4 % pour les accidents de déplacements professionnels (CNAMTS, Risque AT 2008 :
statistiques « technologiques » tous CTN et par CTN, août 2009 ; CNAMTS, Sinistralité des accidents du
travail, des accidents de trajet et des maladies professionnelles entre 2003 et 2007, septembre 2008).


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salariés sont bien maîtrisés par les entreprises. Le télétravail peut même réduire ces
                                                                       1
risques. Ainsi, il contribue généralement à réduire l’absentéisme . Des exemples
de mise en pratique du télétravail sont présentés dans le chapitre 5.

Les abus des employeurs peuvent porter sur le non-respect des dispositions
de l’ANI

D’après les termes de l’ANI de 2005, étendu en 2006, l’employeur doit fournir à son
employé les équipements pour télétravailler (ordinateur, périphériques, connexion
Internet, etc.). La grande majorité des entreprises se conforment à ces dispositions,
en particulier les plus importantes qui disposent d’une direction des services
informatiques (DSI) ou d’un service juridique.

Des contrats de télétravail abusifs existent néanmoins, que les salariés ne
dénoncent pas, par ignorance des dispositifs juridiques ou par peur d’éventuelles
                                                             2
représailles. Une étude de 2008 du cabinet spécialisé IDC portant sur le secteur des
études, du conseil et de l’informatique – pourtant utilisateurs intensifs de TIC – montre
que la prise en charge totale des équipements, prévue par les dispositions de l’ANI,
est finalement une situation relativement exceptionnelle (tableau n° 8).

    Tableau n° 8 : Prise en charge des équipements informatiques par les entreprises
          françaises des secteurs des études, du conseil et de l’informatique

                     Équipement                                   Taux de prise en charge*
    PC portable                                                               74 %
    Accès Internet haut débit                                                 61 %
    Téléphone portable                                                        29 %
    PC portable avec carte 3G                                                 24 %
    Ligne téléphonique fixe                                                   19 %
    Mobilier de bureau**                                                      15 %
    PDA communiquant                                                           3%
                              (*) Base : ensemble des salariés travaillant à domicile aux horaires de bureau.
                    (**) Au Canada, un grand constructeur informatique distribue à ses salariés des guides
             et une enveloppe pour commander du mobilier ergonomique destiné au télétravail à domicile.
                                                                                               Source : IDC


Le télétravailleur étant d’après les textes un salarié comme un autre, il dispose à ce
titre des mêmes avantages en nature que ses collègues : remboursement des
déplacements et des frais professionnels, des repas ou de l’utilisation du domicile
(chauffage, éclairage, etc.). Il devrait avoir accès aux mêmes opportunités de
carrière et aux mêmes informations (syndicats, offres d’emplois en interne,
communication d’entreprise, etc.).




1
  Jusqu’à 80 % de réduction du taux d’absentéisme selon l’étude européenne Sustel de 2002 portant sur
trente entreprises dans cinq pays européens.
2
  IDC, Étude sectorielle sur la pratique du télétravail au sein des secteurs des études, du conseil et de
l’informatique, réalisée pour l’ADESATT, septembre 2008.


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Des abus peuvent provenir de l’intrusion de l’employeur dans la vie privée
de son salarié

Dans l’enquête européenne sur les conditions de travail, les télétravailleurs déclarent
être contactés quotidiennement quatre fois plus souvent par l’employeur
(téléphone ou e-mail) en dehors des heures normales de travail (6,8 % contre 1,7 %
pour les salariés travaillant dans les bureaux de l’entreprise).

En matière de surveillance du salarié, le télétravail favoriserait les abus de
           1
l’employeur , qui peuvent porter atteinte au domicile du salarié. L’informatique
participe ainsi de la « mise à nu » du travail des salariés, selon l’expression de
                      2
Jérémie Rosanvallon , qui traduit une certaine violence psychologique à leur égard.
S’agissant du télétravail nomade, des craintes émergent quant aux possibles abus liés
à l’usage de la géolocalisation, grâce au GPS intégré dans les outils de l’Internet
mobile.

Les abus partagés par les employeurs et les employés sont souvent liés
à des arrangements amiables et informels

Le télétravail informel – au sens strict de l’ANI de 2005 – est l’exemple le plus
répandu d’abus partagé par l’employeur et l’employé, puisqu’en pratique la majorité
des télétravailleurs exercent leur activité professionnelle sans contrat de travail
régularisant leur situation. Cet état de fait convient généralement aux deux parties :
l’employeur n’a pas à formaliser une situation souvent complexe sur le plan juridique,
tandis que l’employé dispose d’une liberté de manœuvre appréciable. Le télétravail
informel est la règle dans de nombreux pays, notamment anglo-saxons (États-Unis,
                                                   3
Canada). En France, selon l’étude du cabinet IDC portant sur les secteurs des études,
du conseil et de l’informatique, le télétravail à domicile ne fait l’objet de clause
particulière dans le contrat de travail que dans 22 % des cas. Dans 64 % des cas, il
n’y a aucune formalisation. Ces chiffres – qui concernent des secteurs ayant
pourtant massivement recours aux TIC – accréditent la thèse que le télétravail informel
est majoritaire dans l’ensemble des secteurs, malgré les dispositifs juridiques récents.

        Tableau n° 9 : Formalisation du travail à domicile aux horaires de bureau

                Type de disposition                              Part dans l’ensemble
    Clauses dans le contrat                                               22 %
    Accord verbal du supérieur hiérarchique                               10 %
    Demande écrite préalable                                               5%
    Aucune formalisation                                                  64 %
                                                                                        Source : IDC

La clandestinité dans laquelle le télétravail est parfois cantonné peut tenir à du
favoritisme de la part de l’employeur – qui aurait identifié un collaborateur apte au
télétravail sans pour autant vouloir généraliser le dispositif – et à un comportement


1
  Jérémie Rosanvallon, « Le Contrôle informatique du travail », Connaissance de l’Emploi, n° 62, 2009.
2
  Jérémie Rosanvallon, Informatique, contrôle individuel et violence au travail, communication à
l’Association française de sociologie, RT n° 25, 14 avril 2009.
3
  IDC, ibid.



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« opportuniste » de l’employé, qui a peur de voir généralisés, donc partiellement remis
en cause, les avantages procurés par le télétravail.

L’augmentation de la durée du travail est un autre exemple d’« abus » (au sens de
la durée maximale légale du temps de travail) largement répandu. En effet,
comparativement au travail effectué exclusivement dans les bureaux de l’entreprise, le
télétravail entraîne une plus grande dispersion dans les durées hebdomadaires
                                                                                      1
travaillées : une partie importante des télétravailleurs travaillent plus de 40 heures .

L’étude SUSTEL indique que, dans les trente organisations des cinq pays considérés,
                                                                         2
entre 23 % et 76 % des télétravailleurs travaillent davantage qu’avant . Pour 46 % des
télétravailleurs aux Pays-Bas, l’augmentation représente entre 6 et 10 heures par
semaine. Dans quelle mesure cette surcharge abusive est-elle acceptée ou subie par
le salarié ? D’un côté, l’employeur est satisfait d’avoir à sa disposition un salarié plus
productif ; de l’autre, l’employé peut être motivé par son travail et peut chercher à
compenser, par un surplus de travail, l’éloignement de sa hiérarchie et le temps gagné
en transport.

En France, les télétravailleurs travaillent plus longtemps et plus souvent la nuit et le
week-end (tableau n° 10). À noter que, parmi les cadres, ces pratiques sont plus
                                                          3
courantes que les chez les cadres non télétravailleurs . Des études conduites aux
                                                                       4
Pays-Bas, en Finlande ou en Allemagne font état de résultats similaires .

                             Tableau n° 10 : Caractéristiques du télétravail

                                                         Fixe à      Alternant                   Tous
                Formes de télétravail                                            Nomade
                                                        domicile    à domicile                  salariés
    Travail de nuit (occasionnel ou régulier)             39 %        69 %         42 %          30 %
    Travail le week-end (occasionnel ou régulier)         73 %        79 %         61 %          56 %
                                               Source : INSEE, enquêtes EPCV 1999-2003, traitements DARES


Le télétravail apparaît davantage susceptible d’entraîner des situations de stress,
voire de « burn-out », que le travail sédentaire en entreprise. Ce problème préoccupe
fortement les salariés mais aussi les employeurs et les pouvoirs publics dans de
nombreux pays. Il est difficile de faire la distinction ici entre la part propre au télétravail
et ce qui relève des changements organisationnels et du management par objectifs.
                      5
D’autant que les TIC sont eux-mêmes porteurs de stress, en particulier le téléphone
portable, les messageries électroniques et les smartphones, et que ces deux
dimensions s’articulent souvent. Pour certains sociologues, ces nouveaux outils
                                       6
constituent une « chaîne invisible » et marquent un asservissement aussi fort que
celui enduré par l’ouvrier des Temps modernes de Charlie Chaplin.

1
    A. Parent-Thirion et al., 2007, op. cit.
2
  Is Teleworking Sustainable? An Analysis of its Economic, Environmental and Social Impacts, projet
SUSTEL financé par la Commission européenne, 2004. Les cinq pays étudiés sont le Danemark,
l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.
3
  T. Coutrot, 2004, op. cit.
4
  A. Broughton, 2006, op. cit.
5
  Nathalie Colombier, Ludivine Martin et Thierry Pénard, « Usage des TIC, conditions de travail et
satisfaction des salariés », Réseaux, n° 143, 2007 ; Silva et Hugon, 2009, op. cit., notamment sur le stress
occasionné par l’avalanche de courriers électroniques.
6
  Jean-Pierre Durand, La Chaîne invisible, Paris, Seuil, 2004.



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En l’absence de régulations formelles, c’est parfois l’entourage familial qui
                                  1
impose des limites de temps . La famille joue alors un rôle de garde-fou contre le
surtravail et contribue plus largement à définir la frontière entre travail et hors-travail.

1.2. Les abus ont été à l’origine de quelques cas de jurisprudence

Le cadre juridique général (Code du travail, jurisprudence…) protège le salarié
                                                          2
En matière de protection de la vie privée , la jurisprudence émane de la Cour
                                                                              3
européenne des droits de l’Homme qui en retient une définition large . La Cour de
cassation y est également très attentive, notamment à travers les notions de « vie
privée », « d’intimité de la vie privée » et de « vie personnelle du salarié » qui protègent
les activités publiques du salarié.

En matière de santé et de sécurité au travail, le droit communautaire ne couvre pas
                                                                                      4
seulement la sécurité physique mais englobe également la sécurité mentale ,
                                                                            5
impliquant une obligation de prévention et de résultats pour l’employeur dans ces
deux domaines qui relèvent de l’ordre public social, c’est-à-dire un niveau élevé de la
hiérarchie du droit social.

En outre, pour la Cour de cassation, le domicile n’est pas un lieu de travail comme
un autre et le salarié est en droit de chercher à le protéger, voire de refuser d’y
                                                                              6
travailler. Avec les TIC, l’enjeu réside désormais selon Jean-Emmanuel Ray dans la
reconnaissance par le législateur ou le juge d’un « droit à la déconnexion ».

Sur la question spécifique du télétravail, la jurisprudence, embryonnaire,
n’est pas révélatrice de l’ensemble des abus existants

La plupart des abus restent probablement confinés dans l’organisation : les
salariés ne sont pas au fait des textes juridiques et connaissent rarement la palette de
recours à leur disposition. De plus, les gains envisageables en cas de régularisation
(paiement de l’équipement, de la connexion ou des avantages en nature) apparaissent
à la « victime » souvent négligeables au regard de la complexité – perçue plus que
réelle – des démarches nécessaires et surtout des éventuelles retombées négatives
(pression salariale, mise à pied, etc.). En tout état de cause, il est difficile de trancher
puisqu’il n’existe aucune étude sur le sujet.

Cependant, il arrive que ces litiges entre employeurs et employés donnent lieu à des
                                                                             7
poursuites judiciaires, voire à des arrêts et des décisions de jurisprudence . Avec
moins de dix cas pour plus de deux millions de télétravailleurs en activité, la
jurisprudence du télétravail en France demeure toutefois embryonnaire.


1
  Jean-Luc Metzger et Olivier Cléach, « Le télétravail des cadres entre suractivité et apprentissage des
nouvelles temporalités », Sociologie du travail, n° 46, 2004.
2
  Jean-Emmanuel Ray, « Les libertés dans l’entreprise », Pouvoirs, n° 130, 2009.
3
  CEDH, 4 décembre 2008, Marper c. Royaume-Uni, req. 30562/04.
4
  J.-E. Ray, ibid.
5
  A. Supiot, 2004, op. cit.
6
  J.-E. Ray, ibid.
7
  L’annexe 6 recense les cas de jurisprudence liés au télétravail. Pour identifier les dérives, nous avons
utilisé en particulier les travaux de veille juridique effectués par le Forum des droits sur l’Internet.



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2. La protection contre les abus en France et dans les pays
       de l’OCDE

    2.1. Comparatif point par point des cadres juridiques du télétravail
         dans les pays de l’OCDE

    La plupart des pays étudiés au cours de cette mission considèrent que le
    télétravailleur est un travailleur comme les autres, auquel s’appliquent les mêmes
    droits, les mêmes devoirs et les mêmes conditions de travail… En particulier, un cadre
    juridique spécifique au télétravail – quand il existe – n’est pas du ressort de la loi mais
    plutôt d’accords interprofessionnels, collectifs, de branche ou d’entreprise entre
    partenaires sociaux. C’est la méthode suivie par la plupart des pays européens qui ont
    transposé, pratiquement à l’identique, l’accord-cadre européen de 2002.

        Tableau n° 11 : Comparatif du cadre juridique du télétravail dans 23 pays de l’OCDE

                Non-transposition de l’accord                                                    Transposition similaire à l’accord-cadre européen
                     et bonnes pratiques générales




                                                                                                                                                                                sur le cumul emploi-retraite



                                                                                                                                                                                                                    sur les accidents du travail
                                                                                                                      Éléments de jurisprudence
                       Nature du cadre juridique




                                                                                   Transposition de l’accord-




                                                                                                                                                  Dispositions particulières



                                                                                                                                                                                  Dispositions particulières



                                                                                                                                                                                                                     Dispositions particulières
                                                       entre un télétravailleur




                                                                                                                                                    sur le congé maladie
                                                         et un autre salarié



                                                                                        cadre européen




                                                                                                                           (abus, litiges…)


  Abus et


                                                                                                                                                        ou maternité
                             du télétravail




                                                             Différence




   cadre
 juridique
     --
   Pays
  étudiés



                                                                                                                3 arrêts en
               Accord national                                                                                                                                                                                 Charge de
France         interprofessionnel
                                                     Aucune                                                     cassation, 2 en                   Non                          Non
                                                                                                                                                                                                               la preuve
                                                                                                                appel (annexe 6)
                                                                                                                Quelques litiges                                                                               Charge de
               Accord d’entreprise                                                                              sur le paiement de                                                                             la preuve
Allemagne      et de branche
                                                     Aucune
                                                                                                                l’équipement dans
                                                                                                                                                  Non                          Non
                                                                                                                                                                                                               (causalité à
                                                                                                                les années 1990                                                                                établir)
                                                     Aucune
               Accord entre                          Accord
                                                                                  NA (non
               employeur et                          d’entreprise
Australie      employé                               si avantages
                                                                                  applica-                      NC (non connu)                    NC                           Non                             NC
                                                                                  ble)
               Accord d’entreprise                   en plus du
                                                          1
                                                     NES )
               Conventions
               collectives
                                                                                                                                                             2
Autriche       Guide informatif                      Non                                                        Non                               Non                          Non                             Non
               pour les entreprises
               (2005)
               Convention                                                                                                                                                      Non                             Oui si les
Belgique       nationale collective
                                                     Aucune                                             1       Non                               Non
                                                                                                                                                                                                               conditions




    1
      National Employment Standards.
    2
      Les risques maladie et accident sont assurés différemment selon que la personne est salariée
    (équivalent CRAM), en « libre travail » (CRAM en dessous de 357 euros par mois ou caisse générale de la
    Sécurité sociale au-dessus) ou à la tâche (adhésion propre à la Sécurité sociale).



    Centre d’analyse stratégique                                                                                                                                                 Novembre 2009
                                                                                               - 49 -
    www.strategie.gouv.fr
n° 85 bis, rendue                                                                     Situation    du contrat
               obligatoire par                                                                       gérée        ou de
               décret royal                                                                          par le       l’avenant
                                                                                                     contrat      sont réunies
                                                                                                     de travail   Charge de
                                                                                                                  la preuve
                                                                                                                  par l’em-
                                                                                                                  ployeur
                                                                                                                  Indemnité si
               Pas de loi générale                                 Décision de Cour                               les condi-
               Éléments dans le                                    d’appel (3 février                             tions du
                                      Aucune en
               Code canadien du                                    2005) : les emplo-                             contrat sont
                                      théorie mais
Canada         travail (exercice du
                                      avantages
                                                     NA            yeurs ne peuvent      Non         NC           respectées
               droit d’association                                 pas obliger leurs                              (horaires et
                                      éventuels
               des travailleurs à                                  employés à tra-                                lieux de
                          2
               distance)                                           vailler à domicile                             travail, y. c.
                                                                                                                  le domicile)
               Loi dans               Aucune                       Accident hors des                              Pas de
                                3
               l’administration       (régime du                   locaux considéré      Non                      disposition
Corée          Conventions collec-    Labor                        comme accident        (disposit                légale sur
                                                     NA                                              Non
du Sud         tives et/ou contrat    Standard                     du travail si ayant   ions du                  les acci-
               de travail dans le     Act of Korea                 eu lieu durant le     LSAK)                    dents à
               secteur privé          - LSAK)                      travail                                        domicile
               Conventions
               collectives
Danemark       obligatoires au        Aucune         Introduit     NC                    Non         Non          Non
               niveau confédéral                     progres-
               et/ou sectoriel                       sivement
                                                                   Class action
               Directement entre
                                                                   contre IBM 2006
               employeur et
États-Unis     employé : contrat
                                      Aucune         NA            (paiement de          Non         Non          Non
                                                                   $65M en heures
               de travail
                                                                   supplémentaires)
               Accord national
                                                                   Non mais deux
Finlande       interprofessionnel     Aucune
                                                                   cas connexes
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               (public et privé)
               Guide national de
               bonnes pratiques
Irlande        sur le télétravail     Aucune                       NC                    Non         Non          Non
               (modèle au contrat                    Code of
               de travail)                           practice
                                      Aucune,
               Pas de loi (contrat
Israël         de travail)
                                      caractère      NA            NC                    Non         Non          NC
                                      informel
               Accord national
               interprofessionnel
Italie         (9 juin 2004) et
                                      Aucune                       Non                   Non         Non          Idem France
               accords collectifs
                                      Aucune                       Un télétravailleur
               Pas de loi dédiée      (application                 considéré comme
               Guide des bonnes       notamment                    salarié a été
                                                                                         Non
Japon          pratiques du           du Labour      NA            indemnisé pour un
                                                                                         (LSA)
                                                                                                     Non          Non
               ministère de la        Standards                    accident de travail
               Santé et du Travail    Act 49 de                    (Rodo Hanrei
                                      1947)                        962.24)
               Décret d’application
Norvège        de la loi sur le
                                      Aucune                       Non                   NC          Non          NC



     1
       La Belgique est allée plus loin que les autres pays européens dans la transposition de l’accord-cadre
     européen, en ajoutant dans sa Convention nationale collective n° 85 de 2005 des éléments très précis sur
     la fréquence du télétravail, les jours effectués dans et hors de l’entreprise, les moments ou périodes
     pendant lesquels le télétravailleur est joignable ou peut contacter l’assistance technique…
     2
       Les compétences sont partagées entre gouvernements régionaux et fédéraux : la plupart des
     entreprises sont régies par les lois provinciales (exemple de la loi sur les normes au Québec), tandis que
     le gouvernement fédéral régit les entreprises de compétence fédérale dans les secteurs bancaires, des
     télécommunications et du conseil.
     3
       La loi n° 9705 sur le gouvernement électronique promeut le télétravail dans la fonction publique, en
     identifiant des gisements dans les emplois de traduction, d’ingénierie, de recherche, d’enquêtes…



     Centre d’analyse stratégique                                                                      Novembre 2009
                                                          - 50 -
     www.strategie.gouv.fr
télétravail                           (public
              (5 juillet 2002)                      et privé)
              Accord entre
              partenaires sociaux
              (décembre 2002)
                                                                                       Non
                                                                                       (Health
                                                                                       and
Nouvelle-                                                                              Safety in
              NC                     Aucune         NA            NC                               NC          Non
Zélande                                                                                Employ-
                                                                                       ment
                                                                                       Act
                                                                                       1992)
              Conventions
              collectives                                         Un télétravailleur
              Loi-cadre pour la                                   ne peut être
              fonction publique                     (disposi-     considéré comme
                                                                                             1
Pays-Bas      Forum du télétravail   Aucune         tions sur     indépendant par      Non         Non         Non
              par le ministère des                    l’ergo-     l’entreprise si le
              Transports                              nomie       lien de subordi-
              (www.telewerkforu                      en plus)     nation est direct
              m.nl)
                                                                                       Flexible
              Guide reconnu par
Royaume-                                                                          3    Working
              les partenaires        Aucune                       Plusieurs cas                    Non         Non
Uni                                                         2                          Regula-
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                                                                                                               Compensati
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                                                                                                   Non
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                                                    Pas de                                         solutions   les accords
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              Conventions                           sition                             peuvent
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              collectives dans                                                         être plus
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              certains secteurs                                                        favora-
                                                    secteurs                                       possible
                                                                                       bles
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                                                                  Non (réponse du      Non
Suisse        dans le Code des       319-322 du     NA
                                                                  Conseil fédéral)     (CO)
                                                                                                   Non         Non (CO)
              obligations (CO)       CO)
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                                                                Source : Missions économiques, exploitation CAS




    1
      Toutefois, aux Pays-Bas, la loi sur les conditions de travail (Arbowet), qui traite également de
    l’ergonomie du poste de travail, s’applique au travail à domicile et donc aux télétravailleurs.
    2
      L’accord-cadre européen de 2002 n’a pas été transposé par les Britanniques par un accord collectif
    entre partenaires sociaux. À la place, un guide des bonnes pratiques, reprenant les termes de l’accord-
    cadre européen, a été édité et promu par les partenaires sociaux.
    3
      Dans un cas, le tribunal de l’Emploi a considéré non valide le refus de l’employeur à l’égard de la
    demande de télétravail d’une employée ayant des enfants en bas âge (discrimination sexuelle indirecte
    selon le Sex Discrimination Act). Dans un autre cas, le tribunal a considéré que l’entreprise devait
    proposer le télétravail comme une alternative au licenciement d’un salarié souffrant d’agoraphobie
    (Disability Discrimination Act de 1995). La Haute Cour a refusé la demande d’un fonctionnaire en
    télétravail (quatre jours par semaine, à 200 km des locaux de l’employeur), auquel on avait retiré son
    bureau) de disposer de déductions d’impôts pour l’usage de son domicile (principe de volontariat). La
    Cour d’appel de l’emploi a obligé un employeur à proposer le télétravail à une employée devenue
    handicapée suite à une maladie grave (DDA, 1995).
    4
      Les télétravailleurs ont droit aux mêmes protections que les autres salariés (Employment Act 2002 –
    Chapitre 47 et Flexible Regulations 2003). En supplément, les employés ayant des responsabilités
    parentales particulières peuvent demander des arrangements pratiques de leurs conditions de travail
    (dont le télétravail à domicile), que l’employeur ne peut refuser que pour des motifs importants, suivant
    une procédure spécifique.



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2.2. En matière de cadre juridique, les différences entre les pays
     de l’OCDE sont mineures1

Les pouvoirs publics de la plupart des pays de l’OCDE sont plus spectateurs
qu’acteurs des changements liés au télétravail

Dans la plupart des pays de l’OCDE, le télétravail ne fait pas l’objet d’une politique
publique de l’emploi au sens où nous l’entendons en France, c’est-à-dire une
                                                                                  2
politique qui poursuit des résultats socioéconomiques dont il serait un instrument .

En revanche, très nombreuses sont les entreprises qui insèrent le télétravail dans leurs
politiques de gestion des ressources humaines. Il existe donc un décalage important
entre d’une part les pratiques internes des entreprises qui recourent au télétravail et
en évaluent de manière critique les effets positifs comme négatifs, notamment sur leur
fonctionnement et leur productivité, et d’autre part les politiques publiques qui suivent
le mouvement plus qu’elles ne l’orientent. Cette remarque se limite bien sûr aux
seules politiques de l’emploi, car le télétravail se développe partout sur le terreau des
infrastructures numériques dont les États soutiennent très activement l’extension.

Ce manque d’ambition se traduit par une politique législative faite d’adaptations
pour intégrer la pratique du télétravail dans l’ordre juridique. Autrement dit, il s’agit le
plus souvent de faire de « simples » ajustements, même si les questions techniques
soulevées peuvent être particulièrement complexes.

La France, qui n’échappe pas à ces remarques, pourrait être amenée à faire un choix
qui dicterait ses orientations législatives à venir. Soit elle se contente d’accompa-
gner la pratique du télétravail en supprimant les obstacles légaux qui pourraient en
limiter la pratique et en mettant des bornes pour éviter des abus ou assurer la
protection des télétravailleurs. Soit elle développe une politique du télétravail intégrée
aux politiques de l’emploi qui favorise la flexicurité, développe la compétitivité du
pays en l’ancrant dans l’économie de la connaissance, permette de lutter contre le
chômage, encourage la mobilité, contribue au maintien de la capacité des travailleurs
à occuper un emploi, stimule la création d’entreprises ou le cumul d’un emploi salarié
et d’un emploi d’indépendant (auto-entreprise), etc.

Si cette deuxième voie devait être choisie, il serait légitime que tout nouveau texte de
droit du travail, qu’il s’agisse des relations contractuelles, du fonctionnement des
institutions représentatives du personnel ou de la négociation collective, prenne en
considération non seulement la pratique du télétravail mais aussi les politiques de
soutien à l’économie numérique dont il est un des prolongements.

Au plan technique, plusieurs traits ressortent de l’enquête menée dans les pays de
l’OCDE. Certains pays disposent d’une législation spécifique, d’autres non (Israël,
Japon, Suisse, par exemple).




1
  Les éléments de synthèse figurant dans cette section sont fournis par Jean-Yves Kerbourc’h, conseiller
scientifique au Centre d’analyse stratégique, professeur de droit social à l’université de Haute-Alsace.
2
  Une des exceptions étant les Pays-Bas, où « le télétravail est mis en avant notamment comme l’un des
moyens de lutter contre la congestion des axes routiers, et d’augmenter la participation des femmes au
marché du travail » (source : rapport des Ambassades pour le Centre d’analyse stratégique).



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Entre segmentation des télétravailleurs par catégorie et vision globale,
les approches varient selon les pays de l’OCDE

Certains pays ont une approche globale de la question du télétravail qui transcende
les séparations juridiques d’exercice par un travailleur de son activité. En Australie par
exemple, l’agence de type « think tank » chargée des questions de télétravail
rattachée au gouvernement fédéral ne fait pas de distinction entre le télétravailleur
salarié et le télétravailleur indépendant. Toujours dans ce pays, une enquête a montré
que les perspectives de développement du télétravail étaient deux fois plus
importantes dans le secteur public que dans le secteur privé. Le Canada a également
développé une politique de télétravail ambitieuse dans le secteur public (mais il
n’existe pas de fonction publique au Canada au sens du droit de la fonction publique
en France). On peut donc penser que le télétravail est susceptible de modifier les
frontières dessinées entre les trois grands régimes d’emploi que nous connaissons
(salariat, indépendance, emploi public). Il serait donc opportun d’avoir une approche
générale de la question plutôt qu’une approche segmentée. C’est ainsi que la grande
indépendance dans laquelle un télétravailleur exerce son activité pourrait remettre en
cause le lien de subordination qui caractérise le contrat de travail : au Royaume-Uni
par exemple, 41 % des auto-entrepreneurs sont des télétravailleurs.

Le cas de l’Italie est intéressant car la distinction entre les télétravailleurs est de
nature juridique et très précise :
–    le télétravail comme « activité d’entreprise » avec un contrat d’entreprise ;
–    le télétravail comme « travail autonome » avec un contrat d’activité professionnelle
     libérale ;
–    le télétravail comme « travail para-salarié » avec un contrat de travail de para-
     salarié ;
–    le télétravail comme « travail salarié » avec un contrat de travail salarié ordinaire ;
–    le télétravail comme « travail salarié décentré » avec un contrat de travail salarié à
     domicile.

La définition du télétravail repose dans tous les pays sur l’utilisation des TIC,
en dehors des locaux de l’entreprise, pour accomplir un travail

Dans tous les pays, la définition du télétravail repose sur l’utilisation de technologies
de l’information (l’ordinateur principalement), le plus souvent couplée à une techno-
logie de communication (Internet, géolocalisation, téléphone, etc.).

Dans tous les pays également, le télétravail se définit comme l’accomplissement
d’une tâche en dehors des locaux de l’entreprise. Cette condition se cumule à celle
relative à l’utilisation de TIC. Un chauffeur-livreur par exemple ne sera pas
considéré comme un télétravailleur, mais il pourrait le devenir s’il devait utiliser un
ordinateur, voire un simple PDA (Personal Digital Assistant) ou un système de
géolocalisation embarqué permettant de maintenir le contact avec l’entreprise. On
voit que, sans définition stricte, le nombre de télétravailleurs pourrait
augmenter considérablement. Ainsi, en Suède, un débat porte actuellement sur le
concept même de télétravail que certains commentateurs jugent dépassé, lui
préférant celui de « travail flexible/mobile ».




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Le rôle central des TIC dans le télétravail conduit tous les pays à établir des
                                       1
distinctions entre plusieurs situations :
–    le télétravailleur complet et celui qui travaille alternativement dans l’entreprise ;
–    le télétravailleur nomade qui travaille chez un client ou dans tout autre lieu ;
–    le télétravailleur à domicile ;
–    le télétravailleur hébergé en centre de télétravail (cas de figure plus rare, cette
     forme connaissant un taux d’échec important dans certains pays).

Certains pays n’assimilent pas à un télétravailleur celui ou celle qui ne répond
qu’occasionnellement à l’une de ces définitions. En Autriche notamment, le travail à
domicile sur ordinateur n’est considéré comme du télétravail que si sa durée est d’au
moins une heure par jour.

Certains pays considèrent exclusivement le télétravail comme du travail à domicile
(Autriche) alors que d’autres (France) ont deux législations qui se superposent : statut
du travail à domicile auquel s’applique le cas échéant le statut du télétravail.

Le télétravail constitue une application particulière du régime juridique général,
avec notamment la nécessité d’établir un contrat ad hoc ou de renvoyer
à des conventions collectives

Dans tous les pays, le télétravail constitue une application particulière du régime
juridique général. Des avenants au contrat de travail doivent parfois être conclus. Il
existe peu d’originalité d’un pays à l’autre de l’Union européenne dans la mesure où
tous sont contraints par les dispositions de l’accord-cadre européen du 16 juillet 2002.

Toutefois, certains pays comme le Danemark ont une politique conventionnelle
particulièrement développée. Les conventions collectives mettent l’accent sur des
mesures spécifiques destinées à éviter les abus. Sont pris en considération, au regard
du droit commun, les tâches, le type de travail et son champ d’application, le cadre de
la durée du télétravail (les heures de travail et les règles de disponibilité), le système
de comptabilisation du temps, le cadre de travail (bureau et chaise), les procédures de
santé et de sécurité, l’évaluation du lieu de travail par l’employeur, la circulation de
l’information depuis et vers la société, le contact entre les télétravailleurs et le
représentant des salariés, l’indemnisation des frais de fonctionnement (y compris le
loyer, le chauffage, l’électricité et le téléphone), la non-discrimination et le caractère
volontaire du télétravail, la protection des données et le respect de la vie privé ou
encore l’accès à la formation.

Le télétravail crée des problèmes juridiques d’ordre pratique, que ce soit
en matière de conditions de travail, de droits communs ou de législation
de sécurité sociale. Pour autant, aucun pays n’a légiféré sur le sujet

Nombre de pays de l’OCDE ont dû faire face à des problèmes juridiques d’ordre
pratique. Les principaux sont relatifs au contrôle du temps de travail, aux heures
supplémentaires et à la distinction entre vie personnelle et vie professionnelle.


1
 On remarquera la proximité de cette typologie avec celle établie par le Forum des droits sur l’Internet en
2004.



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D’autres portent sur la législation de sécurité sociale. Au Canada notamment, certains
télétravailleurs continuent à exercer leur activité alors qu’ils sont malades, sans savoir
qu’ils ont droit à des indemnités journalières. Dans tous les pays de l’OCDE, les
télétravailleurs ont la même couverture de sécurité sociale que les travailleurs « de
droit commun » (donc non-télétravailleurs), catégorie dont ils relèvent. Des difficultés
pratiques affectent l’application de la législation sur les accidents du travail et les
maladies professionnelles (régime de la preuve que l’accident a bien eu lieu au temps
et au lieu du travail).

La question de l’exercice des droits collectifs se pose également dans plusieurs pays.
Mais aucun n’a adopté de législation visant à tenir compte de cette forme de travail
pour les représentants du personnel (sauf droits conventionnels dans un accord
d’entreprise ou de branche).

Plusieurs pays (dont l’Italie) obligent les négociateurs d’une convention collective à
envisager certains des points suivants : responsabilités en matière de santé et de
sécurité, échelle des salaires, réglementation des horaires et des heures supplé-
mentaires, dépenses pouvant être couvertes par les employeurs et les télétravailleurs,
dispositions sur les équipements et leur maintenance, garanties d’accès à la formation
et de déroulement de carrière, droit syndical.



3. Les télétravailleurs se déclarent majoritairement satisfaits
   et disposent généralement de meilleures conditions de travail

En ce qui concerne le télétravail à proprement parler, malgré des horaires souvent
plus longs et des risques de stress plus importants, les télétravailleurs font état en
                                                                     1
moyenne de meilleures conditions de travail que les autres salariés , ce qui s’explique
                                     2
en partie par l’utilisation des TIC . Les télétravailleurs bénéficient plus souvent
d’autonomie dans leur activité professionnelle que les autres salariés. Ils sont en outre
moins sujets au contrôle par leur supérieur direct.

Les télétravailleurs ont davantage de maîtrise sur leur activité

Les télétravailleurs ont davantage de maîtrise sur leur activité et sur le contenu de
leurs tâches, notamment parce que leur travail est moins prescrit par l’action d’autres
collègues. Les tâches elles-mêmes, comme pour nombre d’utilisateurs de TIC en
France, sont souvent plus riches, ces outils favorisant une certaine polyvalence du
        3
salarié .

Ainsi, un télétravailleur sur deux maîtrise ses horaires de travail, deux tiers des
télétravailleurs témoignant en outre d’une forte flexibilité de leur temps de travail.
Cette situation prévaut particulièrement aux Pays-Bas, en Finlande et en Allemagne.
Sur ce point également, il est difficile d’identifier le facteur déterminant, puisque le

1
  Cette section s’appuie principalement sur les données tirées de l’enquête européenne sur les conditions
de travail de 2005 : A. Broughton, 2006, op. cit.
2
  Les études confirment que les technologies numériques participent généralement à l’amélioration des
conditions de travail. Et les témoignages des utilisateurs d’ordinateurs vont dans ce sens. Voir par
exemple Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, Use of Technology
and Working Conditions in the European Union, 2006.
3
  N. Colombier et al., 2007, op. cit.



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travail à distance, avec TIC ou non, coïncide fréquemment avec l’autodétermination
              1
des horaires . Il faut reconnaître enfin que les dépassements d’horaires ne sont pas
une nouveauté, notamment en matière de travaux d’écriture et de lecture, souvent
                                                                           2
pratiqués en débordement à la maison ou à l’occasion des déplacements . Le report à
domicile est perçu par les salariés qui le pratiquent comme moins contraignant. Le
télétravail formel constitue à cet égard un moyen de rendre visibles ces activités.

Cela explique que la grande majorité des télétravailleurs indiquent que leurs
horaires de travail s’accordent bien avec les besoins de leur vie familiale ou
sociale, plus que les salariés travaillant exclusivement dans l’entreprise. Les salariés
nomades se déclarent cependant moins satisfaits sur ce point, même si leur taux de
satisfaction en cette matière dépasse 70 %.

               Tableau n° 12 : Conditions de travail des télétravailleurs français

                                                         Fixe à       Alternant                    Tous
                Formes de télétravail                                               Nomade
                                                        domicile     à domicile                   salariés
    Maîtrise des horaires                                 53 %          61 %          33 %         10 %
    Formation au cours des douze derniers mois            43 %          40 %          47 %         28 %
    Rencontres avec des collègues hors travail            51 %          63 %          54 %         52 %
    Espoir de promotion                                   45 %          56 %          56 %         39 %
    Contrat précaire                                      10 %          10 %           7%          13 %
                                             Source : INSEE, enquêtes EPCV 1999-2003, traitement DARES


Dès lors, la satisfaction au travail des télétravailleurs est plus grande que celle des
autres salariés. En effet, ils peuvent organiser de manière plus souple leur emploi du
temps et mieux concilier ainsi vie professionnelle et vie familiale. On retrouve sur ce
point l’effet positif des TIC, le téléphone portable ou la messagerie électronique étant
                                                                        3
décrits par les salariés dans de nombreuses études françaises comme un facteur
d’amélioration de cette conciliation des temps sociaux. Cela vaut aussi pour le
télétravail quand il permet d’effectuer les trajets domicile-travail en dehors des heures
           4
de pointe ou quand il permet de mieux gérer les temps consacrés aux enfants et à la
       5
famille (aller les chercher à l’école, les aider dans les devoirs, faire face à un imprévu).

Les télétravailleurs sont plus autonomes dans leur travail, mais pas isolés

Les caractéristiques propres aux télétravailleurs, qui sont souvent des salariés plus
                                                                                  6
qualifiés, plus autonomes et plus expérimentés, expliquent en partie ces résultats . On
1
    Gilles Crague, « Le travail industriel hors les murs. Enquête sur les nouvelles figures de l’entreprise »,
Réseaux, n° 134, 2005.
2
  Frédéric Moatty et Françoise Rouard, « Lecture et écriture au travail : les enjeux en termes de formation
et de conditions de travail », Formation emploi, n° 106, 2009.
3
  Par exemple F. Godard, 2007, op. cit. ; A. Boboc et L. Dhaleine, 2007, op. cit.
4
  L. Thomsin, 2005, op. cit.
5
  Metzger et Cléach, 2004, op. cit. ; Jean-Luc Metzger, « Les cadres télétravaillent… pour mieux
travailler », Informations sociales, n° 153, 2009.
6
  Il peut y avoir un biais lié aux caractéristiques individuelles, les salariés acceptant le télétravail étant
ceux qui ont le plus à y gagner. Il semble que l’âge et le niveau d’éducation du salarié soient des
variables très prédictives d’un tel choix, cf. Thomas de Graaf et Piet Rietveld, « Substitution between
working at home and out-of-home: the role of ICT and commuting costs », Transportation Research,
vol. 41(2), février 2007. Les méthodologies mises en œuvre dans les études citées ici ne sont pas de
nature à neutraliser ces biais.



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1
retrouve une observation faite à propos de l’usage des TIC et de l’informatisation des
postes de travail, les salariés équipés étant les mieux formés et ceux disposant
d’un capital social plus important.

Néanmoins, à rebours de l’intuition ou de craintes, ces salariés sont bien insérés
dans l’entreprise et n’apparaissent pas victimes d’isolement (tableau n° 12). Non
seulement ils fréquentent souvent leurs collègues de travail en dehors de l’entreprise,
mais ils bénéficient plus que les autres salariés, toutes choses égales par ailleurs, de
formations de la part de leur employeur. Ils déclarent de même davantage de
                             2
perspectives de promotion .

Sur ce point, le cas français semble relativement atypique, car les risques
d’isolement sont souvent mentionnés par les différentes études en Europe. En
particulier, les problèmes d’isolement du télétravailleur persistent pour les moins
qualifiés, notamment parce qu’ils participent moins souvent à des réunions d’équipes.
De nombreux télétravailleurs signalent ce sentiment d’isolement, notamment en
Finlande, en Autriche ou en Belgique. Pour y remédier, des accords collectifs en
Allemagne et au Luxembourg, ou la loi au Portugal et en Norvège spécifient que des
réunions doivent être régulièrement organisées dans les locaux de l’entreprise avec
les télétravailleurs.

Les désagréments liés au télétravail restent mineurs

Selon une étude sur données européennes, le télétravail à domicile peut avoir un
impact négatif sur la qualité de vie de l’entourage, ce qui peut en retour réduire la
                               3
satisfaction du télétravailleur . Pour d’autres chercheurs, cet aspect n’a pas d’effet
                                                                      4
négatif, y compris quand le télétravail dépasse deux jours par semaine .

Par ailleurs, dans de nombreux pays, les télétravailleurs semblent bénéficier de
moins de formation et d’actions de prévention dans le domaine de la santé et de
la sécurité au travail. Cela entraîne de fréquents troubles musculo-squelettiques.



4. Les abus liés au télétravail restent marginaux
   mais quelques incertitudes de nature juridique demeurent

4.1. Les cas de jurisprudence, peu nombreux, ne sont probablement
     pas représentatifs de l’ensemble des abus

Il est difficile de savoir dans quelle mesure les quelques actions en justice connues
reflètent la réalité :
–    les salariés victimes d’abus engagent-ils des procédures lourdes, sur des sujets
     aussi techniques et complexes, pour probablement peu de résultats ?
1
  Nathalie Greenan et Emmanuelle Walkowiak, « Informatique, organisation du travail et interactions
sociales », Économie et statistique, n° 387, 2005.
2
  T. Coutrot, 2004, op. cit.
3
  Joar Vitterso et al., « Impacts of home-based telework on quality of life for employees and their partners.
Quantitative and qualitative results from a European survey », Journal of Happiness Studies, vol. 4(2), 2003.
4
  Ravi S. Gajendran et David A. Harrison, 2007, « The good, the bad, and the unknown about telecommuting:
Meta-analysis of psychological mediators and individual consequences », Journal of Applied Psychology,
92: 1524–1541.



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–    le faible nombre de litiges confirme-t-il que les appréhensions liées au télétravail
     sont exagérées ?

Il apparaît, en particulier à la lecture de la jurisprudence, que la situation de
télétravail peut être utilisée comme prétexte :
–    par l’employeur pour licencier un collaborateur, alors que les véritables raisons
     peuvent être d’ordre économique (difficultés de l’entreprise) ou personnel (refus
     du salarié de changer de poste ou de lieu de travail, rivalités internes, etc.) ;
–    par le salarié pour ne pas se conformer à son contrat de travail, garder un
     avantage personnel ou ne pas se remettre en cause (non-respect d’une clause de
     mobilité, retour d’un congé maternité ou maladie, refus du changement de la
     nature du poste, régularisation d’une situation ambiguë, etc.).

Les victimes d’abus disposent de plusieurs voies de recours, qu’elles utilisent
rarement

En cas d’abus, les salariés de droit privé disposent de divers moyens de recours,
dans l’ordre suivant :
–    les négociations directes avec l’employeur, si un abus est constaté ;
–    l’intervention de l’Inspection du travail pour examiner une situation délicate
     (contrat de travail…) mais avec des moyens limités (autorisation expresse pour
     contrôler un domicile…) ;
–    l’intercession des syndicats ;
–    les conseils de prud’hommes ;
–    les Cours d’appels ;
–    en dernier recours la Cour de cassation.

Encore faut-il que les salariés victimes d’abus soient informés de ces recours et se
décident à franchir le pas.

Les enjeux de l’effectivité du cadre juridique
                                                                                             1
La majorité des télétravailleurs sont des télétravailleurs informels . Ce constat
simple pose la question de l’effectivité du cadre juridique. Or, quand bien même le
cadre juridique serait parfaitement accessible aux acteurs concernés, il faut également
qu’ils soient en mesure de le comprendre et de le maîtriser, pour faire valoir leurs
                       2
droits en cas de litige . Dans un second temps, le soutien des collègues, l’intercession
des syndicats et enfin l’arbitrage des pouvoirs publics (Inspection du travail, système
judiciaire…) doivent, le cas échéant, montrer leur efficacité… Il se pourrait donc


1
  Les télétravailleurs français seraient dans une situation de télétravail informelle dans 90 % des cas,
selon des chiffres, difficilement vérifiables, avancés par les experts.
2
  Sur ce point, les enjeux de l’effectivité du cadre juridique résident également dans l’égalité entre les
travailleurs et dans la protection des plus fragiles. En effet, la faible effectivité de protections juridiques
pourtant nombreuses s’avère plus préoccupante pour les travailleurs peu qualifiés, comme cela a été
noté dans les centres d’appels. Voir Ève Caroli et Jérôme Gautié (2009), Bas salaires et qualité de
l’emploi : l’exception française ?, CEPREMAP, Éditions Rue d’Ulm.


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qu’une diffusion, large et efficace, de bonnes pratiques, dûment identifiées
comme telles, soit un enjeu plus important que le cadre juridique.


4.2. Le cadre juridique pourrait être clarifié sur la présomption d’accident
     du travail et la couverture assurantielle

Comme nous l’avons vu au chapitre 2 (point 5.1), il existe de nombreux freins de
nature juridique, culturelle et sociale, informatique et organisationnels. Pour ce qui est
des freins juridiques, la présomption d’accident de travail à domicile et la couverture
assurantielle sont deux points qui méritent des précisions.

Actuellement, la présomption d’accident du travail ne s’applique pas pour le domicile
du télétravailleur. Cela peut apparaître comme contraire au principe « le télétravailleur
est un salarié comme un autre », qui a droit en particulier aux mêmes conditions de
sécurité sur son lieu de travail. Comme nous l’avons vu, les partenaires sociaux ont
des opinions divergentes sur le sujet : les syndicats d’employés estiment que les
salariés ont besoin d’être rassurés sur ce point tandis que les employeurs craignent
une augmentation des accidents du travail. Or, d’après le précédent belge (voir
encadré ci-dessous), il semblerait que le télétravail ne conduise pas à une
augmentation du nombre d’accidents du travail.


         La présomption d’accident du travail : l’exemple du cadre juridique belge

   Depuis mai 2009, la loi belge sur les accidents du travail du 10 avril 1971 établit que tout
   accident d’un télétravailleur constitue une présomption d’accident du travail :
   – s’il a lieu là où le télétravailleur a choisi contractuellement de travailler ;
   – s’il a lieu durant la période contractuelle de télétravail ;
   – s’il existe une trace écrite prouvant les lieux et période définis contractuellement.
   Si la période autorisant le recours au télétravail n’a pas été stipulée par un accord écrit,
   la période présumée correspond alors à la période durant laquelle l’employé aurait
   travaillé dans les locaux de l’employeur s’il n’avait pas eu recours au télétravail. Ces
   clauses s’appliquent à moins que l’employeur puisse prouver que l’accident n’est pas lié
   au travail de l’employé. Selon un expert belge du télétravail, « la récente introduction de
   la présomption d’accident du travail a été une bonne initiative. Avant cela, le flou
   juridique constituait une vraie barrière au développement du télétravail ».
                                                                    Source : entretiens, synthèse CAS



Quant au sujet de la responsabilité assurantielle du télétravail, les pratiques varient
selon les compagnies d’assurance et restent peu précises – quand elles ne sont
pas inexistantes – si bien que le télétravailleur sait rarement dans quelles situations
et pour quels sinistres il est assuré (tableau n° 13). Des entreprises peuvent tirer
parti de ces incertitudes pour ne pas prendre en charge certains frais d’assurance.
Sur ce point, la Belgique est un exemple de référence puisque plusieurs assureurs
belges proposent des assurances couvrant le salarié à tout moment (« 24h/24h,
7jours/7 ») et quelle que soit son activité.




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Tableau n° 13 : Prise en charge assurantielle du domicile en cas de télétravail,
              pour les secteurs français de l’informatique et du conseil

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    Prise en charge de l’assurance    Assurance personnelle
                                                                   de l’employeur
 Prise en charge                                  54 %                  44 %
 Non prise en charge                              14 %                  30 %
 Ne sait pas                                      31 %                  26 %
                                                                             Source : IDC


Tous les éléments précédents sont des freins au développement du télétravail. Le
chapitre 5 présentera quant à lui les exemples de bonnes pratiques relevées en
France et à l’étranger, issues d’entreprises comme d’administrations. La palette est
large, puisque l’on compte aussi bien des initiatives des pouvoirs publics, des guides
pratiques que des actions de communication et de formation.




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Un fort potentiel de développement




Ce chapitre a pour objectif d’estimer la part de la population active française
potentiellement concernée par le télétravail, aujourd’hui et à l’horizon 2015. Pour
mener à bien cette analyse, on étudie la nature des tâches caractéristiques de chaque
profession et on détermine leur « télétravaillabilité ». Dans un second temps, on évalue
la possibilité de télétravailler pour certaines catégories particulières d’actifs (seniors,
femmes enceintes, etc.).


1. Le télétravail pourrait concerner jusqu’à 50 %
   de la population active en 2015, contre 30 % aujourd’hui

1.1. En 2008, le télétravail concernait potentiellement jusqu’à 30 %
     de la main-d’œuvre française

Les tâches caractéristiques d’une profession déterminent sa « télétravaillabilité »
                                                        1
D’un point de vue pratique, le travail à distance est un prérequis au télétravail. Des
      2
études indiquent que le travail à distance s’adresse à toutes les catégories profes-
sionnelles, depuis les ouvriers jusqu’aux cadres, mais selon des modalités différentes.

Ainsi, les cadres et les professions intermédiaires travaillent à distance entre 25 % et
75 % de leur temps de travail, soit entre 1 et 4 jours par semaine. Ces professions se
prêtent bien au télétravail car elles correspondent généralement à des activités de
service, plus intellectuelles que manuelles, et nécessitent moins de présence
physique.


1
  Le travail à distance est défini comme le travail ayant lieu hors des locaux de l’employeur. De
nombreuses professions le pratiquent depuis longtemps (magistrats, ouvriers travaillant en extérieur,
etc.). Le télétravail est une forme particulière de travail à distance qui mobilise les TIC.
2
  Anca Boboc, Laurence Dhaleine et Alexandre Mallard, « Travailler, se déplacer et communiquer :
premiers résultats d’enquête », Réseaux, n° 140, 2007.



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C’est le cas notamment des fonctions support (services juridiques, ressources
humaines, gestion des systèmes d’information, administration générale), des fonctions
                                                                                    1
liées à la conception (études techniques économiques) ou de commercialisation .
Néanmoins, ces deux catégories professionnelles ne représentent plus un « gisement »
de télétravailleurs puisque, dans les faits, une majorité de cadres et de professions
intermédiaires peut déjà télétravailler.

Quant aux ouvriers et aux employés, ils représentent la grande majorité (85 %) des
travailleurs exerçant leurs fonctions 100 % du temps à distance. C’est le cas des
ouvriers travaillant en extérieur (secteur du bâtiment, professions agricoles, etc.) ou
des salariés en situation de mobilité permanente comme les techniciens de
maintenance ou les livreurs. Ces deux dernières professions sont particulièrement
concernées et représentent des « gisements » de télétravailleurs importants.

La fonction publique est un « gisement » potentiel de télétravailleurs
plus important que le secteur privé

De nombreux fonctionnaires pratiquent le travail « hors bureau » depuis
longtemps et ont naturellement adopté les technologies de l’information et de la
communication pour mener à bien leurs tâches. C’est le cas des magistrats, des
personnels d’encadrement, de certains chargés d’études, des diplomates, des
rédacteurs-traducteurs, ou encore des fonctions d’inspection. Par rapport au secteur
privé, les trois fonctions publiques comptent en proportion davantage de cadres
(29,6 % contre 14,6 %), davantage d’employés (40,5 % contre 30,4 %) et moins
d’ouvriers (6,6 % contre 31,6 %). A priori, le « taux de télétravailleurs » pourrait
donc être plus important dans la fonction publique que dans le secteur privé. Or
ce n’est probablement pas le cas, même si l’absence d’instrument de mesure ne
permet pas de l’affirmer catégoriquement.

Environ 30 % de la population active occupée était potentiellement concernée
par le télétravail en 2008

Pour mieux connaître la part potentielle de télétravailleurs dans la population active
française, nous avons évalué la « probabilité » de pratiquer le télétravail pour
                                                                                     2
chacune des 82 professions décrites dans la nomenclature FAP de 1993
(tableau n° 14).




1
 G. Crague, 2005, op. cit.
2
 La nomenclature des familles professionnelles (FAP) est une nomenclature agrégée des métiers mise au
point par la DARES, l’organisme chargé des statistiques au ministère du Travail. Une version 2003 a été
actualisée récemment ; pour notre estimation, nous conservons cependant l’ancienne version de 1993
afin de pouvoir exploiter les données des travaux du groupe Prospective des métiers et des qualifications
(Centre d’analyse stratégique et DARES, Les métiers en 2015, rapport du groupe « Prospective des
métiers et des qualifications », Paris, La Documentation française, janvier 2007).



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Méthodologie de l’estimation du nombre de télétravailleurs potentiels

    Chaque profession se voit affectée d’un coefficient de télétravail, de manière qualitative1 :
    – « Probabilité forte de télétravail » correspond à la situation où tous les profession-
      nels exerçant ce métier pourraient effectuer une partie au moins de leur activité en
      télétravail. Les cadres administratifs, les cadres commerciaux et technico-commerciaux
      et les informaticiens se trouvent dans cette catégorie en 2008. Ces professions sont
      affectées d’un coefficient 1 ;
    – « Probabilité faible ou moyenne de télétravail » correspond aux professions où une
      partie seulement de la main-d’œuvre pourrait pratiquer le télétravail, y compris à
      temps partiel. Les secrétaires, les employés administratifs de la fonction publique et
      les professions intermédiaires du commerce sont classés dans cette catégorie en
      2008. Ces professions sont affectées d’un coefficient 0,5 ;
    – « Probabilité nulle de télétravail » correspond aux métiers pour lesquels la main-
      d’œuvre ne peut pas travailler à distance car n’utilisant pas d’informatique ou de
      moyens modernes de communication dans ses activités professionnelles habituelles.
      Les conducteurs de véhicules, les ouvriers du BTP, les coiffeurs, les assistantes
      maternelles et aides à domicile sont classés dans cette catégorie. Ces professions
      sont affectées d’un coefficient 0.
    Le volume d’emplois de chaque métier est affecté du coefficient identifié, de manière à
    estimer globalement le nombre d’emplois comptabilisés dans chaque catégorie et donc à
    mesurer un potentiel total de télétravailleurs.
    Une telle méthodologie qualitative introduit une marge d’erreur dans l’estimation du
    potentiel de télétravailleurs en France. En revanche, elle exclut à coup sûr les professions
    qui n’ont aucune chance d’être concernées par le télétravail.



               Tableau n° 14 : Probabilité de télétravail pour 82 professions
                                         (situation en 2008)*
                                         Probabilité faible                   Probabilité nulle
       Probabilité forte
                                           ou moyenne                          ou quasi nulle
Ingénieurs et cadres techniques    Techniciens et cadres de           Agriculteurs, éleveurs,
de l’industrie                     l’agriculture                      sylviculteurs, bûcherons
Cadres administratifs et           Techniciens et AM du BTP           Maraîchers, jardiniers, viticulteurs
dirigeants                         Cadres du BTP                      Marins, pêcheurs
Informaticiens                     Techniciens et AM électricité      ONQ gros et second œuvre
Personnels d’études                électronique                       bâtiment
et de recherche                    Techniciens et AM industries       ONQ gros œuvre, travaux publics
Professionnels du droit (hors      mécaniques                         et extraction
juristes en entreprise)            Techniciens et AM industries de    OQ travaux publics béton,
Cadres de la banque et des         process                            extraction
assurances                         Techniciens et AM matériaux        OQ gros œuvre ONQ bâtiment,
Cadres commerciaux et              souples, bois, industries          second œuvre
technico-commerciaux               graphiques                         OQ bâtiment, second œuvre
Professionnels de la               OQ maintenance                     Conducteurs d’engins du BTP
communication et de                Techniciens et AM maintenance      ONQ électricité électronique
l’information                      et organisation                    OQ électricité électronique
                                   Agents administratifs et           ONQ travaillant par enlèvement


1
 La construction de cette typologie et l’estimation du potentiel de télétravail qui en a été déduite ont
bénéficié de l’expertise de spécialistes des métiers de l’AFPA, de Pôle Emploi, du Centre d’analyse
stratégique et de chercheurs. Le Centre d’analyse stratégique reste seul responsable des erreurs qui
pourraient naître de l’estimation.



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                                                - 63 -
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Probabilité faible                    Probabilité nulle
      Probabilité forte
                                            ou moyenne                           ou quasi nulle
                                   commerciaux des transports et        ou formage de métal
                                   du tourisme                          OQ travaillant par enlèvement de
                                   Cadres des transports, de la         métal
                                   logistique et navigants de           OQ travaillant par formage de
                                   l’aviation                           métal
                                   Secrétaires                          ONQ mécanique
                                   Employés de la comptabilité          OQ mécanique
                                   Employés administratifs              ONQ industries de process
                                   d’entreprise                         OQ industries de process
                                   Secrétaires de direction             ONQ textile, cuir et bois
                                   Techniciens des services             ONQ textile et cuir
                                   administratifs, comptables et        OQ textile et cuir
                                   financiers                           ONQ bois et ameublement
                                   Employés administratifs de la        OQ bois et ameublement
                                   fonction publique (catégorie C)      Ouvriers des industries
                                   Employés administratifs de la        graphiques
                                   fonction publique (catégorie B)      Ouvriers de la réparation
                                   Cadres de la fonction publique       automobile
                                   Employés et techniciens de la        ONQ manutention
                                   banque                               OQ manutention
                                   Employés et techniciens des          Conducteurs de véhicules
                                   assurances                           Agents d’exploitation des
                                   Attachés commerciaux et              transports
                                   représentants                        Armée, police, pompiers
                                   Maîtrise des magasins et             Caissiers, employés de libre-
                                   intermédiaires du commerce           service
                                   Patrons et cadres d’hôtels,          Vendeurs
                                   cafés, restaurants                   Bouchers, charcutiers,
                                   Enseignants                          boulangers
                                   Formateurs                           Cuisiniers
                                                                        Employés et AM de l’hôtellerie et
                                                                        de la restauration
                                                                        Coiffeurs, esthéticiens
                                                                        Employés de maison
                                                                        Assistants maternels, aides à
                                                                        domicile
                                                                        Agents de gardiennage et de
                                                                        sécurité
                                                                        Agents d’entretien
                                                                        Employés des services divers
                                                                        Professionnels des arts et des
                                                                        spectacles
                                                                        Aides-soignants
                                                                        Infirmiers, Sages-femmes
                                                                        Médecins et assimilés
                                                                        Professions paramédicales
                                                                        Professionnels de l’action sociale,
                                                                        culturelle et sportive

                                  AM : agent de maîtrise ; OQ : ouvrier qualifié ; ONQ : ouvrier non qualifié
(*) En rouge figurent les professions dont le volume d’emploi devrait le plus augmenter entre 2010 et 2020.
                                                                          Source : entretiens, analyse CAS

Au regard du tableau n° 14, il apparaît que :
–    72 % de la main-d’œuvre n’a pratiquement aucune chance de télé-
     travailler car les tâches des professions correspondantes ne peuvent pas être
     accomplies en télétravail ;




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–    17 % des emplois ont une probabilité faible ou moyenne de pratiquer le
     télétravail, même à temps très partiel ;
–    seulement 11 % de la main-d’œuvre a une probabilité forte de télétravail, au
     moins partiellement.

                Figure n° 7 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble
                        de la population active occupée en 2008




                                              Source : INSEE, enquête Emploi 2008, traitement CAS


L’analyse précédente indique qu’il y avait 28 % de télétravailleurs potentiels dans
la population active française en 2008 (11 % en probabilité forte et 17 % en
probabilité faible ou moyenne). Cette estimation concorde avec les données de
l’enquête SIBIS de 2002 (cf. figure n° 2), puisque 25 % des salariés français interrogés
durant cette enquête déclaraient être en mesure de télétravailler.

1.2. En 2015, d’après les projections, le télétravail concernerait
     potentiellement jusqu’à 50 % de la population active

Dans les dix prochaines années, la part de télétravailleurs potentiels dans la
population active est appelée à augmenter, avec la diffusion, dans la plupart des
métiers, des technologies numériques et des changements organisationnels associés.
À titre d’exemple, l’administration électronique pourrait favoriser le télétravail des
agents publics (relations avec les usagers, traitement dématérialisé des dossiers…).

À partir des données du rapport Métiers en 2015 et des réponses des experts
sollicités, nous avons estimé le potentiel de déploiement du télétravail dans les
                                                                           1
82 familles professionnelles étudiées à l’horizon des dix prochaines années . Dans

1
 Pour cela, nous supposons que les obstacles juridiques, économiques ou sociaux au télétravail sont
pour la plupart levés, pour ne retenir que l’évolution des contenus des métiers, notamment leur
« numérisation ».



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cette perspective, de nombreuses professions pourraient passer dans la catégorie
« forte probabilité » de télétravail (tableau n° 15).

           Tableau n° 15 : Probabilité future de télétravail pour 82 professions
                                          (situation en 2015/2020)*

                                              Probabilité faible                    Probabilité nulle
       Probabilité forte
                                                ou moyenne                           ou quasi nulle
Ingénieurs et cadres techniques         Techniciens et AM électricité,      Agriculteurs, éleveurs,
de l’industrie                          électronique                        sylviculteurs, bûcherons
Cadres administratifs et                Techniciens et AM industries        Maraîchers, jardiniers, viticulteurs
dirigeants                              mécaniques                          Marins, pêcheurs
Informaticiens                          Techniciens et AM industries        ONQ gros et second œuvre
Personnels d’études et de               de process                          bâtiment
recherche                               Techniciens et AM matériaux         ONQ gros œuvre, travaux publics
Professionnels du droit (hors           souples, bois, industries           et extraction
juristes en entreprise)                 graphiques                          OQ travaux publics béton,
Cadres de la banque et des              Attachés commerciaux et             extraction
assurances                              représentants                       OQ gros œuvre
Cadres commerciaux et                   Maîtrise des magasins et            ONQ bâtiment, second œuvre
technico-commerciaux                    intermédiaires du commerce          OQ bâtiment, second œuvre
Professionnels de la                    Employés et AM de l’hôtellerie      Conducteurs d’engins du BTP
communication et de                     et de la restauration               ONQ électricité, électronique
l’information                           Agents de gardiennage et de         OQ électricité, électronique
Techniciens et cadres de                sécurité                            ONQ travaillant par enlèvement ou
l’agriculture                           Médecins et assimilés               formage de métal
Techniciens et AM du BTP                Professions paramédicales           OQ travaillant par enlèvement de
Cadres du BTP                           Professionnels de l’action          métal
OQ maintenance                          sociale, culturelle et sportive     OQ travaillant par formage de métal
Techniciens et AM maintenance           Vendeurs                            ONQ mécanique
et organisation                         Ouvriers des industries             OQ mécanique
Professionnels des arts et des          graphiques                          ONQ industries de process
spectacles                                                                  OQ industries de process
Patrons et cadres d’hôtels, cafés,                                          ONQ textile, cuir et bois
restaurants                                                                 ONQ textile et cuir
Enseignants                                                                 OQ textile et cuir
Formateurs                                                                  ONQ bois et ameublement
Employés administratifs de la                                               OQ bois et ameublement
fonction publique (catégorie C)                                             Ouvriers de la réparation
Employés administratifs de la                                               automobile
fonction publique (catégorie B)                                             ONQ manutention
Cadres de la fonction publique                                              OQ manutention
Employés et techniciens de la                                               Conducteurs de véhicules
banque                                                                      Agents d’exploitation des
Employés et techniciens des                                                 transports
assurances                                                                  Armée, police, pompiers
Secrétaires                                                                 Caissiers, employés de libre-
Employés de la comptabilité                                                 service
Employés administratifs                                                     Bouchers, charcutiers, boulangers
d’entreprise                                                                Cuisiniers
Secrétaires de direction                                                    Coiffeurs, esthéticiens
Techniciens des services adminis-                                           Employés de maison
tratifs, comptables et financiers                                           Assistants maternels, aides à
Agents administratifs et                                                    domicile
commerciaux des transports et                                               Agents d’entretien
du tourisme                                                                 Employés des services divers
Cadres des transports, de la logis-                                         Aides-soignants
tique et navigants de l’aviation                                            Infirmiers, Sages-femmes
                                      AM : agent de maîtrise ; OQ : ouvrier qualifié ; ONQ : ouvrier non qualifié.
(*) En rouge figurent les professions dont le volume d’emploi devrait le plus augmenter entre 2010 et 2020.
                                                                               Source : entretiens, analyse CAS



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Sous ces hypothèses, il apparaît que le potentiel de télétravailleurs s’accroît
nettement, pour s’établir à 47 % en 2015 (38 % en probabilité forte et 9 % en
probabilité moyenne ou faible, cf. figure n° 8).

Néanmoins, ce résultat s’explique davantage par la diffusion des TIC dans les
entreprises et les administrations que par une évolution structurelle du marché de
l’emploi vers une plus grande part d’emplois « télétravaillables ». En effet, entre 2009
et 2020, les emplois en forte progression seront peu susceptibles d’être concernés
                                                                                   1
par le télétravail (secteurs social et médico-social, services à la personne, etc.) .

                                                                                    Figure n° 8 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble
                                                                                         de la population active occupée en 2015/2020
    Part des la population active occupée en fonction de la probabilité de




                                                                             100%
                                                                                                                                              11



                                                                             80%                    38                                        17




                                                                             60%
                                                                                                    9
                                   télétravail




                                                                                                                                                                      Probabilité forte
                                                                                                                                                                      Probabilité faible/moyenne
                                                                                                                                                                      Probabilité nulle
                                                                             40%
                                                                                                                                              72

                                                                                                    53
                                                                             20%




                                                                              0%
                                                                                    Avec évolution de la probabilité de     Avec la même probabilité de télétravail
                                                                                                télétravail                             qu'en 2008


                                                                                                                          Source : CAS-DARES, Les Métiers en 2015, traitement CAS



                        L’essor du télétravail passe donc par des actions ciblées de la part des
                        pouvoirs publics, telles que la diffusion des technologies numériques et les
                        campagnes de communication auprès de métiers et/ou branches bien identifiés.




1
 Certes, le nombre d’emplois de cadres créés devrait être important entre 2009 et 2020. Toutefois, les
métiers de cadres ont déjà atteint un « palier » dans la diffusion du télétravail.



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2. Le télétravail ne peut augmenter que marginalement
   le taux d’emploi des seniors

2.1. Les intentions de départ à la retraite des Français

Toutes choses égales par ailleurs, les retraités français ne souhaitent pas
poursuivre leur activité professionnelle

Seule une minorité de Français souhaitent poursuivre une activité professionnelle
après la liquidation de leur retraite, à savoir 10 % des Français de plus de 60 ans et
                                                   1
seulement 0,4 % des salariés de plus de 65 ans . Ainsi, la France appartient au groupe
des pays du sud de l’Europe dont les salariés âgés de 50 à 59 ans souhaitent partir en
                             2
retraite le plus tôt possible . Pour les retraités envisageant de poursuivre une activité
professionnelle, les déterminants sont certes économiques mais aussi non
                                                3
monétaires, liés à une « préférence au loisir » .

             Figure n° 9 : Intention de départ en retraite au regard de la santé
                          et des conditions de travail des retraités




Lecture : se déclarer globalement satisfait de son travail fait baisser de 14,2 points la probabilité de
vouloir partir en retraite au plus tôt. Tous les effets reportés sur ce graphique sont significatifs au seuil de
5 %, sauf pour la variable « faibles chances de pouvoir garder son emploi jusqu’à la retraite ». Les effets
sont estimés sur l’ensemble des dix pays couverts, avec contrôle des effets de l’âge, du genre, du pays
et des caractéristiques de l’emploi.
                                                                                      Source : enquête Share

Il est difficile d’établir une hiérarchie des facteurs expliquant le fait de cumuler ou non
emploi et retraite. Cependant, on peut dire que l’intention de départ à la retraite est
d’autant plus retardée que le salarié se trouve en bonne santé, qu’il est satisfait
et reconnu dans un travail peu pénible et peu stressant lui permettant en outre
d’acquérir de nouvelles compétences et lui offrant de réelles perspectives
d’avancement (figure n° 9).

1
  DREES, « Perspectives et comportements en matière de retraite », Dossiers solidarité et santé, n° 3,
juillet-septembre 2006.
2
  Didier Blanchet et Thierry Debrand, « Aspirations à la retraite, santé et conditions de travail : une
comparaison européenne », Économie et Statistique, n° 403-404, 2007. L’enquête européenne SHARE
de 2004 indique que 57 % des Français de 50 à 59 ans souhaitent partir rapidement en retraite, contre
31 % des Néerlandais.
3
  Didier Blanchet et Thierry Debrand, « Aspirations à la retraite, santé et conditions de travail : une
comparaison européenne », Document de travail, INSEE, mars 2007.



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2.2. Les enjeux du taux d’emploi des seniors et le rôle du cumul
     emploi-retraite

Les enjeux de l’emploi des seniors

En 2008, le taux d’emploi des seniors (tranche d’âge 55-64 ans) était de 38,2 % pour
la France contre 44,7 % pour l’Europe et 54 % pour la moyenne de l’OCDE. Depuis
                                                                                 1
environ une décennie, les pouvoirs publics français cherchent à augmenter ce taux , à
rebours du « consensus social » des années 1970 sur le partage du travail entre les
générations.

       Figure n° 10 : Taux d’emploi des 55-64 ans dans certains pays de l’OCDE
                                          (données 2008)




                                            Source : Conseil d’orientation des retraites, traitement CAS

Un meilleur taux d’emploi des seniors répond à l’objectif d’amélioration de la
balance des dépenses sociales, notamment celles de la branche vieillesse, et
contribue par corollaire à la pérennité du système de retraite par répartition. Se
pose alors la question de déterminer la part de retraités pouvant effectivement
poursuivre une activité professionnelle.

Le cumul emploi-retraite est une des solutions contribuant à augmenter le taux
d’emploi des seniors

Le cumul emploi-retraite est apparu comme un outil pertinent pour augmenter le taux
d’emploi des seniors. La loi du 21 août 2003 a apporté de premiers changements, en
1
 Conseil d’orientation des retraites, « Augmenter le taux d’emploi des seniors – les enseignements des
expériences étrangères », colloque du 29 novembre 2007.



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réduisant les contraintes à l’activité des retraités (possibilité de cumuler retraite et
revenus salariés, reprise de l’activité après un délai de six mois, etc.). Depuis le
 er            1                           2
1 janvier 2009 , sous certaines conditions , les modalités du cumul emploi-retraite
ont été à nouveau assouplies (déplafonnement des revenus du cumul, fin du délai de
carence de six mois) pour permettre aux retraités d’exercer une activité profes-
sionnelle.

La part des cumulants dans la population retraitée est actuellement infime
et ne devrait guère augmenter à l’avenir
                                                                                                        3
Le recours au dispositif de cumul emploi-retraite est relativement mal connu . On
peut toutefois avancer qu’il concerne une part infime des retraités. Dans les années
1995-1996, approximativement 300 000 retraités (soit environ 3 % de la population
des retraités) exerçaient une activité professionnelle en plus de leur retraite, répartis
entre salariés (70 %) et non-salariés (30 %). Les cumulants dont l’âge est compris
entre 54 et 59 ans étaient à 62 % des fonctionnaires (dont 47 % d’anciens militaires).
Cette proportion s’inverse pour les cumulants de 60-70 ans, qui à 60 % cotisent au
régime général.

Même si le taux d’activité des personnes âgées de plus de 60 ans s’est redressé
                                                        4
depuis 1995, en passant de 10 % à 15 % pour les hommes , le nombre de cumulants
n’a probablement guère progressé. Ainsi, en 2006, d’après la CNAV, seuls 120 000
retraités percevaient un salaire.

Certes, le taux d’activité des plus de 60 ans devrait continuer à croître dans les
prochaines années, notamment sous l’effet des réformes des retraites de 1993 et
2003, mais pour l’essentiel il s’agira de poursuite d’emploi avant liquidation de la
retraite (âge de départ à la retraite retardé) plus que de cumul emploi-retraite.

2.3. Le cumul emploi-retraite représente un faible gisement
     de télétravailleurs

Il existe de nombreux obstacles au développement du télétravail chez les seniors

Le cumul emploi-retraite n’est qu’une des possibilités d’associer télétravail et emploi
des seniors parmi les pistes d’action suggérées aux entreprises (article L.138-26 du
Code de la sécurité sociale) et qui constituent les grands axes du plan national
d’action concerté pour l’emploi des seniors 2006-2010.

En théorie, le télétravail répond aux aspirations des seniors quant au besoin de
changement et aux conditions de travail : moindre pénibilité physique et psychique,


1
  Article 88 de la LFSS de 2009.
2
  Les trois conditions prévues par la loi sont la rupture du contrat de travail, la liquidation des pensions et
la condition d’âge et de durée. Cette réforme s’applique à tous les régimes d’assurance vieillesse, à
l’exception de celui des exploitants agricoles.
3
  Contrairement à la population active, on ne dispose pas de données précises sur les caractéristiques
des retraités, par secteur et/ou catégorie socioprofessionnelle. Il est donc difficile d’évaluer le nombre de
télétravailleurs potentiels parmi eux. Tout au plus peut-on dire que le flux annuel de retraités, à savoir
700 000 par an entre 2008 et 2013, se divise à parts égales entre les secteurs secondaire et tertiaire.
4
  Claude Minni, « Emploi et chômage des 50-64 ans en 2008 », Premières Synthèses, DARES, n° 39-2,
septembre 2009.



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liberté dans le travail, maîtrise des horaires, possibilités de développer de nouvelles
compétences (cf. supra figure n° 9).

En pratique toutefois, la faible appropriation des TIC par les seniors est un frein à
l’essor du télétravail. L’âge apparaît ainsi comme un facteur « très déterminant » pour
                               1
l’accès à un micro-ordinateur . Ce retard dans l’équipement des plus de 60 ans vaut
aussi largement pour la téléphonie mobile ou l’Internet haut débit.
                                                                                                       2
Enfin, les seniors peuvent subir des discriminations dans l’accès à l’emploi :
a priori des employeurs sur l’inaptitude des seniors à maîtriser les TIC, moindre
créativité avec l’âge, appréhensions des seniors eux-mêmes vis-à-vis des TIC,
diminution des capacités cognitives… Les changements organisationnels et l’infor-
matisation, deux éléments associés au télétravail, ne s’avèrent pas favorables au
                                   3
maintien des seniors dans l’emploi .

Les obstacles au déploiement du télétravail parmi les seniors, en emploi ou en cumul
emploi-retraite, pourraient néanmoins s’amenuiser à mesure que les générations ayant
pratiqué l’informatique pendant l’essentiel de leur carrière professionnelle atteindront
50 ans. Des formations adaptées pourraient également contribuer à réduire l’écart de
maîtrise des TIC entre seniors et jeunes publics.



3. Sous certaines conditions, le télétravail peut être
   une alternative aux congés maladie

3.1. Juridiquement, le travail est proscrit durant les congés

Le Code du travail interdit très clairement toute forme de travail durant les
       4
congés . En effet, pendant les situations d’arrêt de travail pour maladie ou accident,
de congés maternité, paternité ou adoption, de congés ou absences autorisées, d’un
congé-formation, le contrat de travail est suspendu.

Il existe en outre des règles d’ordre public qui imposent au salarié de prendre ses
congés et lui interdisent donc de travailler pendant une période de suspension du
contrat. Concernant la maternité, l’article L. 1225-29 du Code du travail prévoit qu’il
« est interdit d’employer la salariée pendant une période de huit semaines au total
avant et après son accouchement. Il est interdit d’employer la salariée dans les six
semaines qui suivent son accouchement ». De même, le caractère d’ordre public du
droit aux congés payés fait que l’employeur doit donner au salarié ses congés et que
ce dernier est tenu de les prendre.

1
 En 2008, 92 % des 12-17 ans disposaient d’un ordinateur contre 17 % des plus de 70 ans. La diffusion
des technologies de l’information et de la communication dans la société française, rapport du CREDOC
effectué à la demande du CGIET et de l’ARCEP, novembre 2008.
2
   Sur l’emploi des seniors, voir Pierre Marioni, « Emploi et travail des seniors : des connaissances à
l’action », Synthèse des données pour le colloque « Âge et travail » de mars 2007 », Document d’études,
DARES, n° 125, juillet 2007.
3
  Sévane Ananian et Patrick Aubert, « Travailleurs âgés, nouvelles technologies et changements organisa-
tionnels : un réexamen à partir de l’enquête ‘Reponse’ », Économie et Statistique, n° 397, 2006 ; Sandrine
Levasseur, « Progrès technologique et employabilité des seniors », Revue de l’OFCE, n° 106, 2008.
4
  Cette section est tirée d’une note de Jean-Yves Kerbourc’h, conseiller scientifique au Centre d’analyse
stratégique, professeur de droit social à l’université de Haute-Alsace.



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De leur côté, les règles de la sécurité sociale envisagent la question de la suspension
de manière tranchée : le contrat de travail est suspendu ou il ne l’est pas. Les salariés
relevant du régime général contraints d’interrompre leur activité professionnelle en
raison d’une incapacité physique peuvent prétendre, s’ils remplissent les conditions
requises, au versement d’indemnités journalières compensant partiellement leur perte
de salaire, sauf faute intentionnelle commise en vue de percevoir ces indemnités (CSS
L. 321-1 et L. 375-1). En outre, certaines dispositions légales ou conventionnelles
prévoient le maintien du salaire, comme en cas de maladie, d’accidents du travail ou
de maladie professionnelle, de congé de maternité (voir encadré).


           La règle du maintien du salaire en cas de suspension du contrat de travail
                                     pour raison de santé

     L’article L. 1226-1 du Code du travail prévoit le maintien du salaire en cas de maladie ou
     d’accident (y compris d’origine professionnelle), lorsque les conditions suivantes sont
     remplies :
      – ancienneté d’un an au premier jour d’absence ;
      – justification de l’absence dans les 48 heures et constatation de la maladie par
         certificat médical et contre-visite ;
      – prise en charge par la sécurité sociale ;
      – soins en France ou dans un autre pays membre de l’Union européenne ou de
         l’Espace économique européen.

     Le Code du travail (art. D. 1226-1 à D. 1226-3) fixe le point de départ de l’indemnisation
     au premier jour d’absence si celle-ci est consécutive à un accident du travail ou à une
     maladie professionnelle (à l’exclusion des accidents de trajet) et au huitième jour
     d’absence dans tous les autres cas. Pendant 30 jours, le salarié reçoit 90 % de la
     rémunération brute qu’il aurait perçue s’il avait continué à travailler. Pendant les 30 jours
     suivants, il reçoit les deux tiers de cette rémunération. Ces durées sont augmentées de
     10 jours par période entière de 5 ans d’ancienneté en sus de la durée d’une année
     exigée, sans que chacune d’elles puisse dépasser 90 jours. Chacune de ces durées
     d’indemnisation sera donc portée à : 40 jours entre 6 et 11 ans d’ancienneté ; 50 jours
     entre 11 et 16 ans ; 60 jours entre 16 et 21 ans ; 70 jours entre 21 et 26 ans ; 80 jours
     entre 26 et 31 ans ; 90 jours à partir de 31 ans d’ancienneté.



Des accords de prévoyance conclus en application d’une convention collective de
branche (ou autre) sont susceptibles de couvrir la différence importante entre les
indemnités versées par le régime général de la sécurité sociale et le coût du maintien
du salaire pris en charge par l’employeur.

S’agissant des congés maladie ou accidents du travail, une (petite) partie des
poursuites menées par la CNAMTS vise ainsi des personnes qui exercent une activité
                                1
pendant leur arrêt de travail . Cette situation est examinée avec d’autant plus
d’attention qu’il s’agit d’un cas où salarié et employeur peuvent s’avérer complices
contre l’assurance-maladie.

Pour autant, cela n’empêche pas de nombreux salariés de poursuivre leur activité
professionnelle, en télétravaillant de manière informelle. Parfois de manière subie,
sous la pression plus ou moins directe de leur hiérarchie, mais aussi – probablement
dans la plupart des cas – de manière plus ou moins volontaire, par dépendance au
1
    Quatorze pénalités en 2007.



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travail ou par (auto)contrainte (souhait de suivre à distance ses dossiers pour bien
faire son travail ou ne pas les perdre au profit de collègues).

3.2. Le télétravail est juridiquement incompatible avec le congé maladie
     mais peut être une opportunité pour certains malades et pour
     l’assurance-maladie

En 2005, environ un actif sur cinq, assuré par le régime général, a bénéficié d’un arrêt
de travail pour cause de maladie. Ces arrêts sont majoritairement de courte durée :
ceux d’une durée inférieure à 15 jours représentent 63 % des cas, contre 20 % pour
                                  1
les arrêts supérieurs à un mois . Par ailleurs, les données de la CNAMTS font appa-
raître une nette corrélation entre syndromes grippaux et arrêts de moins de huit jours.
                                                                             2
Trois types d’affections représentaient plus de 50 % des arrêts :
–    les maladies du système ostéo-articulaire, des muscles et du tissu conjonctif
     (21 % des arrêts) ;
–    les traumatismes (21 % des arrêts) ;
–    les troubles mentaux (14 % des arrêts).

Dans l’hypothèse où le télétravail viendrait remplacer 5 % ou 10 % des arrêts de
travail, des économies substantielles pour l’assurance-maladie seraient envisa-
geables. Cela correspondrait également au souhait de certains salariés de poursuivre
une activité professionnelle durant leur congé maladie. En pratique, dans la mesure où
employeur et employé le souhaitent, le médecin pourrait délivrer au patient un arrêt
                                                                          3
de travail assorti d’une attestation médicale d’aptitude au télétravail . Cependant,
il faut noter qu’aucun dispositif de ce type n’a été identifié dans les pays de l’OCDE
étudiés.

Le télétravail, notamment à temps partiel, pourrait également – en tant qu’aménage-
ment des conditions de travail – assurer la transition entre l’arrêt maladie et
                                                                                      4
l’activité professionnelle, par exemple dans le cas de salariés atteints par un cancer .
                                   5
En favorisant le retour à l’emploi et en répondant mieux aux besoins des malades, le
télétravail a un effet positif dans le processus de guérison des maladies chroniques
(contacts sociaux, meilleure hygiène de vie, projection dans l’avenir…).

Enfin, le télétravail à temps partiel serait une opportunité pour les mi-temps
thérapeutiques ou pour un retour au travail à temps complet. La souplesse et la
maîtrise des horaires qu’offre le télétravail peuvent faciliter les traitements et les
examens médicaux de patients en phase de maladie moins aiguë. Il fournirait des



1
 Odile Kusnik-Joinville et al., « Déterminants de l’évolution des indemnités journalières », Points de
repère, n° 5, CNAMTS, novembre 2006.
2
  Ces données datent de 1993, aucune étude plus récente n’ayant été effectuée sur ce sujet.
3
  Un tel dispositif ne constituerait pas forcément une pression supplémentaire sur le médecin qui subit
déjà les demandes du salarié-patient confronté à d’éventuelles pertes de droits et de statuts quand il est
placé en arrêt de travail.
4
  Les données de l’Institut Curie indiquent que de plus en plus de patients atteints d’un cancer
poursuivent une activité professionnelle pendant ou après leur traitement.
5
  Christine Le Clainche, « Retour au travail après un cancer : impact des aménagements des conditions
de travail et des conditions de vie », communication au séminaire DARES-CEE, 16 juin 2009.



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1
marges de manœuvres au salarié malade ou en phase de guérison , articulant mieux
                                                               2
la « trajectoire de la maladie » et la « trajectoire d’emploi » .

3.3. La pratique du télétravail durant les arrêts pour accident de travail
     semble difficilement envisageable

Est considéré comme accident de travail (AT) l’accident, quelle qu’en soit la gravité,
survenu par le fait ou à l’occasion du travail, à toute personne travaillant, à quelque
titre que ce soit et en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou
chefs d’entreprise (CSS, art. L. 411-1). Un AT suppose donc la réunion des deux
critères suivants :
–    un fait accidentel, c’est-à-dire un événement ou une série d’événements survenus
     à des dates certaines, par le fait ou à l’occasion du travail, dont il est résulté une
     lésion corporelle, aussi bénigne soit-elle, quelle que soit la date d’apparition de
     celle-ci ;
–    l’existence d’un lien de subordination entre la victime et son employeur au
     moment de l’accident. Est constitutive d’un lien de subordination l’exécution d’un
     travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des
     directives, de contrôler l’exécution du travail et de sanctionner les manquements
     de son subordonné.

Cette définition confère à tout accident survenu à un salarié pendant les heures de
travail et à un moment où s’exerce l’autorité de l’employeur, même s’il n’est pas causé
par un acte strictement lié au travail, une présomption d’imputabilité au travail, à la
condition que la victime apporte la preuve de la matérialité de la lésion. De la même
manière, un accident survenu consécutivement à un acte d’insubordination peut être
reconnu comme AT tant que la victime est restée sous la surveillance et l’autorité de
l’employeur. En revanche, si le salarié ne bénéficie pas de la présomption
d’imputabilité, il doit apporter la preuve du lien de causalité entre le travail et
l’accident pour bénéficier de la législation en vigueur.

En 2006, 705 000 arrêts ont été établis suite à un accident du travail, pour une durée
moyenne de 45 jours. Les arrêts « courts » (moins de 45 jours), représentant la
                       3
majorité des AT (81 %) , sont dus à des accidents bénins, tandis que les arrêts longs
sont dus à des AT particulièrement graves (chute d’une grande hauteur, etc.), avec
des séquelles souvent importantes.

Au-delà des difficultés juridiques liées à la suspension du contrat de travail, il semble
difficile de proposer à un salarié en AT de télétravailler, alors que l’activité
professionnelle est à l’origine de l’arrêt. En outre, l’équilibre du régime juridique de la
prise en charge des accidents du travail et des maladies professionnelles, établi depuis
      4
1898 , vise à favoriser la prévention par l’employeur des risques professionnels, en lui

1
  Sur l’enjeu de trouver des marges de manœuvre dans la gestion de la maladie et des soins tout en travaillant,
voir Anne-Marie Waser, « Travailler malgré le cancer, un privilège ? », Santé et Travail, n° 66, avril 2009.
2
  Sylvie Célérier, « Santé précaire au travail : quelques perspectives sociologiques », Connaissance de
l’emploi, n° 56, CEE, juillet-août 2008.
3
  Damien Euzenat, « Les indicateurs accidents du travail de la DARES. Conception, champ et
interprétation », Document d’études, n° 150, DARES, juillet 2009.
4
  Daniel Couturier, « Les accidents du travail : approche juridique et jurisprudentielle », communication au
colloque « Les accidents du travail : rétrospective historique et interrogations contemporaines », Lyon,
octobre 2008.



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imposant une obligation de résultats et non seulement de moyens, « récompensée »
financièrement par le biais des mécanismes de cotisation à la branche « accident du
travail/maladies professionnelles » de la Sécurité sociale. Il faut noter, en outre,
qu’aucun pays de l’OCDE étudié n’a mis en place de dispositif substituant le
télétravail à l’arrêt de travail après accident du travail.


4. Le télétravail peut contribuer à mieux concilier activité
   professionnelle et périodes prénatale et postnatale
   (hors congé maternité)

Le Code du travail accorde aux femmes un congé de maternité d’une durée de seize
semaines qui commence en principe six semaines avant la date présumée de
l’accouchement (congé prénatal) pour se terminer dix semaines après la date de celui-
ci (congé postnatal). Pendant cette période, le contrat de travail est suspendu.

Certes, l’interdiction de travailler pendant le congé de maternité n’est pas absolue
                                1
chez nos voisins européens . En Allemagne, pendant le congé prénatal, la femme
enceinte peut continuer à travailler si elle en exprime la volonté, tout en ayant la
faculté de revenir sur cette décision à tout moment. Le congé postnatal danois, qui
dure en principe quatorze semaines, n’inclut de façon obligatoire que les deux
semaines qui suivent la naissance. L’Espagne et la Pologne prévoient la possibilité de
transférer au père une partie du congé de maternité, le cadre juridique ne faisant en
outre pas de différence entre congés prénatal et postnatal. En Espagne, les femmes
ont l’obligation de respecter un congé postnatal de six semaines mais elles peuvent
faire bénéficier le père du solde de leur congé (dix semaines au maximum). De même,
en Pologne, les femmes peuvent transférer au père au maximum six semaines de leur
congé de maternité.

Néanmoins, il ne paraît pas souhaitable de remettre en cause les principes du
droit du travail français concernant le congé de maternité et la suspension du
contrat de travail, notamment parce que les mères y sont très attachées. Ainsi, les
                                 2
mères interrogées par la DREES s’arrêtent plus longtemps que la durée légale ou
conventionnelle, en cumulant congé maternité et congés annuels par exemple, pour
passer du temps avec leur(s) enfant(s).

D’après cette même enquête, certaines mères, notamment parmi les cadres, ont
cependant déclaré avoir consacré du temps à leur activité professionnelle pendant
toute la durée du congé maternité (14 %). D’autres ont repris progressivement leur
travail avant la fin du congé (12 %) tandis que la plupart ont maintenu des contacts
professionnels avec leurs collègues (77 %). En outre, les périodes avant et après le
congé maternité sont souvent synonymes de surcharge de travail, pour les femmes
cadres en particulier.

Par souci d’une meilleure conciliation entre la vie familiale et l’activité professionnelle,
plusieurs entreprises françaises font du télétravail un outil permettant davantage de

1
  Sénat, « Les congés liés à la naissance d’un enfant », Les documents de travail du Sénat, série
Législation comparée, n° LC 200, octobre 2009.
2
  Enquête « Congés autour de la naissance », réalisée en 2004 ; Sophie Pénet, « Le congé maternité »,
Études et Résultats, n° 531, DREES, octobre 2006.


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souplesse dans l’organisation du travail, donc particulièrement adapté aux femmes
enceintes et aux jeunes mères.
                                                              1
Telle est l’approche des entreprises signataires de la « Charte de la parentalité en
entreprise » qui s’engagent à proposer le télétravail, parmi d’autres dispositifs.
L’accord mis en œuvre chez Coca Cola France depuis décembre 2008 permet aux
salariées enceintes de télétravailler un à deux jours par semaine dans les deux mois
qui précèdent le départ en congé maternité. De même, dans le cadre d’un accord
d’entreprise sur « l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes », signé le
13 mai 2009 par l’ensemble des organisations syndicales, Bayer Santé permet un
aménagement des conditions de travail par du télétravail dès quatre mois révolus de
                                              2
grossesse, après avis du médecin du travail .
                       3
Au Royaume-Uni , le télétravail est un outil de conciliation entre vie professionnelle et
éducation des jeunes enfants dans le cadre de la loi sur « le droit de demander un
                  4
travail flexible » . Cette loi introduit le droit pour l’employé, parent d’un enfant de
moins de 6 ans ou d’un enfant handicapé de moins de 18 ans, de demander des
arrangements spécifiques pour rendre son emploi du temps plus flexible (horaires,
durée et lieu de travail). Elle introduit également l’obligation pour l’employeur de
considérer cette demande avec sérieux et d’en discuter avec l’employé. En 2007, ce
droit a été étendu aux parents d’enfants âgés de moins de 16 ans.

En cas de refus d’une demande de flexibilisation du temps de travail, l’employé peut
faire appel. La demande sera alors reconsidérée par l’employeur. En cas de second
refus, l’employé peut faire un second appel devant un tribunal spécialisé dans le droit
du travail (employment tribunal) ou demander un arbitrage qui s’imposera aux deux
parties (binding arbitration). L’objectif de la législation sur le travail flexible est d’offrir
aux parents un meilleur équilibre entre vie familiale et vie professionnelle et de
changer les habitudes culturelles, sans pour autant pénaliser les entreprises.

En Allemagne, le télétravail fait partie des mesures de conciliation entre vie familiale
                            5
et activité professionnelle . Ainsi, la loi sur l’égalité homme/femme dans le secteur
public oblige les services à proposer aux salariés des modes d’organisation
compatibles avec la vie familiale, dont le télétravail. La Commerzbank, dans le cadre
de plusieurs accords collectifs, s’engage de même depuis 2001 à s’efforcer de
répondre aux vœux des salariés en matière de télétravail, ne serait-ce que pour
faciliter un retour précoce de congé parental.

Le télétravail peut aussi favoriser la conciliation entre vie familiale et activité
professionnelle pour les salariés qui ont des parents dépendants ou en fin de vie. Or
ces situations sont appelées à évoluer avec le vieillissement démographique.




1
  120 entreprises signataires au 26 octobre 2009 (www.observatoire-parentalite.com). On note cependant que
les entreprises signataires n’identifient pas toutes le télétravail comme un outil favorable à cette démarche ou
bien sont en retard dans sa mise en œuvre, d’après une enquête de l’Observatoire de la parentalité.
2
  Dépêche AEF n° 121490, 19 octobre 2009.
3
  Roland Berger, Le Télétravail en France et dans les pays de l’OCDE. Monographies pays, septembre 2009.
4
  Employment Act 2002 – chapitre 479 ; Flexible Working Regulations 200310.
5
  Anne-Marie Daune-Richard et Marie-Thérèse Letablier, « Concilier travail et famille : l’engagement des
entreprises dans la prise en charge des enfants (Allemagne, France, Italie et Royaume-Uni) », Dossier
d’étude, n° 120, CNAF, septembre 2009.


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La nécessaire implication de tous les acteurs




1. Le télétravail procure des avantages décisifs
   dans de nombreux domaines
Dans l’ensemble, le télétravail a des effets bénéfiques sur la performance des
entreprises, sur la satisfaction des salariés, sur les émissions de gaz à effet de
                                                                             1
serre… Ces effets positifs, parfois vantés de manière trop enthousiaste par ses
promoteurs, ne doivent pas faire oublier qu’il existe des situations pour lesquelles le
télétravail n’est pas adapté, avec des bilans sociaux, économiques et environ-
nementaux parfois contrastés.

1.1. Le télétravail se trouve à la croisée de nombreux domaines
     de politique publique et de ce fait requiert l’adoption
     d’une « approche systémique »

Régi à la fois – entre autres – par le Code du travail et le Code de la sécurité sociale, le
télétravail est également au centre d’enjeux de société tels que la lutte contre le
changement climatique, la diminution de la pollution urbaine, l’amélioration du bien-
être des salariés et des relations sociales, la flexibilité du travail et la compétitivité des
entreprises, la réduction des dépenses sociales… Pour avoir une efficacité optimale,
les politiques publiques de promotion du télétravail doivent prendre en compte toutes
ces dimensions.

De la même manière, une organisation qui voudrait adopter ce dispositif devra
prendre en compte non seulement les aspects juridiques (clauses du contrat de
travail) mais aussi revoir ses modes de fonctionnement (taux de numérisation des
documents, procédés collaboratifs, etc.), sa politique de ressources humaines (incita-
tions pour les télétravailleurs, identification des postes et agents concernés, maintien

1
 Il existe ainsi une certaine « iconographie du télétravail », parfois entretenue par des procédés marketing,
représentant des professions intellectuelles supérieures ou des chefs d’entreprise télétravaillant au bord
de la piscine de leur maison secondaire… Ce n’est évidemment pas le cas de la grande majorité des
télétravailleurs, pour lesquels la réalité est beaucoup plus prosaïque. La diffusion du télétravail passe
donc aussi par la description juste des avantages et inconvénients pratiques liés à ce mode de travail.



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de l’équité entre tous les salariés, etc.) ou encore étudier les technologies les plus
adaptées au travail à distance, en tenant compte des systèmes d’information existants.

1.2. Malgré certaines incertitudes, les effets du télétravail
     sont dans l’ensemble positifs

Les effets positifs avérés

Le potentiel de diminution des émissions de gaz à effet de serre serait de 1 mil-
                                                 1
lion de tonnes (Mt) par an pour la France . Selon d’autres sources, les gains
pourraient même être plus importants : de 1,5 Mt pour une transposition des chiffres
pour les États-Unis et jusqu’à 3,3 Mt selon la Commission européenne.

La diminution des déplacements a pour corollaire la réduction de la pollution urbaine
                                                                                 2
(particules émises par les voitures, ozone) et la diminution d’une partie du coût des
maladies respiratoires associées, notamment dans les zones urbaines.

Si une estimation solide des gains « macroéconomiques » liés au télétravail semble
difficile à établir au niveau d’un pays, on dispose néanmoins d’un faisceau concordant
d’estimations à un niveau agrégé, qui indiquent un effet globalement positif du
                                                        3
télétravail sur la productivité. Selon une enquête menée auprès de 862 télé-
travailleurs, le passage au télétravail a permis une augmentation de productivité pour
57 % des salariés. Selon une autre enquête menée dans cinq pays européens, la
productivité a augmenté dans plus de 60 % des 30 organisations étudiées. À un
niveau plus fin, une augmentation des performances des télétravailleurs a été
constatée dans la plupart des cas : augmentation de productivité comprise entre
                                                                                   4
15 % et 31 % pour British Telecom, amélioration de l’efficacité de 16 % chez BMW …

             Tableau n° 16 : Influence du télétravail sur les conditions de travail
                                    de 862 salariés belges

      Évolution des conditions de travail             En               Pas de             En
      à la suite du passage en télétravail         diminution        changement       augmentation
    Productivité                                          4%             39 %              57 %
    Opportunités de promotion                         59,4 %              8,7 %            31,9 %
    Charge de travail                                 18,9 %             67 %              14,1 %
    Stress                                            43,5 %            45,7 %             10,8 %
    Équilibre vie privée/professionnelle              10,7 %            33,7 %             55,6 %

                                                                       Source : Walrave et De Bie (2005)




1
  Ce chiffre reprend la valeur consensuelle établie par la mission commune CGTI/CGEDD de décembre 2008
sur les TIC et le développement durable.
2
  Selon le deuxième Plan national santé-environnement (PNSE2) de 2009-2013, les particules fines de
moins de 10µm seraient responsables de 2 à 31 décès pour 100 000 habitants ; ainsi, le coût de traite-
ment du seul asthme imputable à l’environnement serait compris entre 0,2 et 0,8 milliard d’euros en 2006.
3
  Laurent Taskin, « Le télétravail en manque de régulation », Regards économiques, 2006.
4
  Projet SUSTEL, Is teleworking sustainable? An analysis of its economic, environmental and social
impacts, financé par la Commission européenne, 2004.


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Plusieurs causes expliquent cette augmentation de productivité. Tout d’abord, le
télétravailleur est généralement mieux formé que le travailleur resté dans les locaux
de l’employeur. Il est aussi en général moins perturbé dans l’exécution de ses
tâches (bruit, demandes urgentes du manager, nombreuses sollicitations des
collègues, etc.). Il travaille sur des plages horaires plus larges, durant lesquelles il est
plus concentré et plus efficace. Cette différence de productivité peut être source de
tensions entre les travailleurs dans les locaux, régulièrement dérangés par des
demandes intempestives, et les télétravailleurs, plus productifs car travaillant au calme
et dans de meilleures conditions.

Les effets présumés positifs mais difficiles à mesurer

L’amélioration générale des conditions de travail (moindres déplacements, meilleure
qualité de vie, diminution du stress, équilibre famille/travail, réduction de l’absen-
téisme) a probablement des impacts socioéconomiques considérables, tant en
                                                                   1
termes de productivité que de diminution des dépenses sociales , qu’il est toutefois
difficile d’évaluer précisément.

Dans une certaine mesure, l’emploi dans les territoires profite de l’essor du télétravail
qui permet l’installation de travailleurs en zone rurale. Ce phénomène est probable-
ment marginal : le télétravail à domicile (ou à 100 % hors des locaux de l’entreprise)
concerne moins de 25 % des télétravailleurs et s’adresse à certaines professions par-
ticulières (professions libérales, indépendants, chefs d’entreprises et cadres dirigeants de
certains secteurs). L’impact du télétravail sur la localisation de l’emploi et sur l’aménage-
ment du territoire réside principalement dans le développement des télécentres.

Dans certaines situations, le télétravail peut contribuer à augmenter significativement
le pouvoir d’achat, comme le montre l’encadré suivant.


           Illustration de l’impact du télétravail sur le pouvoir d’achat des salariés
                          télétravailleurs d’une société de téléconseil

    L’amélioration du pouvoir d’achat pour ses « téléconseillers » à domicile a été évaluée
    entre 10 % et 20 % suivant les situations personnelles.




                        Le conseiller            Le conseiller           Le conseiller
                          habite en             économise en            économise en
                       moyenne à 25 km         moyenne 1,5€ par      moyenne 1 heure de
                        de son lieu de             déjeuner           garde d’enfant par
                            travail                                          jour


                                       (1)                     (2)
                         90 € / mois             20 € / mois            105 € / mois   (3)




    Hypothèses
1
  D’après les résultats de l’enquête de Laurent Taskin, le stress au travail a diminué et l’équilibre entre vie
familiale et vie professionnelle s’est amélioré. Il y a de fortes chances que ces bénéfices sociaux se
traduisent par des diminutions de dépenses sociales (indemnités journalières moins nombreuses,
moindres prescriptions de médicaments…).



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1. Consommation de 6 litres au 100 km avec prix moyen constaté du carburant de
      1,20 € et usure véhicule équivalent à 0,05 €/km sur 15 jours ouvrés à domicile par
      mois : 25*2*15*(6/100*1,2 + 0,05) = 91,5 €
   2. Frais de bouche sur site de 4,50 € (restaurant d’entreprise) contre 3 € à domicile :
      15*(4,5-3) = 22,5 €
   3. Garderie pendant l’heure de transport économisée à 7 €/h : 15*7 = 105 €

                                                                               Source : analyse Roland Berger




                                      Le bilan des impacts du télétravail
     Impacts économiques
                                                  Valeur ajoutée
     En règle générale, le télétravail augmente les performances (productivité…), contribue à diminuer
     l’absentéisme, à améliorer le recrutement et à fidéliser les meilleurs employés. Les gains sont supérieurs
     aux coûts d’équipement, sauf lorsque le projet est mal préparé en amont

                                                 Pouvoir d’achat
     Effets généralement positifs pour les ménages à travers les économies en frais de transport et en garde
     d’enfant, généralement plus importants que les coûts de chauffage et d’éclairage de l’habitat

                                           Résilience de l’organisation
     Le télétravail permet de contourner les discontinuités de service partielles (transports…). En revanche, il
     augmente la vulnérabilité de l’organisation aux risques systémiques (perturbations sur les réseaux de
     télécommunications…)

                                                     Capital humain
     Le télétravail a des effets positifs sur l’évolution des compétences et les savoir-faire mais peut avoir un
     impact négatif sur le déroulement de carrière

                                                    Emploi
     Impacts difficiles à estimer de manière définitive bien que le télétravail puisse aboutir à modifier
     l’implantation géographique (aménagement du territoire…)

     Impacts environnementaux
                                                         Transport
     Diminution des embouteillages et des kilomètres parcourus malgré les déplacements supplémentaires
     induits parfois par le télétravail. Meilleur usage des infrastructures existantes par optimisation des horaires
     de déplacements

                                         Qualité de l’air en zone urbaine
     Moins d’émissions de particules car moins de déplacements de véhicules particuliers

                                             Consommation de ressources
     Impact négatif lorsque le télétravail ne s’accompagne pas de réduction des surfaces de bureaux (doublons
     d’équipement informatique et de consommations énergétiques)

                                                     Urbanisme
     Manque de recul pour estimer les effets : réimplantation des bureaux éventuellement contre-productive si
     les infrastructures de transport ne sont pas adaptées

                                                       Sécurité
     Pas d’effet connu




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Impacts individuels et sociaux
                                                   Insertion sociale
        Globalement positive grâce au maintien de certains emplois sinon détruits (handicapés, seniors…)

                                               Qualité de vie
        La plupart des sondés indiquent que le télétravail a amélioré leur quotidien malgré les heures
        supplémentaires souvent associées

                                                  Équilibre de vie
        Une grande majorité des sondés estiment que le télétravail leur permet de mieux concilier vie personnelle
        et vie professionnelle

                                                         Santé
        La plupart des télétravailleurs mentionnent un meilleur état de santé ; ceci est corroboré par la réduction
        de l’absentéisme

                                                       Vie sociale
        Le télétravail a souvent redynamisé les services locaux, voire l’implication dans les activités associatives
        pour de nombreux télétravailleurs


                                         Source : adapté du rapport final du projet européen SUSTEL de 2004




2. Les « success stories » et les bonnes pratiques

2.1. Quelques exemples de success stories

La littérature et les auditions ont permis d’identifier un certain nombre d’exemples
types du déploiement du télétravail.

BMW a été un pionnier dans l’industrie

BMW a commencé à développer le télétravail dès 1995 à travers le projet TWIST
(Telework in flexible structures). La montée en puissance du nombre de télétravailleurs
a été régulière entre 1996 et 2002. Aujourd’hui, l’ensemble des fonctions pratique le
télétravail, y compris la production (tâche de rédaction de rapport…).


                                 Figure n° 11 : Le télétravail selon BMW
                                                                                                 Autres Achats
                                                                       2 000                            3%
                                                                                 Distribution
                                                         1 494                                        7%              R&D
                                                                                                14%
 Montée en puissance du nombre                                                                               26%
 de télétravailleurs chez BMW                  987
                                   619
                        310
 20              78                                                                                              8%
                                                                                                36%                   Finance / IT
                                                                                                             6%
1996            1996   1997     1998-1999     2000       2001          2002
                                                                                   Production                    RH
       Pilote              Expansion                  Généralisation


                                                      Source : TWIST Telearbeit in der BMW Group, février 2002




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64 % des salariés de British Telecom sont en travail flexible
et 12 % télétravaillent depuis leur domicile

Au Royaume-Uni, l’exemple de bonne pratique le plus souvent cité en matière de
télétravail est le cas de British Telecom (BT) qui a réduit ses effectifs de manière
drastique au cours des dernières années, passant de 250 000 à 98 000 employés.
L’un des moyens privilégiés pour révolutionner ses ressources humaines a été
d’introduire le travail flexible. Aujourd’hui, 63 000 personnes sur le total des employés
de BT ont un travail flexible et 12 000 travaillent depuis leur domicile comme
télétravailleurs. L’objectif de la société est d’augmenter encore la part des
télétravailleurs pour modifier la culture interne de l’entreprise. Une des principales
motivations de BT a été la volonté de réduire les coûts des loyers et de mieux
rentabiliser les espaces de bureaux. Sur les dix dernières années, BT a ainsi pu
économiser 222 millions de livres en charges locatives. Les coûts associés aux
transports ont été réduits de 9,7 millions par an. 70 % des télétravailleurs ont constaté
une hausse de leur productivité et 65 % ont affirmé pouvoir ainsi économiser 6 heures
par semaine en temps de transport.

Toutefois, certains détracteurs soulignent que BT, qui vend également à travers sa
branche BT Workstyle Solutions des équipements et les technologies nécessaires à
des entreprises souhaitant développer le télétravail, aurait modifié ses pratiques en
ressources humaines dans un souci d’image plus que par souci de modernité et du
bien-être de ses employés.


2.1. Idéalement, un projet de déploiement du télétravail devrait se faire
     au cas par cas

Comme l’illustre la figure n° 12, sur les 60 organisations interrogées dans 11 pays
dans le cadre de cette mission, il est difficile d’identifier des cohérences entre le
développement du télétravail et d’autres caractéristiques de l’entreprise telles que
l’intensité technologique du secteur considéré ou sa taille. En effet, le déploiement du
télétravail correspond à une démarche propre à chaque organisation, variable selon
les pays, la culture d’entreprise ou le secteur.




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Figure n° 12 : Taux de télétravailleurs selon la taille de l’organisation,
        le secteur économique et le niveau de maturité du projet de télétravail
                                  (11 pays considérés)




                Source : entretiens, informations des entreprises (rapports annuels…), analyse CAS



                               Guide de lecture de la figure n° 12
   En abscisse est indiqué le taux de télétravailleurs dans l’organisation considérée (rapport
   entre le nombre de télétravailleurs et le nombre total de salariés).
   En ordonnée est indiquée l’intensité technologique de l’entreprise, sur une échelle allant
   de 1 (agriculture, BTP) à 10 (R & D en pharmacie, construction de technologies spatiales).
   Le diamètre de chaque cercle est fonction de la taille de l’organisation, exprimée en
   échelle logarithmique afin que les entreprises les plus petites restent visibles (la plus
   petite organisation comprend 100 salariés, la plus importante 320 000).
   Enfin, la couleur correspond au niveau de maturité atteint par l’organisation dans la mise
   en place de son projet de télétravail : pilote = noir, pilote/élargissement = rouge,
   élargissement = orange, élargissement/croisière = jaune, croisière = vert



Si la mise en œuvre du télétravail doit se faire de préférence au cas par cas, il n’en
demeure pas moins que l’on peut identifier quelques étapes invariantes majeures, que
les paragraphes suivants passent en revue. 

2.3. Les exemples de bonnes pratiques dans les entreprises

Bien qu’il soit difficile d’identifier un schéma universel de déploiement du télé-
travail, plusieurs travaux académiques en gestion des organisations et des études
menées par des syndicats d’entreprise ont mis en valeur des constantes et des
bonnes pratiques.




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La figure n° 13 présente un schéma type de mise en place du télétravail, établi par
plusieurs entreprises belges.


              Figure n° 13 : Schéma de mise en place du télétravail agréé
                      par un regroupement d’organisations belges




                                                  Source: BTA, Telework in Belgium, synthèse CAS


Le même travail a été réalisé par une dizaine d’entreprises américaines du secteur des
hautes technologies (figure n° 14).




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Figure n° 14 : Schéma de mise en place du télétravail agréé
                par treize entreprises américaines du secteur high-tech




                                                                   Source : telcoa.org, synthèse CAS



2.4. Les exemples de bonnes pratiques dans l’administration

Les bonnes pratiques issues de l’administration française

Il existe peu de cas de mise en place du télétravail dans l’administration
française, que ce soit au niveau central ou au niveau des collectivités locales.

Au niveau central, trois exemples récents sont ceux de la Direction générale des
impôts, du ministère de l’Éducation nationale et du ministère de la Justice. Ce dernier
a mis en place un protocole de télétravail dans ses services en novembre 2008, en
réponse aux changements organisationnels induits par la réforme de la carte
judiciaire.


          Expérience du télétravail au sein du ministère de l’Éducation nationale

   Le télétravail est très peu développé dans l’Éducation nationale. Le personnel potentiel-
   lement concerné est le personnel administratif. Il est à ce stade très difficile d’envisager
   d’élargir le périmètre des télétravailleurs aux professeurs. La « télétravaillabilité » des
   activités d’un enseignant est effectivement très limitée en dépit des progrès des TIC ;
   les préparations des cours et les corrections de copies s’effectuent déjà à distance du
   lieu d’enseignement (généralement au domicile).

   Si l’offre en matière de télétravail pour les professeurs n’est pas très importante, il n’y a
   pas non plus de demande forte.



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Lorsqu’un agent choisit de s’organiser en mode télétravail, l’Éducation nationale fournit
   le matériel et la connexion Internet au domicile, pour un coût annuel évalué à 700 euros.

   Les situations d’accidents du travail survenus au domicile sont rares et gérées au cas
   par cas, à l’amiable.

                 Protocole de télétravail au sein du ministère de la Justice

   Le ministère de la Justice a mené une expérimentation du télétravail sur les agents des
   conseils de prud’hommes (11 personnes) supprimés le 3 décembre 2008 (activité de
   greffe). Ce protocole indique que « le télétravail a pour effet de permettre à l’agent qui
   en bénéficie d’assurer, de façon régulière, son emploi dans un autre site judiciaire que
   celui au sein duquel il l’exerce habituellement ». Comme dans le cadre des accords
   d’entreprise signés entre la direction et les organisations représentatives du personnel,
   le protocole prévoit :
   – le caractère volontaire du télétravail ;
   – le lieu d’exercice du télétravail (en l’occurrence à domicile ou sur un site judiciaire) ;
   – l’activité exercée ;
   – les modalités d’organisation du télétravail (qui sont de la compétence du directeur
       de greffe) ;
   – la durée de la convention individuelle (12 mois maximum) ;
   – les modalités de cessation de la convention ;
   – la répartition du temps de travail entre les sites judiciaires : le télétravail choisi est
       un travail en alternance, pour une part n’excédant pas 80 % du temps de travail ; la
       présence aux réunions de service est requise ;
   – les conditions matérielles d’organisation du travail (mise à disposition d’un poste de
       travail dans le respect des règles d’hygiène et de sécurité) ;
   – les modalités d’utilisation des technologies de l’information (utilisation du réseau
       privé virtuel justice) ;
   – les horaires de travail (soumis à la charte de temps de sa juridiction de
       rattachement) ;
   – la formation au télétravail ;
   – la prise en charge en cas d’accident de travail, de service ou de trajet ;
   – les dépenses de fonctionnement (conditions de prise en charge d’une partie des
       frais liés au télétravail) ;
   – les modalités de suivi et bilan de l’expérimentation (retour au moins une fois par an).



Bien que les expériences précédentes n’aient pas connu de suite, rien ne s’oppose,
ni en théorie ni en pratique, à la mise en place du télétravail dans la fonction
publique. Un guide pratique, rédigé en 1998 par la DGAFP, a été édité à La
Documentation française. Très pragmatique, il présente en une cinquantaine de pages
le cadre juridique du télétravail dans la fonction publique et donne des conseils
pratiques.

Les bonnes pratiques issues des administrations étrangères et des organisations
internationales

Certaines administrations à travers le monde peuvent être considérées comme des
pionnières de la mise en place du télétravail. Ainsi, au début des années 2000,
l’administration américaine s’est mobilisée fortement en faveur du télétravail, via la
Direction générale des personnels fédéraux (US Office for Personnel Management et



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US General Services Administration), en fixant une feuille de route à son directeur. Ce
dernier doit produire un rapport annuel engageant, devant le Congrès, la respon-
sabilité de son organisation dans le déploiement du télétravail au sein des agences
fédérales. Des indicateurs sont fixés ex-ante (taux d’agences fédérales ayant mis en
place un programme de télétravail, taux de télétravailleurs potentiels et effectifs dans
chaque agence, prévisions, etc.).

                    Figure n° 15 : Exemple de plan d’action « Télétravail »
                             pour la fonction publique américaine




                                                                           Source : US OPM, analyse CAS




3. Les initiatives des pouvoirs publics contribuent à l’essor
   du télétravail

3.1. Les politiques publiques étrangères relatives au télétravail
                                                                                                       1
Comme nous l’avons vu précédemment (cf. tableau n° 11), hormis quelques cas , il
n’existe pas de législation spécifique au télétravail dans les pays étudiés. Néanmoins,
à partir des années 1990, le télétravail a été un sujet d’intérêt pour certains parlements
ou gouvernements étrangers, qui ont soutenu son essor de différentes manières :
1
  Il existe une législation du télétravail en Norvège, en Colombie et en Argentine, ainsi qu’en Corée du Sud
et aux Pays-Bas pour le secteur public. De même, la République tchèque (1er janvier 2007), la Pologne, la
Hongrie (mai 2004) et le Portugal (articles 233 à 243, modifiés par la loi 99/2003 du 27 août 2003) ont
introduit, sous une forme ou une autre, le télétravail dans leur Code du travail.



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soutien financier, promotion des bonnes pratiques, organisation du dialogue entre les
parties, amélioration de la diffusion des technologies…

Le soutien des pouvoirs publics peut être financier, en encourageant l’équipement
des entreprises et des ménages ou en proposant des déductions fiscales. Dans les
années 1990, les gouvernements belge, néerlandais, britannique et suédois ont
soutenu l’équipement informatique des ménages et/ou des entreprises,
contribuant ainsi au développement de la société de l’information en général et du
                                                                           1
télétravail en particulier. À partir de 1998, le « PC-privéregeling » a permis
annuellement à 400 000 salariés néerlandais d’acheter un ordinateur détaxé jusqu’à
un montant de 2 269 euros. Cette mesure coûtant environ 560 millions d’euros par an
pour les finances publiques, le seuil de détaxation a été abaissé à 1 425 euros en
2003 avant d’être supprimée en 2004. Les Britanniques et les Suédois peuvent
déduire de leurs impôts les frais liés à l’utilisation de leur domicile comme lieu de
         2
travail : déductions fiscales en Suède pour la transformation d’une pièce du domicile
en bureau, déductions fiscales pour les entreprises britanniques prenant en charge les
coûts de leurs télétravailleurs (environ 3 livres sterling par semaine), déductions
fiscales pour les particuliers britanniques justifiant les frais supplémentaires liés à
l’utilisation du domicile comme lieu de travail… Enfin, le télétravail est récemment
devenu un sujet d’intérêt pour le gouvernement coréen qui a mis en place un groupe
de travail chargé de réfléchir à d’éventuelles réductions fiscales et à des subventions.

Plus régulièrement, les gouvernements étrangers ont tâché d’identifier et de promou-
voir les bonnes pratiques. Des guides pratiques ont été édités aux États-Unis, au
Japon, en Belgique, aux Pays-Bas… En 2009, le gouvernement finlandais a édité un
      3
guide indiquant aux entreprises les neuf étapes à suivre pour mettre en œuvre le
télétravail avec succès. Des conférences et des campagnes de promotion ont
également été organisées pour vanter les bénéfices du télétravail, dans les années
                                                         4                5
1990 mais aussi plus récemment, notamment au Japon et en Finlande . Enfin, les
autorités peuvent déléguer la gestion du « thème télétravail » à une structure ad
hoc : Japan Telework Association au Japon, Belgian Telework Association en Belgique…

Enfin, la diffusion des TIC – à la base de l’essor du télétravail – est souvent encouragée
par les gouvernements étrangers. Outre le soutien à l’acquisition d’équipements
informatiques, le Japon, la Corée du Sud et la Suède investissent dans les
1
  La Belgique a adopté le même type de mesures : les entreprises peuvent accorder une majoration à la
rémunération des télétravailleurs à domicile, dans la limite de 10 % du salaire, sans avoir à s’acquitter
d’impôts ou de contributions sociales.
2
  Notons que de la même manière, rien n’empêche actuellement un télétravailleur français d’indiquer, lors
de sa déclaration d’impôt sur le revenu, comme frais réels les coûts de transport, de chauffage, etc., liés
à une activité en télétravail…
3
  Turku School of Economics, Better job satisfaction through quality of work life; How can telework help?,
rapport pour le ministère de l’Emploi et de l’Économie, avril 2009.
4
  Le « Plan pour doubler le nombre de télétravailleurs » de 2007 a suggéré de sensibiliser les décideurs,
de décerner des récompenses et d’organiser des conférences internationales sur le sujet.
5
  « Le 5 octobre 2006, le Conseil d’État a arrêté les objectifs de la politique de la société de l‘information
pour la période 2007-2013. L’un de ses objectifs consiste en la promotion du télétravail. Dans le pro-
gramme gouvernemental, l’importance du télétravail a alors été soulignée, afin notamment de développer
les régions les moins densément peuplées et les plus isolées. Suite à cette décision du Conseil d’État, le
ministère du Travail a lancé une campagne d’information sur le travail en ligne et le télétravail, le
                                                                er
10 décembre 2007. Cette campagne, effective jusqu’au 1 septembre 2008, avait pour objectif de
présenter le télétravail comme une modalité flexible d’organisation du travail. Des articles en ligne
– étayés par des statistiques et des études récentes – présentaient les atouts du télétravail et son impact
sur la productivité, la qualité de vie au travail, le développement régional et l’environnement. » Source :
Mission économique d’Helsinki.


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infrastructures numériques (fibre optique, réseaux hertziens, etc.). Les télécentres ont
également été développés dans plusieurs pays. Dès les années 1980, les premières
expériences de bureaux satellitaires ont eu lieu au Japon (bureaux de NEC et NTT
dans la ville de Kichijoji dès 1984). Par la suite, dans les années 1990, des télécentres
ont été implantés dans les territoires peu peuplés d’Allemagne (programme Bayern
Online sur la période 1996-2000) tandis que l’Autriche disposait aussi de ses Telehaus
ou Telezentrum, accueillant seulement 2 % des télétravailleurs autrichiens. À la même
période, le principe de « telecottages » suédois a essaimé au Royaume-Uni, qui a
compté jusqu’à 200 télécentres organisés en réseau. Plus tard, au début de notre
décennie, des télécentres ont été créés aux États-Unis – de manière informelle dans
les bâtiments publics ou de manière plus structurée autour de Washington D.C. Enfin,
                                                                    1
en 2009, l’Australie a mis en place un réseau de 100 télécentres tandis que la Corée
du Sud étudie le déploiement à partir de 2011 d’espaces mutualisés de travail
administratif intitulés Smart Work Centers. Les télécentres ont parfois connu des
échecs rapides (aux Pays-bas, cessation d’activité du « Your-near-home-office » en
1999 et du projet « D-Office » en 2001) ou ont disparu sous l’effet du développement
des TIC mobiles (exemple des télécentres japonais en zones périurbaines).


              L’exemple du plan japonais pour le développement du télétravail

    Le Japon considère le télétravail comme une réponse à l’accélération du vieillissement
    de sa population, qui devrait compter en 2030 près de 32 % de citoyens de plus de 65
    ans, contre 20 % en 2005. Le gouvernement japonais voit là aussi un moyen d’améliorer
    la flexibilité du marché du travail et de préserver la compétitivité de l’économie, de
    concilier vie professionnelle et vie personnelle (soins d’enfants ou de proches âgés), de
    diminuer les émissions de CO2 et d’aménager le territoire.

    Pour ce faire, le gouvernement japonais (Cabinet Office du Premier ministre) a initié en
    2007 son « plan pour doubler le nombre de télétravailleurs », avec un objectif au niveau
    national (de 10 % de télétravailleurs en 2005 à 20 % en 2010), relayé par les structures au
    niveau régional. Les principaux points de ce plan sont les suivants :
    – mise en place des systèmes de télécommunication ad hoc : développement d’un
      système de télétravail type applicable à plusieurs sociétés ;
    – mise en place d’un environnement réglementaire favorable : amélioration de la
      connaissance du guideline sur le télétravail à domicile, possible révision des standards
      d’application de l’assurance chômage pour les télétravailleurs à domicile, etc. ;
    – développement de la promotion du télétravail : organisation de séminaires, création
      d’un prix aux entreprises introduisant le télétravail, etc. ;
    – soutien du télétravail par catégorie de population :
        • contrats de type contractuel (personne employée) : introduction d’un guide de
           bonnes pratiques sur la sécurité informatique pour le télétravailleur, mise en
           place d’un centre de conseillers pour le télétravail, etc. ;
        • femmes avec enfants : aide à la recherche d’un emploi ; aide dans la création
           d’entreprise ;
        • personnes âgées et personnes issues du baby-boom.



1
  « Le gouvernement du Western Australia a mis en place au début de cette année un réseau de 100 télé-
centres destinés avant tout à fournir un accès à l‘information aux communautés isolées grâce à des
possibilités d’accès par Internet à différents sites des gouvernements fédéral et fédérés. Par extension,
les équipements mis à disposition ainsi que les accès à Internet peuvent être utilisés à des fins
commerciales en pratiquant notamment le télétravail. » Source : Mission économique de Canberra.



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Source : Japan Cabinet Office, Mission économique de Tokyo, analyse CAS




3.2. Les télécentres ont un rôle à jouer dans les zones périurbaines
     et rurales, à condition que les initiatives prennent en compte
     les besoins des utilisateurs locaux

Les projets de télécentres datent des années 1980

Les premiers projets de télécentres remontent aux années 1980 et sont le fait des
entreprises japonaises du secteur des TIC (NEC, NTT). En France, dès les années
1990, le télétravail a été imaginé comme un outil d’aménagement du territoire : la
DATAR a ainsi lancé son premier appel d’offres pour la création de télécentres en
1990, suivi d’un deuxième en 1992, puis d’un troisième en 1993. En 2005, la DIACT a
émis un appel à projets visant à soutenir la création par les collectivités territoriales de
100 télécentres en deux ans.

Dans l’ensemble, les télécentres français ont connu un succès mitigé

À l’étranger, les télécentres mis en place dans les années 1990, que ce soit au
Japon, en Allemagne, en Autriche ou au Royaume-Uni, ont disparu : à mesure que
les ménages s’équipaient en TIC à domicile, la valeur ajoutée des télécentres
« traditionnels », ne proposant qu’un accès à l’Internet, s’est progressivement réduite.
Il semblerait que seuls les télécentres états-uniens – en nombre très restreint et
                                                            1
réservés aux fonctionnaires dans leur version « officielle » – et français soient encore

1
 Des centres de proximité (« Community Centers »), mis en place à l’initiative des habitants, peuvent faire
office de télécentres « informels » aux États-Unis comme au Canada ; ils se trouvent dans des bâtiments
ouverts au public (églises, écoles…).



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en activité. L’Australie et la Corée du Sud développent actuellement un réseau de
télécentres sur leur territoire.

En France, une trentaine seulement de télécentres seraient en fonctionnement en
2009, quand les objectifs initiaux de l’appel à projet de la DIACT de 2005 était de
100, avec mise à disposition de 1 000 postes de travail à l’horizon 2007. Par ailleurs,
                                        1
les espaces publics numériques (EPN) , plus nombreux, semblent rarement réunir les
conditions adaptées au télétravail : taille insuffisante des locaux, configuration en
openspace inadaptée2, solutions informatiques pour le grand public et non
professionnelles, sécurité des systèmes d’information incertaine doublée parfois de
                                                               3
l’impossibilité d’établir des connexions sécurisées de type VPN …

Un soutien aux télécentres nécessite une implication plus forte des pouvoirs
publics, qui doit s’appuyer sur les attentes et initiatives locales

Les télécentres doivent donc être redynamisés (moyens immobiliers et techniques
supplémentaires, formation des personnels, mise en réseau plus importante au niveau
national, actions de promotion) et intégrer les EPN qui satisfont aux critères de la
DIACT. Les zones rurales et périurbaines présentent le potentiel le plus
                                         4         5
important ; les télécentres dédiés (IBM , Regus …), situés en banlieue parisienne,
semblent procurer un service satisfaisant, tout en étant rentables.

Dans les zones rurales, le réseau des accès collectifs aux infrastructures et aux
équipements TIC pourra être revitalisé en vue d’attirer et d’accueillir des
télétravailleurs, dans une logique d’aménagement du territoire et de revitalisation de
zones délaissées. Les cibles sont essentiellement des travailleurs indépendants ou
des TPE. Étant donné les progrès constants en équipement TIC des particuliers et
l’amélioration des infrastructures haut débit, un EPN ou un télécentre ne sera attractif
que s’il apporte une véritable valeur ajoutée.

Dans les zones urbaines et périurbaines, on observe un réel besoin et des attentes
fortes pour des espaces d’accueil de télétravailleurs. C’est notamment le cas dans les
« banlieues dortoirs » d’Île-de-France, qui abritent de nombreux travailleurs ayant des
temps de transport souvent supérieurs à 3 heures par jour. Les avantages de ces
télécentres résident dans l’amélioration de l’emprunte carbone de l’entreprise, dans la
réduction des transports et de la congestion, dans les gains de productivité et sur les

1
  Il faut distinguer les télécentres des espaces publics numériques (EPN) : ces derniers proposent des
activités d’initiation et de formation aux TIC sans disposer toujours des fonctionnalités propres aux
télécentres (salles de réunions, vidéoconférence, etc.). Alors que les EPN (avec le réseau des cyberbases
de la Caisse des Dépôts et Consignations) comprennent environ 4 000 lieux répartis sur l’ensemble du
territoire, les télécentres ne seraient qu’une trentaine.
2
  Le cahier des charges de la DIACT stipule par exemple qu’un télécentre doit disposer de bureaux
fermés d’au moins 9 m².
3
  Virtual Private Network.
4
  IBM France, refusant la logique du télétravail entièrement à domicile, a mis en place depuis une dizaine
d’années sept télécentres dédiés à l’entreprise (entre 50 et 100 postes pour télétravailleurs nomades),
répartis en Île-de-France (Noisy-le-Grand, Marne-la-Vallée, etc.). Ce changement d’organisation a
nécessité un accompagnement des équipes et du management. Le taux d’occupation de ces télécentres
serait d’environ 80 %.
5
  La société privée britannique Regus (chiffre d’affaires de 557 millions de livres, 1 000 centres d’affaires
dans 76 pays et 450 villes, ouverture récente de 112 centres d’affaires pour un investissement de 69,5
millions) propose à Paris et en première couronne 9 télécentres disposant de bureaux individuels, open
space ou partagés, pour la direction, pour les équipes, etc.


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coûts immobilier et fiscaux (relocalisation des sites, exonérations liées aux zones de
développement prioritaire), dans l’amélioration de l’équilibre entre vie privée et vie
professionnelle, ou encore dans l’augmentation des revenus potentiels des zones de
développement prioritaire.

Une initiative ambitieuse telle que le projet ELMUT du Conseil général de l’industrie,
                                                                                         1
de l’énergie et des technologies (CGIET) pourrait également être examinée . Les
bonnes pratiques dans les télécentres existants pourraient être identifiées afin d’être
                                                                                       2
dupliquées sur l’ensemble du territoire. À ce titre, les télécentres du Vercors et du
      3
Cantal représentent des exemples intéressants. Dans tous les cas, des études de
faisabilité poussées, prenant en compte les besoins locaux, seraient à mener en
amont, à l’initiative des collectivités territoriales, en partenariat avec les élus locaux.

3.3. La crise économique et la pandémie grippale peuvent constituer
     deux leviers conjoncturels, puissants et inédits, au développement
     à long terme du télétravail

Face à la crise économique, de nombreuses entreprises et administrations
cherchent à réduire leurs dépenses

Confrontées au besoin de réduire leurs frais de fonctionnement, les entreprises ont
recours au télétravail pour diminuer les déplacements des collaborateurs (classes
affaires des compagnies aériennes, etc.) et les charges immobilières.

Un passage efficace en télétravail dépend fortement des secteurs et des pays. Ainsi,
Cisco aurait déjà atteint un fort taux de vidéoconférence (jusqu’à 30 % des colla-
borateurs) et aurait réduit de près d’un tiers les frais de déplacement en avion de ses
collaborateurs.

Reste à savoir si ces situations perdureront après la crise économique. Il existe
peu de précédents puisque seules quelques crises nationales ou régionales (2001 en
Asie après l’éclatement de la bulle Internet) ont eu lieu depuis la démocratisation du
télétravail. Une mise en place précipitée du télétravail risque d’avoir les effets
inverses de ceux escomptés, surtout s’il est subi. Les gains à court terme de
charges immobilières et de transport pourraient être annulés par des pertes à moyen
terme (départs de collaborateurs, « relocalisation » après un conflit social). D’où la
nécessité, lorsque le télétravail est envisagé, de s’inspirer, même en cas d’urgence,
des bonnes pratiques.

Durant la pandémie grippale, la continuité de l’activité économique pourrait
passer partiellement par le télétravail

Les coûts économiques de la grippe H1N1 sont estimés à plusieurs dizaines de
milliards d’euros. Or, dans une telle situation de pandémie grippale, le télétravail fait

1
  Le projet ELMUT (Espaces locaux mutualisés de télétravail en 2012) vise à créer 10 000 espaces
adaptés au télétravail. Ceux-ci disposeraient des infrastructures sécurisées de haute qualité (salles de
téléréunions avec téléprésence, très haut débit), seraient aptes à recevoir des agents publics ou privés
selon un mode de réservation simple. 10 000 e-apprentis seraient chargés de faire fonctionner ces centres.
2
  www.centresdappels.vercors.org/Economie/telespace-vercors.html.
3
  www.cybercantal.fr/438/telecentres-cybercantal-presentation-information-teletravail-teletravailleur-
cybertravailleur.html.



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partie des outils permettant d’assurer la continuité de l’activité économique. Suite à
l’ouragan Katrina, les États-Unis ont mis en place un « Plan de continuité de
l’activité économique et des opérations » destiné aux agences fédérales, arguant
qu’on « ne peut pas estimer à quel point la continuité de l’activité économique est
importante ». Les pouvoirs publics de nombreux autres pays – Belgique, France par
exemple – ont ainsi informé la population et les entreprises sur la possibilité de
recourir au télétravail.

De fait, de nombreuses entreprises et administrations sont contraintes de passer
au télétravail pour assurer leur activité. Des entreprises du secteur des télécommu-
nications font ainsi de la grippe A un argument de vente pour des solutions de
télétravail (clé 3G avec connexion illimitée de quelques mois), en espérant que les
services vendus à cette occasion seront maintenus par la suite. Si les grandes
entreprises disposent des ressources internes pour mettre en place le télétravail (DRH,
juristes, DSI), certaines organisations de plus petite taille semblent également prêtes à
                                                                         1
l’adopter, même si en 2009 seules 6 % des TPE/PME le pratiqueraient .

Comme pour la crise économique, on ne dispose d’aucun précédent sur la pérennité
d’un télétravail mis en place pour cause de pandémie. Suite à la grippe aviaire de
2004, un plan de lutte a été mis en place et s’est traduit par la circulaire DGT 2007/18
du 18 décembre 2007. Cette épidémie n’ayant pas touché la France, il est impossible
de prévoir avec certitude si la grippe A contribuera à développer le télétravail en
France. Toutefois, aucune des entreprises interrogées dans le cadre de l’étude n’a
évoqué la réintroduction des plans de continuité d’activité mis sur pied au moment de
la grippe aviaire.


3.4. Le « retour sur investissements » du télétravail est maximal
     sous certaines conditions

Le pic de productivité est atteint lorsque le télétravail est pratiqué entre un
et deux jours par semaine
                                                                    2
Une étude menée par le Danish Technological Institute montre que l’introduction
d’une part de télétravail à domicile augmente la productivité totale de l’employé.
Cette productivité est optimale pour 13 jours de télétravail par mois mais diminue
ensuite pour retomber, au-delà d’un certain seuil de jours, au-dessous du niveau de
productivité sans télétravail (figures n° 16 et n° 17).




1
  Cabinet Adwise, « Les TPE-PME et le télétravail », étude réalisée pour le compte de Keyyo Business,
septembre 2009. L’enquête, réalisée par téléphone, a porté sur un échantillon de 501 décisionnaires en
TPE/PME.
2
  Danish Technological Institute, Labour Productivity and Teleworking, mai 2005.



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Figure n° 16 : Productivité en fonction du nombre de jours
                                        télétravaillés par mois




                    Base 100 = Travail au bureau
                                                    110

                      Productivité du télétravail
                                                    105

                                                    100

                                                     95

                                                     90

                                                     85

                                                     80
                                                          0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30
                                                              Nombre de jours télétravaillés par mois
                                                                          Source : Danish Technological Institute, analyse Roland Berger




                                                 Figure n° 17 : Évolution de la productivité
                                            en fonction de la part du temps passé en télétravail

                                                                             Zone de productivité
                                                                             supérieure au travail
           Productivité                                                      traditionnel                     Productivité

                                                                             Niveau maximal de productivité

                                                                             Produ
                                                                                  c   tivité to
                                                                                                ta   le
       Niveau de
     productivité                                                                                                        Zone de productivité
normal au bureau                                                                                                         moindre que travail
                                                                                                                         traditionnel
                                                                          margina   le bureau
                                                             Productivité


                                                             Produc
                                                                    tivité m
                                                                            arginale
                                                                                     domic   ile




 0% au domicile                                     Mix bureau-domicile optimal                                    100% au domicile
100% au bureau                                                                                                     0% au bureau

                                                                          Source : Danish Technological Institute, analyse Roland Berger




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Les gains financiers sur les charges immobilières ne sont significatifs qu’à partir
d’un certain seuil de télétravailleurs tandis que les autres gains, probablement
plus importants, sont difficilement quantifiables

Au-dessous d’un certain seuil de télétravailleurs, les gains immobiliers semblent
négligeables, puisque la libération de quelques postes dispersés ne permet pas de
fermer une unité de travail entière.


     Figure n° 18 : Exemple d’économies de charges immobilières, selon certaines
                  hypothèses* (en pourcentage des coûts immobiliers)

      Gains
                                                                                     2 jours de
       40%                                                                           télétravail
                                                                                     par semaine
                                                               ue
                                                            riq
                                                        h éo
                                                      st
                                                    Ca
       20%                                                                           1 jour de
                                                                     e               télétravail
                                                          thé   oriqu
                                                      Cas                            par semaine



                             25                50                75           100
                                                                  Part des salariés
                                                                  en télétravail [%]
(*) Dans le cas n° 1 (courbe bleue), on suppose que 100 % des salariés sont en télétravail 1 jour par
semaine et sont présents dans les locaux de l’entreprise les 4 jours restants. Dans le cas n° 2 (courbe
jaune), on considère que 70 % des salariés sont en télétravail 2 jours par semaine et sont présents dans
les locaux de l’entreprise les 3 jours restants. Dans les deux cas, on suppose que les jours télétravaillés
sont répartis de façon homogène entre les salariés et entre les jours de la semaine (c’est-à-dire qu’il n’y a
pas un jour où aucun salarié n’est là).
                                                                            Source : analyse Roland Berger



Ainsi, selon certaines hypothèses assez fortes, on peut montrer que la mise au
télétravail de 100 % des salariés, à raison de 1 jour par semaine, engendre une
économie de coûts immobiliers de 20 % maximum, contre 28 % maximum lorsque
70 % des salariés télétravaillent à raison de 2 jours par semaine.

Il existe d’autres gains pour l’employeur, difficiles à estimer précisément car propres à
chaque organisation. Le télétravail réduit en effet l’absentéisme, augmente la
productivité et dans certains cas la créativité des collaborateurs. Plus satisfaits de
leurs conditions de travail, ils sont plus motivés pour exercer leurs fonctions.




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4. Les facteurs de développement et les cinq facteurs clés
   de succès d’un projet de télétravail

Comme pour les freins, on peut procéder à partir des auditions effectuées à une
analyse des facteurs de développement du télétravail (tableau n° 17).


                 Tableau n° 17 : Analyse des principaux facteurs de développement du télétravail

                                Volonté politique de l’Europe (ACE 2002…)
    JURIDIQUE

    POLITIQUE




                                Pression politique en faveur d’une organisation du travail plus souple
       ET




                                Prise en compte du télétravail comme élément favorable d’une politique de
                                développement durable
                                Aspiration sociétale forte pour un meilleur équilibre entre vie privée et vie
                                professionnelle
    CULTUREL
    ET SOCIAL




                                Globalisation des entreprises et croissance du travail en équipe multi-sites
                                « Buzz » médiatique autour du télétravail et lobbying des réseaux et
                                groupes de télétravailleurs dans le monde
                                Impact favorable sur le pouvoir d’achat
                                Développement rapide des TIC
    ÉQUIPEMENT




                                Investissements dans les infrastructures haut débit comme élément de la
                                politique d’aménagement du territoire
                                Croissance de l’Internet haut débit dans les foyers
                                Baisse du coût total des équipements nécessaires au télétravail
                                Prise de conscience des avantages liés au télétravail
    MANAGEMENT




                                Communication sur le télétravail en tant qu’avantage concurrentiel
                                Développement d’une politique RH globale favorisant le bien-être au travail
                                Utilisation du télétravail comme outil de réorganisation de l’entreprise

                                                                               Source : entretiens, analyse Roland Berger


L’examen des facteurs de développement ci-dessus, doublée de l’analyse croisée du
télétravail en France et à l’étranger, ainsi que dans le secteur privé et la fonction
publique, fait apparaître in fine cinq facteurs clés de succès dans sa mise en œuvre
                                           1
et sa pratique, que des bonnes pratiques viennent compléter.




1
                  Rôle faible        Rôle important.



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Facteur clé n° 1 : Produire un effort important en matière de communication
envers les employés et le management
Effort de communication
• Plan de communication interne
• Organisation de retours d'expérience de la part des
    télétravailleurs du "pilote"
• Brochure sur les droits et devoirs du télétravailleur et du
    manager
• Sponsor DG
• Échange des pratiques entre entreprises (retour sur
    expériences)

Le but du plan de communication est de faire connaître le télétravail en mettant
notamment l’accent sur la compatibilité de sa pratique avec la dynamique des
équipes et les avantages réels pour les salariés. Le soutien de l’institution doit être
visible et exprimé pour signifier un a priori positif aux managers et démontrer que le
télétravail est une pratique « normale ». Le télétravail pâtit généralement d’un décalage
entre l’idée que s’en font les salariés et managers et la réalité de sa pratique.
S’appuyer sur des exemples concrets (retours d’expérience d’autres entreprises et
des pilotes) permet de donner un aperçu réaliste de ce qu’est le télétravail et de
rétablir des idées reçues erronées. L’édition d’une brochure concourt également à
ancrer le télétravail dans le concret de sa mise en œuvre matérielle et à se défaire
d’une vision idéalisée.

Facteur clé n° 2 : Faire évoluer le mode de management en passant notamment
du concept de « management présentiel » à celui de « management par objectifs »
Nouveau modèle de management
•  Mode de management par objectif
•  « Espaces » d’échanges prévus à l’avance ou systématiques
•  Développement d’une confiance réciproque entre le manager
   et ses équipes
•  Trouver le bon équilibre entre les jours de présence au bureau
   et les jours télétravaillés
•  Assurer la présence impérative du télétravailleur lors des
   principaux événements / réunions de l’entreprise
•  Surveiller les évaluations du télétravailleur pour lui éviter d'être
   pénalisé
•  Prise en considération par le management des situations de
   télétravail d'une partie de l'équipe


Le télétravail n’est un mode de travail efficace, et dont les salariés et les organisations
tirent les pleins avantages, que lorsqu’il s’inscrit dans un mode de management
moderne. Pouvoir quantifier et suivre le travail effectué par les salariés, et fixer des
objectifs en laissant un degré de liberté pour les atteindre permet d’introduire de la
flexibilité au travail. Pour cela, la confiance et un cadre propice aux échanges sociaux
dans l’équipe sont nécessaires. Il faut assurer la présence concomitante des membres
d’une équipe, et l’intégration du télétravailleur à la vie de l’équipe (réunions) même en
dehors des échanges purement productifs (événements de l’entreprise).




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Facteur clé n° 3 : Investir dans un équipement informatique et dans l’ergonomie
du poste de travail à domicile
Équipement adapté
•  Équipement suffisant
•  Bonne ergonomie de l’espace de travail
•  Adaptation du logement dans le cas de télétravail à domicile
   (logements "salubres")
•  Visite de l'entreprise au domicile (si le collaborateur le
   souhaite)
•  Conditions de prise en charge


Le télétravail s’appuie par définition sur l’usage de matériel informatique. Celui-ci doit
être performant et fiable pour permettre de travailler dans des conditions correctes.
Dans les cas de travail à domicile, l’organisation doit s’assurer que l’environnement de
travail est conforme à la réglementation et aux standards en place dans l’entreprise.
Cette vérification permettra à l’employeur, en cas d’accident ou de panne, d’être
couvert et de limiter le risque juridique couru. L’équipement en mobilier ergonomique
d’un espace dédié pendant les heures de travail à l’activité professionnelle permet
notamment au salarié de « se sentir au travail ». Différents niveaux de prise en charge
de ces points par l’employeur existent, le plus important étant de spécifier clairement
les conditions appliquées lors de la mise en place du télétravail.


Facteur clé n° 4 : Disposer d’un cadre légal pragmatique
Cadre légal pragmatique
•  Outils faciles à utiliser (e.g. contrats types)
•  Cadre réglementaire clair (périmètre de responsabilité de
   l’entreprise)
•  Illustrations et cas (benchmark et études : résultats et impacts)
•  Accord avec les IRP
•  Charte du télétravailleur et de son manager


Les pays étudiés ne font pas mention du télétravail dans leur Code du travail. Le cadre
qui s’applique est celui des accords collectifs, lorsqu’ils existent. L’apport du cadre
légal dans le développement du télétravail est de préciser de façon pragmatique les
points durs pouvant constituer des sources d’incertitude, par exemple le périmètre de
responsabilité de l’employeur en cas d’accident du travail ou de sinistre au domicile.
Des études de cas précisant la démarche à suivre dans les cas de litige les plus
courants posent un cadre rassurant pour les responsables d’entreprises. De plus, la
mise en œuvre du télétravail est grandement facilitée, surtout pour les petites
entreprises, par l’existence de formulaires types clairs et faciles à utiliser pour établir
les avenants au contrat de travail, les accords d’entreprise et des chartes de bonne
conduite.




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Facteur clé n° 5 : Cibler les activités susceptibles d’être réalisées en télétravail
 Bon ciblage de la population
 •  Sélection des profils (niveau d’expérience et d’ancienneté dans
    la société, personnalité, etc.)
 •  Analyse des fonctions et tâches adaptées au télétravail
 •  Effort de formation adapté
 •  Effort d'explication vis-à-vis du management et du salarié


L’analyse de la télétravaillabilité est essentielle pour garantir la réussite de ce mode
d’organisation. En effet, il faut au préalable s’assurer que les tâches à accomplir se
prêtent à ce mode d’organisation et que la personne qui les accomplit soit capable de
travailler dans ces conditions. Il convient donc d’établir des critères de
télétravaillabilité des tâches et des fonctions et cibler les salariés qui, par leur
intégration dans l’entreprise, leur autonomie au travail et leur personnalité sauront
télétravailler avec succès. Lorsque le passage au télétravail d’un employé a été
décidé, un effort de formation doit être fait pour veiller à sa maîtrise des outils
informatiques nécessaires (notamment pour la sécurisation des données) et surtout
pour assurer le bon fonctionnement de l’équipe : le manager et le salarié doivent être
formés à ce nouveau mode d’interaction.

A contrario, les entreprises choisissant de pousser une politique de développement du
télétravail peuvent faire preuve d’une grande créativité et mettre en œuvre ce mode
d’organisation du travail au sein de populations qui a priori en semblaient exclues.

Ces cinq facteurs clés permettent d’identifier les leviers à actionner par la puissance
publique. Les recommandations suivantes en sont donc largement inspirées.




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Depuis une dizaine d’années, le télétravail se développe moins rapidement en France
que dans de nombreux pays de l’OCDE. Pour surmonter les blocages spécifiques à
notre pays, le Parlement a élaboré une proposition de loi que le secrétariat d’État à la
Prospective et au Développement de l’Économie numérique a souhaité soutenir en
adressant au Centre d’analyse stratégique une saisine portant sur l’étude des abus
recensés à l’étranger en la matière.

Des consultations et des auditions réalisées, il ressort que le développement du
télétravail est moins contraint par la technologie et le cadre juridique que par des
blocages organisationnels liés au manque d’information et de formation des employés
comme des dirigeants. L’analyse fait émerger sept messages clés.
1. Depuis au moins dix ans, la France est en retard sur les principaux pays de
   l’OCDE, en particulier pour le télétravail dans l’administration. Les principaux
   leviers ne sont pas d’ordre juridique : évolution de la culture managériale et de
   l’organisation du travail, meilleure connaissance des avantages permis par le
   télétravail, besoin d’infrastructures numériques à haut débit symétrique, diffusion
   et formation aux TIC.
2. Le télétravail – et plus généralement les TIC – bouleverse les relations de travail
   (concepts de lieux et de temps de travail, nature du travail intellectuel, nature du
   lien de subordination, etc.). Le télétravail participe à la flexibilité du travail, avec
   une efficacité maximale s’il est pratiqué un à deux jours par semaine.
3. Le télétravail doit bénéficier de la règle du double volontariat et de la confiance
   entre les parties plutôt que d’un cadre juridique trop contraignant.
4. La proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale constitue un socle propice
   au développement du télétravail. Une clarification pourrait toutefois intervenir
   sur la présomption d’accident du travail et sur la prise en charge de
   l’assurance.
5. Le télétravail est susceptible de concerner potentiellement jusqu’à 40 % ou 50 %
   des emplois à 10 ans.
6. Dans aucun des pays de l’OCDE étudiés n’ont été rapportés des exemples de
   télétravail subi lors d’un congé maternité, d’un arrêt maladie ou accident du
   travail ; aucun pays n’a légiféré spécifiquement sur ces sujets. Toutefois, le
   télétravail peut être source de progrès social avant et/ou après le congé maternité.
   Par ailleurs, pour certaines maladies, en accord avec l’entreprise et si le salarié le
   souhaite, il pourrait être envisagé de réfléchir à un certificat médical d’aptitude




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au télétravail, délivré par un médecin, permettant au salarié de poursuivre son
    activité.
7. Le télétravail n’est pas spontanément évoqué comme moyen de favoriser
   l’emploi des seniors, ni en France ni à l’étranger (manque de formation aux TIC,
   besoin pour les retraités de se socialiser par le travail).

De ces analyses sont issues dix-neuf recommandations, déclinées parfois en
plusieurs mesures et réparties selon quatre axes principaux. La promotion du
télétravail est un des axes majeurs car les actions de sensibilisation contribuent à faire
évoluer les mentalités au sein des organisations. Le déploiement des infrastructures
numériques et la diffusion des technologies sont des prérequis à l’essor du télétravail ;
toutefois, aucune recommandation n’a été émise sur le thème des infrastructures, qui
n’entre pas dans le cadre de ce rapport.




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AXE 1 : Promouvoir le télétravail et former les acteurs

Cet axe est essentiel au développement du télétravail. Les actions de communication
et de promotion font connaître ses avantages auprès de l’ensemble des acteurs ; elles
renforcent également l’effectivité du droit. La formation permet de surmonter les
blocages pratiques – psychologiques, techniques et organisationnels – liés à la mise
en place du télétravail.


1. Communiquer auprès du grand public

        Constat
        La France est en retard par rapport aux autres pays de l’OCDE dans la mise en œuvre
        et même dans la connaissance des possibilités offertes par le télétravail (voir les
        chiffres de l’enquête SIBIS de 2002). Or la demande de télétravail émane souvent des
        salariés, et non de la hiérarchie, qui y voit un sujet complexe, non prioritaire, pour
        lequel elle est peu formée. Il faut donc améliorer la sensibilisation à destination des
        salariés, qui initient les projets de télétravail, et des dirigeants, pour éviter qu’ils ne les
        bloquent.

        Mesures

    1           Promotion du télétravail par des actions de communication :
                o   campagne de communication grand public sur les possibilités du
                    télétravail ;
                o   campagne de communication ciblée sur certains secteurs et catégories
                    de salariés identifiés dans le rapport (ruraux, seniors, métiers à fort
                    potentiel de télétravail, jeunes parents, etc.) ;
                o   lisibilité des offres d’emplois en télétravail (Pôle Emploi, Maisons de
                    l’emploi, sites professionnels de recrutement) ;
                o   initiative nationale « un jour par semaine, je travaille chez moi ».


        Exemples

        Durant les années 1990, de nombreux pays ont assuré la promotion du télétravail
        auprès du grand public. L’Allemagne a mis en place les campagnes « Initiative
        Télétravail », « Télétravail pour les grands invalides » ou « Télétravail dans les PME ».
        Dans le cadre de sa stratégie numérique de 2007 (« New IT Reform Strategy »), le
        gouvernement japonais a également assuré la promotion du télétravail auprès de la
        population. Plus récemment, en 2009, la Finlande envisage de lancer une nouvelle
        campagne nationale d’information sur ce thème1, après une première campagne
        menée entre décembre 2007 et septembre 2008 qui avait présenté le télétravail
        comme une modalité flexible d’organisation du travail.




1
 Turku School of Economics, Better Job Satisfaction Through Quality of Work Life – How Can Telework
Help?, rapport au ministre de l’Emploi et de l’Économie, avril 2009.


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2. Tenir une conférence de haut niveau sur le télétravail, fortement soutenue
   par les pouvoirs publics, afin de sensibiliser les cadres dirigeants
   et l’encadrement intermédiaire

         Constat
         L’implication des pouvoirs publics est un élément indispensable pour développer le
         télétravail. Ce constat de Pierre Morel-à-L’Huissier1, qui date de 2006, est toujours
         d’actualité. En France, par comparaison avec les pays les plus en pointe, le télétravail
         n’a pas toujours bénéficié d’un engagement fort et pérenne de la part des pouvoirs
         publics. L’encadrement intermédiaire apparaît souvent réticent à adopter les projets de
         télétravail suggérés par les salariés. Dans le même temps, l’impulsion initiale à la mise
         en place du télétravail provient rarement de la hiérarchie : il n’est pas considéré
         comme une priorité car il est rarement source de bénéfices opérationnels à court
         terme.

         Mesures

    2             Conférence de haut niveau regroupant les partenaires sociaux et les
                  décideurs (élus, PDG, DRH, DSI, directeurs d’administration, etc.), accompa-
                  gnée d’une forte implication des pouvoirs publics (présidence par une
                  personnalité politique de premier rang). Le télétravail pourrait par exemple
                  ouvrir une conférence portant plus généralement sur les mutations du monde
                  du travail face à la crise économique.
                  Sensibilisation de l’encadrement intermédiaire et des élus (gestion des
                  administrations territoriales) aux questions du télétravail, éventuellement dans
                  le cadre d’une sensibilisation plus large (droit du travail et droit des TIC,
                  flexibilité du travail).
                  o    Implication des associations et syndicats professionnels (CIGREF, G9+,
                       AFEP, APEC, MEDEF, club de dirigeants, etc.) et séminaires au
                       Parlement ;
                  o    Présentation des gains opérationnels possibles à moyen et long terme
                       (augmentation de la productivité, diminution de l’absentéisme, etc.).

        Exemples

        Au Japon, dans le cadre de la « New IT Reform Strategy » de 2007, des séminaires et
        symposiums internationaux ont été organisés pour promouvoir le télétravail. Des
        études de cas et des guides de bonnes pratiques ont été présentés aux décideurs. En
        Suède, des séminaires ont eu lieu entre 1996 et 2004 dans le cadre d’une plate-forme
        d’échanges sur le télétravail.


3. Créer un site web institutionnel sur le télétravail exploitant tout le potentiel
   du web 2.0 et de l’interactivité

         Constat
         De l’avis de la plupart des experts, les cadres juridique et technique actuels sont
         suffisants pour la mise en œuvre du télétravail. Toutefois, des blocages culturels sub-
         sistent, entretenus par l’absence de source d’information de référence sur le télétravail2.


1
 Pierre Morel-à-L’Huissier, Du télétravail au travail mobile, rapport au Premier ministre, 2006.
2
 Actuellement, les sources d’information relatives au télétravail sont éparpillées et de qualité diverse, ou
à fins commerciales.



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Mesures
   3            Création d’un site de référence sur le télétravail, aux fonctionnalités
                classiques (information juridique, guides de bonnes pratiques, forum,
                exemples de contrat de travail type, FAQ) et avancées (hotline, calculateur en
                ligne des coûts-bénéfices du télétravail pour l’organisation, interaction Web
                2.0, simulations par monde virtuel, voire e-formation au télétravail utilisant des
                jeux sérieux).
        L’élaboration d’un tel site pourrait être confiée à un service de l’administration (SIG…)
        ou à une association (AFTT, ANDT…) recevant délégation de service public. Un appel
        d’offres (du type « plates-formes web 2.0 ») pourrait être un outil pertinent.


        Exemples
        De tels sites existent à l’étranger :
        www.telework.gov ; www.telework.net.au, www.telewerkforum.nl, www.ework.ie...

         Bonnes pratiques étrangères                            Caractéristiques possibles
                                                                 de www.e-travail.gouv.fr

                                                       • Fonctionnalités classiques : présentation du
                                                       télétravail pour les employés, managers intermé-
                                                       diaires, cadres dirigeants, salariés indépendants
                                                       (secteurs privé et public) ; FAQ sur le télétravail ;
                                                       publications classées par thèmes (organisation,
                                                       aspects juridiques, technologies) avec actualités
                                                       hebdomadaires ; bibliographie aussi complète
                                                       que possible…
                                                       • Fonctionnalités avancées : recherche, forums
                                                       et zone de témoignage, sondages en ligne,
                                                       hotline gratuite (orientation vers des experts,
                                                       conseils élémentaires, etc.), carte interactive (coor-
                                                       données des télécentres, des experts du télé-
                                                       travail, des correspondants syndicaux ou en
                                                       entreprise sur le télétravail, etc.), « calculateur en
                                                       ligne des bénéfices » liés au télétravail, en fonction
                                                       de divers paramètres (nombre d’employés, surface
                                                       de bureau, activité…) et donnant les différents
                                                       types de bénéfices (gains immobiliers, réduction
                                                       des émissions de gaz à effet de serre…), modules
                                                       de formation en ligne (exposé et vérification des
                                                       connaissances, jeux sérieux…).
                                                       • Site multilingue (français, anglais, allemand,
                                                       espagnol…) pouvant servir de vitrine commerciale.




4. Former l’ensemble des acteurs au télétravail

        Constat

        Le télétravail ne fonctionne que si la confiance est instaurée entre employeur et
        employé. Quand bien même l’encadrement intermédiaire et les cadres dirigeants
        seraient convaincus de l’intérêt du télétravail, ils ne sont pas toujours formés aux
        enjeux juridiques, technologiques ou organisationnels associés. Cela s’explique
        notamment par des lacunes sur les thèmes managériaux dans les formations initiales.
        De même, les salariés qui souhaiteraient télétravailler n’ont pas toujours les arguments
        pour convaincre leur supérieur hiérarchique ni la formation pour télétravailler



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efficacement. Il s’agit donc de proposer des modules ou kits de formation à l’ensemble
        des acteurs, en s’appuyant autant que possible sur les structures existantes.

        Mesures

   4            Mise en place de diverses offres ou kits de formation destinés à tous les
                acteurs de l’organisation potentiellement concernés par le télétravail :
                o formation professionnelle pour les dirigeants, en particulier les DRH et les
                    DSI : modules d’e-apprentissage (web 2.0, jeux sérieux…), kits de
                    formation, modules de sensibilisation aux nouvelles méthodes de
                    management dans les universités et/ou les écoles d’ingénieurs et de
                    management ;
                o formations spécifiques pour les salariés ou les auto-entrepreneurs,
                    adaptées aux différents publics (seniors…), par exemple dans le cadre du
                    CIF ou du DIF. En pratique, de telles formations peuvent revêtir plusieurs
                    formes et/ou avoir plusieurs supports : modules de e-learning (par
                    exemple sur le site www.e-travail.gouv.fr), kits de formation, ajout d’un
                    thème « télétravail » dans l’offre de formation du « passeport pour
                    l’économie numérique » du CEFAC et/ou des CCI, ajout d’un module
                    « télétravail » dans certains stages de perfectionnement transversaux de
                    l’AFPA, etc. Un constat des compétences informatiques nécessaires au
                    salarié pour télétravailler pourrait être réalisé par des organismes
                    spécialisés dans la formation professionnelle ou par le Passeport de
                    compétences informatiques européen (PCIE) ;
                o formation pour les inspecteurs du travail, les conseillers de prud’hom-
                    mes et les instances représentatives du personnel, notamment pour
                    diffuser le cadre juridique du télétravail et pour leur donner les moyens
                    d’accompagner les salariés dans leurs démarches ou leurs litiges ;
                o un « quota » de formation au télétravail pourrait éventuellement être
                    intégré dans le taux de participation de l’employeur au financement de la
                    formation professionnelle.

        Exemples

        Entre 1996 et 2000, le programme Bayer Online du Land de Bavière a conduit à la
        création de télécentres et à des actions de formation. Le Japon a ciblé les travailleurs
        indépendants et les personnes handicapées pour ses actions de formation
        professionnelle.



5. Éditer des guides de bonnes pratiques

        Constat

        Les organisations, en particulier celles de petite taille, sont parfois démunies lors de la
        mise en place pratique du télétravail.

        Mesures

   5            Édition de guides de bonnes pratiques destinés aux entreprises et aux
                administrations, s’inspirant des guides français et étrangers existants. Ces
                guides seraient diffusés le plus largement possible (Maisons de l’Emploi et
                Pôle Emploi, CCI, partenaires sociaux).



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Exemples

        De nombreux guides de bonnes pratiques existent, en France comme à l’étranger :
              « Code of Practice » en Irlande ;
              Guide de la Belgian Telework Academy ;
              Guide du télétravail dans la fonction publique, DGAFP, 1998 ;
              Guide pratique du CATRAL de 1999.

        Ils pourraient inspirer un guide de référence sur un site institutionnel consacré au
        télétravail.




AXE 2 : Assurer une bonne gouvernance

La gouvernance doit s’entendre comme la « structuration » des acteurs de
l’organisation et des relations qui les lient. Une bonne gouvernance est importante
lorsqu’il s’agit de mettre en pratique efficacement le télétravail.


6. Inscrire le télétravail comme un des critères de la responsabilité sociale
   des entreprises (RSE) et mettre en place un « label du télétravail »

        Constat

        Les critères environnementaux et sociaux sont des éléments importants de l’image des
        entreprises. À moyen terme, la RSE pourrait être de plus en plus prise en compte par
        les investisseurs pour évaluer la valeur ou la performance d’une entreprise et par les
        meilleurs candidats au recrutement pour choisir leur entreprise.


        Mesures

   6            Inscription du télétravail comme un critère dans la responsabilité sociale
                des entreprises, selon certains indicateurs :
                o per se (part de télétravailleurs dans l’entreprise et leurs caractéristiques,
                    régularité et qualité des initiatives de l’entreprise, formation des employés
                    et des employeurs, respect de l’ANI/de la loi…) ;
                o comme moyen de réduire les émissions de gaz à effet de serre (impacts
                    du télétravail sur le bilan CO2 collectif et individuel…) ;
                o comme instrument de soutien aux populations les plus fragilisées face
                    l’emploi (handicapés, seniors…).
                Mise en place d’un « label du télétravail », pouvant s’inspirer des bonnes
                pratiques étrangères, qui serait attribué aux organisations exemplaires en
                termes de télétravail.




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7. Créer un comité de pilotage de haut niveau chargé d’accompagner
   le développement du télétravail en France

        Constat

        Au niveau national, une structure ad hoc pourrait s’assurer du bon déroulement des
        négociations sur le télétravail et identifier les bonnes pratiques1. Il est également
        possible d’attribuer cette thématique au Conseil d’orientation sur les conditions de
        travail (COCT), créé fin 2008.
        Au niveau de l’organisation, l’une des conditions nécessaires à la mise en place du
        télétravail réside en la confiance entre tous les acteurs de l’organisation, qui doivent
        être associés le plus tôt possible au projet de télétravail.

        Mesures

    7            Associer, en amont du projet2, les instances représentatives du personnel
                 (délégués, CE, CHSCT, DS/RS…) et informer les services de l’État chargés de
                 la politique du travail dans les départements. Au niveau national, le sujet du
                 télétravail pourrait être mis régulièrement à l’agenda de la Commission
                 nationale de la négociation collective (CNNC).
                 Mettre en place un Observatoire des pratiques du télétravail, soit au sein du
                 COCT, soit autonome et associant alors les partenaires sociaux, chargé de
                 recenser/propager les bonnes pratiques et identifier les éventuels abus.
                 Annuellement, et éventuellement en partenariat avec la Direction générale du
                 Travail (DGT), cet observatoire pourrait examiner les négociations et accords
                 intervenus sur le télétravail.
                 Désigner un représentant interne à l’organisation chargé des questions liées
                 au télétravail, notamment celles portant sur le Code du travail et le Code de la
                 sécurité sociale.
                 Négocier un contrat d’engagement des syndicats d’employeurs sur la
                 promotion du télétravail dans les entreprises.


        Exemples

        Dans de nombreux pays étrangers, les guides de bonnes pratiques édités par les
        syndicats ont été repris par les acteurs de terrain.
        Aux Pays-Bas, les premières négociations sur le télétravail (PC-privéregeling 1998)
        ont eu lieu sous l’égide d’une organisation paritaire de droit privé regroupant les
        trois principaux syndicats d’employeurs et d’employés.


8. Développer le télétravail dans la fonction publique

        Constat

        Le télétravail est une thématique transversale pour l’État, impliquant le MINEFE/Budget,
        la DGAFP, voire le ministère du Travail… De fait, et bien que les chiffres manquent

1
  À l’image du comité de pilotage qui a été créé dans le cadre du Plan national d’action concertée pour
l’emploi des seniors 2006-2010.
2
  En 2004, le Forum des droits sur l’Internet suggérait de considérer un projet de télétravail comme un
« projet important » au sens de l’article L. 432-2 du Code du travail, afin que le CE ou les délégués du
personnel soient obligatoirement consultés sur sa mise en place.



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pour le caractériser, la fonction publique est en retard dans la mise en place du
        télétravail. Pourtant, les gains potentiels en productivité et en bien-être des fonction-
        naires – mais aussi en charges immobilières et en aménagement du territoire – sont
        non négligeables. Conformément au souhait du législateur (art. 11 de la proposition de
        loi adoptée le 9 juin 2009 par l’Assemblée nationale1), une mission pourrait être
        chargée de promouvoir l’essor du télétravail dans la fonction publique.


         Mesures

    8            Mise en place d’une mission « Télétravail dans la fonction publique » :
                 o   pilotée directement par le ministre en charge de la Fonction publique ;
                 o   chargée de rédiger le rapport prévu par le législateur ;
                 o   devant élaborer un plan de déploiement du télétravail, s’appuyant sur
                     quelques indicateurs simples2 permettant de mesurer régulièrement
                     (trimestriellement ou annuellement par exemple) la diffusion du télétravail,
                     ministère par ministère ;
                 o   pouvant dans un second temps être adossée à un programme LOLF3.

        Il ne s’agit donc pas principalement de modifier le statut général de la fonction
        publique mais d’identifier les obstacles et les postes adaptés au télétravail (en se
        basant par exemple sur le Répertoire interministériel des métiers de l’État) pour ensuite
        promouvoir les bonnes pratiques et les projets pilotes. Les initiatives de télétravail dans
        la fonction publique (ministère de l’Éducation nationale, ministère de la Justice,
        Direction générale des impôts…) et les guides existants (DGAFP…) pourraient être pris
        en compte.


        Exemples

        Certains pays ont déjà mené une réflexion à ce sujet :
                aux États-Unis, l’évaluation par l’US Office of Personnel Management4 des
                directeurs des agences gouvernementales fédérales prend en compte les
                indicateurs annuels de performance en télétravail (pourcentage de télé-
                travailleurs dans l’agence…). L’US OPM rend compte annuellement, devant le
                Congrès, des progrès du télétravail dans la fonction publique fédérale ;



1
  Cet article 11 dit en substance : « dans un délai d’un an à partir de la date de promulgation de la
présente loi, le gouvernement présente un rapport au Parlement sur les mesures visant à promouvoir et à
développer le télétravail au sein des administrations publiques ». Le présent rapport du Centre d’analyse
stratégique ne peut se substituer à une telle mission mais peut en préciser les principales lignes
directrices.
2
  De tels indicateurs, à identifier par un groupe de travail, pourraient être, à titre indicatif :
  – évolution du taux de télétravailleurs par rapport au potentiel mesuré ex ante (cf. calculateur en ligne
      des bénéfices du télétravail) ;
  – évolution du taux de « formation » des fonctionnaires aux problématiques du télétravail (enquêtes
      internes, sondages externes…) ;
  – évolution du nombre de télétravailleurs et de référents télétravail nommés au sein de chaque
      ministère ;
  – évolution des résultats des manageurs intermédiaires aux tests de formation en ligne (cf. recom-
      mandation sur le site www.e-travail.gouv.fr qui pourrait héberger des contenus pédagogiques).
Ces indicateurs pourraient être identiques à ceux du secteur privé (inscription dans une charte du
télétravail ou dans la RSE).
3
  Reste à déterminer la faisabilité dudit programme, par exemple au sein des missions « Administration
générale et territoriale » ou « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».
4
  L’US OPM est l’équivalent de la DGAFP aux États-Unis.



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au Japon, 36 mesures ont été imaginées pour développer le télétravail,
                déclinées ministère par ministère ;
                la législation sud-coréenne prévoit des dispositions particulières pour la
                fonction publique ;
                suite à une expérimentation sur quelques centaines de fonctionnaires, l’Espagne
                a mis en place un programme de télétravail pour l’ensemble de la fonction
                publique en 2007.



9. Créer un réseau de « référents du télétravail » au sein des organisations

        Constat

        Le télétravail est un sujet à la convergence de plusieurs métiers et fonctions : DSI pour
        les aspects informatiques et technologiques, DRH pour les aspects juridiques et la
        gestion des personnels, encadrement intermédiaire pour la gestion de la charge de
        travail et des objectifs du salarié, et, enfin, les salariés. Le télétravail ne fait pas partie
        des premières priorités des hauts dirigeants et des personnels d’encadrement : leurs
        objectifs à court terme n’autorisent que peu de temps pour une réflexion sur le travail à
        distance. Une personne de référence chargée de promouvoir le télétravail pourrait
        jouer un rôle d’intermédiaire entre ces acteurs et les décharger de certaines
        responsabilités. Ce réseau permettrait de diffuser les bonnes pratiques et d’identifier
        les points de blocages éventuels.

        Mesures

   9            Désignation encouragée d’un « référent du télétravail » dans les organisa-
                tions, aussi bien publiques (administrations, collectivités locales…) que privées
                (entreprises, associations…) :
                 o    modèle de correspondants existant pour les TIC en entreprises
                      (« correspondants informatique et libertés » de la CNIL…) ;
                 o    rôle de point de contact pour les employés, les cadres dirigeants, les
                      pouvoirs publics (DGT…) ;
                 o    ces « référents » favoriseraient la transversalité entre DSI, RH, unités
                      opérationnelles… ;
                 o    ils seraient structurés en réseau sur l’ensemble du territoire, avec des
                      coordonnées aisément accessibles.

        Exemples
        L’administration américaine a identifié pour chaque agence gouvernementale et/ou
        unité un référent pour le télétravail, dont les coordonnées figurent sur le site web
        institutionnel. Il est chargé de renseigner, identifier et diffuser les bonnes pratiques
        dans l’organisation. À l’interface de plusieurs métiers et/ou fonctions (RH, unités
        techniques, direction générale, DSI…), il promeut le télétravail. Il rend compte au
        directeur général de l’agence – lui-même comptable auprès de l’US Office of Personnel
        Management – de l’avancement du télétravail dans son organisation, selon des
        indicateurs précis.




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10. Créer des médiateurs du télétravail dans les départements

         Constat

         Un salarié victime de pratiques abusives de la part de son employeur (non-respect des
         dispositions de l’ANI, surcharges de travail, déménagement sans proposition de
         télétravail, etc.) peut avoir des difficultés à interpréter les textes juridiques relatifs au
         télétravail. Il n’est généralement pas au fait de la palette de recours à sa disposition
         (IRP, prud’hommes…) et peut en outre être dissuadé de les mobiliser (peur de
         représailles de la part de l’employeur, mauvais conseils d’IRP peu formées sur un sujet
         aussi complexe, etc.).

         Mesures

    10           Désigner un médiateur du télétravail, bien identifié1, dont les prérogatives et
                 les modalités d’intervention seraient à préciser, qui pourrait être saisi pour
                 évaluer, voire régler, les litiges avant toute action devant le conseil de
                 prud’hommes. Avec quelques adaptations, de tels médiateurs pourraient
                 aussi être mis en place dans la fonction publique.
                 Se pose toutefois la question de leur visibilité au sein des organisations – a
                 fortiori pour les télétravailleurs – et de leur périmètre d’action (impossibilité de
                 visiter le domicile du salarié et éventuellement les télécentres…).

         De tels médiateurs existent déjà sur d’autres sujets (European Ombudsman, Médiateur
         de la République, médiateur du crédit, médiateur de l’Éducation nationale et de
         l’enseignement supérieur, médiateur des communications électroniques…).

         Exemples

         La fonction d’Ombudsman existe dans de nombreux pays (Pays-Bas…). Ce médiateur
         peut être exclusivement affecté au règlement de litiges concernant le télétravail ou plus
         généralement aux litiges liés à l’emploi. Son rôle diffère de celui des inspecteurs du
         travail, qui existent également dans de nombreux pays et disposent souvent des
         mêmes prérogatives que leurs homologues français.




AXE 3 : Sécuriser définitivement le cadre juridique du télétravail

L’inscription du télétravail dans la partie législative du Code du travail va concourir à
faire connaître le cadre juridique du télétravail issu de l’extension de l’accord national
interprofessionnel. Pour répondre aux attentes des entreprises pionnières et sécuriser
les salariés, quelques dispositions pourraient venir compléter le dispositif existant. Au-
delà de l’action du législateur, il est nécessaire de développer le dialogue social et la
négociation collective, en particulier dans les entreprises, pour préciser et adapter le
cadre juridique aux situations particulières. Cette palette d’outils normatifs doit être

1
  Les médiateurs pourraient être référencés sur le site www.e-travail.gouv.fr ou tout autre site
institutionnel de promotion du télétravail, mais aussi par des liens sur le site du Médiateur de la
République et des acteurs du télétravail…



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accompagnée par des outils de type soft law (chartes de bonnes pratiques, codes de
bonne conduite…), le télétravail devant demeurer un instrument de souplesse au profit
de l’entreprise et des salariés.



11. Expérimenter la présomption d’accident du travail

         Constat

         Les partenaires sociaux ont des positions opposées sur le thème de la présomption
         d’accident du travail. Les syndicats d’employés estiment qu’elle est nécessaire pour
         rassurer les salariés qui souhaiteraient télétravailler. De leur côté, les employeurs
         considèrent que la présomption aurait pour conséquence une augmentation du
         nombre d’accidents du travail (éventuellement opportunistes) et donc une hausse des
         cotisations des employeurs1. Il est à noter que la plupart des grandes entreprises
         françaises qui ont mis en place le télétravail ont adopté la présomption d’accident de
         travail, de jure ou de facto, sans désagrément apparent.
         Enfin, en 2004, le Forum des droits sur l’Internet préconisait déjà une telle mesure et la
         soutient encore aujourd’hui, tout comme certains spécialistes du télétravail, Pierre
         Morel-à-L’Huissier ou le cabinet spécialisé IDC (étude de septembre 2008 pour le
         compte de l’ADESATT).

         Mesures


    11            Compte tenu des interrogations soulevées par une telle mesure, expérimenter
                  la présomption d’accident de travail (amendement à la proposition de loi).
                   o L’efficacité d’une telle mesure étant discutable, il serait pertinent de mener
                       une phase d’expérimentation avant de la généraliser.
                   o Cette expérimentation devrait être menée sur le fondement de l’article 37.1
                       de la Constitution, pour une durée limitée (trois ans) et sur un périmètre
                       restreint (les entreprises de plus de 250 salariés).
                   o Des indicateurs clairs de suivi (évolution des accidents de travail à
                       domicile, nombre de télétravailleurs par type d’entreprise…) et des études
                       socioéconomiques pourraient être utilisés pour évaluer l’efficacité du
                       dispositif.




1
  Les dépenses liées aux accidents du travail (branche AT-MP), contrairement à celles liées à la maladie
et à la maternité, sont financées exclusivement par les employeurs, selon un taux de cotisation de plus en
plus individualisé à mesure que la taille de l’entreprise augmente (tarification collective pour les
entreprises de moins de 10 salariés en fonction de l’activité, tarification mixte (bonus/malus du type de
l’assurance automobile) pour les entreprises de 10 à 199 salariés, tarification individuelle a posteriori pour
les entreprises de 200 salariés et plus en fonction des résultats propres à chaque établissement) et selon
les risques auxquels sont exposés les employés. Dans le cas des télétravailleurs à domicile, le risque
d’accident est faible (moins de 30 accidents du travail à domicile par an depuis 2002). Il est fort probable
que les « cotisations » (si l’on considère que le risque global de l’organisation peut être réparti selon les
individus) seront équivalentes à celles appliquées aux sièges sociaux et bureaux bénéficiant d’un taux
collectif « bureau » peu élevé, eu égard aux faibles risques. Dans le cas du télétravail nomade ou alterné,
des calculs de risque pourraient essayer de déterminer l’impact sur les cotisations.



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Exemples

        La plupart des pays étudiés n’ont pas adopté la présomption d’accident pour le cas
        spécifique du télétravail : les dispositions générales de l’accident du travail s’appli-
        quent au télétravailleur, qui est un salarié comme un autre.
        Seule la Belgique l’a introduit explicitement, dans sa Convention nationale collective
        n° 85. Contrairement à ce que craignaient les employeurs, les cotisations sociales
        patronales à la branche « accident du travail » n’ont pas augmenté. Par ailleurs,
        l’Association belge des Assurances considère que le risque d’accident lié au télétravail
        n’a pas augmenté ; l’accidentologie montre en effet que, pour un salarié en télétravail,
        les accidents de trajets diminuent et les accidents au domicile n’augmentent que
        faiblement.



12. Rédiger une circulaire expliquant clairement le cadre juridique du télétravail

        Constat

        Le cadre juridique du télétravail résulte pour l’essentiel de négociations sociales
        autonomes des partenaires sociaux, au niveau européen puis interprofessionnel, qui
        s’impose largement aux acteurs sociaux depuis son extension par le ministre du
        Travail en 2006. La loi votée le 9 juin 2009 en première lecture à l’Assemblée nationale
        s’est concentrée sur les grands principes du télétravail. L’information et les actions de
        formation qui sont nécessaires et qui font l’objet des recommandations précédentes
        doivent pouvoir s’appuyer sur un document juridiquement solide, c’est-à-dire rédigé
        par l’administration du ministère du Travail. La fiche « télétravail » de la circulaire DGT
        du 18 décembre 2007 et les indications de la circulaire DGT du 3 juillet 2009 relatives à
        la pandémie grippale, bien que très claires, ne sont pas suffisantes.

        Mesures

   12           La Direction générale du Travail pourrait rédiger une circulaire expliquant de
                manière pédagogique le cadre juridique qui résultera de la loi et de l’ANI de
                2005, rénovant la fiche « télétravail » élaborée en 2007. Elle doit être un outil
                opérationnel pour les entreprises comme pour les salariés.



13. Régulariser les situations problématiques d’un point de vue juridique
    (même si elles n’ont pas encore fait l’objet de recours)

        Constat

        Malgré la clarté des dispositions de l’ANI de 2005, des abus sont encore à déplorer
        (non paiement de l’équipement et de la connexion, surcharge de travail et non-respect
        des durées légales de repos…). Les contrats de travail et les avenants doivent
        respecter un certain nombre de principes rappelés par l’accord-cadre européen, l’ANI
        de 2005, les accords de branche et la proposition de loi actuelle :
         – le télétravailleur est un salarié comme un autre : il a droit aux mêmes conditions de
            travail (santé et sécurité, droits collectifs…) que ses collègues et aux mêmes
            informations (disponibilités de postes, accès à la formation, opportunités de
            carrière…) ;
         – le double volontariat et la double réversibilité ;
         – le remboursement des frais et des équipements du télétravailleur.


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Mesures

   13           Inciter les entreprises et les branches à négocier sur le télétravail sans
                toutefois faire entrer le télétravail dans les thèmes soumis à la négociation
                annuelle obligatoire.
                Inciter les entreprises à procéder à la régularisation de la situation des
                télétravailleurs par un avenant obligatoire au contrat de travail (si celui-ci ne
                mentionne pas dès l’origine le télétravail), dans le respect strict du Code du
                travail et de l’accord national interprofessionnel de 2005.
                o À titre indicatif, les avenants au contrat de travail pourront mentionner les
                     points suivants :
                     - les mesures de protection des données, en particulier en situation de
                          nomadisme ;
                     - les mesures de protection de la vie privée (information du télétravailleur
                          sur les dispositifs de surveillance, plage horaire pour les contacts…) ;
                o Des actions de promotion auprès des entreprises/secteurs pratiquant
                     massivement le télétravail informel (high-tech, conseil…) peuvent être
                     envisagées, via par exemple le Syntec, le CIGREF ou les partenaires
                     sociaux.

        Exemples

        Dans la grande majorité des pays, le télétravail fait l’objet de contrats de travail ou
        d’avenants particuliers.



14. Clarifier la prise en charge par les assurances

        Constat

        L’assurance du télétravailleur explicite rarement les conditions exactes de couverture
        dans les cas limites. Les assureurs adoptent des principes de prise en charge
        variables, y compris parfois au sein d’une même compagnie. Le matériel professionnel
        peut être pris en charge par l’assurance de l’employeur, l’assurance du salarié peut
        prendre en charge les dégâts à domicile… Pour rassurer les parties prenantes, il
        semble pertinent de préciser les conditions d’assurance dans le contrat de travail.


        Mesures

   14           Organiser une concertation entre assureurs (associations des assureurs
                FFSA, GEMA…) et entreprises pour qu’ils étudient les possibles conséquences
                du passage en télétravail, sur les cotisations de l’employeur et/ou du salarié,
                et éventuellement fixent des principes de prise en charge et de couverture des
                risques.
                Préciser dans le contrat de travail (ou son avenant) les conditions de prise
                en charge d’assurance, au cas par cas et suivant de bonnes pratiques.




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Exemples

        Dans la plupart des pays, les assurances sont réparties entre employeurs et employés,
        de la même manière qu’en France, sans dispositions précisément formalisées sur le
        contrat de travail.
        En Belgique, des assureurs proposent aux employeurs et/ou employés des contrats
        d’assurance « accident du travail » 24h/24 et 7j/7, sans majoration.




AXE 4 : Encourager les initiatives

Le télétravail se développera d’autant plus que les bonnes pratiques pourront servir
d’exemples. Mais pour les PME, notamment, les coûts des matériels et des solutions
techniques peuvent apparaître encore trop importants. Le déploiement du haut et très
haut débit sur la majeure partie du territoire ainsi que la poursuite d’innovations dans
les technologies réseaux et les solutions logicielles constituent des prérequis du
développement du télétravail.



15. Soutenir financièrement et matériellement l’essor du télétravail


        Constat

        Alors que l’employeur est obligé de fournir le matériel informatique au salarié, les
        incitations financières ont été couramment utilisées par plusieurs pays étrangers afin
        de développer le télétravail, et plus généralement la société de l’information. C’est un
        signal fort pour les entreprises comme pour les particuliers.


        Mesures

   15           Mettre en place des incitations financières et matérielles au développement
                du télétravail, adaptées selon les situations :
                o proposer un accompagnement pour les PME, financé par exemple sous
                    la forme d’un « chèque conseil ». Un consultant spécialisé serait chargé
                    d’identifier les besoins et les solutions de télétravail dans les entreprises ;
                o aide à l’acquisition de matériel neuf, directement pour les salariés ou par
                    mise à disposition/location par l’employeur. Du matériel informatique
                    d’occasion pourra également être fourni, par exemple via l’initiative
                    « Ordi 2.0 » ;
                o pour les structures concernées, le crédit d’impôt recherche (CIR) pourrait
                    également être utilisé pour financer les dépenses de migration vers des
                    systèmes informatiques collaboratifs (virtualisation, cloud computing,
                    CAO…), qui constituent une partie des dépenses liées au télétravail dans
                    certains secteurs.
            Nous n’abordons pas la question des taux et des montants d’incitations finan-
            cières.




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Exemples

        De nombreux pays ont adopté des dispositions fiscales favorables au télétravail :
                Belgique : contribution pouvant aller jusque 10 % du salaire du télétravailleur ;
                Japon : mesure de soutien aux entreprises investissant dans des infrastruc-
                tures facilitant le télétravail ;
                Pays-Bas : le PC-privéregeling entre 1998 et 2003 a consisté à payer
                l’équipement informatique des ménages (coût 500 millions d’euros par an) ;
                Suède :
                o mesure d’incitation fiscale à l’équipement informatique des ménages (coût
                   environ 200 millions d’euros par an) : entre 1998 et 2007, 2 millions de PC
                   ont été mis à la disposition (ou location) des employés après achat par
                   l’employeur ;
                o subvention au raccordement au réseau haut débit ;
                o déductions fiscales accordées aux télétravailleurs : compensation des
                   travaux pour mise aux normes d’une pièce dédiée au télétravail…




16. Créer les télécentres de l’ère du Web 2.0.


        Constat

        Malgré les initiatives de la DATAR dans les années 1990, les télécentres n’ont jamais
        connu l’essor espéré ; depuis, la notion de télécentre est connotée négativement. Or
        certains de ces centres fonctionnent correctement (réseaux de télécentres d’IBM…) et
        disposent d’atouts considérables en termes de prise en charge assurantielle, de
        socialisation, de sécurité informatique, etc. Selon certains experts, il existe un marché
        potentiel qui ne pourra décoller sans l’intervention initiale des pouvoirs publics.
        Deux situations se prêtent particulièrement bien aujourd’hui au développement des
        télécentres :
        –   la deuxième couronne parisienne : leur développement permettrait au salarié de
            gagner un temps de déplacement qui peut s’élever jusqu’à une ou deux heures
            par jour ;
        –   les zones rurales où les télécentres constituent un moyen de favoriser l’emploi.


        Mesures

   16           A minima, redynamiser le réseau de télécentres actuel (financements,
                promotion, formation des acteurs…).
                Expérimenter puis éventuellement généraliser de nouveaux projets, en
                réalisant des montages adaptés à chaque situation associant les acteurs ad
                hoc (en particulier les collectivités locales) :
                o télécentres en partenariat public/privé au niveau local, ou opérés par les
                     collectivités locales… ;
                o mobilisation des entreprises potentiellement concernées (chaînes hôte-
                     lières disposant de salons pour télétravailleur…) ;




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o   exemple du programme ambitieux ELMUT du CGIET : 10 000 espaces
                    locaux mutualisés en 2012 (salle de téléréunion THD, système de réser-
                    vation pour les agents publics ou privés, restauration collective, animation
                    par 10 000 « technologues » secondés par 10 000 jeunes e-apprentis
                    recrutés localement pour des tâches de maintenance…).



17. Favoriser, grâce au télétravail, la conciliation entre la vie familiale
    et l’activité professionnelle

        Constat

        Les salariés français, très attachés au travail, sont aussi, parmi les Européens, ceux qui
        éprouvent le plus de difficultés à concilier une vie familiale harmonieuse et une activité
        professionnelle épanouissante. Le télétravail, formidable outil de flexibilité pour le
        salarié et l’employeur, peut constituer un facteur d’amélioration des conditions de
        travail. Sans introduire des dispositifs spécifiques qui paraîtraient dérogatoires au
        cadre général, il peut s’avérer particulièrement bien adapté à certaines situations ou
        étapes de la vie.


        Mesures

   17           Dans le cadre des accords d’entreprises et dispositifs relatifs à la conciliation
                entre vie familiale et vie professionnelle, le recours au télétravail pourrait être
                proposé avant et/ou après le congé maternité (à partir des bonnes pratiques
                existant en France et à l’étranger). Le télétravail pour le père de famille pourrait
                également être envisagé plus largement comme outil favorisant la parentalité
                en milieu professionnel. Par extension, les soins à un ascendant pourraient être
                visés par le recours à ce mode d’organisation.
                La pratique ponctuelle du télétravail pourrait être également favorisée pour
                beaucoup de salariés afin de leur donner une plus grande flexibilité et leur
                permettre de s’absenter exceptionnellement de leur travail durant les heures
                normales, notamment pour effecteur une démarche officielle ou pour rendre
                visite à un parent en maison de retraite, en rattrapant par exemple le temps
                d’absence le soir.


        Exemples

        Au Royaume-Uni, à la suite d’un important débat de société sur le développement de
        la flexibilité du travail, un texte (Flexible Working Regulations Act) favorise les
        demandes d’aménagement des conditions de travail formulées par les salariés (obli-
        gation pour l’employeur de les accepter, sauf raison de tout premier ordre). Le même
        type de dispositif est utilisé à Singapour (Flexible Work Arrangements) mais sur une
        base probablement plus informelle (à l’instar de ce qui se passe en France).
        Coca-Cola France a mis en place le télétravail pour les femmes enceintes, avant le
        congé maternité.




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18. Favoriser, grâce au télétravail, l’exercice d’une activité professionnelle


        Constat

        Le travail joue un rôle important comme facteur d’insertion sociale des individus. Le
        télétravail peut constituer un instrument souple contribuant à l’inclusion sociale par
        l’exercice d’une activité professionnelle. Il peut permettre à des personnes malades de
        reprendre leur activité professionnelle en favorisant les transitions entre les exigences
        des traitements et/ou les besoins de repos, d’une part, et une activité professionnelle
        sur site, dans un cadre collectif avec ses contraintes, d’autre part. Il peut en être de
        même pour certaines situations de handicap.


        Mesures

   18           Un certificat médical d’aptitude au télétravail pourrait à ce titre être un
                élément complémentaire à l’arrêt de travail ou au mi-temps thérapeutique,
                délivrés par le médecin. Cet outil ne serait pas créateur de droit au télétravail
                pour le salarié, ce qui suppose que le médecin doit conserver l’usage des
                autres possibilités en dernier recours.
                Le télétravail pourrait être intégré aux outils mis en œuvre pour répondre à
                l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans les entreprises de plus
                de 20 salariés. Le contact avec un cadre collectif étant important, le télétravail
                partiel serait privilégié.
                Télétravail et développement de l’emploi des seniors : des actions de
                sensibilisation (« publicité » pour le télétravail lors de la liquidation de la
                retraite ou de la rupture du contrat de travail…) et de formation aux TIC à
                destination des seniors semblent pertinentes.


        Exemples

        Dans la plupart des pays, le télétravailleur, en tant que salarié comme un autre, est
        soumis aux mêmes dispositions juridiques que ses collègues (congés maladie,
        accident, maternité ou cumul emploi-retraite). Dans aucun des 23 pays de l’OCDE
        étudiés n’a été fait mention d’un télétravail subi lors d’un congé maternité ou d’un arrêt
        maladie ; aucun de ces pays n’a légiféré spécifiquement sur ces sujets. On peut se
        demander, en outre, si des dispositions juridiques spécifiques à certaines catégories
        sont pertinentes pour un pays disposant d’un système social protecteur comme la
        France.


19. Mieux connaître la situation du télétravail en France


        Constat

        La France ne dispose que de statistiques parcellaires et irrégulières sur le télétravail
        dans le secteur privé, et pratiquement d’aucune dans le secteur public. Les recherches
        d’ordre socioéconomique sur le télétravail (impact des technologies, sociologie des
        organisations…) sont peu nombreuses et fragmentaires. De plus, ces travaux sont peu
        visibles et mal insérés dans les réseaux internationaux de recherche sur le sujet.




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Mesures

    19          Financer des recherches académiques et des études pour améliorer la
                décision publique :
                o études statistiques régulières sur le télétravail (enquêtes COI, PCV…)1 ;
                o enquêtes en sociologie des organisations pour mieux comprendre les
                     obstacles à la diffusion du télétravail ;
                o comparaison internationale des politiques menées en la matière.
                La recherche interdisciplinaire pourra être redynamisée, à l’image des travaux
                du Groupement de recherche sur les TIC (GDR-TIC).
                Financer une évaluation socioéconomique de l’impact de la pandémie
                grippale sur le développement du télétravail, examinant également les bonnes
                pratiques en matière de mise en œuvre.


         Exemples

         Des pays de taille plus modeste que la France (Pays-Bas, Belgique, Finlande, Suède…)
         sont mieux représentés dans les réseaux de recherche et les conférences inter-
         nationales sur le télétravail.




1
  Enquête COI : enquête sur les changements organisationnels et l’informatisation. Enquête PCV :
enquête permanente sur les conditions de vie (INSEE).



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                               Lettre de saisine




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Annexe 2

                        Liste des personnes interrogées


  Administration française
Caroline Berteau-Rapin, direction statistiques et prospective, pôle « prévisions »,
Caisse nationale d’assurance vieillesse, CNAV
Joël Blondel, chef de service, Direction générale du travail, DGT
Jean Ceugniet, ingénieur général des mines, Conseil général de l’industrie, de l’énergie
et des technologies, CGIET
Annelore Coury, sous-directrice des relations individuelles et collectives de travail,
Direction générale du travail, DGT
Thomas Coutrot, chef du département Conditions de travail et santé, Direction de
l’animation de la recherche, des études et des statistiques, DARES
Fabrice Dambrine, ingénieur général des mines, Conseil général de l’industrie, de
l’énergie et des technologies, CGIET
Guillaume Destré, chargé de mission, Conseil d’orientation des retraites, COR
Nathanaël Grave, chargé de mission, Caisse nationale d’assurance vieillesse, CNAV
Jean-Michel Hourriez, chargé de mission, Conseil d’orientation des retraites, COR
Vincent Poubelle, chef du service statistique, Caisse nationale d’assurance vieillesse
Françoise Roure, présidente, section technologie et société, Conseil général de
l’industrie, de l’énergie et des technologies, CGIET
Julien Tiphine, chef du bureau retraites, régimes de base, Direction de la sécurité
sociale, DSS
Brigitte Zago-Koch, adjointe au chef du bureau relations individuelles de travail,
Direction générale du travail, DGT

  Partenaires sociaux français
Chantal Foulon, directrice adjointe, relations sociales, Mouvement des entreprises de
France, MEDEF
Jean-Pierre Koechlin, délégué, Confédération française des travailleurs chrétiens, CFTC

  Experts français
Denis Bérard, chargé de mission, changement technologique, Agence nationale pour
l’amélioration des conditions de travail (ANACT)
Nadine Delouche, membre de l’espace RSSI du Clusid, spécialiste aspects sécurité Tic
et droit du travail
Thibault Grouas, juriste, chargé de mission, Forum des droits sur l’Internet
Sylvie Hamon-Cholet, chercheur, Centre d’études de l’emploi, CEE
Serge Le Roux, administrateur, Association française du télétravail et des téléactivités,
AFTT
Jean-Luc Metzger, chercheur, Orange Labs
Anne-Marie Nicot, correspondante pour la France de Euro Foundation, changement
technologique, Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, ANACT
Nadine Pelvillain, chef du département Informatique, direction de l’ingénierie,
Association pour la formation professionnelle des adultes, AFPA
Philippe Planterose, président, Association française du télétravail et des téléactivités, AFTT
Jean-Emmanuel Ray, professeur, université Paris 1-Sorbonne


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Jérémie Rosanvallon, chercheur, Centre d’études de l’emploi, CEE
Nicole Turbe-Suetens, expert européen en télétravail, Distance-Expert
Jean-Louis Zanda, chargé d’études, Direction des études et des évaluations, Pôle emploi

  Experts européens et internationaux
Svein Bergum, Eastern Norway Research Institute, Norvège
John Gundry, Knowledge Ability Ltd., Royaume-Uni
Esther Hoffmann, Tshwane University of Technology, Afrique du Sud
Ursula Huws, experte du télétravail, Analytica Social and Economic Research,
Royaume-Uni
Gareis Karsten, Empirica Gesellschaft für Kommunikations-und Technologieforschung
mbH, Allemagne
Diana Limburg, Oxford Brookes University, Royaume-Uni
Pascale Peters, Institute for Management Research, université Nijmegen, Pays-Bas
Sirkemaa Seppo, Turku School of Economics, Finlande
Wendy Spinks, Tokyo University of Sciences, Japon
Laurent Taskin, directeur adjoint, Louvain School of Management, Center for Research
in Entrepreneurial Change and Innovation Strategies et animateur du réseau Belgian
Telework Academy, Belgique
Diane-Gabrielle Tremblay, professeur à la Télé-université (UQAM), titulaire de la chaire
de recherche du Canada sur les enjeux socio-organisationnels de l’économie du savoir,
directrice de l’Alliance de recherche Universités-Communautés, ARUC, Canada
Michel Walrave, université d’Anvers, Belgique

   Entretiens par pays (Roland Berger)
Allemagne
Beatrix Behrens, chef du département politique du personnel, Bundesagentur für Arbeit
Christiane Flüter-Hoffmann, experte télétravail, Institut der deutschen Wirtschaft Köln
Mme Höhne, Bundesministerium für Arbeit und Soziales
Jürgen Kühn, Group Diversity Management, Deutsche Telekom
Peter Mohns, chef de bureau, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend
Belgique
Robin Bellings, CIO Europe, CISCO
Paul Hautekiet, HR manager, Electrabel
Philip Vandervoort, Ellke Jorens, CEO, HR manager, Microsoft
Corée du Sud
Seung-hwan Cha, director of Home-base Call Center, Dongbu Insurance Co., Ltd
Hyo-jin Hong, Strategic future planning team, Senior researcher
Jong-min Jeon, Human resource part, manager, Samsung SDS Co., Ltd
Soon-ho Kwon, HR director, IBM Corée du Sud
Joo-hwan Park, Policy planning team, director of Telework management, Dongdaemoon
Ward Office
Jeong Won, HR director, Korean Airlines
Danemark
Elizabeth Berents, responsable du programme de formations, Danske fysioterapeuter
Winnie Holm, régional HR-director, ALD automotive (filiale SG)
Jérémie Millard, Teknologisk Institute
Lene Mondrup, HR manager, Boehringer-Ingelheim
JL Thomsen, HR manager, SAS Data CSC




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États-Unis
Christine Arnould, HR manager, HP
Elizabeth Maden, HR, Goldman Sachs
Jozef Roitz, director, AT&T
Charlie Wall, VP HR Suez Environnement North America
Finlande
Thomas Brannbacka, HR manager, Sofia Bank
Tamara Carpentier, DRH France, Nokia
France
Dominique Cervera, responsable des ressources humaines, Téléperformance
Brigitte Dumont, directrice du développement et performance des RH, France Télécom
Jérôme Filippini, directeur des systèmes d’information et de communication, ministère
de l’Intérieur
Alexandre Gardet, Direction générale des finances publiques
Catherine Jacolot, directrice territoriale Est des opérations France, France Télécom
JP Lainé, directeur des services à l’entreprise, Renault
Janine Kister, Guy Duplaquet, Direction des services judiciaires, DSI, ministère de la Justice
Sébastien Lebreton, juriste social en chef, Alcatel Lucent
Emmanuelle Lièvremont, directrice diversité et santé au travail pour le groupe L’Oréal
Hélène Martin, référente télétravail France, Michelin
Pierre Morel-à-L’Huissier, député de Lozère
Gérard Perfettini, directeur de la Caisse régionale des Dépôts et Consignations (Bordeaux)
Karine Picot, responsable développement RH, Coca Cola
Philippe Planterose, président, Association française des télétravailleurs
Jean Rafenomanjato, ex-inspecteur, ministère de l’Éducation nationale
Philippe Roux-Comoli, directeur de cabinet, ministère de la Justice
Vincent Tachet, directeur général adjoint, Webhelp
Nicole Tuerbé-Suetens, avocate experte, Distance Expert
Amélie Velly, juriste sociale, Norauto
Eloïse Verde-Delisle, directrice des relations sociales et de l’emploi, IBM
Italie
Piera Albertini, director of Home-base Call Center, BNP Paribas Personal Finance Italy
Alessio Bertocco, HR direction, Seat Pagine Gialle S.p.A
Umberto Malesci, CEO, Fluid Mesh Networks
Elena Sala, Human Resource manager, AstraZeneca
Filippo Stefanelli, CEO, New Target Web
Japon
Yusuke Emi, HR director, Hitachi
Akinobu Kanasugi, HR manager, NEC
Masahiro Mori, HR manager, Showcase TV
Hiroko Nagai, HR manager, Panasonic
Taizo Nishimuro, HR director, Japan Teleworkers Association
Hajime Takashima, HR manager, NTT
Noritake Uji, HR manager, NTT
Royaume-Uni
Laura White, HR manager, Tesco
David Wilson, HR director, British Telecom
Suède
Gosta Molleby, HR manager, Teliasonera
Anna Stellinger, expert, SIEPS (agence gouvernementale)



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Annexe 3
   L’évolution des définitions du télétravail depuis 1993


Afin d’illustrer l’évolution de la notion de télétravail, nous présentons dans cette
annexe les six définitions issues des principaux rapports ou textes français sur le
télétravail.


1993 : Rapport Breton (cabinet juridique Service Lamy)

« Le télétravail est une modalité d’organisation et/ou d’exécution d’un travail exercé à
titre habituel, par une personne physique, dans les conditions cumulatives suivantes :

D’une part, ce travail s’effectue :
  –    à distance, c’est-à-dire hors des abords immédiats de l’endroit où le résultat de
       ce travail est attendu ;
  –    en dehors de toute possibilité physique pour le donneur d’ordre de surveiller
       l’exécution de la prestation par le télétravailleur.

D’autre part, ce travail s’effectue au moyen de l’outil informatique et/ou des outils de
télécommunications ; il implique nécessairement la transmission au moyen d’une ou
de plusieurs techniques de télécommunications au sens de l’article L32 du Code des
Postes et Télécommunications, y compris au moyen de systèmes informatiques de
communication à distance :
  –    des données utiles à la réalisation du travail demandé ;
  –    et/ou du travail réalisé ou en cours de réalisation ».


2002 : Accord-cadre européen sur le télétravail

« Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les
technologies de l’information, dans le cadre d’un contrat ou d’une relation d’emploi,
dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de
l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière.

Le présent accord couvre les télétravailleurs. On entend par télétravailleur toute
personne qui effectue du télétravail tel que défini ci-dessus. »




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2004 : Rapport du Forum des droits sur l’Internet

« Le télétravail peut être défini comme étant le travail qui s’effectue, dans le cadre
d’un contrat de travail, au domicile ou à distance de l’environnement hiérarchique et
de l’équipe du travailleur à l’aide des technologies de l’information et de la
communication. »


2005 : Accord national interprofessionnel en France

« Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les
technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de travail et dans laquelle un
travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, est
effectué hors de ces locaux de façon régulière. Cette définition du télétravail permet
d’englober différentes formes de télétravail régulier répondant à un large éventail de
situations et de pratiques sujettes à des évolutions rapides. Elle inclut les salariés
« nomades » mais le fait de travailler à l’extérieur des locaux de l’entreprise ne suffit
pas à conférer à un salarié la qualité de télétravailleur. Le caractère régulier exigé par
la définition n’implique pas que le travail doit être réalisé en totalité hors de
l’entreprise, et n’exclut donc pas les formes alternant travail dans l’entreprise et travail
hors de l’entreprise.

On entend par télétravailleur, au sens du présent accord, toute personne salariée de
l’entreprise qui effectue, soit dès l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que
défini ci-dessus ou dans des conditions adaptées par un accord de branche ou
d’entreprise en fonction de la réalité de leur champ et précisant les catégories de
salariés concernés. »


2006 : Rapport de Pierre Morel-à-L’Huissier

Le député reprend la définition « fonctionnelle » du Forum des droits sur l’Internet et la
typologie des télétravailleurs. Il précise toutefois que « le télétravail est d’abord une
modalité d’organisation du travail, parmi d’autres et en concurrence avec
d’autres ».


2009 : Proposition de loi « pour faciliter le maintien et la création d’emplois »

« Sans préjudice de l’application, s’il y a lieu, des dispositions du présent code
protégeant les travailleurs à domicile, le télétravail désigne toute forme d’organisation
du travail dans laquelle un travail, qui aurait également pu être exécuté dans les
locaux de l’employeur, est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon
régulière et volontaire en utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un
contrat de travail ou d’un avenant à celui-ci.

Le télétravailleur désigne toute personne salariée de l’entreprise qui effectue, soit dès
l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que défini au précédent alinéa ».




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Annexe 4
      Tableau récapitulatif des définitions du télétravail pour la France

   Source                             Définition télétravail / télétravailleur                        Date      Champ
Proposition      Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un
de loi           travail, qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur,
Code du          est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire
                                                                                                           Salariés
travail          en utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de
                                                                                                      2009 secteur privé
(Partie 1,       travail ou d’un avenant à celui-ci.
                                                                                                           uniquement
Livre 2,         Le télétravailleur désigne toute personne salariée de l’entreprise qui effectue,
Titre 2,         soit dès l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que défini au
Chap. 2)         précédent alinéa.
                 Une entreprise pratique le télétravail si elle a des personnes qui travaillent au
INSEE                                                                                                      Étude portant
                 moins une demi-journée par semaine en dehors de ses locaux, en ayant
enquête TIC                                                                                           2009 seulement sur
                 accès au système informatique de l’entreprise par des réseaux
2008                                                                                                       les entreprises
                 électroniques.
                 Le télétravail est une forme d’organisation du travail recouvrant quatre
                                                                                                           Reprend la
                 formes d’organisation :
Rapport                                                                                                    distinction faite
                 – le télétravail à domicile ;
Morel-à-                                                                                              2006 par le Forum
                 – le télétravail nomade ;
l’Huissier                                                                                                 des droits sur
                 – les télécentres ;
                                                                                                           l’Internet
                 – le travail en réseau.
                 Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail,
                 utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de
                 travail et dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les
                 locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière.                Salariés
ANI              On entend par télétravailleur, au sens du présent accord, toute personne             2005 secteur privé
                 salariée de l’entreprise qui effectue, soit dès l’embauche, soit ultérieurement,          uniquement
                 du télétravail tel que défini ci-dessus ou dans des conditions adaptées par
                 un accord de branche ou d’entreprise en fonction de la réalité de leur champ
                 et précisant les catégories de salariés concernés.
                 Le télétravail peut être défini comme étant le travail qui s’effectue, dans le
Forum des                                                                                                  Salariés
                 cadre d’un contrat de travail, au domicile ou à distance de l’environnement
Droits sur                                                                                            2004 secteur privé
                 hiérarchique et de l’équipe du travailleur à l’aide des technologies de
l’Internet                                                                                                 uniquement
                 l’information et de la communication.
INSEE,
                 Le télétravailleur utilise dans son travail les technologies de l’information tous
enquête per-
                 les jours ou plusieurs fois par semaine, pour un usage supérieur à cinq                 Salariés et
manente sur                                                                                         2004
                 heures par semaine, se déroulant au moins pour partie loin de son                       agents publics
les conditions
                 responsable hiérarchique ou de son équipe de travail.
de vie
             Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail,
                                                                                                           Plus large :
             utilisant les technologies de l’information, dans le cadre d’un contrat ou
Accord-cadre                                                                                               contrat ou
             d’une relation d’emploi, dans laquelle un travail, qui aurait également pu être          2002
européen                                                                                                   relation
             réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de
                                                                                                           d’emploi
             façon régulière.
          The broadest definition of eWork encompasses any work that is carried out       Extrêmement
Projet                                                                              2002-
          away from an establishment and managed from that establishment using ICT        large (inclut
EMERGENCE                                                                           2003
          for receipt or delivery of the work.                                            l’outsourcing)
              Tout type de travail qui fait usage d’outils de traitement de l’information et de
                                                                                                     Extrêmement
              télécommunications pour en livrer le produit à un employeur ou un client distant.
Caisse des                                                                                           large (inclut
              Le télétravail devient alors un sous-ensemble de l’e-travail, dans lequel un
Dépôts et                                                                                       2002 l’outsourcing)
              individu (salarié ou non) travaille ailleurs que dans les locaux standards de
Consignations                                                                                        pris du projet
              son employeur ou de l’entreprise avec laquelle il est en contrat, et reste en
                                                                                                     Emergence
              relation avec l’entreprise grâce aux TIC.




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Annexe 5
            Quelques définitions du télétravail à l’étranger


   Nous avons recensé les définitions du télétravail adoptées à l’étranger. Comme pour
   la France, plusieurs sources sont disponibles pour chaque pays. Nous avons donc
   choisi de ne faire figurer que la définition la plus communément admise, à savoir celle
   des institut nationaux de statistiques dans la majorité des cas.

   Ces définitions peuvent ensuite varier selon les enquêtes statistiques (cf. annexe 7).


              Organisme                                  Définition                                    Champ
             Mémento
             « télétravail »    Le télétravail est toute activité, basée sur les technologies
             de 2001 publié     de l’information et de la communication, accomplie
             par les minis-     exclusivement ou à temps partiel sur un poste de travail
Allemagne    tères fédéraux     situé hors de l’établissement central. Ce poste de travail
             du travail, de     est relié par des moyens de communications électroniques
             l’économie et      à l’établissement central.
             de l’éducation
                                Le travail entrepris soit à plein temps soit à temps partiel,
             Australian
                                par un employé ou un travailleur indépendant, qui est
             Telework
                                effectué à distance de l’environnement traditionnel du
Australie    Advisory
                                bureau de l’entreprise, y compris à domicile, et qui est
             Committee
                                facilité par le recours aux TIC telles que la téléphonie
             (2005)
                                mobile ou l’Internet.
             Ministère de
             l’Économie et      Réalisation d’un travail à distance avec l’aide de systèmes
Autriche     du Travail         de communication.
             (2003)
                                Une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail,         Les télétravailleurs
                                utilisant les technologies de l’information, dans le cadre        mobiles sont exclus
             Convention
                                d’un contrat de travail, dans laquelle un travail, qui aurait     (commerciaux,
Belgique     collective de
                                également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur,         techniciens,
             travail n° 85bis
                                est effectué hors de ces locaux de façon régulière et non         infirmières à
                                occasionnelle.                                                    domicile…)
                                Le télétravail désigne le travail effectué en dehors du lieu
             Partenaires
                                de travail habituel et transmis vers ce lieu par
             sociaux
                                l’intermédiaire d’un PC et d’une connexion internet. Le
             (transposition
                                télétravail doit avoir un caractère récurrent et régulier pour    Secteur privé
             de la définition
                                être couvert par l’accord et ne peut avoir lieu que pendant
             de l’ACE de
                                les heures de travail sur lesquelles se sont accordés au
             2002)
                                préalable l’employé et l’employeur.
                                Le télétravail est un travail pouvant être effectué dans un
Danemark                        lieu différent du lieu de travail habituel à l’aide d’un
                                ordinateur personnel et de moyens de communication
                                électroniques et/ou téléphoniques fournis par l’employeur.
             Direction
                                Le télétravail et le travail à domicile doivent avoir un
             du personnel
                                caractère récurrent et être compris dans les heures de            Secteur public
             (secteur
                                travail du contrat de travail. L’accord n’inclut pas le travail
             public)
                                à distance effectué lors de voyages d’affaires. Il se
                                distingue en outre du « travail mobile » c’est-à-dire
                                effectué dans plusieurs lieux distincts comme par
                                exemple le travail d’un commercial.




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Il y a une distinction1 sur le régime de travail et sur les
                                   conditions de travail entre télétravailleur (qui effectue la
                                   totalité de son travail depuis son domicile ou un site à
               World at Work                                                                       Secteur privé
                                   distance des locaux) et « telecommuter » (qui travaille
                                   périodiquement ou régulièrement depuis son domicile ou
États-Unis                         un site distant).
                                   Le télétravail est un aménagement du travail dans lequel
               US Office of
                                   un employé effectue régulièrement des tâches profession-        Secteur public
               Personnel
                                   nelles, depuis son domicile ou depuis les locaux (de            (agences fédérales)
               Management
                                   l’administration) proches de son lieu de résidence.
                                   Le télétravail est une modalité d’organisation du travail. Il
                                   s’agit d’un travail qui pourrait être réalisé dans les locaux
                                   de l’employeur, mais qui est régulièrement effectué en
                                   dehors du lieu de travail, en utilisant les technologies de
                                   l’information et de la communication.
                                   Sont inclus dans la définition, par exemple :
               Accord entre
                                   – le travail à temps plein ou partiel effectué à partir d’un
               partenaires
                                      ordinateur à domicile ou dans d’autres locaux que ceux
               sociaux du
Finlande       23 mai 2005
                                      de l’employeur : travaux de planification, de recherche,
                                      etc.
               (transposition
                                   – le travail réalisé dans un lieu où de nombreux employés
               de l’ACE 2002)
                                      de l’entreprise travaillent au même moment, en utilisant
                                      les technologies de l’information et de la
                                      communication.
                                   Ne sont pas inclus dans la définition retenue :
                                   – les travaux ménagers traditionnels ;
                                   – le travail dans les centres d’appel et de contact.
                                   Le « e-work » est défini non comme un emploi mais
               Ministère de la
                                   comme une méthode de travail ayant recours aux TIC,
               Science, de la
                                   selon laquelle le travail est accompli indépendamment
               Technologie et
                                   d’un lieu donné. Ces méthodes de travail recouvrent :           Secteurs privé
Irlande        du Commerce
                                   – le travail chez soi, à temps plein ou à temps partiel ;       et public
               (« Code of
                                   – le « telecommuting » à savoir l’alternance entre le
               practice » de
                                      domicile et le bureau ;
               2002)
                                   – le travail mobile.
                                   Typologie de prestation de services qui s’effectue en
               Institut national
                                   dehors des limites traditionnelles de l’entreprise sans
               de protection                                                                       Secteur privé
                                   impliquer de transformation des rapports de travail en
               sociale
                                   vigueur.
               Réforme             Un travail effectué par un salarié dans l’une des
   Italie      Bassani 1998        administrations publiques, dans n’importe quel lieu estimé
               (art. 4 loi         compatible avec ce type de prestation, et en dehors du
               n° 191) et          siège de travail, où la prestation sera techniquement           Secteur public
               décret              possible grâce à l’utilisation de supports technologiques
               présidentiel        et informatiques permettant de mettre en liaison les
               n° 70 de 1999       différents sièges du travail.



   1
     La définition de World at Work est la suivante :
   Telecommute: To either periodically or regularly perform work for one’s employer from home or another
   remote location ; Telework: To perform all of one’s work either from home or another remote location,
   either for an employer or through self-employment ; Employee Telecommuter: A regular employee (full or
   part time) who works at home or another remote location at least one day per month during normal
   business hours ; Contract Telecommuter: An individual who works on a contract basis for an employer
   or is self-employed, and who works at home or at a remote location at least one day per month during
   normal business hours ; Employed Telecommuters: Individuals (either employees or contractors)
   working at home or remotely at least one day per month during normal business hours; the sum of
   “employee telecommuters” and “contract telecommuters”.
   Les critères étant très larges (travail à distance périodique avec les TIC, inclusion de toutes les catégories
   de travailleurs…), le nombre de télétravailleurs est relativement important aux États-Unis (21,5 % de la
   population active, soit 14,2 % de l’ensemble de la population en 2008.



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Méthode de travail qui, grâce à l’utilisation des moyens
             Japan
                              d’information et de télécommunication, n’est pas
Japon        Telework
                              soumise à des conditions d’exercice liées au lieu et à la
                                                                                            NC
             Association1
                              durée du travail.
             Ministère des
                              Travail effectué à distance, le salarié effectuant son
             Affaires
Pays-Bas     sociales et de
                              travail à domicile sur son ordinateur au lieu d’aller au
                              bureau.
             l’Emploi
                              Les télétravailleurs sont des personnes qui travaillent
                              principalement depuis leur domicile ou sur différents
             Office of
Royaume-                      lieux lorsqu’ils sont en déplacement en utilisant leur        Secteurs privé
             National
Uni                           domicile comme base et qui ont recours à la fois au           et public
             Statistics
                              téléphone et à un ordinateur pour poursuivre leur activité
                              depuis leur domicile.
             Ministère du     Le télétravail est une forme de travail flexible quant au
             Travail          lieu de travail , et où le travail est effectué grâce à
Singapour    (Statistiques    l’utilisation des TIC, qui peuvent aller des ordinateurs et   Secteur privé
             de l’emploi -    modems personnels aux installations électroniques
             2009)            complexes permettant le travail en réseau.
Suède                         Identique à l’accord-cadre européen de 2002.

                                                             Source : Missions Economiques, synthèse CAS




  1
   La Japan Telework Association est un organisme sous tutelle du Ministry of Internal Affairs and
  Communications, du Ministry of Economy, Trade and Industry, du Ministry of Health, Labour and Welfare
  et du Ministry of Land, Infrastructure, Transport and Tourism.



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Annexe 6
                       Les éléments de jurisprudence


La jurisprudence du télétravail concerne des faits relativement anciens et peu
nombreux, étant donné que les télétravailleurs ne représentent environ que 8 % de la
population active. Si les exemples suivants ne présentent probablement pas de
manière exhaustive les litiges liés au télétravail, ils donnent un bon aperçu de la
                                                                               1
jurisprudence qui s’est élaborée au cours des dix dernières années sur ce thème .


Les trois arrêts de Cour de cassation

Cour de cassation, chambre sociale, 31 mai 2006

Un employeur et sa salariée étaient convenus que cette dernière exercerait ses
fonctions de responsable de communication à partir de son domicile en ne se
présentant au siège de l’entreprise qu’une fois par semaine, l’ensemble de ses frais de
déplacement étant pris en charge par son employeur. Au retour du congé maternité
de la salariée, l’employeur lui demanda de reprendre ses fonctions tous les jours de la
semaine au siège social de la société. Suite à son refus, la salariée fut licenciée pour
faute grave (abandon de poste).

La Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt du 16 mars 2004, décida que le
licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse considérant que « le fait pour
l’employeur d’imposer [à sa salariée] de travailler désormais tous les jours de la
semaine au siège de la société constituait, peu important l’existence d’une clause de
mobilité, une modification du contrat de travail que la salariée était en droit de
refuser ».

La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 31 mai 2006, a rejeté le
pourvoi de la société SCC considérant que « lorsque les parties sont convenues d’une
exécution de tout ou partie de la prestation de travail par le salarié à son domicile,
l’employeur ne peut modifier cette organisation contractuelle du travail sans l’accord
du salarié ».

Cour de cassation, chambre sociale, 13 avril 2005

Un directeur commercial avait été autorisé, dès son embauche, à effectuer des tâches
administratives de sa prestation de travail à son domicile. Son employeur, considérant
les résultats commerciaux de son salarié insuffisants, décida qu’il devait dorénavant
venir travailler au siège social de la société, situé à plus de 200 km de son domicile,
deux jours par semaine. Le salarié, refusant cette mesure, fut licencié pour faute.

La Cour d’appel d’Amiens, dans un arrêt du 27 novembre 2002, a considéré que le
salarié avait commis une faute grave. En effet, elle a estimé que l’employeur n’avait
1
  Les paragraphes suivants reprennent les travaux de veille juridique, notamment du Forum des droits sur
l’Internet, et des articles de la presse spécialisée dans les questions sociales.



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pas modifié unilatéralement un élément essentiel du contrat de travail mais procédé à
un changement de ses conditions de travail. La faute grave du salarié est caractérisée,
ce dernier ne respectant pas la mesure décidée par l’employeur et ne communiquant
pas à celui-ci les renseignements réclamés.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 13 avril 2005, au visa de l’article 1134 du Code
civil, a cassé l’arrêt de la Cour d’appel. Elle a considéré que « […] le fait pour
l’employeur de lui imposer de se rendre désormais deux jours par semaine au siège
de la société situé à plus de 200 km pour exécuter ce travail constituait une
modification de son contrat que le salarié était en droit de refuser, ce dont il résultait
qu’il ne pouvait se voir reprocher une faute grave ».

Cour de cassation, 3 novembre 2004

La Cour a arrêté que le salarié n’est ni tenu d’accepter de travailler à son domicile, ni
d’y installer ses dossiers et ses instruments de travail, retenant toutefois qu’une
société n’a pas d’intérêt illégitime à muter une salariée de Paris à Aix-en-Provence,
alors que son emploi de téléprospectrice peut s’effectuer à domicile.

Cour de cassation, chambre sociale, 2 octobre 2001 (arrêt « Abram »)

Dans cet arrêt déjà ancien, la chambre sociale de la Cour de cassation, sans faire
directement référence au télétravail au domicile, a visé cette organisation du travail.
Elle a décidé que « le salarié n’est tenu ni d’accepter de travailler à son domicile, ni d’y
installer ses dossiers et ses instrument de travail ». Cette décision signifie que le
passage au télétravail à domicile est un changement important dans l’organisation du
travail d’un salarié, qui doit par conséquent faire l’objet d’un avenant au contrat de
travail.


Les trois arrêts de Cour d’appel

La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 16 septembre 2005, considère qu’un
salarié travaillant à domicile ne peut être licencié pour avoir :
–    refusé de se soumettre au contrôle et au suivi du travail à domicile, alors que les
     échanges réguliers de e-mail attestent du contraire et qu’aucun avertissement n’a
     été adressé par l’employeur ;
–    dépassé son forfait Internet deux mois avant les poursuites judiciaires par son
     employeur ;
–    modifié son mot de passe pour des raisons de sécurité.

La Cour d’appel de Paris, dans son arrêt en date du 15 décembre 2004, considère
que la salariée, VRP et cadre autonome en situation de télétravail, ne rapportant pas la
preuve d’un harcèlement moral, la rupture du contrat de travail produit les effets d’une
démission. En effet, les changements technologiques imposés concernaient
l’ensemble du personnel, restaient mineurs et ne visaient pas spécialement la salariée.
Selon les magistrats, il lui appartenait, en sa qualité de cadre, d’organiser son temps




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de travail. Elle ne saurait s’appuyer sur des e-mails envoyés occasionnellement le soir
ou le dimanche sans sollicitation urgente de son employeur.

La Cour d’appel de Douai, dans un arrêt du 30 mai 2008, considère que
l’employeur peut verser une indemnisation forfaitaire non soumise à cotisation sociale
à ses salariés pour compenser les frais occasionnés par le télétravail à domicile,
même partiel. La prise en charge des frais engagés par le salarié en situation de
télétravail ne doit pas être incluse dans l’assiette des cotisations sociales en vertu
d’un arrêté du 20 décembre 2002 sur les frais professionnels, y compris quand le
télétravail est partiel. En effet, les frais engagés par le salarié pour aménager son
domicile (installation informatique, connexion Internet…) sont les mêmes dans les cas
de télétravail à temps complet ou à temps partiel. L’entreprise attribuait à ses cadres
télétravailleurs une allocation forfaitaire mensuelle, dans la limite de 152,45 euros,
contre justificatifs des frais engagés. Ces dépenses avaient fait l’objet d’un
redressement de l’Urssaf. Suite à l’arrêt de la Cour d’appel de Douai, l’Urssaf n’ayant
pas déposé de pourvoi en cassation, cette décision est devenue définitive.




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Annexe 7

     Tableau détaillé des chiffres relatifs au télétravail,
             par catégorie de télétravailleurs


                               Explication du contenu du tableau

   Le tableau suivant présente, de manière aussi exhaustive que possible, les chiffres les
   plus récents, selon une gradation allant de « 0 % en télétravail » au télétravail à domicile
   à temps complet. Nous avons choisi un chiffre de référence utilisé pour le comparatif
   international, il s’agit généralement de la donnée issue de l’institut de statistique national
   (lorsque la définition retenue le permet). Si besoin, les chiffres du tableau sont précisés
   par des notes de bas de page.

   Certains pays sont décrits dans le tableau par plusieurs lignes :
   – la première présente les chiffres du cabinet spécialisé Gartner en première
     colonne (synthèse consolidée en 2007) et les chiffres les plus récents fournis par les
     instituts statistiques nationaux (collectés par les Missions économiques) ;
   – la seconde ligne (en bleu) rappelle les chiffres 2002 de l’enquête SIBIS, dont la
     méthodologie harmonisée autorise la comparaison entre pays ;
   – la troisième ligne (en jaune) rappelle les chiffres 2005 de l’enquête européenne sur
     les conditions de travail menée par la Fondation européenne pour l’amélioration des
     conditions de vie et de travail (Eurofound).

   Ces trois sources principales permettent donc à la fois d’évaluer les limites métho-
   dologiques de chaque enquête et de constater l’évolution de la diffusion du télétravail
   entre 2002 (chiffres SIBIS), 2005 (chiffres Eurofound) et 2007 (chiffres Gartner).

   Ce tableau doit être pris avec précaution, puisqu’il présente des éléments souvent non
   comparables entre eux.




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Forme de travail
                              1-2 jours       > 2 jours                                               TOTAL
                 > 8 h par                                   À        Nomades          Indépen-
    Pays                         par             par                                               (définition de
                   mois 1                                  domicile    Mobiles           dants
                              semaine         semaine                                                référence)
                    8.4           1               -              1           5            -           72-12 3
                                                                                   4
    France           -           2.2             2.3             -       15.5             -            6.3 5
                     -                 5.26                  1.8              -           -              7
                   18.8           -               -              -            -           -              -
    Allemagne        -           1.6             6.3             -       16.3             -            16.6
                     -                    7                  1.5              -           -             8.5
                     -           2.0             4.7             -       13.7             -            13.8
    Autriche
                     -                 9.0                   5.2              -           -            14.2
                   30.0           -               -              -            -           -              -
    Belgique         -           2.2             5.3             -       12.5             -            10.6
                     -                 11.0                  3.7              -           -            14.7
    Canada         12.3          8.0                         5-6              -           -            9.8 7
                   17.4         16.5            10.0             -            -           -            25.7 8
    Danemark         -            4             21.7             -       13.9             -            21.5
                     -                 12.8                  3.2              -           -            16.0
                    6.2           -               -              -            -           -              -
    Espagne          -           0.3             2.0             -           9.1          -             4.9
                     -                 6.6                   1.8              -           -             8.4
                   27.6           -               -              -            -          10.4          21.5
    États-Unis
                     -           5.1            12.2             -       18.9             -            24.6
                   17.7           -               -              -            -           -              -
    Europe
                     -                 6.2                   2.1              -           -            8.3 9


1
  Pour l’ensemble de cette colonne, les chiffres sont issus d’une enquête de 2005 du cabinet Gartner,
mise à jour en 2007, intitulée « Teleworking, the quiet revolution ». Le cabinet spécialisé s’est appuyé sur les
chiffres des instituts de statistiques nationaux, consolidés et complétés par sa connaissance des marchés.
2
  Ces chiffres proviennent de l’étude de la DARES de 2004 (Premières information, Premières synthèses,
« Le télétravail en France ») sur la base des chiffres 1999-2002 de l’Enquête permanente sur les
conditions de vie des ménages (enquête dite « PCV ») de l’INSEE.
3
  Chiffre 2005 de l’enquête Conditions de travail menée par la DARES. Il correspond à la « proportion de
salariés qui utilisent à leur domicile un ordinateur pour leurs activités professionnelles ».
4
  Selon l’enquête SIBIS de 2002, les télétravailleurs mobiles sont ceux qui travaillent, au moyen des TIC,
plus de 10 heures par semaine, à distance de leur lieu de travail ou de leur domicile.
5
  Les chiffres à l'intersection des dernières colonnes et des lignes de couleur bleue sont issus de
l’enquête SIBIS de 2002, menée selon une méthodologie fiable et harmonisée au niveau européen. Pour
ces deux raisons, malgré leur relative ancienneté, ces données sont considérées comme des chiffres de
référence, dans ce tableau et dans la figure n° 2.
6
  Dans l’enquête européenne sur les conditions de travail, le nombre total de télétravailleurs est divisé en
deux catégories : ceux travaillant en quasi-totalité à domicile et ceux y travaillant entre un quart et trois
quarts du temps.
7
  Chiffres de 2005 issus de l’enquête sociale générale de Statistique Canada. Les chiffres de 2008 sont en
cours de traitement.
8
  Chiffres de 2006 issus de l’enquête de l’Agence danoise des statistiques (Danmarks Statistik). 4 % des
personnes actives interrogées déclarent « télétravailler régulièrement depuis leur domicile » (nous assimilons
cela à plus de deux jours par semaine) contre 21,7 % qui déclarent « télétravailler occasionnellement
depuis chez elles » (nous assimilons cela à un ou deux jours de télétravail).
9
  Chiffres Eurofound (Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail) 2005,
pour l’UE-27.




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Forme de travail
                             1-2 jours    > 2 jours                                                 TOTAL
                > 8 h par                                 À             Nomades     Indépen-
    Pays                        par          par                                                 (définition de
                  mois 1                                domicile         Mobiles      dants
                             semaine      semaine                                                  référence)
                   32.4           -            -               -            -           -           14 1-25 2
    Finlande         -           4.7          11.0             -          19.7          -            21.8
                     -                 11.0                2.0              -           -            13.0
                    5.0           -            -           4.3              -           -             7.1 3
    Italie           -           0.8          1.7              -          14.1          -             9.5
                     -                 2.9                 1.0              -           -             3.9
    Japon          24.0           -            -               -        12.4-37.4    2.7-8.6       15.2-46 4
    Monde           3.5           -            -               -            -           -              -
                     -            -            -               2            -           -            8-10 5
    Norvège
                     -            -            -               -            -           -            11.6 6
                                 9.0          11.6                        19.6                       26.4
    Pays-Bas
                                       11.2                2.8                                       14.0
                   22.3           -            -           2.2            6.67          -             8.8 8
    Royaume-
                     -           2.4          8.5              -          18.9          -            17.3
    Uni
                     -                 6.1                 3.5              -           -             9.6
                                                                                9
                   26.8           3            1           1.6             18           -            5.4 10
    Suède            -           5.3          9.5                         19.3          -            18.7
                     -            -            -               -            -           -             15
                                                                   11
                     -            -            -          0.5              8.2          -              -
    Suisse           -           4.2          7.1              -          16.8          -            16.8
                     -                 6.7                 1.6              -           -             8.3




1
   Ce chiffre est considéré comme le chiffre de référence par la Mission économique finlandaise.
2
   Le chiffre de 25 % de télétravailleurs en Finlande est fourni par l’étude européenne sur les conditions de
travail (Eurofound).
3
   Chiffres pour 2005.
4
   Pour l’année 2008, le ministère japonais du Territoire, des Infrastructures et des Transports a estimé à
15,6 % la part des télétravailleurs dans la population active au sens restreint (travailleurs utilisant des TIC
à des fins professionnelles en dehors de leur lieu de travail au moins 8 heures par semaine) et à 46 % au
sens large (travailleurs qui utilisent des TIC pour travailler en dehors de leur lieu de travail).
5
   Chiffres de 2007.
6
   Chiffres 2005 de Eurofound.
7
   Télétravailleurs travaillant dans différents endroits mais utilisant leur domicile comme base.
8
   Hormis pour la colonne 1, ces chiffres de 2007 sont issus de l’Office for National Statistics (ONS), qui
retient une définition très large du télétravail (« les télétravailleurs sont des personnes qui travaillent
principalement depuis leur domicile personnel ou sur différents lieux lorsqu’elles sont en déplacement en
utilisant leur domicile comme base et qui ont recours à la fois au téléphone et à un ordinateur pour
poursuivre leur activité depuis leur domicile »).
9
   Selon l’agence suédoise chargée de l’environnement (Arbetsmiljöverket), 18 % des employés.
10
   En 2005, il y avait 5,4 % de télétravailleurs au sens strict selon l’office suédois des statistiques (SCB),
contre 6,8 % en 2003.
11
   Chiffres de 2006 issus de l’enquête suisse sur la population active (ESPA) menée par l’Office fédéral de
la statistique (OFS). Le télétravail à domicile pur est peu développé (0,5 % de la population active) ; en
revanche, le télétravail mobile représentait 8,2 % de la population active en 2006, selon la définition de
l’OFS (« le télétravail partiel à domicile, utilisé dans les cas où une partie seulement du travail peut être
effectué à la maison »).



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Annexe 8
             Les corrélations entre l’essor du télétravail
             et quelques indicateurs socioéconomiques


En étudiant les données d’une vingtaine de pays, il apparaît que l’essor du télétravail
           1
est corrélé :
    a. faiblement avec le climat (coefficient de corrélation C = – 0,24 pour les tempé-
       ratures moyennes, C = 0,03 pour l’amplitude des températures, C = – 0,16 pour
       le minimum des températures…), la densité de population (C = 0,27), le degré
                                                                                      2
       de tertiarisation de l’économie (C = 0,3), le taux de syndicalisation
       (C = 0,12) ;
    b. moyennement avec le travail d’équipe (C = 0,4), la rotation et la complexité
       des tâches (respectivement C = 0,48 et C = 0,42) ;
    c. fortement avec le management par objectifs (C = 0,67), l’accès à l’Internet
       (C = 0,68) et les contacts professionnels hors des horaires normaux de bureau
       (C = 0,59) ;
    d. très fortement avec le déploiement des infrastructures numériques (C = 0,81
       pour accès à l’Internet à haut débit, C = 0,8 pour accès à bas débit pour les
       chiffres de 2002).

Le développement est donc faiblement lié – contrairement à ce que l’on pourrait croire
a priori – aux paramètres géographiques au sens large et à la macrostructure de
l’économie. En revanche, l’incidence du management par objectifs et de l’accès à
l’Internet semble importante, ils peuvent constituer les deux facteurs clés de l’essor
du télétravail.




1
  Pour C = [0,20-0,40] corrélation faible, C = [0,4-0,6] corrélation moyenne, C = [0,6-0,8] corrélation bonne,
C > 0,8 corrélation élevée. Selon les paramètres étudiés et la disponibilité des données pour l’année
2002, le nombre de pays pris en compte pour les corrélations varie.
2
  Le taux de syndicalisation pourrait indiquer la nature du dialogue social.



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Sources : enquête SIBIS 2002, Eurostat, Eurofound, CIA Worldbook, OCDE, World Economic Forum,
                                                        The Economist, Bureau International du Travail




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Annexe 9
                                   Liste des tableaux et figures


Tableau n° 1 : Comparaison des principaux éléments du cadre juridique français
    relatif au télétravail ............................................................................................................... 15

Tableau n° 2 : Nombre de télétravailleurs dans les pays de l’OCDE, comparaison
    des principales sources disponibles (données en pourcentage) ........................................ 19

Tableau n° 3 : Définitions du télétravail retenues pour les enquêtes ........................................ 19

Tableau n° 4 : Part des entreprises pratiquant le télétravail selon leur secteur d’activité
    et leur taille (France, entreprises de plus de 10 salariés, 2008 ; données en pourcentage) .... 22

Tableau n° 5 : Le télétravail selon la catégorie socioprofessionnelle, le sexe et l’âge
    (période 1999-2003 – données en pourcentage)................................................................. 24

Tableau n° 6 : Usages professionnels de l’Internet et besoins de bande passante
    associés ............................................................................................................................... 38

Tableau n° 7 : Freins à l’essor du télétravail, classés selon quatre thèmes .............................. 40

Tableau n° 8 : Prise en charge des équipements informatiques par les entreprises
    françaises des secteurs des études, du conseil et de l’informatique ................................. 45

Tableau n° 9 : Formalisation du travail à domicile aux horaires de bureau............................... 46

Tableau n° 10 : Caractéristiques du télétravail .......................................................................... 47

Tableau n° 11 : Comparatif du cadre juridique du télétravail dans 23 pays de l’OCDE ........... 49

Tableau n° 12 : Conditions de travail des télétravailleurs français............................................ 56

Tableau n° 13 : Prise en charge assurantielle du domicile en cas de télétravail,
    pour les secteurs français de l’informatique et du conseil .................................................. 60

Tableau n° 14 : Probabilité de télétravail pour 82 professions (situation en 2008) ................... 63

Tableau n° 15 : Probabilité future de télétravail pour 82 professions (situation en 2015/2020).... 66

Tableau n° 16 : Influence du télétravail sur les conditions de travail de 862 salariés belges ... 78

Tableau n° 17 : Analyse des principaux facteurs de développement du télétravail.................. 96




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Figure n° 1 : Historique du développement du télétravail en France ........................................ 13

Figure n° 2 : Position des pays de l’OCDE en matière de télétravail au début
    des années 2000.................................................................................................................. 17

Figure n° 3 : Population salariée pratiquant le télétravail plus de 8 heures par mois
    sur la période 2000-2010 (données en pourcentage).......................................................... 18

Figure n° 4 : Diffusion du télétravail dans les pays de l’OCDE.................................................. 20

Figure n° 5 : Corrélation entre management par objectifs et télétravail .................................... 35

Figure n° 6 : Corrélation entre densité de population et télétravail ........................................... 39

Figure n° 7 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble de la population active
    occupée en 2008 ................................................................................................................. 65

Figure n° 8 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble de la population active
    occupée en 2015/2020 ........................................................................................................ 67

Figure n° 9 : Intention de départ en retraite au regard de la santé et des conditions
    de travail des retraités.......................................................................................................... 68

Figure n° 10 : Taux d’emploi des 55-64 ans dans certains pays de l’OCDE (données 2008) ..... 69

Figure n° 11 : Le télétravail selon BMW..................................................................................... 81

Figure n° 12 : Taux de télétravailleurs selon la taille de l’organisation, le secteur
    économique et le niveau de maturité du projet de télétravail (onze pays considérés) ....... 83

Figure n° 13 : Schéma de mise en place du télétravail agréé par un regroupement
    d’organisations belges......................................................................................................... 84

Figure n° 14 : Schéma de mise en place du télétravail agréé par treize entreprises
    américaines du secteur high-tech ....................................................................................... 85

Figure n° 15 : Exemple de plan d’action « Télétravail » pour la fonction publique américaine.... 87

Figure n° 16 : Productivité en fonction du nombre de jours télétravaillés par mois.................. 94

Figure n° 17 : Évolution de la productivité en fonction de la part du temps passé
    en télétravail ......................................................................................................................... 94

Figure n° 18 : Exemple d’économies de charges immobilières, selon certaines hypothèses
    (en pourcentage des coûts immobiliers).............................................................................. 95




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Annexe 10

                    Abréviations, sigles et acronymes


ACE          Accord-cadre européen (intervenu entre partenaires sociaux européens en
             2002)
ADESATT      Association d’étude et de suivi de l’aménagement du temps de travail dans les
             métiers du savoir
ADSL         Asymmetric digital subscriber line
AFEP         Association française des entreprises privées
AFPA         Association nationale pour la formation professionnelle des adultes
AFTT         Association française du télétravail et des téléactivités
ANDT         Association nationale pour le développement du télétravail et de la téléformation
ANI          Accord national interprofessionnel (transposition de 2005 par les partenaires
             sociaux français, de l’accord européen de 2002)
APEC         Association pour l’emploi des cadres
ARCEP        Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes
AT/MP        Accident du travail / maladie professionnelle
BIT          Bureau international du travail
CAO          Conception assistée par ordinateur
CAS          Centre d’analyse stratégique
CATRAL       Agence régionale pour l’aménagement du temps de travail
CCI          Chambre de commerce et d’industrie
CDD          Contrat à durée déterminée
CDI          Contrat à durée indéterminée
CEEP         Centre européen des entreprises à participation publique et des entreprises
             d’intérêt économique général
CEFAC        Centre d’études et de formation des assistants techniques du commerce,
             des services et du tourisme
CE           Comité d’entreprise
CES          Confédération européenne des syndicats
CFE-CG       Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres
CFDT         Confédération française démocratique du travail
CFTC         Confédération française des travailleurs chrétiens
CGIET        Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies
CGPME        Confédération générale des petites et moyennes entreprises
CGT          Confédération générale du travail
CHSCT        Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail




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CIGREF       Club informatique des grandes entreprises françaises
CIF          Congé individuel de formation
CIR          Crédit d’impôt recherche
CNAF         Caisse nationale d’allocations familiales
CNAMTS       Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés
CNAV         Caisse nationale d’assurance vieillesse
CNIL         Commission nationale de l’informatique et des libertés
CNNC         Commission nationale de la négociation collective
COCT         Conseil d’orientation sur les conditions de travail
CPAM         Caisse primaire d’assurance maladie
CREDOC       Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie
DARES        Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques
DATAR        Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale
DGAFP        Direction générale de l’administration et de la fonction publique
DGI          Direction générale des impôts
DGT          Direction générale du travail
DIACT        Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires
DIF          Droit individuel à la formation
DREES        Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques
DRH          Direction des ressources humaines
DS           Délégué syndical
DSI          Direction des systèmes informatiques
ELMUT        Espaces locaux mutualisés de télétravail
FAP          Familles professionnelles
FAQ          Frequently asked questions – Foire aux questions
FDI          Forum des droits sur l’Internet
FFSA         Fédération française des sociétés d’assurances
FO           Force ouvrière
GDR          Groupement de recherche
GEMA         Groupement des entreprises mutuelles d’assurance
GPS          Global positioning system
INSEE        Institut national de la statistique et des études économiques
IRP          Instances représentatives du personnel
LOLF         Loi organique relative aux lois de finances
LTE          Long term evolution
MEDEF        Mouvement des entreprises de France
OCDE         Organisation de coopération et de développement économiques
OFS          Office fédéral de la statistique
ONQ          Ouvrier non qualifié



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OQ           Ouvrier qualifié
PME          Petite et moyenne entreprise
RS           Représentant syndical
RSE          Responsabilité sociétale des entreprises
SESSI        Service des études et des statistiques industrielles
SIBIS        Statistical indicators benchmarking the information society (Indicateurs
             statistiques comparatifs de la société de l’information)
SIG          Service d’information du Gouvernement
THD          Très haute définition
TIC          Technologies de l’information et de la communication
TPE          Très petite entreprise
UEAPME       Union européenne de l’artisanat et des petites et moyennes entreprises
UNICE        Union des confédérations de l’industrie et des employeurs européens




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Annexe 11

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Le développement du télétravail dans la société numérique de demain

  • 1. PREMIER MINISTRE Novembre 2009 Rapports et documents Le développement du télétravail dans la société numérique de demain
  • 2. Centre d’analyse stratégique 18, rue de Martignac – 75700 Paris cedex 07 www.strategie.gouv.fr
  • 3. Le développement du télétravail dans la société numérique de demain Cabinet Roland Berger Jérôme Ferhenbach, Frédéric Granel et Damien Dufort Centre d’analyse stratégique Tristan Klein et Jean-Loup Loyer avec le concours des Ambassades
  • 5. Introduction ................................................................................................................................ 7 Messages clés .......................................................................................................................... 9 Chapitre 1 De grands espoirs, un développement faible .............................................................. 12 1. La notion de télétravail a changé au gré des évolutions technologiques et s’est stabilisée grâce aux accords entre les partenaires sociaux............................. 12 2. Un retard français par rapport aux autres pays de l’OCDE, en particulier pour le secteur public ....................................................................................................... 16 Chapitre 2 De nombreux obstacles ........................................................................................................ 26 1. L’examen des appréhensions à l’égard du télétravail fournit un cadre d’analyse des freins à son essor ....................................................................................................... 26 2. Un relatif manque de confiance entre partenaires sociaux expliquerait en partie les faibles avancées du télétravail en France.................................................................. 28 3. Des obstacles culturels souvent à l’origine de blocages organisationnels .................. 32 4. La diffusion des technologies explique en partie le développement du télétravail ..... 37 5. La géographie n’est pas un obstacle majeur au développement du télétravail .......... 39 6. Récapitulatif des principaux obstacles à l’essor du télétravail ..................................... 39 Chapitre 3 Les risques d’abus .................................................................................................................. 44 1. Les abus restent rares, bien que probablement sous-estimés ..................................... 44 2. La protection contre les abus en France et dans les pays de l’OCDE ......................... 49 3. Les télétravailleurs se déclarent majoritairement satisfaits et disposent généralement de meilleures conditions de travail .......................................................... 55 4. Les abus liés au télétravail restent marginaux mais quelques incertitudes de nature juridique demeurent ......................................................................................... 57 Chapitre 4 Un fort potentiel de développement ................................................................................ 61 1. Le télétravail pourrait concerner jusqu’à 50 % de la population active en 2015, contre 30 % aujourd’hui ................................................................................................... 61 2. Le télétravail ne peut augmenter que marginalement le taux d’emploi des seniors ... 68 3. Sous certaines conditions, le télétravail peut être une alternative aux congés maladie . 71 4. Le télétravail peut contribuer à mieux concilier activité professionnelle et périodes prénatale et postnatale (hors congé maternité) .......................................... 75
  • 6. Chapitre 5 La nécessaire implication de tous les acteurs ............................................................ 77 1. Le télétravail procure des avantages décisifs dans de nombreux domaines .............. 77 2. Les « success stories » et les bonnes pratiques ............................................................ 81 3. Les initiatives des pouvoirs publics contribuent à l’essor du télétravail....................... 87 4. Les facteurs de développement et les cinq facteurs clés de succès d’un projet de télétravail ....................................................................................................................... 96 Recommandations .................................................................................................................. 100 ANNEXES Annexe 1 : Lettre de saisine ......................................................................................................... 121 Annexe 2 : Liste des personnes interrogées .............................................................................. 123 Annexe 3 : L’évolution des définitions du télétravail depuis 1993............................................ 126 Annexe 4 : Tableau récapitulatif des définitions du télétravail pour la France ........................ 128 Annexe 5 : Quelques définitions du télétravail à l’étranger ....................................................... 129 Annexe 6 : Les éléments de jurisprudence ................................................................................. 132 Annexe 7 : Tableau détaillé des chiffres relatifs au télétravail, par catégorie de télétravailleurs ...................................................................................................... 135 Annexe 8 : Les corrélations entre l’essor du télétravail et quelques indicateurs socioéconomiques ..................................................................................................... 138 Annexe 9 : Liste des tableaux et figures ..................................................................................... 141 Annexe 10 : Abréviations, sigles et acronymes.......................................................................... 143 Annexe 11 : Références bibliographiques .................................................................................. 146
  • 7. 1 Au regard de la situation dans de nombreux pays industrialisés, le télétravail est encore peu répandu en France. Pour favoriser son développement tout en évitant les éventuels abus liés au télétravail subi, la secrétaire d’État à la Prospective et au Développement de l’Économie numérique a demandé au Centre d’analyse stratégique d’étudier la situation en France et dans les pays de l’OCDE. Le télétravail préfigure sous bien des aspects les nouvelles formes du travail de demain, à l’ère du numérique et de la société de la connaissance. Le terme même de « télétravail » est d’ores et déjà dépassé dans les pays qui le pratiquent avec enthousiasme, au profit de celui, plus englobant, plus flexible aussi, de « travail mobile » ou de « e-travail ». Les technologies numériques modèlent chaque jour davantage nos modes de vies et par conséquent nos façons de travailler : Internet, les ordinateurs portables et les télé- phones mobiles trouvent des applications dans tous les domaines d’activité et sont déjà porteurs de transformations importantes du travail. Elles ouvrent des opportunités inédites à l’essor du télétravail : dans les années à venir, l’amélioration de la capacité d’innovation et les gains de productivité permis par les évolutions technologiques seront considérables, que ce soit à travers les applications collaboratives (virtuali- sation, cloud computing et Software as a Service) ou les outils de mobilité (netbooks et smartphones, 4G, LTE/WiMAX, réseaux sans couture…). Ces technologies devraient non seulement s’appliquer aux télétravailleurs, au sens de la loi, mais également permettre à la plupart d’entre nous de bénéficier d’une plus grande flexibilité dans le travail. De ce fait, les technologies numériques remettent en cause les schémas établis, e instaurés par l’industrialisation à partir du XIX siècle, de l’unité de temps et de lieu. Des questions telles que le découplage entre activité professionnelle et locaux de 2 l’entreprise ou encore les nouvelles porosités entre vie privée et vie professionnelle se posent avec une plus grande acuité dans le cas du télétravail. Ainsi, son développement ne peut se faire sans que soient étudiés les bouleversements sociaux induits par l’usage des TIC. Dans de nombreux domaines, le télétravail présente des avantages importants : il améliore les conditions de travail des salariés et la conciliation entre vie personnelle et 1 Ce rapport adopte la définition suivante du télétravail, large et consensuelle : « Le télétravail peut être défini comme étant le travail qui s’effectue, dans le cadre d’un contrat de travail, au domicile ou à distance de l’environnement hiérarchique et de l’équipe du travailleur à l’aide des technologies de l’information et de la communication ». Source : Forum des droits sur l’Internet (décembre 2004), Recommandation « Le télétravail en France ». 2 Déjà en 1995, moins de 40 % des actifs travaillaient en un lieu fixe, uniquement du lundi au vendredi. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 -7- www.strategie.gouv.fr
  • 8. vie professionnelle ; il contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ; il bouscule les modèles organisationnels et managériaux obsolescents ; il favorise l’accès à l’emploi des populations exclues du marché du travail, contribuant de ce fait à l’inclusion sociale ; il permet de réduire les impacts sanitaires de la pollution dans les centres urbains… Bref, le télétravail contribue à une meilleure qualité de vie, à la réduction des dépenses sociales ou encore à la compétitivité de notre économie. Dans tous ces domaines, il apporte des éléments de réponse adaptés aux défis socioéconomiques des prochaines décennies. Parmi ces défis figure en bonne place l’amélioration des relations et des conditions de travail. Le télétravail est ici un instrument de souplesse entre employeur et employé. Il va de pair avec le travail intellectuel, la société de la connaissance, une économie de services à forte valeur ajoutée. Ses prérequis sont la confiance entre employeur et employé, le management selon des objectifs concertés, le dialogue entre tous les acteurs de l’organisation. Néanmoins, le télétravail ne constitue pas le remède miracle. En particulier, il remet en cause trois aspects fondamentaux du travail salarié et de manière plus générale le Code du travail : – l’employeur d’un salarié, voire son supérieur hiérarchique direct, peuvent se trouver sur un autre continent, à des milliers de kilomètres de distance. Dès lors, c’est la notion de subordination et surtout ses modalités qui se trouvent profondément modifiées, en particulier pour les « travailleurs du savoir ». Cette subordination peut aussi bien diminuer que s’accroître pour prendre la forme d’une « télédisponibilité généralisée » ; – la notion de temps de travail est remise en cause, notamment par le débordement du travail sur la sphère privée. Surtout, ce sont les modalités de contrôle du temps de travail qui sont remises en cause, bien que les outils technologiques peuvent assurer un contrôle très précis et détaillé ; – les TIC peuvent affaiblir les collectifs de travail, par la constitution de réseaux multiformes, horizontaux et transversaux, introduisant parfois une porosité entre l’espace de l’entreprise et d’autres communautés de travail ou de non-travail. Par conséquent, pour que les gains apportés par le télétravail soient significatifs et pérennes, son déploiement dans une organisation doit être progressif et adapté, suivant certaines étapes bien identifiées. À cette condition, ses inconvénients potentiels sont largement contrebalancés par de formidables opportunités. Ce rapport tente d’esquisser une vue d’ensemble du télétravail, de ses avantages comme de ses désagréments, en adoptant une démarche pragmatique et systémique. Le premier chapitre expose la situation de la France au regard de ses partenaires de l’OCDE, le deuxième présente les principaux obstacles à la mise en place du télétravail. Le troisième chapitre examine le cadre juridique du télétravail et les abus constatés. Le potentiel du télétravail, aujourd’hui et à l’horizon 2015-2020 fait l’objet du quatrième chapitre. Le cinquième et dernier chapitre expose un certain nombre de bonnes pratiques rencontrées dans les pays étrangers, les administrations et les entreprises, préparant ainsi la transition vers les recommandations. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 -8- www.strategie.gouv.fr
  • 9. 1. Depuis au moins dix ans, la France est en retard sur les principaux pays de l’OCDE en matière de développement du télétravail, quelles que soient les sources ou les approches statistiques. Dans les pays scandinaves et anglo- saxons notamment, il concerne deux à trois fois plus de salariés. En particulier, la France apparaît très en retard pour le déploiement du télétravail dans l’administration, puisque dans la plupart des pays de l’OCDE, le cadre juridique du télétravail s’applique aussi aux agents publics. Les principaux leviers pour le développement du télétravail en France se situent hors du cadre juridique et sont au nombre de quatre : – une évolution de la culture managériale française en lien avec des transformations des modes d’organisation du travail et de la production pour les adapter à l’économie de la connaissance ; – une meilleure connaissance des gains envisageables grâce au télétravail, et plus généralement grâce aux TIC, favorisée par le développement d’informations de référence sur le sujet ; – la mise à disposition d’infrastructures numériques de qualité à l’échelle de l’ensemble du territoire, mixant haut débit, 3G et télécentres ; – la diffusion d’outils techniques performants, accessibles, fiables et de moins en moins onéreux, préalable à tout télétravail formalisé au sein des entreprises. Les questions de sécurité des données et de gestion de la vie privée doivent cependant faire partie des réflexions sur les technologies. 2. Le télétravail et plus largement le travail avec des outils numériques transforment profondément les relations de travail. En effet, ils mettent à mal les concepts usuels du temps de travail et les frontières entre vie professionnelle et vie privée. Par ailleurs, ils interrogent le lien de subordination du travail salarié. L’un des enjeux majeurs du développement du télétravail aujourd’hui est de donner une plus grande flexibilité du travail au salarié en lui permettant de mieux concilier vie familiale et vie professionnelle, par exemple, d’interrompre sa journée de travail pour aller chercher un enfant à l’école ou rendre visite à une personne âgée puis de reprendre son travail en soirée. Les marges principales de progression du télétravail en France, comme à l’étranger, résident dans la diffusion du télétravail partiel, un à deux jours par Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 -9- www.strategie.gouv.fr
  • 10. semaine. En effet, un temps complet peut poser des problèmes d’isolement du salarié et réduire les gains de productivité associés au télétravail, le maximum de productivité étant atteint pour un ou deux jours de télétravail par semaine. A contrario, les effets positifs pour les entreprises (immobilier) et pour la collectivité (déplacements) sont plus nets en cas de diffusion de ce mode d’organisation à une grande partie des salariés (20 % ou 30 % minimum). 3. Pour prendre son plein essor, le télétravail doit continuer à bénéficier de la règle actuelle du « double volontariat ». Il serait donc préjudiciable de vouloir l’encadrer trop strictement et de manière trop uniforme par la loi. Le télétravail répond aux attentes spécifiques de nombreux salariés (conciliation vie familiale et vie professionnelle) et requiert une confiance entre les deux parties. Au-delà, des principes adaptés à chaque entreprise devraient être négociés avec les représentants des salariés. 4. La proposition de loi actuelle constitue un socle propice pour le développement du télétravail sans explosion d’un télétravail subi ; elle apparaît relativement protectrice pour les salariés sans pour autant dissuader les entreprises qui souhaiteraient mettre en place le télétravail. L’enjeu aujourd’hui réside dans l’effectivité des instances de contrôle des abus et de non-respect du cadre légal et conventionnel : institutions représentatives du personnel, Inspection du travail et conseils de prud’hommes. Une formation de ces acteurs au cadre juridique du télétravail apparaît nécessaire. Une clarification des règles d’accidents du travail (affirmation du principe de présomption d’accidents du travail au bénéfice du télétravailleur) et du régime d’assurance habitation et de sa prise en charge par l’employeur pourraient toutefois constituer deux ajustements possibles à la proposition de loi. Ces clarifications sont demandées par les entreprises françaises ayant adopté le télétravail. En effet, jusqu’à présent prévalent des principes simples de prise en charge par l’employeur tandis que les problèmes sont réglés au cas par cas. 5. Le potentiel de développement du télétravail, pour une partie de l’exercice de la profession, pourrait concerner jusqu’à 40 % à 50 % des emplois à l’horizon de dix ans. Toutes les fonctions ne sont pas « télétravaillables », notamment dès lors qu’elles n’utilisent pas les TIC. À cet égard, les données disponibles en matière de prospective des métiers et des qualifications montrent que les métiers qui vont se développer le plus ne sont pas en général propices au télétravail (assistantes maternelles, aides à domicile, aides-soignants, infirmières, ouvriers qualifiés des industries de process, ouvriers qualifiés de la manutention, employés de maison, etc.). Le développement du télétravail repose donc sur une diffusion large et importante dans les métiers qui lui sont particulièrement propices (emplois de cadres et d’ingénieurs, fonctions administratives support, fonctions intellectuelles, etc.). 6. Dans aucun des pays de l’OCDE étudiés n’ont été mentionnés des abus de télétravail subi lors d’un congé maternité ou d’un arrêt maladie : – le congé maternité est un droit de la femme qui ne saurait être remis en question ; le télétravail peut néanmoins être source de progrès social Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 10 - www.strategie.gouv.fr
  • 11. avant ou après le congé maternité. Il permet en effet à la future mère d’économiser ses efforts en diminuant le temps de transport avant son congé maternité, ou à l’un des deux parents de passer plus de temps avec le jeune enfant dans la période postérieure. Il appartient à l’État non de légiférer sur un tel sujet, mais d’encourager les entreprises à proposer à leurs salariés un télétravail à temps partiel dans ces périodes, en s’inspirant des bonnes pratiques existantes tant en France qu’à l’étranger (pour les femmes enceintes par exemple) ; – un arrêt maladie peut être accordé à un salarié empêché de se rendre à son travail et non de l’exercer (une entorse par exemple). Néanmoins, dans le cas d’un congé maladie, la pratique du télétravail doit être encadrée pour éviter d’éventuels abus de télétravail subi. Pour répondre à certains empêchements particuliers, il pourrait être envisagé de réfléchir à un certificat médical d’aptitude au télétravail, délivré par un médecin compétent, qui permettrait au salarié, s’il le souhaite, et si son entreprise en est d’accord, de continuer à exercer son activité. Cette situation, qui constituerait une solution alternative à l’arrêt maladie, reste cependant à approfondir : elle n’est envisageable que dans la mesure où elle apportera un avantage à l’État, au salarié et à l’entreprise. Il convient de souligner que la mission n’a repéré aucune disposition juridique de cette nature dans les dix- huit pays étudiés. 7. Le télétravail n’est pas spontanément destiné à favoriser l’emploi des seniors. Les entreprises qui l’ont mis en œuvre n’ont pas ciblé cette catégorie de travailleurs, ni en France ni à l’étranger. Le cumul emploi-retraite ne constitue donc pas une modalité de déploiement du télétravail dans les pays pionniers. Quand ils travaillent, les retraités préfèrent souvent conserver un contact avec le collectif de travail, notamment en France. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 11 - www.strategie.gouv.fr
  • 12. De grands espoirs, un développement faible 1. La notion de télétravail a changé au gré des évolutions technologiques et s’est stabilisée grâce aux accords entre les partenaires sociaux 1.1. La montée en puissance d’Internet a révélé tout le potentiel du télétravail La notion de télétravail reste difficile à cerner, malgré l’existence de pratiques de travail à distance depuis au moins trente ans et de constructions de typologies 1 pertinentes . Dans un premier temps, le télétravail a revêtu une acception essentiellement 2 technique (à l’image du « telework » anglais). Au fil des rapports et des études, le champ s’est élargi au « travail mobile », inspiré du monde anglo-saxon (« mobile work » ou « e-work »). Ce glissement consacrait le télétravail comme un mode d’organisation du travail parmi d’autres, plutôt que comme l’utilisation de technologies particulières (cf. annexe 3). La définition, stabilisée depuis l’accord-cadre européen de 2002, pourrait se résumer ainsi : Le télétravail peut être défini comme le travail qui s’effectue, dans le cadre d’un contrat de travail, au domicile ou à distance de l’environnement hiérarchique et de l’équipe du travailleur, à l’aide des technologies de l’information et de la communication. 1 Par exemple, le Forum des droits sur l’Internet (FDI) a établi en 2004 une typologie intéressante (télétravail à domicile, nomade, alterné, en télécentre), largement reprise par les partenaires sociaux. 2 Thierry Breton, Les téléservices en France : quels marchés pour les autoroutes de l’information ?, rapport au ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire et au ministre des Entreprises et du Développement économique, Paris, La Documentation française, 1994. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 12 - www.strategie.gouv.fr
  • 13. Figure n° 1 : Historique du développement du télétravail en France Source : Caisse des Dépôts et Consignations, AFTT, ANDT, analyse CAS Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 13 - www.strategie.gouv.fr
  • 14. 1.2. La définition française faisant aujourd’hui consensus est basée en grande partie sur l’accord-cadre européen sur le télétravail Par l’accord national interprofessionnel (ANI) du 19 juillet 2005, les partenaires sociaux français ont transposé, dans le délai imparti de trois ans, l’accord-cadre européen de 2002, signé par les partenaires sociaux européens (CES, UNICE/UEAPME, CEEP). Centré sur le télétravail salarié, il ne concerne par définition que le secteur privé, excluant les agents publics et les travailleurs indépendants, bien que ces derniers soient souvent des télétravailleurs en pratique. La définition retenue s’inspire des travaux du Forum des droits sur l’Internet (FDI). Elle précise qu’un télétravailleur est un salarié utilisant les TIC de manière régulière – mais pas forcément à temps complet – pour effectuer une tâche qu’il aurait pu accomplir dans les locaux de l’entreprise. Elle se distingue de la définition de l’accord-cadre européen en ce qu’elle reconnaît l’existence de plusieurs catégories de télétravailleurs, en particulier les travailleurs nomades, auxquels il est fait explicitement référence. L’ANI décrit le télétravail comme une réalité complexe en permanente évolution, dont le FDI a produit une typologie : – le télétravail à domicile concerne le salarié travaillant la majorité du temps à la maison et se rendant de temps en temps dans les locaux de son employeur ; – le télétravailleur nomade conserve un poste de travail physique dans l’entreprise mais utilise les TIC dans ses déplacements, à la maison ou chez ses clients pour se connecter au système d’information (SI) de l’entreprise ; – le télétravail en télécentres – qu’ils soient publics ou réservés à une seule entreprise – permet de distinguer clairement vie privée et vie professionnelle, et de maintenir les contacts entre salariés ; – le télétravailleur en réseau peut être localisé dans un site – celui de l’entreprise, dans un télécentre ou chez le client – et travailler sous le contrôle d’un manager à distance, éventuellement au sein d’une « équipe virtuelle ». 1.3. La proposition de loi « Pour faciliter le maintien et la création d’emplois » ne modifie pas la définition du télétravail mais inscrit certaines pratiques dans la loi La proposition de loi (texte n° 298 adopté par l’Assemblée nationale le 9 juin 2009) reprend la plupart des termes de l’ANI. Cette initiative de l’Assemblée nationale s’inscrit dans la continuité des travaux parlementaires menés sur la question depuis 2006. En revanche, contrairement à l’ANI, la proposition de loi ne mentionne plus les télétravailleurs nomades de manière explicite, ce qui laisse croire que la segmentation entre télétravailleurs nomades, à domicile, en réseau et dans des télécentres n’a plus lieu d’être. 1.4. La proposition de loi de 2009 au regard des textes conventionnels récents sur le télétravail À l’instar de la quasi-totalité des pays européens, les partenaires sociaux français ont donc transposé au niveau national la plupart des termes de l’accord-cadre européen de 2002. La spécificité française réside dans la volonté des parlementaires d’inscrire les dispositions des accords entre partenaires sociaux dans le Code du travail. Le Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 14 - www.strategie.gouv.fr
  • 15. 1 tableau n° 1 récapitule les différences principales entre les textes français encadrant le télétravail. Tableau n° 1 : Comparaison des principaux éléments du cadre juridique français relatif au télétravail Accord national Accord-cadre européen Proposition de loi interprofessionnel 2002 (ACE 2002) 2009 2005 (ANI 2005) Forme d’organisation utilisant les TIC dans le cadre Identique à l’ACE 2002 avec Identique à l’ACE 2002 (le Définition d’un contrat, effectué mention explicite des télétravail nomade n’est plus régulièrement hors du local télétravailleurs « nomades » mentionné explicitement) de l’employeur • Identique à l’ACE 2002, • Général, le contrat de avec un délai de travail ou son avenant • Volontaire pour les 2 parties prévenance pour revenir en précise les modalités de Volontariat- • Réversibilité a priori double arrière passage (ou de retour) en réversibilité définie par un accord • Identique à l’ACE 2002 et (du) télétravail individuel et/ou collectif priorité d’accès à un poste • Priorité pour retrouver un dans les locaux emploi dans les locaux Un télétravailleur est un Statut Non, mêmes droits que les Identique à l’ACE 2002 salarié (pas plus de particulier autres salariés précisions) L’employé se conforme aux Identique à l’ACE 2002, en Protection règles édictées par suivant les préconisations de Néant des données l’employeur la CNIL en la matière Identique à l’ACE 2002 et Pas de dispositions plages horaires pour contacter Surveillance proportionnée, particulières si ce n’est la Vie privée respectueuse de la vie privée le salarié + consultation du mention de plages horaires comité d’entreprise ou des pour contacter le salarié délégués du personnel Charges définies dans le Prise en contrat de travail : Identique à l’ACE 2002 charge des • équipement Identique à l’ACE 2002 et à l’ANI 2005 équipements • coûts de connexion directs • appui technique Identique à l’ACE 2002 et avis aux délégués du L’employé applique les personnel/CHSCT + accord Santé et directives de l’employeur, Pas de mentions/dispositions du salarié dans le cas du sécurité responsable de la santé et de particulières télétravail à domicile + droit la sécurité de demander une visite d’inspection Gestion par l’employé, avec des charges de travail Mêmes principes que l’ACE Organisation équivalentes à celles des Pas de mentions/dispositions 2002 mais plus de précisions du travail autres employés particulières pratiques L’employeur prévient l’isolement (rencontres…) Formation sur les équipements puis mêmes Pas de mentions/dispositions Formation droits que les autres employés Identique à l’ACE 2002 particulières (carrière…) Identique à l’ACE 2002 + consultation des IRP + Droits Mêmes droits que les autres Pas de mentions/dispositions identification du télétravailleur collectifs salariés particulières sur le registre unique du personnel À la lecture de ce tableau, il apparaît que l’ANI de 2005 se fait plus précis et plus protecteur que le texte original adopté par les partenaires sociaux européens en 2002. Plus précis car il mentionne les télétravailleurs nomades, indique que le contrat de 1 Le choix des thèmes de comparaison du tableau provient de la structure de l’accord-cadre européen de 2002. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 15 - www.strategie.gouv.fr
  • 16. travail du salarié devra fixer les plages horaires durant lesquelles il pourra être contacté ou encore signale qu’un délai de prévenance pourra être mis en place pour le retour du télétravailleur dans les locaux de l’entreprise. La transposition française est également plus protectrice : elle donne au télétravailleur la priorité du retour dans les locaux, s’inspire des préconisations de la CNIL sur la protection des données et implique à plusieurs niveaux les institutions représentatives du personnel (IRP). Quant aux dispositions de la proposition de loi de 2009, elle restent plus générales : les principes fondamentaux sont présents (double volontariat, conditions de passage et du retour du télétravail, prise en charge des équipements…) tandis que les détails et les points pratiques sont renvoyés au droit commun du Code du travail, puisque le « télétravailleur est un salarié comme un autre ». 2. Un retard français par rapport aux autres pays de l’OCDE, en particulier dans le secteur public 2.1. La France appartient à l’avant-dernier des cinq groupes en matière de diffusion du télétravail Faute de définition normalisée au niveau international, la diffusion du télétravail reste difficile à mesurer par les organismes de statistique Il n’existe pas de définition harmonisée du télétravail à l’échelon du Bureau international du travail (BIT), à la différence du chômage et de l’activité. En particulier, l’accord-cadre européen n’a pas mis en place de dispositif de suivi statistique de son application. Dès lors, les données disponibles, qu’elles soient issues d’enquêtes internationales ou de sources nationales, sont difficilement interprétables. En outre, le champ des études diffère, certaines ciblant les travailleurs salariés, d’autres embrassant tous les actifs occupés. L’annexe 5 présente les définitions du télétravail relevées dans les pays étrangers. Exemples de définitions du télétravail à l’étranger La comparaison de quelques définitions du télétravail à l’étranger illustre la difficulté à mesurer cette réalité : – au Japon, le télétravail est « une méthode de travail qui, grâce à l’utilisation des moyens d’information et de télécommunication, n’est pas soumise à des conditions d’exercice liées au lieu et à la durée du travail ». Par ailleurs, les statistiques japonaises utilisent deux définitions pour mesurer la part des télétravailleurs dans la population active : le télétravail au sens restreint (travailleurs utilisant des TIC à des fins professionnelles en dehors de leur lieu de travail au moins 8 heures par semaine) et le télétravail au sens large (travailleurs utilisant des TIC pour exercer leur activité en dehors de leur lieu de travail) ; – l’Autriche considère que le télétravail est la « réalisation d’un travail à distance avec l’aide de systèmes de communication » ; – au niveau européen également, les enquêtes comparatives harmonisées adoptent des définitions différentes. Ainsi, l’enquête européenne sur les conditions de travail divise les télétravailleurs en deux catégories : ceux travaillant en quasi-totalité à domicile et ceux y travaillant entre un quart et trois quarts du temps. Et selon l’enquête SIBIS de Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 16 - www.strategie.gouv.fr
  • 17. 2002, les télétravailleurs mobiles sont ceux qui travaillent, au moyen des TIC, plus de 10 heures par semaine à distance de leur lieu de travail ou de leur domicile. Enfin, comme nous l’avons vu, la France n’a pas adopté de définition « normalisée » du télétravail, ce qui empêche une connaissance fine de la situation et la définition de politiques publiques. Sur la base de données harmonisées existantes, on peut classer les pays étudiés en cinq groupes Une première vision statique permet de positionner les pays selon l’essor du télétravail. Elle se fonde sur les chiffres de l’enquête européenne SIBIS de 2002, base de référence pour la comparaison internationale. Figure n° 2 : Position des pays de l’OCDE en matière de télétravail au début des années 2000 Source : SIBIS 2002 (Statistical Indicators Benchmarking the Information Society), typologie CAS 1 En se basant sur ces données harmonisées de la diffusion du télétravail – adoption 2 du télétravail et faisabilité ressentie par la population active – on répartit les pays en cinq groupes : – les pays du Nord de l’Europe (Pays-Bas, Finlande, Danemark…) et les États- Unis sont en tête avec plus de 20 % de télétravailleurs actuellement en activité et une importante faisabilité du télétravail ; – suivent les pays du centre de l’Europe et/ou anglo-saxons, à savoir la Suède, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Suisse, qui comptabilisent entre 15 % et 20 % de télétravailleurs et pour lesquels le télétravail est un levier puissant de modernisation du marché de l’emploi ; 1 L’adoption du télétravail se définit ici comme la part des télétravailleurs dans l’ensemble des personnes en situation d’emploi, autrement dit comme le ratio entre le nombre de télétravailleurs et celui des personnes en emploi. 2 La faisabilité du télétravail est le ratio entre le nombre d’emplois pour lesquels le télétravail s’applique et le nombre de personnes disposant d’un emploi. En pratique, les résultats de l’enquête SIBIS se basent sur les réponses des sondés à la question « Diriez-vous que votre travail peut se faire en télétravail, sous l’hypothèse que vous passiez au moins une journée entière par semaine à domicile ? ». Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 17 - www.strategie.gouv.fr
  • 18. le troisième ensemble regroupe les pays pour lesquels le télétravail n’est plus l’objet d’importants débats, mais qui restent à la traîne dans son déploiement. Ces pays comptent pour la plupart entre 10 % et 15 % de télétravailleurs. Il s’agit de l’Estonie, de la Grèce, de l’Irlande, de l’Italie et dans une moindre mesure de l’Autriche et de la Belgique ; – le quatrième groupe – auquel appartient la France – comprend les pays où le télétravail est peu développé (entre 5 % et 10 % de télétravailleurs) et qui ont encore un effort important de sensibilisation à fournir, auprès des employeurs comme des employés ; – le cinquième groupe, enfin, rassemble les pays pour lesquels le télétravail est négligeable et ne fait pas l’objet d’actions de la part des pouvoirs publics. Les pays de culture anglo-saxonne se distinguent en ce qu’ils comptent proportion- nellement plus de télétravailleurs dans leur population active. Pour l’Europe, on peut constater grossièrement un gradient progressif du Sud-Ouest vers le Nord-Est. Une vision dynamique de l’évolution du télétravail vient confirmer le retard de la France depuis dix ans (figure n° 3). Figure n° 3 : Population salariée pratiquant le télétravail plus de 8 heures par mois sur la période 2000-2010 (données en pourcentage) Finlande 32,4% 32,9% Belgique 31,6% 30,5% 30,0% 30,6% USA 29,2% 28,9% Suède 28,1% 27,5% 27,0% 26,7% 26,8% 28,0% Japon 26,3% 27,2% 25,8% 25,0% 25,3% 25,3% UK 24,2% 26,1% 24,0% 25,1% 23,6% 23,5% Allemagne 22,3% 24,5% 22,3% 22,3% 22,8% 21,2% 21,3% Europe 20,4% 20,7% 19,6% 19,2% 21,5% France 18,9% 18,7% 20,6% 18,8% 19,5% 17,8% 18,2% 17,9% Italie 17,2% 17,1% 17,5% 17,0% 18,3% 16,3% 16,0% 15,4% 15,6% 15,2% 17,7% 15,0% 14,9% 17,0% 14,0% 14,4% 16,1% 13,2% 13,3% 13,2% 15,3% 12,6% 12,4% 14,5% 11,7% 14,0% 10,8% 13,3% 10,9% 12,0% 8,7% 8,4% 10,0% 7,6% 8,9% 6,6% 8,5% 6,7% 5,8% 5,1% 5,0% 4,0% 4,5% 4,3% 5,5% 3,5% 3,7% 2,6% 3,0% 2,6% 3,0% 1,9% 2,3% 1,5% 1,7% 1,3% 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 Source : Gartner, analyse Roland Berger La prise en compte de plusieurs sources, notamment publiques, permet de dresser un état des lieux consolidant celui établi à partir des chiffres de l’enquête SIBIS La comparaison des données issues de quatre sources différentes, portant sur une quinzaine de pays de l’OCDE, confirme le diagnostic établi à partir des enquêtes 1 SIBIS . 1 On trouvera en annexe 7 un tableau plus détaillé, présentant les chiffres par catégorie de télétravailleurs. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 18 - www.strategie.gouv.fr
  • 19. Tableau n° 2 : Nombre de télétravailleurs dans les pays de l’OCDE, comparaison des principales sources disponibles (données en pourcentage) Eurofound Sources SIBIS (2002) Gartner (2007) (2005) nationales France 6,3 7 8,4 7 (1999-2003) Allemagne 16,6 8,5 18,8 - Australie - - - 24 (2008) Autriche 13,8 14,2 - - Belgique 10,6 14,7 30 - Canada - - 12,3 9,8 (2005) Danemark 21,5 16 17,4 25,7 (2006) Espagne 4,9 8,4 6,2 - États-Unis 24,6 - 27,6 21,5 UE-27 - 8,3 17,7 - Finlande 21,8 13 32,4 14* (2008) Italie 9,5 3,9 5 7,1 (2005) Japon - - 24 15,6 (2008) Norvège - 11,6 - 10 (2007) Pays-Bas 26,4 14 - - Royaume-Uni 17,3 9,6 22,3 8,8 (2007) Suède 18,7 15 26,8 5,4 (2005) Suisse 16,8 8,3 - 8,7 (2006) (*) télétravail formalisé par un accord écrit. Sources : SIBIS ; Parent-Thirion et al., 2007 ; Gartner, 2007 ; Missions économiques Comme mentionné précédemment, la définition donnée au télétravail influe sur les statistiques. Sont donc présentées ci-après les définitions retenues par ces enquêtes comparatives internationales : Tableau n° 3 : Définitions du télétravail retenues pour les enquêtes Organisme Définition Champ La question posée lors de l’enquête sur le télétravail au sens le plus large est la suivante : Statistical « Avec l’aide d’un téléphone, d’un fax et d’un Indicators ordinateur, plusieurs types de tâches peuvent Population Enquête SIBIS Benchmarking être effectués depuis la maison. Si le résultat de active (2002) ce travail est transféré électroniquement, cela est occupée the Information parfois qualifié de télétravail. Télétravaillez-vous Society actuellement depuis votre domicile, pour une partie au moins de votre temps de travail ? » Enquête Fondation La question posée dans l’enquête ne définit pas européenne le télétravail : « Est-ce que votre emploi principal Population européenne sur sur les comporte du télétravail depuis le domicile à active les conditions conditions de partir d’un ordinateur ?» et prévoit une occupée de travail (2005) travail quantification du temps passé au télétravail. Synthèse des données publiées par les instituts Cabinet Gartner (2007) spécialisé de statistique nationaux, consolidées et complétées par une connaissance des marchés. Source :CAS Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 19 - www.strategie.gouv.fr
  • 20. Conclusion de la comparaison internationale : quelles que soient les sources, la France est en retard dans la diffusion du télétravail Figure n° 4 : Diffusion du télétravail dans les pays de l’OCDE Source : Instituts nationaux repris par les Missions économiques, Gartner, analyse CAS En prenant en compte au moins trois sources de données sur les cinq dernières e années, la France se situe au 13 rang des pays de l’OCDE pour la diffusion du télétravail. 2.2. Détail de la situation française : quasiment inexistant dans le secteur public, le télétravail s’est régulièrement, quoique faiblement, développé depuis trente ans La progression du télétravail en France a été régulière sur les vingt dernières années Bien qu’il faille prendre les chiffres suivants avec une grande prudence, la progression du télétravail en France apparaît régulière depuis 1988, date des premiers chiffres connus. La France comptait alors moins de 1 000 télétravailleurs, chiffre porté à 1 16 000 en 1993 (1,1 % de la population employée), puis 2,9 % en 1999. L’essor du télétravail s’accélère entre 1999 et 2003 (la France compte alors 6,3 % de télétravailleurs) avant de plafonner à 7 % en 2005, date à partir de laquelle les 2 données ne sont plus actualisées (enquête européenne sur les conditions de travail) . Pour la période 2005-2009, si l’on en juge par les conclusions de la mission du député 1 T. Breton, 1994, op. cit. 2 Agnès Parent-Thirion, Enrique Fernandez Macias, John Hurley et Greet Vermeylen, Fourth European Working Conditions survey, Fondation européenne sur les conditions de travail, 2007. D’après l’enquête précédente, le télétravail concernait 4 % des actifs occupés en 2000 en France. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 20 - www.strategie.gouv.fr
  • 21. Pierre Morel-à-L’Huissier (2006) et par le faible nombre d’accords de télétravail signés 1 depuis 2005 , il est probable que ce chiffre de 7 % n’ait pas fortement changé. L’essor du télétravail parmi les salariés est plus net d’après les enquêtes françaises 2 sur les conditions de travail , puisque la proportion de salariés utilisant un ordinateur à domicile pour leurs activités professionnelles est passée de 6,5 % en 1998 à 12 % en 2005. 3 Pour sa part, l’enquête COI (Changement organisationnel et informatisation) estime la part de télétravailleurs à 14,2 % des salariés en 2006, mais elle est limitée aux 4 entreprises de plus de vingt salariés du secteur marchand . Le télétravail exclusivement à domicile à temps complet y apparaît comme un phénomène marginal (1 % des salariés). Toutefois, à ce jour, aucune des sources disponibles en France n’est capable de fournir des données en évolution. Des données actualisées tirées de l’enquête permanente sur les conditions de vie de l’INSEE devraient être disponibles dans les prochains mois, ce qui permettrait d’afficher l’évolution du nombre de télétravailleurs depuis le début des années 2000, mesuré à 7 % par la DARES. L’enquête européenne sur les conditions de travail sera reconduite en 2010 et donnera une appréciation de la diffusion récente du télétravail en France et en Europe. Sur le front des entreprises, la part de celles qui pratiquent le télétravail a augmenté de 37 % entre 2007 et 2008 ; de 16 % à 22 % pour l’ensemble des entreprises, de 5 12 % à 22 % pour les services immobiliers . Il semblerait que les entreprises françaises aient récemment pris en compte la question du télétravail ; la crise économique et la pandémie grippale renforceraient encore ce phénomène. Néanmoins, il est difficile de déterminer si le nombre de télétravailleurs s’est accru depuis 2007. Le télétravail : une pratique principalement mise en œuvre par les entreprises du secteur des services des TIC et des services financiers ainsi que par les entreprises de 250 salariés ou plus Dans les secteurs des services TIC et des services financiers, une entreprise sur deux pratique le télétravail pour au moins une partie de ses salariés, c’est-à-dire deux fois plus que la moyenne des entreprises (tableau n° 4). A contrario, les entreprises de la 1 D’après les bilans annuels publiés par le ministère du Travail, un seul accord de branche a été signé sur le télétravail suite à l’ANI de 2005, dans les télécommunications (accord du 6 octobre 2006). Néanmoins, des dispositions relatives au télétravail sont souvent présentes dans les accords d’entreprise sur l’égalité professionnelle au titre de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale. Ces accords se développent depuis 2006 et le vote de la loi sur l’égalité professionnelle (DGT-DARES, La négociation collective en 2008, Paris, La Documentation française, 2009). 2 Données DARES à partir de l’enquête Conditions de travail, disponibles sur le site Internet du ministère du Travail. 3 Pilotée par le Centre d’études de l’emploi, cette enquête est développée par plusieurs institutions de la statistique publique (www.enquetecoi.net/fr2006/cadre1.htm). 4 Sont donc écartés de cette mesure les salariés des TPE, les agents publics ainsi que les travailleurs indépendants. 5 Mahmoud Jlassi et Xavier Niel, « E-administration, télétravail, logiciels libres : quelques usages de l’Internet dans les entreprises », INSEE Première, n° 1228, mars 2009. Dans l’enquête TIC, une entreprise pratique le télétravail si elle a des salariés qui travaillent au moins une demi-journée par semaine en dehors de ses locaux, en ayant accès au système informatique de l’entreprise par des réseaux électroniques. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 21 - www.strategie.gouv.fr
  • 22. construction, du commerce de détail, des transports et de l’hôtellerie-restauration pratiquent moins que les autres le télétravail. Tableau n° 4 : Part des entreprises pratiquant le télétravail selon leur secteur d’activité et leur taille (France, entreprises de plus de 10 salariés, 2008 ; données en pourcentage) Entreprises Entreprises Entreprises Ensemble de 1 à 19 de 20 à 249 de plus de salariés salariés 250 salariés Commerce dont : 25 20 29 64 • Commerce de détail 16 12 17 62 • Industries* 23 11 29 67 Services dont : 17 12 20 54 • Services TIC 55 48 58 85 • Services financiers 49 n.s. 44 64 • Autres services aux entreprises 27 21 31 66 • Services immobiliers 22 n.s. 22 n.s. • Transports 17 10 20 52 • Hôtels et restaurants 14 12 16 n.s. Construction 9 6 13 72 Ensemble 22 15 27 65 n.s. : non significatif Champ : entreprises de 10 salariés ou plus disposant d’un ordinateur, France métropolitaine. (*) Y compris industries agroalimentaires et secteur de l’énergie. Source : INSEE, enquêtes TIC 2007 et 2008 La pratique du télétravail est limitée dans les TPE et PME et demeure l’apanage des grandes entreprises, hormis dans le secteur des services TIC. On observe que ces secteurs et grandes entreprises sont également en avance pour la pratique des TIC et 1 pour la mise en place d’un extranet . Certes, les outils de communication en réseau se sont diffusés entre 2003 et 2006, mais le facteur taille demeure déterminant, sauf pour les petites entreprises qui appartiennent à un groupe de taille plus importante. Le télétravail est encore moins développé dans le secteur public, puisqu’il 2 concernait seulement 1 % des agents publics français au début des années 2000 . Hormis quelques expérimentations au ministère de la Justice, dans l’Éducation nationale et à la Caisse des Dépôts et Consignations, le télétravail, notamment dans sa dimension formalisée, semble souffrir de l’absence de cadre juridique dans le secteur public. Au contraire, dans plusieurs pays de l’OCDE, le télétravail est assez courant dans les administrations publiques. Il a atteint un rythme de croisière ou un niveau important aux États-Unis (7 % du personnel des agences fédérales gérées par l’US Office of Personnel Management) et en Finlande (agglomération d’Helsinki). Plusieurs expérimentations sont conduites en Espagne (plan de développement lancé en 2007), 1 Sonia Besnard, Pacale Chevalier, Patrice Victor, Danièle Guillemot et Yusuf Kocoglu, « Des TIC de plus en plus diversifiées dans les entreprises », INSEE Première, n° 1126, mars 2007 ; Sonia Besnard, Chantal Biré et Patrice Victor, « L’intégration des TIC est encore incomplète dans les entreprises », INSEE Première, n° 1184, avril 2008. 2 Thomas Coutrot, « Le télétravail en France : 2 % des salariés le pratiquent à domicile, 5 % de façon nomade », Premières synthèses, DARES, n° 51.3, décembre 2004. Il s’agit là du télétravail à domicile ; en outre, les enseignants ne sont pas comptabilisés parmi les télétravailleurs. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 22 - www.strategie.gouv.fr
  • 23. en Allemagne (ministère du Travail) ou en Corée du Sud (gouvernement régional de Séoul, Agence gouvernementale sur les systèmes d’information et les technologies numériques). 2.3. Une réalité davantage diffusée parmi les cadres et les ingénieurs Le profil type du télétravailleur français est celui d’un homme cadre ou ingénieur Bien que la plupart des entreprises ouvrent la possibilité de se porter candidat au télétravail à tous leurs salariés sans distinction a priori sur les profils souhaités, il se dégage bien un profil type du télétravailleur en France (tableau n° 5). Le télétravail nécessite uniquement que l’activité puisse être menée au moins partiellement sans présence physique des collègues, superviseurs ou clients grâce aux outils TIC. Son utilisation est donc possible pour de multiples fonctions, y compris celles de nombreux agents de maîtrise (assistantes, par exemple). Cependant, près de la moitié des télétravailleurs à domicile sont ingénieurs ou cadres, et un tiers sont des 1 professions intermédiaires. Alors que 10 % des cadres se considèrent ainsi télétravailleurs à domicile (4 % à temps plein, 6 % à temps partiel), seuls 2 % des professions intermédiaires sont concernés. Le télétravail nomade est pratiqué par une plus grande part des salariés : c’est le cas de 20 % des cadres, 9 % des professions intermédiaires et 3 % des employés. D’après l’enquête Conditions de travail de 2005, le télétravail est particulièrement utilisé par les cadres et les professions intellectuelles supérieures, puisque l’usage d’un ordinateur à domicile à des fins professionnelles concerne 37 % d’entre eux. Le critère principal, outre l’usage des NTIC, réside dans le degré d’autonomie dans son activité professionnelle, plus élevé parmi les cadres et ingénieurs. La prépondérance des cadres parmi les télétravailleurs s’explique aussi par la simplicité relative de mise en place de cette organisation pour des salariés au forfait jour. 1 T. Coutrot, ibid. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 23 - www.strategie.gouv.fr
  • 24. Tableau n° 5 : Le télétravail selon la catégorie socioprofessionnelle, le sexe et l’âge (période 1999-2003 – données en pourcentage) Fixe Alternant Formes de télétravail Total Nomade à domicile à domicile Selon les catégories socioprofessionnelles Ingénieurs et cadres 29,8 3,7 6,0 20,1 Professions intermédiaires 11,3 1,1 1,2 9,0 Employés 3,6 0,6 0,3 2,7 Ouvriers 0,7 0,0 0,1 0,6 Ensemble 7,4 0,9 1,1 5,4 Selon le sexe Hommes 10,2 1,0 1,7 7,5 Femmes 4,1 0,9 0,4 2,8 Selon l’âge 15 à 24 ans 4,5 0,4 0,4 3,7 50 ans et plus 6,3 1,4 0,8 4,1 Source : INSEE, Enquêtes PCV 1999-2003 ; calculs DARES La perception du télétravail par le public est souvent celle d’un aménagement des conditions de travail favorable aux femmes qui ont des enfants ou des parents âgés à charge. La réalité statistique est autre : les télétravailleurs sont des hommes à 57 %, alors que les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les 1 hommes à utiliser un ordinateur à titre professionnel sur leur lieu de travail . De plus, la probabilité qu’une femme soit télétravailleuse à domicile ne dépend pas du fait qu’elle élève ou non des enfants, ni du nombre d’enfants à charge. 2 À 90 %, les télétravailleurs nomades sont en CDI à temps plein , ce qui constitue une surreprésentation par rapport aux 74 % constatés dans l’ensemble de la popu- lation salariée. Les télétravailleurs à domicile ne présentent pas la même tendance au CDI à temps plein et peuvent aussi bien être en contrat précaire (CDD, intérim ou temps partiel). Ceci peut s’expliquer par le volontariat qui est souvent la règle pour le télétravail salarié et auquel les employés plus expérimentés et ayant plus d’ancienneté sont plus réactifs. À noter cependant que les salariés de plus de 50 ans sont moins souvent en télétravail que l’ensemble, ce qui est dû sans doute à la barrière techno- logique et à l’imprégnation trop profonde de l’organisation du travail traditionnelle. En termes de profils du télétravail et des télétravailleurs, la situation française 3 s’avère très proche de celle des pays de l’OCDE Dans la plupart des pays de l’OCDE, le télétravail est très majoritairement un télétravail partiel. Les principaux secteurs pratiquant le télétravail en Europe sont l’immobilier, les 1 Mais les hommes sont plus souvent multi-utilisateurs de téléphone mobile et de messagerie élec- tronique, cf. Anca Boboc et Laurence Dhaleine, « Faire du privé au bureau, une question de genre ? », Réseaux, n° 145-146, 2007. 2 T. Coutrot, 2004, op. cit. 3 A. Parent-Thirion et al., 2007, op. cit. ; Andrea Broughton, Place of Work and Working Conditions, European Foundation for the improvement of Living and Working Conditions, 2006. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 24 - www.strategie.gouv.fr
  • 25. 1 services financiers et l’éducation. Les télétravailleurs sont plus souvent des hommes et des indépendants, tandis que parmi les salariés, les plus concernés sont les cadres, les professions intellectuelles et scientifiques ainsi que les techniciens. Dans les données de l’enquête européenne sur les conditions de travail, il existe une corréla- tion très forte entre un niveau élevé de qualification formelle et la pratique du télétravail. Les Français ne sont pas suffisamment conscients des possibilités offertes par le télétravail Les enquêtes montrent bien souvent que les employés comme les employeurs ne 2 connaissent pas les possibilités offertes par le télétravail. D’après les parlementaires , c’est le cas de 90 % des chefs d’entreprises. Quant aux salariés français, ils sont moins intéressés (ou moins sensibilisés) que leurs voisins européens puisque seuls 54 % d’entre eux se déclarent intéressés par au moins une forme de travail à 3 distance, contre 66 % en moyenne pour l’UE-15 , 79 % pour le Danemark et 77 % pour la Belgique. De plus, toujours selon l’enquête européenne SIBIS de 2002, seuls 24 % des Français interrogés estimaient que leur emploi se prêtait au télétravail, contre 31 % pour l’UE-15, 41 % pour les Pays-Bas et 39 % pour la Finlande. 1 La différence entre les hommes et les femmes tient essentiellement au télétravail alternant. 2 Exposé des motifs de la loi. 3 Enquête SIBIS 2002. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 25 - www.strategie.gouv.fr
  • 26. De nombreux obstacles 1. L’examen des appréhensions à l’égard du télétravail fournit un cadre d’analyse des freins à son essor Si les avantages du télétravail sont nombreux et pour certains évidents (cf. chapitre 5), les incertitudes et les craintes restent fortes, bien que le débat ait été ouvert dès les années 1970. Les aspects psychologiques sont considérables lors de la mise en 1 place d’un projet de télétravail , comme pour toute modification importante des conditions de travail. Ils sont donc à considérer avec le plus grand soin par les DRH et le management intermédiaire lorsqu’un tel projet est envisagé. Certaines craintes prennent souvent racine dans la conception française du travail et dans la nature des relations entre partenaires sociaux. D’autres appréhensions appartiennent plutôt au registre des incertitudes, des hésitations devant un « objet mal identifié », quand les conséquences négatives peuvent être importantes (moindres opportunités de carrière, flou juridique en cas d’accident du travail, etc.). Le tableau suivant présente les principales incertitudes mentionnées dans la littérature et identifiées par les spécialistes auditionnés. Il récapitule les appréhensions et leurs liens avec les cadres juridique, culturel, technologique, organisationnel… 1 Ce constat n’est pas propre à la France puisqu’il en va de même en Corée du Sud ou dans certaines entreprises japonaises (rapports d’auditions effectuées par le cabinet Roland Berger pour le Centre d’analyse stratégique, septembre 2009). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 26 - www.strategie.gouv.fr
  • 27. Facteurs culturels (histoire des relations sociales, conception Promotion et connaissance Facteurs organisationnels Technologies et territoire Formation des acteurs collective du travail…) Cadre juridique du télétravail Incertitudes et craintes face au télétravail -- Poids des facteurs relatifs Pour l’employeur • Coûts de mise en œuvre à court terme contre gains à long terme • Calcul de rentabilité • Management du travail à distance (contrôle, nouvelles formes de communication…) • Sécurité et protection des données Pour les salariés • Licenciement déguisé et exter- nalisation (passage d’un contrat salarial à un contrat commercial) • Rupture avec le collectif de travail • Aptitude du salarié à télétravailler (expérimentation…) • Charge de travail équivalente à celle des autres salariés • Gestion du temps de travail (limitation, interpénétration vie privée/vie professionnelle) • Discrimination (primes individuel- les, augmentations, promotions, opportunités de carrière…) Risques communs à l’employeur et à l’employé • Gestion du risque lié aux accidents à domicile • Contrôle du temps de travail (législation sur les horaires…) • Utilisation du matériel (dans le domicile, à des fins personnelles…) • Respect du rôle du CHSCT, implication des IRP… • Réversibilité BILAN Bilan de l’importance relative de chaque facteur Impact faible Impact fort Source : entretiens, analyse CAS Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 27 - www.strategie.gouv.fr
  • 28. Ce tableau met en évidence les principaux blocages économiques et sociaux : – le manque de réactivité organisationnelle face au télétravail : management par objectifs, identification des (non)télétravailleurs, indicateurs de performance indivi- duelle et collective, etc. ; – les facteurs culturels spécifiques à la France : conception collective du travail « à la française », histoire des relations entre partenaires sociaux, etc. ; – le manque de formation des acteurs, qu’il s’agisse des employés, qui sont les télétravailleurs potentiels, ou des managers, qui doivent acquérir de nouvelles compétences managériales. Les paragraphes suivants ont pour objectif de préciser les obstacles relatifs à chacun de ces trois facteurs. 2. Un relatif manque de confiance entre partenaires sociaux expliquerait en partie les faibles avancées du télétravail en France Sans entrer dans le débat sur la nature et l’histoire des relations entre partenaires 1 sociaux français , on peut avancer que la conflictualité de ces relations est – au moins en partie – à l’origine d’incompréhensions sur le télétravail. L’examen des négociations entre partenaires sociaux indique les points d’achoppement, que l’on peut également déceler dans les débats au Parlement sur la proposition de loi « Pour favoriser le maintien et la création d’emplois ». 2.1. Les accords collectifs sur le télétravail n’ont pas conduit à un fort développement du télétravail en France L’accord-cadre européen de 2002, intervenu dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne, correspond à une volonté de moderniser le dialogue social2 3 Dès les années 1990, l’Europe s’est intéressée au télétravail . Ensuite, dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne, la Commission européenne a encouragé les partenaires sociaux européens à négocier un accord sur le télétravail, afin de réaliser l’équilibre entre la flexibilité et la sécurité. Au début, la plupart des syndicats se sont montrés sinon opposés, du moins très réservés. Leurs positions tendaient à obtenir rapidement des garanties sur des points essentiels, tels que le caractère volontaire du télétravail, la possibilité de revenir au moins une fois par semaine sur le lieu de travail, de communiquer aisément avec les autres salariés… Au fur et à mesure, certains syndicats, surtout en Europe du Nord, ont paru disposés à revoir leurs positions et à s’ouvrir à des analyses concrètes. Deux accords ont ainsi été conclus dans le secteur du commerce en avril 2001 et dans le secteur des télécommunications (Etno 1 Alain Supiot, Le Droit du travail, coll. Que sais-je ?, PUF, 2004. 2 Les éléments synthétisés proviennent d’un travail de recueil et d’analyse effectué par Anna Michalik, sous la direction de Benoît Verrier. 3 Des projets tels que ADAPT ont été mis en place dès 1995 avant qu’un rapport de la Commission sur le statut du télétravail européen ne paraisse en 1997, dans le cadre de la Stratégie européenne sur l’Emploi. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 28 - www.strategie.gouv.fr
  • 29. Unieuropa/CES) en février 2001. C’est ce dernier accord qui a servi de base aux négociations interprofessionnelles ouvertes le 20 septembre 2001 entre la CES, l’UNICE/UEAPME et le CEEP, ayant abouti le 16 juillet 2002 à l’accord-cadre européen. Cet accord-cadre est le premier du genre : mené sous l’égide de l’article 139 du traité d’Amsterdam, il est le résultat d’un dialogue autonome entre partenaires sociaux européens, devant ensuite être transposé au niveau national dans un délai de trois ans. L’accord européen, transposé en France, n’a pas eu pour conséquence de développer fortement le télétravail Largement associés, voire signataires de l’accord-cadre européen, les partenaires sociaux français représentatifs ont logiquement signé l’accord national interpro- fessionnel (ANI) de 2005 qui en a découlé. On note cependant qu’il aura fallu attendre trois ans pour assurer une telle transposition, soit la limite fixée par l’accord européen. Les partenaires sociaux français ne se sont pas distingués sur ce point de leurs homologues européens. Engagés dans une logique de construction de protections, les confédérations syndicales françaises ont toutes signé l’ANI, y compris pour des raisons de principe, celui-ci étant une innovation conventionnelle affirmant l’autonomie 1 des partenaires sociaux . Cependant, depuis 2005, l’ANI ne s’est pas concrétisé par de nombreuses négociations sur le télétravail, et les positions des différents acteurs n’ont guère évolué. À ce jour, seule la CFDT Cadres a édité un guide d’aide à la négociation collective pour ses équipes, témoignant ainsi de son engagement plus ancien et plus profond pour soutenir ce mode d’organisation du travail. Ce relatif immobilisme s’est constaté au niveau des branches (un seul accord identifié, celui des télécommunications en 2006) et au niveau des entreprises, même si on note un léger 2 frémissement depuis quelques années dans les grandes entreprises : – après cinq ans de réflexion et d’expérimentations sur le télétravail, Alcatel- Lucent a signé le 18 janvier 2008 un accord avec les syndicats (CFDT, CGT, CFTC, CGE-CGC et FO) sur la base du volontariat et concernant 500 salariés répartis tout d’abord en région parisienne (phase d’expérimentation avant la généralisation à l’ensemble des sites). Les salariés sont formés durant 30 minutes (e-learning), par une plate-forme de gestion de la formation et par l’Alcatel-Lucent University, aux problématiques de santé (hygiène, ergonomie…) et de sécurité ; – France Télécom a signé le 22 juin 2009 un accord avec les syndicats (CFDT, CFE-CGC, CFTC, FO), après plus de treize ans d’expérimentation (les premiers tests ont eu lieu en 1996), faisant suite à l’accord de la branche Télécom du 6 octobre 2006. Les points principaux sont le volontariat, la réversibilité à tout moment, la préservation du lien social par la formation et la présence dans les locaux au moins deux jours par semaine. À la fin juin, près d’un millier de salariés en France ont opté pour le télétravail, qui permet d’augmenter la flexibilité et de mieux concilier vie professionnelle et vie privée. L’opérateur prend en charge les 1 DGT-DARES, La négociation collective en 2005, Paris, La Documentation française, 2006. 2 Une veille intéressante et actualisée sur les accords intervenus en matière de télétravail est disponible sur les sites des syndicats ainsi que sur divers sites spécialisés (cyberworkers.com, revues d’actualité sociale…). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 29 - www.strategie.gouv.fr
  • 30. frais d’installation, verse une indemnité unique de 150 euros et accorde un droit de regard aux représentants du personnel ; – Renault a signé début 2007 un accord sur le télétravail avec l’ensemble des organisations syndicales. Il permet l’accès au télétravail à domicile pour les salariés qui le souhaitent, en accord avec leur manager. Le télétravail s’exerce sur une base de deux à quatre jours à domicile avec au moins un jour de présence sur le site d’origine. L’entreprise équipe entièrement le salarié du matériel nécessaire. Une validation électrique du lieu de télétravail (7 % seulement des logements aux normes) et des modalités d’accès informatique sont des conditions nécessaires à sa mise en place. Le dispositif commence par une période de test de trois mois, il est ensuite réversible à tout moment. À la fin 2007, 99 salariés sont en télétravail et 52 dossiers sont en cours. Un nombre équivalent de femmes et d’hommes est concerné. L’éloignement du domicile est un facteur clé de choix (près de 70 % des télétravailleurs), ainsi que la facilité de ce mode de travail (20 %) et les raisons personnelles (10 %) ; – l’accord négocié dans le cadre du déménagement du siège de Microsoft France à Issy-les-Moulineaux est restreint : il ne s’applique qu’aux seuls salariés de la division support aux clients, soit une centaine de personnes, et limite le télétravail à deux jours par semaine. La direction offre une enveloppe de 400 euros pour permettre aux télétravailleurs de s’équiper à domicile « d’un écran ou d’un fauteuil » ; – d’autres entreprises comme Coca-Cola France (2008), Michelin (12 mai 2009), L’Oréal (4 décembre 2008), Téléperformance, etc., ont également signé des dispositions sur le télétravail, souvent dans le cadre d’accords sur l’égalité 1 professionnelle ou la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle . 2.2. Sur le télétravail, les partenaires sociaux français ont des vues contrastées mais pas opposées, à l’origine de quelques points d’achoppement Les syndicats mettent en avant la protection des salariés et les bénéfices sociaux du télétravail… Les principaux syndicats de salariés (FO, CFDT, CFE-CGC, CGT, CFTC…) ont participé activement aux négociations sur ce sujet, que ce soit au niveau européen en 2002 via la Confédération européenne des syndicats (CES), au niveau interprofessionnel ou au niveau des entreprises. Ils ont régulièrement rappelé leur attachement à la normativité d’un accord sur le télétravail, obtenu en 2005 par l’ANI, transposition de l’accord-cadre européen de 2002. Les grandes confédérations sont attachées à un encadrement collectif assez poussé du télétravail. La plupart estiment que les instances représentatives du personnel (IRP) doivent être consultées lorsque la mise en place du télétravail est envisagée. Leurs autres revendications concernaient : – une meilleure définition du télétravailleur, qui ne distinguerait pas les télé- travailleurs nomades des télétravailleurs à domicile ou en télécentre ; 1 DGT-DARES, 2009, op. cit. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 30 - www.strategie.gouv.fr
  • 31. l’inscription de toute pratique de télétravail – qui ne peut être effectué que sur la base du volontariat – dans le contrat de travail ou son avenant. Ce dernier préciserait également les clauses de réversibilité et d’insertion ; – le paiement de l’équipement par l’employeur (ordinateur, frais de connexion…) et l’assistance technique à distance ; – l’amélioration des conditions de travail : mesures pour réduire un éventuel isolement du télétravailleur, protection des données et de la vie privée, équilibre entre vie privée et vie professionnelle… Dans la mesure où un télétravailleur est un salarié comme un autre, il dispose des mêmes droits communs, des mêmes garanties de santé et de sécurité, d’organisation du travail, de gestion de carrière (formation, accès aux offres d’emplois…) que tout autre salarié de l’organisation. Enfin, de nouvelles revendications telles que le droit à la déconnexion ou le respect de la vie privée sont portées par des syndicats tels que la CFDT Cadres. …contre les gains de flexibilité et de productivité pour les employeurs La position des employeurs s’exprime le mieux à travers le MEDEF, qui se démarque 1 de la proposition de loi , sur la forme comme sur le fond. Sur la forme, le MEDEF considère que la méthode employée de légalisation du télétravail sans concertation avec les partenaires sociaux va à l’encontre des principes de la loi du 31 janvier 2007 sur la modernisation du dialogue social. Quant au fond, de l’avis même des acteurs du télétravail, il n’y a pas de vide juridique à combler, une loi pouvant même être contreproductive, en rigidifiant le cadre juridique, ce qui dissuaderait les employeurs. En effet, selon le MEDEF, la contractualisation de certains points figurant dans l’ANI de 2005 peut poser problème pour certaines entreprises, notamment la clause de réversibilité ou la sécurisation des conditions de travail de leurs salariés en situation de nomadisme ou télétravailleurs à domicile. La CGPME exprime une position légèrement différente de celle du MEDEF. Elle considère que la délimitation d’une plage horaire pour effectuer son travail sécuriserait le cadre d’exercice du télétravail (litiges liés aux heures supplémentaires, droit à la déconnexion, litiges en cas d’accidents de travail, répartition des frais liés à l’équipement…). Elle souhaite que soit précisée l’utilisation de l’équipement professionnel dans le contrat de travail ou son avenant, pour éviter son usage à des fins personnelles, sauf à considérer le matériel comme un élément de rémunération. Enfin, comme le MEDEF, la CGPME indique que la sécurité peut difficilement être assurée par l’employeur hors de ses locaux. La présomption d’accident du travail et la réversibilité constituent les deux points d’achoppement entre partenaires sociaux Bien qu’ils souhaitent conserver leur autonomie dans les négociations sur le télétravail, les partenaires sociaux français, hormis dans quelques entreprises, n’ont pas cherché à assurer la diffusion de l’ANI de 2005 ni sa mise en œuvre dans les entreprises ou dans les branches. 1 Sa position, exprimée officiellement au début de mars 2009, répond à la proposition de loi n° 1194 d’octobre 2008, qui a été amendée à de nombreuses reprises avant d’être adoptée par l’Assemblée nationale le 9 juin 2009. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 31 - www.strategie.gouv.fr
  • 32. Certes, la quasi-totalité des dispositions de l’ANI de 2005 présente un caractère impératif, les possibilités de dérogation défavorables aux salariés étant limitées par l’article 12 de l’accord. Néanmoins, cet attentisme traduit également la position d’équilibre peu stable qui résulte de l’accord de 2005. Outre des problèmes générationnels et la faible diffusion du télétravail, qui peuvent expliquer le manque d’intérêt des partenaires sociaux pour ce sujet, cette situation reflète aussi les oppositions qui demeurent, notamment sur deux points clés : – la présomption d’accident de travail Selon les syndicats de salariés, la présomption d’accident du travail permettrait de sécuriser les conditions de travail des salariés ; rassurés, ces derniers opteraient plus facilement pour le télétravail. En outre, cela permettrait de rapprocher les conditions de travail des télétravailleurs de celles de leurs collègues restés dans les locaux de l’entreprise. Les organisations patronales, en particulier le MEDEF, y sont opposées, par peur des risques liés à des engagements juridiques complexes et d’une explosion des (fausses) déclarations d’accidents du travail, alors même que l’employeur, obligé de sécuriser le domicile du salarié, ne peut le faire sans l’accord de ce dernier ; – la réversibilité du télétravail Les syndicats de salariés craignent que les télétravailleurs à domicile ne soient isolés du collectif de travail et que leur emploi soit progressivement externalisé. De leur côté, les organisations patronales craignent de ne pouvoir remettre en question des avantages accordés temporairement au salarié. À la lumière de la jurisprudence sur ce sujet (arrêt du 31 mai 2006 de la Cour de cassation, chambre sociale, étudié en annexe 6), il apparaît en effet très difficile pour un employeur d’obliger unilatéralement son salarié à revenir travailler dans les locaux de l’entreprise. 3. Des obstacles culturels souvent à l’origine de blocages organisationnels Le télétravail est plus développé dans le Canada anglophone qu’au Québec ; les modalités de télétravail varient entre les filiales française et néerlandaise d’une même entreprise, aboutissant à des résultats différents… On pourrait ainsi multiplier les exemples illustrant l’importance des facteurs culturels et organisationnels sur le développement du télétravail. 3.1. Les Français se singularisent par leur fort attachement au travail L’analyse économique du travail reconnaît une place particulière au contexte français, 1 tant du point de vue de la relation formation-emploi que de la place de l’État dans la 2 construction du droit du travail et du modèle social. Selon cette approche culturaliste , la société conserve une grille de lecture hiérarchique des relations sociales, fondée sur les « rangs », les grades et les statuts de chacun. 1 Voir les travaux de Marc Maurice, François Sellier et Jean-Jacques Silvestre sur ce sujet, ainsi que Philippe d’Iribarne, La Logique de l’honneur, Paris, Seuil, 1989. 2 Philippe d’Iribarne, L’Étrangeté française, Paris, Seuil, 2006. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 32 - www.strategie.gouv.fr
  • 33. Les travaux récents de Lucie Davoine et Dominique Méda sur les perceptions subjectives mettent en avant la place particulière que le travail occupe en France dans 1 2 les représentations des individus , à partir d’enquêtes internationales sur les valeurs . Le travail a une place importante dans l’esprit des Français, plus que dans celui des résidents des pays protestants. Si, en matière d’« éthique du devoir » et de rapport instrumental au travail, la France se situe dans une position moyenne ou comparable à celle des autres pays européens, la volonté de s’épanouir au travail marque une singularité française. Près de 65 % de la population déclare que l’aspect intrinsèque du travail est « très important ». Ce résultat place la France loin devant les autres pays européens et 3 s’avère stable dans le temps . De même, les Français sont les premiers en Europe à se dire tout à fait d’accord avec l’idée que le travail est nécessaire pour développer pleinement ses capacités. Cette importance du travail semble revêtir une dimension profondément culturelle : elle ne s’explique ni par les caractéristiques de la population en emploi, ni par le contexte, ni par la richesse de la population, et ne semble pas résulter enfin d’un biais linguistique. L’importance attribuée au travail parmi les principales sources de satisfaction dans la vie est particulièrement élevée pour les catégories sociales supérieures, chefs 4 d’entreprise, cadres, professions libérales et professions intermédiaires . Lucie Davoine et Dominique Méda mettent également en évidence un paradoxe français, qui pourrait être résolu par un développement du télétravail. Si le travail a une place très importante, les Français sont également les plus nombreux à souhaiter passer plus de temps avec leur famille, fortement plébiscitée. Il y a ainsi une réelle attente des Français pour une meilleure conciliation entre la vie professionnelle et la vie familiale. À cet égard, il apparaît relativement plus difficile en France que dans le nord de l’Europe de s’absenter de son travail pour des raisons familiales, l’organisation du travail y étant moins souple. 3.2. La structure des organisations influe sur le développement du télétravail La France, comme les pays du sud de l’Europe, accuse un retard dans l’adoption de processus modernes de production, dans l’organisation en réseau et dans la gestion de l’autonomie, avec une persistance de formes de taylorisme par rapport aux pays 5 nordiques et à l’Allemagne . 1 Lucie Davoine et Dominique Méda, « Place et sens du travail en Europe : une singularité française ? », document de travail, n° 96-1, Centre d’études de l’emploi, février 2008 ; Lucie Davoine et Dominique Méda, « Travailler plus pour gagner plus ? Les avis partagés des Européens », Revue internationale du travail, vol. 148(1-2), 2009. 2 European Values Surveys (EVS), International Social Survey Programme (ISSP), European Social Survey (ESS). 3 L. Davoine et D. Méda, 2008, 2009, op. cit. 4 Sondage TNS Sofres, « Nouveaux modèles ce croissance », réalisé par téléphone pour le Centre er d’analyse stratégique du 20 août au 1 septembre 2009 auprès d’un échantillon de 1 001 personnes représentatif de la population âgée de 18 ans et plus. 5 Edward Lorenz et Antoine Valeyre, « Les formes d’organisation du travail dans les pays de l’Union européenne », Travail et Emploi, n° 102, avril-juin 2005 ; Antoine Valeyre et al., Working Conditions in the European Union: Work Organisation, European foundation for the improvement of Living and Working Conditions, Dublin, 2009. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 33 - www.strategie.gouv.fr
  • 34. Le télétravail est d’autant plus aisé à mettre en œuvre que la structure de l’organisation est légère, peu hiérarchisée, réactive et que les processus internes font appel aux TIC (taux d’équipement en ordinateur, qualité de la connexion Internet, « taux de numérisation » des documents et dématérialisation des procédures, disponibilité d’un extranet…). Pourtant, dans les faits, les entreprises comprenant entre 10 et 19 salariés pratiquent deux fois moins le télétravail que les entreprises employant entre 20 et 249 salariés, et plus de quatre fois moins que les entreprises de plus de 250 salariés (tableau n° 4). Ce phénomène s’explique par les moindres ressources (DRH, DSI, juristes, informaticiens…) dont disposent les petites entreprises pour mettre en place le télétravail mais également, selon certains experts auditionnés, par les bonnes relations de travail dans ces structures presque « familiales », qui n’inciteraient pas les salariés à télétravailler. L’autonomie, aussi bien dans les tâches que dans les horaires de travail, est plus développée dans les pays scandinaves, tout comme la formation continue y est plus répandue (plus de 50 % des salariés en Suède et en Finlande) et l’usage de l’informatique plus massif (plus de 70 % des emplois en Suède et aux Pays-Bas). Par rapport aux autres pays d’Europe, l’organisation du travail y est aussi plus flexible (travail en équipe, rotation des tâches, polyvalence sur les postes de travail…), plus « active » et le travail y est plus intensif (cette intensité continue à s’accroître en Finlande, en Suède et au Danemark). De l’avis des chercheurs de la Fondation 1 européenne sur l’amélioration des conditions de vie et de travail , cette organisation du travail, tout en étant la plus productive, ne dégrade pas le bien-être du travailleur qui, bien que soumis à une plus forte pression, dispose de plus de liberté sur ses horaires et sur la gestion du contenu de son travail. La flexibilité interne est moins développée en France, qui se situe parmi les mauvais élèves européens : 36 % des travailleurs français témoignent d’une rotation sur les postes, 50 % travaillent en équipe (contre 70 % dans les deux cas au e Danemark) tandis que les salariés en équipes autonomes ne sont que 20 % (12 place européenne, contre plus de 50 % dans les pays scandinaves). De même, l’intensité du e travail est comparativement faible en France (19 place dans l’UE-27). A contrario, la pression de la demande extérieure est relativement élevée en France (74 %), signe d’un modèle tertiaire qui a bien intégré la notion du « juste à temps ». Enfin, au-delà des processus organisationnels, on observe une corrélation positive 2 entre télétravail et pratiques modernes de gestion des ressources humaines . Un bon exemple est la plus grande flexibilité des horaires accordée aux salariés, avec la possibilité de fractionner le temps de travail. 3.3. Le télétravail, parce qu’il remet en cause les processus établis d’une organisation, peut aboutir à des appréhensions de l’encadrement intermédiaire 3 Une étude a mis en évidence que le télétravail accroît l’autonomie des salariés à l’égard de leur supérieur direct et qu’il oblige ce dernier à adopter un management par 1 A. Parent-Thirion et al., 2007, op. cit. 2 Angel Martinez-Sanchez et al., « Telework, human resource flexibility and firm performance », New Technology, Work and Employment, volume 22, n° 3, novembre 2007. Cette étude a été menée sur 156 entreprises espagnoles. 3 Claire Dambrin, « How does telework influence the manager-employee relationship? », International Journal of Human Resources Development and Management, vol. 4, n° 4, janvier 2004. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 34 - www.strategie.gouv.fr
  • 35. objectifs ; les données harmonisées entre pays indiquent également une corrélation entre taux de télétravailleurs et taux de salariés soumis au management par objectifs (figure n° 5). Ce nouveau paradigme réduit en apparence le rôle du manager « traditionnel », attaché à la présence physique du subordonné. Il constitue aussi une opportunité d’acquérir de nouvelles compétences de gestion et d’animation à distance d’équipes pluridisciplinaires. Figure n° 5 : Corrélation entre management par objectifs et télétravail Source : enquête SIBIS 2002, analyse CAS En outre, le télétravail formalise la déstabilisation et la fragmentation des équipes liées aux TIC, en désynchronisant les cadres temporels et spatiaux, en remettant en cause les routines informelles construites lors des échanges interpersonnels sur les sites de 1 2 production . Néanmoins, des études récentes sur le travail à distance font apparaître que des collectifs de travail se recréent parfois via les TIC et les outils partagés, avec un renforcement de la répartition des rôles et des compétences de chacun au sein du cadre collectif. Dans de nombreux pays européens, ces problèmes de management des télétravailleurs sont bien identifiés par les employeurs mais sont mis en balance avec les résultats positifs en termes de qualité du travail et d’augmentation de la productivité. 1 François Silva et Stéphane Hugon, Usages des TIC et RSE. Nouvelles pratiques sociales dans les grandes entreprises, rapport, ORSE-CIGREF, juin 2009. 2 Jérémie Rosanvallon, « Travail à distance et représentations du collectif de travail », Interventions Économiques, n° 34, 2006. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 35 - www.strategie.gouv.fr
  • 36. Le télétravail dans les filiales française et néerlandaise d’une même entreprise La moindre diffusion du télétravail, d’un facteur trois, entre les Pays-Bas et la France peut trouver une explication à travers plusieurs cadres d’analyse des différences culturelles entre les pays1. Le comportement de l’encadrement dans les entreprises en est un des aspects essentiels. Ainsi, l’exemple de la mise en place du télétravail dans les filiales française et néerlandaise d’un même groupe multinational, spécialisé dans l’industrie des télécommunications, permet de comprendre les différences de compor- tement entre les cadres de ces deux pays. Alors que les cadres dirigeants de la filiale française se déclaraient en faveur du télétravail – certes plus pour des impératifs de communication que par réelle conviction sur les bénéfices à en attendre –, leurs homologues néerlandais se montraient plus circonspects, échaudés par des expériences passées malheureuses, tout en tolérant le télétravail informel. À l’inverse, au niveau hiérarchique inférieur, les cadres intermé- diaires français – par manque de formation et de « soutien » des ressources humaines – s’opposaient à la mise en place du télétravail, tandis que leurs homologues néerlandais encourageaient le télétravail informel. Le projet de télétravail français, bien que formalisé dans les contrats de travail, s’est finalement trouvé circonscrit à quelques unités de l’entreprise, choisies plus ou moins arbitrairement, tandis que dans le même temps la filiale néerlandaise pratiquait le télétravail, certes informel, à une plus large échelle. Bien que le comportement des cadres intermédiaires semble prépondérant, la mise en place efficace du télétravail nécessite l’implication des acteurs à tous les échelons de l’entreprise. La confiance entre employeur et salarié, les actions de formation des cadres ou encore la mise à niveau des systèmes informatiques sont d’autres facteurs de succès. Source : P. Peters et al. (2009), synthèse CAS Or les managers français se distinguent par une moindre appropriation des outils 2 numériques et par la difficulté à faire évoluer leurs pratiques d’encadrement, par exemple vers des modes de travail plus collaboratif. Les raisons sont culturelles mais le manque de formation initiale et continue vient renforcer le blocage. L’exemple de la mise en œuvre du télétravail, différente entre les filiales française et néerlandaise d’une même entreprise, illustre les disparités culturelles dans l’encadrement, et l’importance de celui-ci dans le succès – ou l’échec – du télétravail dans une organisation (voir encadré). 1 Geert Hofstede a établi un de ces cadres généraux d’analyse des différences culturelles entre les pays, qui s’appuie sur deux dimensions de la culture nationale, à savoir le « refus de l’incertitude » et la « distance au pouvoir ». À travers ces deux dimensions, un classement des pays est produit, qui correspond fortement au classement du télétravail par pays présenté dans le chapitre 1. 2 F. Silva et S. Hugon, 2009, op. cit. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 36 - www.strategie.gouv.fr
  • 37. 4. La diffusion des technologies explique en partie le développement du télétravail 4.1. Télétravail et degré d’avancement dans la société de l’information semblent corrélés 1 Une comparaison entre différentes mesures de l’accès à la société de l’information indique que la corrélation est forte, d’une part, entre le télétravail et la qualité des usages numériques personnels et, d’autre part, entre télétravail et avancement de la société de l’information. En ce qui concerne les infrastructures numériques (déploiement du haut débit…), la corrélation est encore plus importante. L’annexe 8 indique les corrélations entre télétravail et une quinzaine de facteurs. Corrélation n’est pas causalité. Toutefois, la qualité de l’infrastructure numérique semble être une condition nécessaire au développement du télétravail. Ainsi, la montée en puissance du télétravail aux Pays-Bas, dès le début des années 2000 (14,5 % de la population active en 1999 contre 26,4 % en 2003), aurait été largement 2 favorisée par des aides gouvernementales à l’équipement informatique des ménages . Or, sur ce point, malgré le développement de l’usage des TIC dans les entreprises françaises, on note des lacunes dans l’encadrement et dans l’expertise en matière de 3 TIC . En effet, si 98 % des entreprises françaises de plus de dix salariés sont équipées en ordinateurs, dont 71 % disposent d’un réseau local, seules 15 % d’entre elles emploient du personnel spécialisé en informatique et télécommunications. Parmi les entreprises industrielles, les entreprises allemandes et britanniques ont un usage plus répandu de l’informatique par les salariés. En outre, si la pratique des TIC s‘est fortement développée dans les entreprises françaises, l’équipement en outils de travail collaboratif a assez peu progressé sur la dernière période : seulement 13 % des entreprises d’au moins dix salariés disposent de tels outils en janvier 2008. Les lacunes sont concentrées dans les TPE et PME. Or ces outils (messageries et agendas électroniques, visioconférence) facilitent considérablement le télétravail. 4.2. La nature du travail de certaines professions nécessite d’importants besoins de bande passante, et donc des infrastructures numériques de qualité À l’avenir, il est probable que les besoins de débits montants seront aussi significatifs que les besoins de débits descendants : la fibre optique – ou toute 4 technologie de communication symétrique – est donc plus qualifiée que l’ADSL pour contribuer à développer le télétravail. 1 La société de l’information est caractérisée, entre autres, par l’indice de développement des usages numé- riques individuels du World Economic Forum, le taux de pénétration d’Internet dans les ménages français… 2 En 1998 était mis en place par le gouvernement le « PC-privéregeling » qui prévoyait le paiement d’un ordinateur par le gouvernement à l’employé, dans la limite de 2 269 euros. 3 S. Besnard et al., 2008, op. cit. 4 Par nature, l’ADSL (acronyme de Asymmetric Digital Suscriber Line) est un mode de communication asymétrique : le débit descendant est supérieur au débit montant, ce qui pénalise certains types de communication, en premier lieu la téléprésence. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 37 - www.strategie.gouv.fr
  • 38. Tableau n° 6 : Usages professionnels de l’Internet et besoins de bande passante associés* Bande passante Bande passante Usage et bande passante effective montante descendante E-mail simple 250 Kbps 250 Kbps Partage de documents (> 2 Mo) 500 Kbps 500 Kbps Téléconférence (VoIP entre 200 Kbps 600 Kbps 4 utilisateurs simultanément) Navigation Internet simple * 500 Kbps (pages web simples…) * * Navigation Internet avancée (rapports, * 1,2 Mbps streaming vidéo…) * * Ingénierie à distance (collaboration de 5 personnes en temps réel sur une 1 Mbps 4 Mbps maquette virtuelle de CAO…) Vidéoconférence résolution moyenne 400-1 200 Kbps 400-1 200 Kbps (640*480 pixels) entre deux personnes Vidéoconférence multiple 400-1 200 Kbps 800 -2 400 Kbps (trois personnes) Téléprésence (vidéoconférence HD) 5 Mbps 5 Mbps (*) Les chiffres indiquent les débits nécessaires pour que l’activité économique ne soit pas fortement ralentie Source : analyse CAS Selon la nature et l’intensité de la pratique de télétravail, les besoins en bande passante se situent dans la fourchette 500 Kbps-5 Mbps. Si les infrastructures fixes sont à privilégier (fibre optique, câble, ADSL…), les infrastructures hertziennes, qui favorisent la mobilité, sont particulièrement adaptées au télétravail. Enfin, au-delà 1 du simple débit, une bonne pratique de télétravail exige une connexion de qualité , stable et robuste. 4.3. À l’avenir, les technologies numériques seront de moins en moins des obstacles à l’essor du télétravail Ces trente dernières années, les technologies n’ont jamais constitué un goulet d’étranglement à l’essor du télétravail, sauf dans les zones dépourvues d’infra- structures. Dans les années à venir, l’amélioration de la capacité d’innovation et les gains de productivité permis par les évolutions technologiques seront considérables, que ce soit à travers les applications collaboratives (virtualisation, cloud computing et Software as a Service, synchronisation des terminaux, etc.) ou les outils de mobilité (netbooks et smartphones, 4G, LTE/WiMAX, réseaux sans couture, etc.). De même, les débits symétriques d’information atteints par une infrastructure de fibre optique autorisent une véritable collaboration entre les acteurs, grâce à la téléprésence, les vidéoconférences multiples, le transfert instantané d’importants volumes de données… 1 Laurence Thomsin, « Télétravail : enseignements tirés d’un observatoire topique (cas d’une filiale belge d’une multinationale) », Innovations, n° 22, 2005. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 38 - www.strategie.gouv.fr
  • 39. 5. La géographie n’est pas un obstacle majeur au développement du télétravail Avec 98 habitants par km², la densité de la population française est inférieure à la moyenne de l’Union européenne. À première vue, cela pourrait constituer un facteur explicatif du faible développement du télétravail en France. Or, comme le montre la figure n° 6, il n’existe pas de corrélation entre densité de population et développe- ment du télétravail. Figure n° 6 : Corrélation entre densité de population et télétravail Source : Eurostat, enquête SIBIS, analyse CAS De la même manière, climat et télétravail ne sont pas corrélés (cf. annexe 8). Ainsi, l’influence des paramètres « physiques » (densité de population, conditions clima- tiques…) sur le développement du télétravail semble faible. 6. Récapitulatif des principaux obstacles à l’essor du télétravail Les freins au développement du télétravail appartiennent à quatre catégories L’évaluation de ces freins a été réalisée de manière globale, en se fondant sur 50 entretiens réalisés en France et à l’étranger auprès d’entreprises, d’experts et 1 d’administrations . Quatre catégories de freins au télétravail apparaissent : freins de nature juridique et politique, freins de nature culturelle et sociale, freins liés à l’équipement informatique et freins liés à l’encadrement. Les freins juridiques seront développés dans la suite du rapport (chapitre 3, point 4.2), à travers les questions de présomption d’accident du travail et de l’assurance 1 L’échantillon retenu étant non significatif à l’échelle d’un pays, une comparaison inter pays n’est pas pertinente. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 39 - www.strategie.gouv.fr
  • 40. Tableau n° 7 : Freins à l’essor du télétravail, classés selon quatre thèmes Responsabilité assurantielle mal définie JURIDIQUE ET POLITIQUE Discrimination de population au sein de l’entreprise Protection de la vie privée Clause de réversibilité à la demande des salariés Décompte et paiement des heures télétravaillées Absence de politique publique (État/législateur) et de promotion Acceptation en tant que mode de travail à part entière CULTUREL ET SOCIAL Crainte de l’isolement Crainte du travail additionnel sans contrepartie réelle Méconnaissance globale du télétravail Protection des données échangées ÉQUIPEMENT Gestion et maintenance de réseaux décentralisés Lourdeur des investissements à consentir Passage à des infrastructures haut débit Maîtrise des TIC encore incomplète MANAGEMENT Passage à un management par objectifs Perception par le management encore négative Vision du télétravail comme un avantage accordé arbitrairement Inexistence de formations Impact faible Impact fort. Source : entretiens, analyse Roland Berger La mauvaise connaissance des responsabilités, les ambiguïtés du cadre juridique et le manque d’incitations fiscales de la part des pouvoirs publics sont les principaux freins de nature juridique et politique Les entretiens menés par la mission confirment la demande d’un cadre juridique plus clair et plus pragmatique, permettant aux acteurs de ne pas attendre l’arrivée de la jurisprudence au fur et à mesure que les risques, parfois attendus, se réalisent. L’incertitude engendrée par les lacunes de la loi oblige les entreprises qui le peuvent à réaliser des efforts supplémentaires pour prévoir les cas potentiellement litigieux dans un accord d’entreprise. Dans certains cas, les entreprises préfèrent même parler de « mobilité » ou de « nomadisme », se soustrayant ainsi aux obligations que leur impose, par exemple, le télétravail à domicile. Trois points en particulier restent flous et sources de risque pour les salariés et les employeurs : – la répartition des responsabilités en cas d’accident du travail à domicile ; – la limite entre utilisation personnelle et professionnelle des outils mis à disposition ; Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 40 - www.strategie.gouv.fr
  • 41. la mise en œuvre pratique de la mesure du temps de travail pour les salariés qui ne sont pas au forfait jour ; en effet, le télétravail remet en cause une vision uniforme de calcul du temps de travail. À cela s’ajoute de façon plus générale l’absence de définition légale du salarié, ce qui peut poser problème dans les cas où l’on est à la limite de l’externalisation ou de l’intérim. De même, la situation du télétravailleur indépendant n’est prise en compte dans aucun texte. La loi est par ailleurs perçue comme contraignante par les entreprises pratiquant le télétravail depuis longtemps, notamment par sa clause de réversibilité sur demande des salariés. L’absence de politique fiscale réellement incitative (c’est le cas en France) est un frein important à l’essor du télétravail. Des pays appartenant au groupe des « pays matures » comme la Suède ou le Danemark ont une politique incitative et proposent de rembourser une part des dépenses du foyer liées à la pratique d’une partie de son activité depuis son domicile. Dans la fonction publique, l’absence de cadre juridique spécifique constitue bien évidemment un des obstacles majeurs à une large diffusion du télétravail. La méconnaissance et la dévalorisation sociale du télétravail, la crainte de travailler plus sans contrepartie sont les principaux freins de nature culturelle et sociale Tout d’abord, la réalité et les enjeux du télétravail sont généralement méconnus et ses avantages sociaux (e.g. augmentation de la productivité liée aux TIC ou à l’amélio- ration des conditions de travail des salariés, diminution des coûts immobiliers) sont sous-estimés par les employés, les employeurs et les pouvoirs publics. De plus, le télétravail, en tant que mode d’organisation, est desservi par une perception générale négative. Il n’est pas encore accepté comme une forme de travail à part entière par l’ensemble des collaborateurs. Ses utilisateurs préfèrent souvent parler de « nomadisme » ou de « mobilité ». Le télétravail est ainsi assimilé à une absence (congés, maladie ou même chômage). Un télétravailleur à domicile insiste sur le besoin de venir au bureau régulièrement : « sinon, mes voisins vont penser que je suis au chômage ». Les salariés craignent de travailler plus sans contrepartie réelle et de ne pas voir leurs efforts récompensés (attribution de primes et de promotions). Les salariés redoutent également d’être isolés de leur équipe et de la hiérarchie, ce qui annulerait le rôle sociabilisant de l’emploi. Tout cela est dû à un déficit de reconnaissance du télétravail. De facto, les managers ont souvent l’impression qu’un employé qu’ils ne voient pas travailler ne travaille pas. Le déficit d’infrastructures, la sécurité des systèmes, la protection des données et la diffusion des TIC auprès des Français sont les principaux freins liés à l’équipement et à la technologie Un retard technologique existe dans certains territoires qui pourraient pourtant être les premiers bénéficiaires de l’installation de télétravailleurs (territoires ruraux de déve- loppement prioritaire et zones de redynamisation urbaine). Il y a une forte corrélation Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 41 - www.strategie.gouv.fr
  • 42. entre l’existence d’infrastructures permettant la connexion à haut débit à l’Internet sur un territoire et le développement du télétravail pour lequel ces ressources techniques sont indispensables. Un autre frein est la sécurisation de la confidentialité des données sur le terminal du travailleur (à domicile, en mobilité ou en télécentre) et dans les transmissions avec le réseau interne de l’entreprise. Les entreprises recommandent ainsi couramment à leurs employés de ne pas travailler sur des données confidentielles dans les lieux publics potentiellement fréquentés par leurs concurrents (avions, abords de l’entreprise). Néanmoins, la sécurisation d’un poste de travail peut ne coûter aujourd’hui qu’une cinquantaine d’euros par mois, ce qui met cette technologie à la portée des entreprises les plus petites. Enfin, si la diffusion des NTIC et la croissance des investissements dans les infrastructures est une réalité, il reste qu’en France 35 % des individus de 16 à 1 74 ans n’ont aucune connaissance de base dans l’usage d’Internet , outil indispensable à la pratique du télétravail. L’absence de management par objectifs, la peur des dirigeants de perdre le pouvoir et la crainte d’abus sont les principaux freins liés à l’organisation et au management Le télétravail, qui sous-entend dans la plupart des cas un relâchement du contrôle et de la supervision de l’exécution des tâches par le management, nécessite un mode de management par objectifs. Cette organisation moderne du travail n’est pas en œuvre dans toutes les entreprises et certains managers sont réticents face à ce qu’ils 2 considèrent comme une perte de pouvoir . Le télétravail accordé de manière informelle à quelques salariés est souvent perçu par le manager, le salarié concerné et ses collègues comme un avantage consenti plutôt que comme un mode normal d’organisation. De façon générale, le poids du management traditionnel oppose dans certaines organisations une inertie considérable à l’introduction du télétravail. Par ailleurs, les salariés sont également confrontés aux incertitudes qui laissent la place à la peur d’être traités comme des employés de seconde zone et à la crainte des abus (par exemple sur le respect du temps de travail). Au sein de la fonction publique, l’aspect excessivement personnalisé de cet avantage consenti semble transformer un mode d’organisation en fait du prince au profit de ses « protégés ». De plus, l’absence de doctrine officielle sur le sujet favorise l’hétérogénéité des pratiques et une forme d’immobilisme : une brochure a été éditée par le ministère de la Fonction publique et faiblement diffusée en 1998, et rien n’a été 1 Source : « Enquête communautaire sur l’utilisation des TIC par les ménages et les particuliers », Eurostat, 2006. Le niveau de compétence de base en informatique est mesuré à l’aide d’une auto- évaluation, sans que ces compétences soient testées. Six éléments liés à l’informatique ont été utilisés pour répartir les répondants en niveaux de compétence informatique : copie ou déplacement d’un fichier ou d’un répertoire, utilisation des outils « copier et coller » pour dupliquer ou déplacer de l’information dans un document, utilisation de formules arithmétiques de base (addition, soustraction, multiplication, division) dans un tableau de calcul, compression de fichiers, connexion et installation de nouveaux matériels, par exemple une imprimante ou un modem, écriture d’un programme informatique utilisant un langage de programmation spécialisé. 2 « Chez nous, les managers sont marqués par notre culture industrielle et son management présentiel ; ne plus voir ses équipes, c’est une révolution » - Renault, France. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 42 - www.strategie.gouv.fr
  • 43. entrepris depuis. Enfin, la fonction publique fait preuve d’une certaine difficulté à adopter la gestion par objectifs, point fondamental de l’organisation du travail en télétravail. À titre de comparaison, il est intéressant de noter le cas des administrations fédérales allemandes, où le taux de télétravail est de 4 % à 10 % des équipes. L’absence de visibilité du cadre juridique n’a pas favorisé un essor rapide du télétravail en France La proposition de loi « pour favoriser le maintien et la création d’emplois » traduit, sans changement majeur dans la loi, les termes de l’ANI de 2005. Si, juridiquement, l’extension de l’ANI par arrêté du ministère du Travail en 2006 lui donne un caractère prescriptif pour la plupart des entreprises et salariés, la tradition française fait du législateur le principal constructeur du droit du travail. À cet égard, au cours de la dernière décennie, les partenaires sociaux ont souvent invité les pouvoirs publics à transposer leur accord dans une loi. Selon certains experts auditionnés, l’accord national interprofessionnel ne serait actuellement pas suffisamment visible, et de ce fait mal connu et inappliqué, d’autant plus que les partenaires sociaux ne se sont pas particulièrement investis pour le promouvoir. L’espoir de certains partisans de la proposition de loi réside dans la 1 visibilité accordée par l’inscription dans le Code du travail, base de référence pour la plupart des DRH et dirigeants, notamment des PME. 1 En complément, alors que la plupart des entreprises ont désormais accès à l’Internet, un site institutionnel de référence sur le télétravail pourrait contribuer à diffuser la réglementation et les bonnes pratiques. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 43 - www.strategie.gouv.fr
  • 44. Les risques d’abus 1. Les abus restent rares, bien que probablement sous-estimés 1.1. Les abus sont surtout le fait des employeurs mais aussi des salariés Les abus des salariés peuvent porter sur de fausses déclarations d’accidents de travail et sur le non-respect des clauses du contrat de travail et/ou du Code du travail Concernant les accidents du travail, l’ampleur des fausses déclarations est difficile à 1 quantifier . Elles sont vraisemblablement marginales, même si l’effet « accident de travail du lundi matin » existe. Une des craintes des employeurs est donc de voir le 2 nombre de fraudes augmenter avec le passage en télétravail . L’absence de contrôle physique permanent, caractéristique du télétravail, a une influence variable sur les autres abus liés au contrat de travail, à savoir l’absentéisme, les faibles horaires de travail, le vol ou la détérioration des données de l’organisation, les déplacements non autorisés… Toutefois, ces abus peuvent être prévenus lors du projet de déploiement du télétravail, à même d’identifier en amont les problèmes éventuels : remise en cause des processus de l’organisation, identification des profils de salariés aptes au télétravail, management par objectifs, contrôle des horaires et des plages de travail, sécurisation des données et nouvelles méthodes d’animation managériale… De fait, la mise en œuvre du travail formalisé nécessitant l’accord de l’employeur, les abus des 1 Il n’existe pas de statistiques précises sur la fraude aux accidents du travail, la convention d’objectif et de gestion de la branche AT/MP 2009-2012 prévoit d’ailleurs le lancement par la CNAMTS d’une cartographie des risques d’abus (programme 12). 2 Toutefois, pour toute personne – en situation de télétravail ou non –, il est déjà possible de déclarer un accident domestique comme accident de travail. En outre, d’après les données de la CNAMTS, les accidents du travail à domicile n’ont représenté que 0,003 % des accidents du travail avec arrêt en 2008 (18 sur 703 976 accidents avec arrêt) contre 12 % des accidents du travail pour les accidents de trajet et moins de 4 % pour les accidents de déplacements professionnels (CNAMTS, Risque AT 2008 : statistiques « technologiques » tous CTN et par CTN, août 2009 ; CNAMTS, Sinistralité des accidents du travail, des accidents de trajet et des maladies professionnelles entre 2003 et 2007, septembre 2008). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 44 - www.strategie.gouv.fr
  • 45. salariés sont bien maîtrisés par les entreprises. Le télétravail peut même réduire ces 1 risques. Ainsi, il contribue généralement à réduire l’absentéisme . Des exemples de mise en pratique du télétravail sont présentés dans le chapitre 5. Les abus des employeurs peuvent porter sur le non-respect des dispositions de l’ANI D’après les termes de l’ANI de 2005, étendu en 2006, l’employeur doit fournir à son employé les équipements pour télétravailler (ordinateur, périphériques, connexion Internet, etc.). La grande majorité des entreprises se conforment à ces dispositions, en particulier les plus importantes qui disposent d’une direction des services informatiques (DSI) ou d’un service juridique. Des contrats de télétravail abusifs existent néanmoins, que les salariés ne dénoncent pas, par ignorance des dispositifs juridiques ou par peur d’éventuelles 2 représailles. Une étude de 2008 du cabinet spécialisé IDC portant sur le secteur des études, du conseil et de l’informatique – pourtant utilisateurs intensifs de TIC – montre que la prise en charge totale des équipements, prévue par les dispositions de l’ANI, est finalement une situation relativement exceptionnelle (tableau n° 8). Tableau n° 8 : Prise en charge des équipements informatiques par les entreprises françaises des secteurs des études, du conseil et de l’informatique Équipement Taux de prise en charge* PC portable 74 % Accès Internet haut débit 61 % Téléphone portable 29 % PC portable avec carte 3G 24 % Ligne téléphonique fixe 19 % Mobilier de bureau** 15 % PDA communiquant 3% (*) Base : ensemble des salariés travaillant à domicile aux horaires de bureau. (**) Au Canada, un grand constructeur informatique distribue à ses salariés des guides et une enveloppe pour commander du mobilier ergonomique destiné au télétravail à domicile. Source : IDC Le télétravailleur étant d’après les textes un salarié comme un autre, il dispose à ce titre des mêmes avantages en nature que ses collègues : remboursement des déplacements et des frais professionnels, des repas ou de l’utilisation du domicile (chauffage, éclairage, etc.). Il devrait avoir accès aux mêmes opportunités de carrière et aux mêmes informations (syndicats, offres d’emplois en interne, communication d’entreprise, etc.). 1 Jusqu’à 80 % de réduction du taux d’absentéisme selon l’étude européenne Sustel de 2002 portant sur trente entreprises dans cinq pays européens. 2 IDC, Étude sectorielle sur la pratique du télétravail au sein des secteurs des études, du conseil et de l’informatique, réalisée pour l’ADESATT, septembre 2008. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 45 - www.strategie.gouv.fr
  • 46. Des abus peuvent provenir de l’intrusion de l’employeur dans la vie privée de son salarié Dans l’enquête européenne sur les conditions de travail, les télétravailleurs déclarent être contactés quotidiennement quatre fois plus souvent par l’employeur (téléphone ou e-mail) en dehors des heures normales de travail (6,8 % contre 1,7 % pour les salariés travaillant dans les bureaux de l’entreprise). En matière de surveillance du salarié, le télétravail favoriserait les abus de 1 l’employeur , qui peuvent porter atteinte au domicile du salarié. L’informatique participe ainsi de la « mise à nu » du travail des salariés, selon l’expression de 2 Jérémie Rosanvallon , qui traduit une certaine violence psychologique à leur égard. S’agissant du télétravail nomade, des craintes émergent quant aux possibles abus liés à l’usage de la géolocalisation, grâce au GPS intégré dans les outils de l’Internet mobile. Les abus partagés par les employeurs et les employés sont souvent liés à des arrangements amiables et informels Le télétravail informel – au sens strict de l’ANI de 2005 – est l’exemple le plus répandu d’abus partagé par l’employeur et l’employé, puisqu’en pratique la majorité des télétravailleurs exercent leur activité professionnelle sans contrat de travail régularisant leur situation. Cet état de fait convient généralement aux deux parties : l’employeur n’a pas à formaliser une situation souvent complexe sur le plan juridique, tandis que l’employé dispose d’une liberté de manœuvre appréciable. Le télétravail informel est la règle dans de nombreux pays, notamment anglo-saxons (États-Unis, 3 Canada). En France, selon l’étude du cabinet IDC portant sur les secteurs des études, du conseil et de l’informatique, le télétravail à domicile ne fait l’objet de clause particulière dans le contrat de travail que dans 22 % des cas. Dans 64 % des cas, il n’y a aucune formalisation. Ces chiffres – qui concernent des secteurs ayant pourtant massivement recours aux TIC – accréditent la thèse que le télétravail informel est majoritaire dans l’ensemble des secteurs, malgré les dispositifs juridiques récents. Tableau n° 9 : Formalisation du travail à domicile aux horaires de bureau Type de disposition Part dans l’ensemble Clauses dans le contrat 22 % Accord verbal du supérieur hiérarchique 10 % Demande écrite préalable 5% Aucune formalisation 64 % Source : IDC La clandestinité dans laquelle le télétravail est parfois cantonné peut tenir à du favoritisme de la part de l’employeur – qui aurait identifié un collaborateur apte au télétravail sans pour autant vouloir généraliser le dispositif – et à un comportement 1 Jérémie Rosanvallon, « Le Contrôle informatique du travail », Connaissance de l’Emploi, n° 62, 2009. 2 Jérémie Rosanvallon, Informatique, contrôle individuel et violence au travail, communication à l’Association française de sociologie, RT n° 25, 14 avril 2009. 3 IDC, ibid. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 46 - www.strategie.gouv.fr
  • 47. « opportuniste » de l’employé, qui a peur de voir généralisés, donc partiellement remis en cause, les avantages procurés par le télétravail. L’augmentation de la durée du travail est un autre exemple d’« abus » (au sens de la durée maximale légale du temps de travail) largement répandu. En effet, comparativement au travail effectué exclusivement dans les bureaux de l’entreprise, le télétravail entraîne une plus grande dispersion dans les durées hebdomadaires 1 travaillées : une partie importante des télétravailleurs travaillent plus de 40 heures . L’étude SUSTEL indique que, dans les trente organisations des cinq pays considérés, 2 entre 23 % et 76 % des télétravailleurs travaillent davantage qu’avant . Pour 46 % des télétravailleurs aux Pays-Bas, l’augmentation représente entre 6 et 10 heures par semaine. Dans quelle mesure cette surcharge abusive est-elle acceptée ou subie par le salarié ? D’un côté, l’employeur est satisfait d’avoir à sa disposition un salarié plus productif ; de l’autre, l’employé peut être motivé par son travail et peut chercher à compenser, par un surplus de travail, l’éloignement de sa hiérarchie et le temps gagné en transport. En France, les télétravailleurs travaillent plus longtemps et plus souvent la nuit et le week-end (tableau n° 10). À noter que, parmi les cadres, ces pratiques sont plus 3 courantes que les chez les cadres non télétravailleurs . Des études conduites aux 4 Pays-Bas, en Finlande ou en Allemagne font état de résultats similaires . Tableau n° 10 : Caractéristiques du télétravail Fixe à Alternant Tous Formes de télétravail Nomade domicile à domicile salariés Travail de nuit (occasionnel ou régulier) 39 % 69 % 42 % 30 % Travail le week-end (occasionnel ou régulier) 73 % 79 % 61 % 56 % Source : INSEE, enquêtes EPCV 1999-2003, traitements DARES Le télétravail apparaît davantage susceptible d’entraîner des situations de stress, voire de « burn-out », que le travail sédentaire en entreprise. Ce problème préoccupe fortement les salariés mais aussi les employeurs et les pouvoirs publics dans de nombreux pays. Il est difficile de faire la distinction ici entre la part propre au télétravail et ce qui relève des changements organisationnels et du management par objectifs. 5 D’autant que les TIC sont eux-mêmes porteurs de stress, en particulier le téléphone portable, les messageries électroniques et les smartphones, et que ces deux dimensions s’articulent souvent. Pour certains sociologues, ces nouveaux outils 6 constituent une « chaîne invisible » et marquent un asservissement aussi fort que celui enduré par l’ouvrier des Temps modernes de Charlie Chaplin. 1 A. Parent-Thirion et al., 2007, op. cit. 2 Is Teleworking Sustainable? An Analysis of its Economic, Environmental and Social Impacts, projet SUSTEL financé par la Commission européenne, 2004. Les cinq pays étudiés sont le Danemark, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni. 3 T. Coutrot, 2004, op. cit. 4 A. Broughton, 2006, op. cit. 5 Nathalie Colombier, Ludivine Martin et Thierry Pénard, « Usage des TIC, conditions de travail et satisfaction des salariés », Réseaux, n° 143, 2007 ; Silva et Hugon, 2009, op. cit., notamment sur le stress occasionné par l’avalanche de courriers électroniques. 6 Jean-Pierre Durand, La Chaîne invisible, Paris, Seuil, 2004. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 47 - www.strategie.gouv.fr
  • 48. En l’absence de régulations formelles, c’est parfois l’entourage familial qui 1 impose des limites de temps . La famille joue alors un rôle de garde-fou contre le surtravail et contribue plus largement à définir la frontière entre travail et hors-travail. 1.2. Les abus ont été à l’origine de quelques cas de jurisprudence Le cadre juridique général (Code du travail, jurisprudence…) protège le salarié 2 En matière de protection de la vie privée , la jurisprudence émane de la Cour 3 européenne des droits de l’Homme qui en retient une définition large . La Cour de cassation y est également très attentive, notamment à travers les notions de « vie privée », « d’intimité de la vie privée » et de « vie personnelle du salarié » qui protègent les activités publiques du salarié. En matière de santé et de sécurité au travail, le droit communautaire ne couvre pas 4 seulement la sécurité physique mais englobe également la sécurité mentale , 5 impliquant une obligation de prévention et de résultats pour l’employeur dans ces deux domaines qui relèvent de l’ordre public social, c’est-à-dire un niveau élevé de la hiérarchie du droit social. En outre, pour la Cour de cassation, le domicile n’est pas un lieu de travail comme un autre et le salarié est en droit de chercher à le protéger, voire de refuser d’y 6 travailler. Avec les TIC, l’enjeu réside désormais selon Jean-Emmanuel Ray dans la reconnaissance par le législateur ou le juge d’un « droit à la déconnexion ». Sur la question spécifique du télétravail, la jurisprudence, embryonnaire, n’est pas révélatrice de l’ensemble des abus existants La plupart des abus restent probablement confinés dans l’organisation : les salariés ne sont pas au fait des textes juridiques et connaissent rarement la palette de recours à leur disposition. De plus, les gains envisageables en cas de régularisation (paiement de l’équipement, de la connexion ou des avantages en nature) apparaissent à la « victime » souvent négligeables au regard de la complexité – perçue plus que réelle – des démarches nécessaires et surtout des éventuelles retombées négatives (pression salariale, mise à pied, etc.). En tout état de cause, il est difficile de trancher puisqu’il n’existe aucune étude sur le sujet. Cependant, il arrive que ces litiges entre employeurs et employés donnent lieu à des 7 poursuites judiciaires, voire à des arrêts et des décisions de jurisprudence . Avec moins de dix cas pour plus de deux millions de télétravailleurs en activité, la jurisprudence du télétravail en France demeure toutefois embryonnaire. 1 Jean-Luc Metzger et Olivier Cléach, « Le télétravail des cadres entre suractivité et apprentissage des nouvelles temporalités », Sociologie du travail, n° 46, 2004. 2 Jean-Emmanuel Ray, « Les libertés dans l’entreprise », Pouvoirs, n° 130, 2009. 3 CEDH, 4 décembre 2008, Marper c. Royaume-Uni, req. 30562/04. 4 J.-E. Ray, ibid. 5 A. Supiot, 2004, op. cit. 6 J.-E. Ray, ibid. 7 L’annexe 6 recense les cas de jurisprudence liés au télétravail. Pour identifier les dérives, nous avons utilisé en particulier les travaux de veille juridique effectués par le Forum des droits sur l’Internet. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 48 - www.strategie.gouv.fr
  • 49. 2. La protection contre les abus en France et dans les pays de l’OCDE 2.1. Comparatif point par point des cadres juridiques du télétravail dans les pays de l’OCDE La plupart des pays étudiés au cours de cette mission considèrent que le télétravailleur est un travailleur comme les autres, auquel s’appliquent les mêmes droits, les mêmes devoirs et les mêmes conditions de travail… En particulier, un cadre juridique spécifique au télétravail – quand il existe – n’est pas du ressort de la loi mais plutôt d’accords interprofessionnels, collectifs, de branche ou d’entreprise entre partenaires sociaux. C’est la méthode suivie par la plupart des pays européens qui ont transposé, pratiquement à l’identique, l’accord-cadre européen de 2002. Tableau n° 11 : Comparatif du cadre juridique du télétravail dans 23 pays de l’OCDE Non-transposition de l’accord Transposition similaire à l’accord-cadre européen et bonnes pratiques générales sur le cumul emploi-retraite sur les accidents du travail Éléments de jurisprudence Nature du cadre juridique Transposition de l’accord- Dispositions particulières Dispositions particulières Dispositions particulières entre un télétravailleur sur le congé maladie et un autre salarié cadre européen (abus, litiges…) Abus et ou maternité du télétravail Différence cadre juridique -- Pays étudiés 3 arrêts en Accord national Charge de France interprofessionnel Aucune cassation, 2 en Non Non la preuve appel (annexe 6) Quelques litiges Charge de Accord d’entreprise sur le paiement de la preuve Allemagne et de branche Aucune l’équipement dans Non Non (causalité à les années 1990 établir) Aucune Accord entre Accord NA (non employeur et d’entreprise Australie employé si avantages applica- NC (non connu) NC Non NC ble) Accord d’entreprise en plus du 1 NES ) Conventions collectives 2 Autriche Guide informatif Non Non Non Non Non pour les entreprises (2005) Convention Non Oui si les Belgique nationale collective Aucune 1 Non Non conditions 1 National Employment Standards. 2 Les risques maladie et accident sont assurés différemment selon que la personne est salariée (équivalent CRAM), en « libre travail » (CRAM en dessous de 357 euros par mois ou caisse générale de la Sécurité sociale au-dessus) ou à la tâche (adhésion propre à la Sécurité sociale). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 49 - www.strategie.gouv.fr
  • 50. n° 85 bis, rendue Situation du contrat obligatoire par gérée ou de décret royal par le l’avenant contrat sont réunies de travail Charge de la preuve par l’em- ployeur Indemnité si Pas de loi générale Décision de Cour les condi- Éléments dans le d’appel (3 février tions du Aucune en Code canadien du 2005) : les emplo- contrat sont théorie mais Canada travail (exercice du avantages NA yeurs ne peuvent Non NC respectées droit d’association pas obliger leurs (horaires et éventuels des travailleurs à employés à tra- lieux de 2 distance) vailler à domicile travail, y. c. le domicile) Loi dans Aucune Accident hors des Pas de 3 l’administration (régime du locaux considéré Non disposition Corée Conventions collec- Labor comme accident (disposit légale sur NA Non du Sud tives et/ou contrat Standard du travail si ayant ions du les acci- de travail dans le Act of Korea eu lieu durant le LSAK) dents à secteur privé - LSAK) travail domicile Conventions collectives Danemark obligatoires au Aucune Introduit NC Non Non Non niveau confédéral progres- et/ou sectoriel sivement Class action Directement entre contre IBM 2006 employeur et États-Unis employé : contrat Aucune NA (paiement de Non Non Non $65M en heures de travail supplémentaires) Accord national Non mais deux Finlande interprofessionnel Aucune cas connexes Non Non Non (public et privé) Guide national de bonnes pratiques Irlande sur le télétravail Aucune NC Non Non Non (modèle au contrat Code of de travail) practice Aucune, Pas de loi (contrat Israël de travail) caractère NA NC Non Non NC informel Accord national interprofessionnel Italie (9 juin 2004) et Aucune Non Non Non Idem France accords collectifs Aucune Un télétravailleur Pas de loi dédiée (application considéré comme Guide des bonnes notamment salarié a été Non Japon pratiques du du Labour NA indemnisé pour un (LSA) Non Non ministère de la Standards accident de travail Santé et du Travail Act 49 de (Rodo Hanrei 1947) 962.24) Décret d’application Norvège de la loi sur le Aucune Non NC Non NC 1 La Belgique est allée plus loin que les autres pays européens dans la transposition de l’accord-cadre européen, en ajoutant dans sa Convention nationale collective n° 85 de 2005 des éléments très précis sur la fréquence du télétravail, les jours effectués dans et hors de l’entreprise, les moments ou périodes pendant lesquels le télétravailleur est joignable ou peut contacter l’assistance technique… 2 Les compétences sont partagées entre gouvernements régionaux et fédéraux : la plupart des entreprises sont régies par les lois provinciales (exemple de la loi sur les normes au Québec), tandis que le gouvernement fédéral régit les entreprises de compétence fédérale dans les secteurs bancaires, des télécommunications et du conseil. 3 La loi n° 9705 sur le gouvernement électronique promeut le télétravail dans la fonction publique, en identifiant des gisements dans les emplois de traduction, d’ingénierie, de recherche, d’enquêtes… Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 50 - www.strategie.gouv.fr
  • 51. télétravail (public (5 juillet 2002) et privé) Accord entre partenaires sociaux (décembre 2002) Non (Health and Nouvelle- Safety in NC Aucune NA NC NC Non Zélande Employ- ment Act 1992) Conventions collectives Un télétravailleur Loi-cadre pour la ne peut être fonction publique (disposi- considéré comme 1 Pays-Bas Forum du télétravail Aucune tions sur indépendant par Non Non Non par le ministère des l’ergo- l’entreprise si le Transports nomie lien de subordi- (www.telewerkforu en plus) nation est direct m.nl) Flexible Guide reconnu par Royaume- 3 Working les partenaires Aucune Plusieurs cas Non Non Uni 2 Regula- sociaux 4 tions Pas de loi Flexible Non (Work Aucune Éventuelles Work Injury and Singapour conventions (Employment NA Non Arrange Non Compensati Act) collectives ments on Act) Non Non Pas de loi mais les mais Non mais Accord-cadre accords Pas de solutions les accords européen comme de transpo- indivi- de branche Suède « checklist » Aucune Non branches duelles peuvent être Conventions sition peuvent pour de semi- plus collectives dans être plus tous les retraite favorables certains secteurs favora- secteurs possible bles Pas d’éléments Aucune (art. Non (réponse du Non Suisse dans le Code des 319-322 du NA Conseil fédéral) (CO) Non Non (CO) obligations (CO) CO) Taïwan Pas de cadre NC NA NC NC NC NC Source : Missions économiques, exploitation CAS 1 Toutefois, aux Pays-Bas, la loi sur les conditions de travail (Arbowet), qui traite également de l’ergonomie du poste de travail, s’applique au travail à domicile et donc aux télétravailleurs. 2 L’accord-cadre européen de 2002 n’a pas été transposé par les Britanniques par un accord collectif entre partenaires sociaux. À la place, un guide des bonnes pratiques, reprenant les termes de l’accord- cadre européen, a été édité et promu par les partenaires sociaux. 3 Dans un cas, le tribunal de l’Emploi a considéré non valide le refus de l’employeur à l’égard de la demande de télétravail d’une employée ayant des enfants en bas âge (discrimination sexuelle indirecte selon le Sex Discrimination Act). Dans un autre cas, le tribunal a considéré que l’entreprise devait proposer le télétravail comme une alternative au licenciement d’un salarié souffrant d’agoraphobie (Disability Discrimination Act de 1995). La Haute Cour a refusé la demande d’un fonctionnaire en télétravail (quatre jours par semaine, à 200 km des locaux de l’employeur), auquel on avait retiré son bureau) de disposer de déductions d’impôts pour l’usage de son domicile (principe de volontariat). La Cour d’appel de l’emploi a obligé un employeur à proposer le télétravail à une employée devenue handicapée suite à une maladie grave (DDA, 1995). 4 Les télétravailleurs ont droit aux mêmes protections que les autres salariés (Employment Act 2002 – Chapitre 47 et Flexible Regulations 2003). En supplément, les employés ayant des responsabilités parentales particulières peuvent demander des arrangements pratiques de leurs conditions de travail (dont le télétravail à domicile), que l’employeur ne peut refuser que pour des motifs importants, suivant une procédure spécifique. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 51 - www.strategie.gouv.fr
  • 52. 2.2. En matière de cadre juridique, les différences entre les pays de l’OCDE sont mineures1 Les pouvoirs publics de la plupart des pays de l’OCDE sont plus spectateurs qu’acteurs des changements liés au télétravail Dans la plupart des pays de l’OCDE, le télétravail ne fait pas l’objet d’une politique publique de l’emploi au sens où nous l’entendons en France, c’est-à-dire une 2 politique qui poursuit des résultats socioéconomiques dont il serait un instrument . En revanche, très nombreuses sont les entreprises qui insèrent le télétravail dans leurs politiques de gestion des ressources humaines. Il existe donc un décalage important entre d’une part les pratiques internes des entreprises qui recourent au télétravail et en évaluent de manière critique les effets positifs comme négatifs, notamment sur leur fonctionnement et leur productivité, et d’autre part les politiques publiques qui suivent le mouvement plus qu’elles ne l’orientent. Cette remarque se limite bien sûr aux seules politiques de l’emploi, car le télétravail se développe partout sur le terreau des infrastructures numériques dont les États soutiennent très activement l’extension. Ce manque d’ambition se traduit par une politique législative faite d’adaptations pour intégrer la pratique du télétravail dans l’ordre juridique. Autrement dit, il s’agit le plus souvent de faire de « simples » ajustements, même si les questions techniques soulevées peuvent être particulièrement complexes. La France, qui n’échappe pas à ces remarques, pourrait être amenée à faire un choix qui dicterait ses orientations législatives à venir. Soit elle se contente d’accompa- gner la pratique du télétravail en supprimant les obstacles légaux qui pourraient en limiter la pratique et en mettant des bornes pour éviter des abus ou assurer la protection des télétravailleurs. Soit elle développe une politique du télétravail intégrée aux politiques de l’emploi qui favorise la flexicurité, développe la compétitivité du pays en l’ancrant dans l’économie de la connaissance, permette de lutter contre le chômage, encourage la mobilité, contribue au maintien de la capacité des travailleurs à occuper un emploi, stimule la création d’entreprises ou le cumul d’un emploi salarié et d’un emploi d’indépendant (auto-entreprise), etc. Si cette deuxième voie devait être choisie, il serait légitime que tout nouveau texte de droit du travail, qu’il s’agisse des relations contractuelles, du fonctionnement des institutions représentatives du personnel ou de la négociation collective, prenne en considération non seulement la pratique du télétravail mais aussi les politiques de soutien à l’économie numérique dont il est un des prolongements. Au plan technique, plusieurs traits ressortent de l’enquête menée dans les pays de l’OCDE. Certains pays disposent d’une législation spécifique, d’autres non (Israël, Japon, Suisse, par exemple). 1 Les éléments de synthèse figurant dans cette section sont fournis par Jean-Yves Kerbourc’h, conseiller scientifique au Centre d’analyse stratégique, professeur de droit social à l’université de Haute-Alsace. 2 Une des exceptions étant les Pays-Bas, où « le télétravail est mis en avant notamment comme l’un des moyens de lutter contre la congestion des axes routiers, et d’augmenter la participation des femmes au marché du travail » (source : rapport des Ambassades pour le Centre d’analyse stratégique). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 52 - www.strategie.gouv.fr
  • 53. Entre segmentation des télétravailleurs par catégorie et vision globale, les approches varient selon les pays de l’OCDE Certains pays ont une approche globale de la question du télétravail qui transcende les séparations juridiques d’exercice par un travailleur de son activité. En Australie par exemple, l’agence de type « think tank » chargée des questions de télétravail rattachée au gouvernement fédéral ne fait pas de distinction entre le télétravailleur salarié et le télétravailleur indépendant. Toujours dans ce pays, une enquête a montré que les perspectives de développement du télétravail étaient deux fois plus importantes dans le secteur public que dans le secteur privé. Le Canada a également développé une politique de télétravail ambitieuse dans le secteur public (mais il n’existe pas de fonction publique au Canada au sens du droit de la fonction publique en France). On peut donc penser que le télétravail est susceptible de modifier les frontières dessinées entre les trois grands régimes d’emploi que nous connaissons (salariat, indépendance, emploi public). Il serait donc opportun d’avoir une approche générale de la question plutôt qu’une approche segmentée. C’est ainsi que la grande indépendance dans laquelle un télétravailleur exerce son activité pourrait remettre en cause le lien de subordination qui caractérise le contrat de travail : au Royaume-Uni par exemple, 41 % des auto-entrepreneurs sont des télétravailleurs. Le cas de l’Italie est intéressant car la distinction entre les télétravailleurs est de nature juridique et très précise : – le télétravail comme « activité d’entreprise » avec un contrat d’entreprise ; – le télétravail comme « travail autonome » avec un contrat d’activité professionnelle libérale ; – le télétravail comme « travail para-salarié » avec un contrat de travail de para- salarié ; – le télétravail comme « travail salarié » avec un contrat de travail salarié ordinaire ; – le télétravail comme « travail salarié décentré » avec un contrat de travail salarié à domicile. La définition du télétravail repose dans tous les pays sur l’utilisation des TIC, en dehors des locaux de l’entreprise, pour accomplir un travail Dans tous les pays, la définition du télétravail repose sur l’utilisation de technologies de l’information (l’ordinateur principalement), le plus souvent couplée à une techno- logie de communication (Internet, géolocalisation, téléphone, etc.). Dans tous les pays également, le télétravail se définit comme l’accomplissement d’une tâche en dehors des locaux de l’entreprise. Cette condition se cumule à celle relative à l’utilisation de TIC. Un chauffeur-livreur par exemple ne sera pas considéré comme un télétravailleur, mais il pourrait le devenir s’il devait utiliser un ordinateur, voire un simple PDA (Personal Digital Assistant) ou un système de géolocalisation embarqué permettant de maintenir le contact avec l’entreprise. On voit que, sans définition stricte, le nombre de télétravailleurs pourrait augmenter considérablement. Ainsi, en Suède, un débat porte actuellement sur le concept même de télétravail que certains commentateurs jugent dépassé, lui préférant celui de « travail flexible/mobile ». Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 53 - www.strategie.gouv.fr
  • 54. Le rôle central des TIC dans le télétravail conduit tous les pays à établir des 1 distinctions entre plusieurs situations : – le télétravailleur complet et celui qui travaille alternativement dans l’entreprise ; – le télétravailleur nomade qui travaille chez un client ou dans tout autre lieu ; – le télétravailleur à domicile ; – le télétravailleur hébergé en centre de télétravail (cas de figure plus rare, cette forme connaissant un taux d’échec important dans certains pays). Certains pays n’assimilent pas à un télétravailleur celui ou celle qui ne répond qu’occasionnellement à l’une de ces définitions. En Autriche notamment, le travail à domicile sur ordinateur n’est considéré comme du télétravail que si sa durée est d’au moins une heure par jour. Certains pays considèrent exclusivement le télétravail comme du travail à domicile (Autriche) alors que d’autres (France) ont deux législations qui se superposent : statut du travail à domicile auquel s’applique le cas échéant le statut du télétravail. Le télétravail constitue une application particulière du régime juridique général, avec notamment la nécessité d’établir un contrat ad hoc ou de renvoyer à des conventions collectives Dans tous les pays, le télétravail constitue une application particulière du régime juridique général. Des avenants au contrat de travail doivent parfois être conclus. Il existe peu d’originalité d’un pays à l’autre de l’Union européenne dans la mesure où tous sont contraints par les dispositions de l’accord-cadre européen du 16 juillet 2002. Toutefois, certains pays comme le Danemark ont une politique conventionnelle particulièrement développée. Les conventions collectives mettent l’accent sur des mesures spécifiques destinées à éviter les abus. Sont pris en considération, au regard du droit commun, les tâches, le type de travail et son champ d’application, le cadre de la durée du télétravail (les heures de travail et les règles de disponibilité), le système de comptabilisation du temps, le cadre de travail (bureau et chaise), les procédures de santé et de sécurité, l’évaluation du lieu de travail par l’employeur, la circulation de l’information depuis et vers la société, le contact entre les télétravailleurs et le représentant des salariés, l’indemnisation des frais de fonctionnement (y compris le loyer, le chauffage, l’électricité et le téléphone), la non-discrimination et le caractère volontaire du télétravail, la protection des données et le respect de la vie privé ou encore l’accès à la formation. Le télétravail crée des problèmes juridiques d’ordre pratique, que ce soit en matière de conditions de travail, de droits communs ou de législation de sécurité sociale. Pour autant, aucun pays n’a légiféré sur le sujet Nombre de pays de l’OCDE ont dû faire face à des problèmes juridiques d’ordre pratique. Les principaux sont relatifs au contrôle du temps de travail, aux heures supplémentaires et à la distinction entre vie personnelle et vie professionnelle. 1 On remarquera la proximité de cette typologie avec celle établie par le Forum des droits sur l’Internet en 2004. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 54 - www.strategie.gouv.fr
  • 55. D’autres portent sur la législation de sécurité sociale. Au Canada notamment, certains télétravailleurs continuent à exercer leur activité alors qu’ils sont malades, sans savoir qu’ils ont droit à des indemnités journalières. Dans tous les pays de l’OCDE, les télétravailleurs ont la même couverture de sécurité sociale que les travailleurs « de droit commun » (donc non-télétravailleurs), catégorie dont ils relèvent. Des difficultés pratiques affectent l’application de la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (régime de la preuve que l’accident a bien eu lieu au temps et au lieu du travail). La question de l’exercice des droits collectifs se pose également dans plusieurs pays. Mais aucun n’a adopté de législation visant à tenir compte de cette forme de travail pour les représentants du personnel (sauf droits conventionnels dans un accord d’entreprise ou de branche). Plusieurs pays (dont l’Italie) obligent les négociateurs d’une convention collective à envisager certains des points suivants : responsabilités en matière de santé et de sécurité, échelle des salaires, réglementation des horaires et des heures supplé- mentaires, dépenses pouvant être couvertes par les employeurs et les télétravailleurs, dispositions sur les équipements et leur maintenance, garanties d’accès à la formation et de déroulement de carrière, droit syndical. 3. Les télétravailleurs se déclarent majoritairement satisfaits et disposent généralement de meilleures conditions de travail En ce qui concerne le télétravail à proprement parler, malgré des horaires souvent plus longs et des risques de stress plus importants, les télétravailleurs font état en 1 moyenne de meilleures conditions de travail que les autres salariés , ce qui s’explique 2 en partie par l’utilisation des TIC . Les télétravailleurs bénéficient plus souvent d’autonomie dans leur activité professionnelle que les autres salariés. Ils sont en outre moins sujets au contrôle par leur supérieur direct. Les télétravailleurs ont davantage de maîtrise sur leur activité Les télétravailleurs ont davantage de maîtrise sur leur activité et sur le contenu de leurs tâches, notamment parce que leur travail est moins prescrit par l’action d’autres collègues. Les tâches elles-mêmes, comme pour nombre d’utilisateurs de TIC en France, sont souvent plus riches, ces outils favorisant une certaine polyvalence du 3 salarié . Ainsi, un télétravailleur sur deux maîtrise ses horaires de travail, deux tiers des télétravailleurs témoignant en outre d’une forte flexibilité de leur temps de travail. Cette situation prévaut particulièrement aux Pays-Bas, en Finlande et en Allemagne. Sur ce point également, il est difficile d’identifier le facteur déterminant, puisque le 1 Cette section s’appuie principalement sur les données tirées de l’enquête européenne sur les conditions de travail de 2005 : A. Broughton, 2006, op. cit. 2 Les études confirment que les technologies numériques participent généralement à l’amélioration des conditions de travail. Et les témoignages des utilisateurs d’ordinateurs vont dans ce sens. Voir par exemple Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, Use of Technology and Working Conditions in the European Union, 2006. 3 N. Colombier et al., 2007, op. cit. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 55 - www.strategie.gouv.fr
  • 56. travail à distance, avec TIC ou non, coïncide fréquemment avec l’autodétermination 1 des horaires . Il faut reconnaître enfin que les dépassements d’horaires ne sont pas une nouveauté, notamment en matière de travaux d’écriture et de lecture, souvent 2 pratiqués en débordement à la maison ou à l’occasion des déplacements . Le report à domicile est perçu par les salariés qui le pratiquent comme moins contraignant. Le télétravail formel constitue à cet égard un moyen de rendre visibles ces activités. Cela explique que la grande majorité des télétravailleurs indiquent que leurs horaires de travail s’accordent bien avec les besoins de leur vie familiale ou sociale, plus que les salariés travaillant exclusivement dans l’entreprise. Les salariés nomades se déclarent cependant moins satisfaits sur ce point, même si leur taux de satisfaction en cette matière dépasse 70 %. Tableau n° 12 : Conditions de travail des télétravailleurs français Fixe à Alternant Tous Formes de télétravail Nomade domicile à domicile salariés Maîtrise des horaires 53 % 61 % 33 % 10 % Formation au cours des douze derniers mois 43 % 40 % 47 % 28 % Rencontres avec des collègues hors travail 51 % 63 % 54 % 52 % Espoir de promotion 45 % 56 % 56 % 39 % Contrat précaire 10 % 10 % 7% 13 % Source : INSEE, enquêtes EPCV 1999-2003, traitement DARES Dès lors, la satisfaction au travail des télétravailleurs est plus grande que celle des autres salariés. En effet, ils peuvent organiser de manière plus souple leur emploi du temps et mieux concilier ainsi vie professionnelle et vie familiale. On retrouve sur ce point l’effet positif des TIC, le téléphone portable ou la messagerie électronique étant 3 décrits par les salariés dans de nombreuses études françaises comme un facteur d’amélioration de cette conciliation des temps sociaux. Cela vaut aussi pour le télétravail quand il permet d’effectuer les trajets domicile-travail en dehors des heures 4 de pointe ou quand il permet de mieux gérer les temps consacrés aux enfants et à la 5 famille (aller les chercher à l’école, les aider dans les devoirs, faire face à un imprévu). Les télétravailleurs sont plus autonomes dans leur travail, mais pas isolés Les caractéristiques propres aux télétravailleurs, qui sont souvent des salariés plus 6 qualifiés, plus autonomes et plus expérimentés, expliquent en partie ces résultats . On 1 Gilles Crague, « Le travail industriel hors les murs. Enquête sur les nouvelles figures de l’entreprise », Réseaux, n° 134, 2005. 2 Frédéric Moatty et Françoise Rouard, « Lecture et écriture au travail : les enjeux en termes de formation et de conditions de travail », Formation emploi, n° 106, 2009. 3 Par exemple F. Godard, 2007, op. cit. ; A. Boboc et L. Dhaleine, 2007, op. cit. 4 L. Thomsin, 2005, op. cit. 5 Metzger et Cléach, 2004, op. cit. ; Jean-Luc Metzger, « Les cadres télétravaillent… pour mieux travailler », Informations sociales, n° 153, 2009. 6 Il peut y avoir un biais lié aux caractéristiques individuelles, les salariés acceptant le télétravail étant ceux qui ont le plus à y gagner. Il semble que l’âge et le niveau d’éducation du salarié soient des variables très prédictives d’un tel choix, cf. Thomas de Graaf et Piet Rietveld, « Substitution between working at home and out-of-home: the role of ICT and commuting costs », Transportation Research, vol. 41(2), février 2007. Les méthodologies mises en œuvre dans les études citées ici ne sont pas de nature à neutraliser ces biais. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 56 - www.strategie.gouv.fr
  • 57. 1 retrouve une observation faite à propos de l’usage des TIC et de l’informatisation des postes de travail, les salariés équipés étant les mieux formés et ceux disposant d’un capital social plus important. Néanmoins, à rebours de l’intuition ou de craintes, ces salariés sont bien insérés dans l’entreprise et n’apparaissent pas victimes d’isolement (tableau n° 12). Non seulement ils fréquentent souvent leurs collègues de travail en dehors de l’entreprise, mais ils bénéficient plus que les autres salariés, toutes choses égales par ailleurs, de formations de la part de leur employeur. Ils déclarent de même davantage de 2 perspectives de promotion . Sur ce point, le cas français semble relativement atypique, car les risques d’isolement sont souvent mentionnés par les différentes études en Europe. En particulier, les problèmes d’isolement du télétravailleur persistent pour les moins qualifiés, notamment parce qu’ils participent moins souvent à des réunions d’équipes. De nombreux télétravailleurs signalent ce sentiment d’isolement, notamment en Finlande, en Autriche ou en Belgique. Pour y remédier, des accords collectifs en Allemagne et au Luxembourg, ou la loi au Portugal et en Norvège spécifient que des réunions doivent être régulièrement organisées dans les locaux de l’entreprise avec les télétravailleurs. Les désagréments liés au télétravail restent mineurs Selon une étude sur données européennes, le télétravail à domicile peut avoir un impact négatif sur la qualité de vie de l’entourage, ce qui peut en retour réduire la 3 satisfaction du télétravailleur . Pour d’autres chercheurs, cet aspect n’a pas d’effet 4 négatif, y compris quand le télétravail dépasse deux jours par semaine . Par ailleurs, dans de nombreux pays, les télétravailleurs semblent bénéficier de moins de formation et d’actions de prévention dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail. Cela entraîne de fréquents troubles musculo-squelettiques. 4. Les abus liés au télétravail restent marginaux mais quelques incertitudes de nature juridique demeurent 4.1. Les cas de jurisprudence, peu nombreux, ne sont probablement pas représentatifs de l’ensemble des abus Il est difficile de savoir dans quelle mesure les quelques actions en justice connues reflètent la réalité : – les salariés victimes d’abus engagent-ils des procédures lourdes, sur des sujets aussi techniques et complexes, pour probablement peu de résultats ? 1 Nathalie Greenan et Emmanuelle Walkowiak, « Informatique, organisation du travail et interactions sociales », Économie et statistique, n° 387, 2005. 2 T. Coutrot, 2004, op. cit. 3 Joar Vitterso et al., « Impacts of home-based telework on quality of life for employees and their partners. Quantitative and qualitative results from a European survey », Journal of Happiness Studies, vol. 4(2), 2003. 4 Ravi S. Gajendran et David A. Harrison, 2007, « The good, the bad, and the unknown about telecommuting: Meta-analysis of psychological mediators and individual consequences », Journal of Applied Psychology, 92: 1524–1541. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 57 - www.strategie.gouv.fr
  • 58. le faible nombre de litiges confirme-t-il que les appréhensions liées au télétravail sont exagérées ? Il apparaît, en particulier à la lecture de la jurisprudence, que la situation de télétravail peut être utilisée comme prétexte : – par l’employeur pour licencier un collaborateur, alors que les véritables raisons peuvent être d’ordre économique (difficultés de l’entreprise) ou personnel (refus du salarié de changer de poste ou de lieu de travail, rivalités internes, etc.) ; – par le salarié pour ne pas se conformer à son contrat de travail, garder un avantage personnel ou ne pas se remettre en cause (non-respect d’une clause de mobilité, retour d’un congé maternité ou maladie, refus du changement de la nature du poste, régularisation d’une situation ambiguë, etc.). Les victimes d’abus disposent de plusieurs voies de recours, qu’elles utilisent rarement En cas d’abus, les salariés de droit privé disposent de divers moyens de recours, dans l’ordre suivant : – les négociations directes avec l’employeur, si un abus est constaté ; – l’intervention de l’Inspection du travail pour examiner une situation délicate (contrat de travail…) mais avec des moyens limités (autorisation expresse pour contrôler un domicile…) ; – l’intercession des syndicats ; – les conseils de prud’hommes ; – les Cours d’appels ; – en dernier recours la Cour de cassation. Encore faut-il que les salariés victimes d’abus soient informés de ces recours et se décident à franchir le pas. Les enjeux de l’effectivité du cadre juridique 1 La majorité des télétravailleurs sont des télétravailleurs informels . Ce constat simple pose la question de l’effectivité du cadre juridique. Or, quand bien même le cadre juridique serait parfaitement accessible aux acteurs concernés, il faut également qu’ils soient en mesure de le comprendre et de le maîtriser, pour faire valoir leurs 2 droits en cas de litige . Dans un second temps, le soutien des collègues, l’intercession des syndicats et enfin l’arbitrage des pouvoirs publics (Inspection du travail, système judiciaire…) doivent, le cas échéant, montrer leur efficacité… Il se pourrait donc 1 Les télétravailleurs français seraient dans une situation de télétravail informelle dans 90 % des cas, selon des chiffres, difficilement vérifiables, avancés par les experts. 2 Sur ce point, les enjeux de l’effectivité du cadre juridique résident également dans l’égalité entre les travailleurs et dans la protection des plus fragiles. En effet, la faible effectivité de protections juridiques pourtant nombreuses s’avère plus préoccupante pour les travailleurs peu qualifiés, comme cela a été noté dans les centres d’appels. Voir Ève Caroli et Jérôme Gautié (2009), Bas salaires et qualité de l’emploi : l’exception française ?, CEPREMAP, Éditions Rue d’Ulm. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 58 - www.strategie.gouv.fr
  • 59. qu’une diffusion, large et efficace, de bonnes pratiques, dûment identifiées comme telles, soit un enjeu plus important que le cadre juridique. 4.2. Le cadre juridique pourrait être clarifié sur la présomption d’accident du travail et la couverture assurantielle Comme nous l’avons vu au chapitre 2 (point 5.1), il existe de nombreux freins de nature juridique, culturelle et sociale, informatique et organisationnels. Pour ce qui est des freins juridiques, la présomption d’accident de travail à domicile et la couverture assurantielle sont deux points qui méritent des précisions. Actuellement, la présomption d’accident du travail ne s’applique pas pour le domicile du télétravailleur. Cela peut apparaître comme contraire au principe « le télétravailleur est un salarié comme un autre », qui a droit en particulier aux mêmes conditions de sécurité sur son lieu de travail. Comme nous l’avons vu, les partenaires sociaux ont des opinions divergentes sur le sujet : les syndicats d’employés estiment que les salariés ont besoin d’être rassurés sur ce point tandis que les employeurs craignent une augmentation des accidents du travail. Or, d’après le précédent belge (voir encadré ci-dessous), il semblerait que le télétravail ne conduise pas à une augmentation du nombre d’accidents du travail. La présomption d’accident du travail : l’exemple du cadre juridique belge Depuis mai 2009, la loi belge sur les accidents du travail du 10 avril 1971 établit que tout accident d’un télétravailleur constitue une présomption d’accident du travail : – s’il a lieu là où le télétravailleur a choisi contractuellement de travailler ; – s’il a lieu durant la période contractuelle de télétravail ; – s’il existe une trace écrite prouvant les lieux et période définis contractuellement. Si la période autorisant le recours au télétravail n’a pas été stipulée par un accord écrit, la période présumée correspond alors à la période durant laquelle l’employé aurait travaillé dans les locaux de l’employeur s’il n’avait pas eu recours au télétravail. Ces clauses s’appliquent à moins que l’employeur puisse prouver que l’accident n’est pas lié au travail de l’employé. Selon un expert belge du télétravail, « la récente introduction de la présomption d’accident du travail a été une bonne initiative. Avant cela, le flou juridique constituait une vraie barrière au développement du télétravail ». Source : entretiens, synthèse CAS Quant au sujet de la responsabilité assurantielle du télétravail, les pratiques varient selon les compagnies d’assurance et restent peu précises – quand elles ne sont pas inexistantes – si bien que le télétravailleur sait rarement dans quelles situations et pour quels sinistres il est assuré (tableau n° 13). Des entreprises peuvent tirer parti de ces incertitudes pour ne pas prendre en charge certains frais d’assurance. Sur ce point, la Belgique est un exemple de référence puisque plusieurs assureurs belges proposent des assurances couvrant le salarié à tout moment (« 24h/24h, 7jours/7 ») et quelle que soit son activité. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 59 - www.strategie.gouv.fr
  • 60. Tableau n° 13 : Prise en charge assurantielle du domicile en cas de télétravail, pour les secteurs français de l’informatique et du conseil Assurance Prise en charge de l’assurance Assurance personnelle de l’employeur Prise en charge 54 % 44 % Non prise en charge 14 % 30 % Ne sait pas 31 % 26 % Source : IDC Tous les éléments précédents sont des freins au développement du télétravail. Le chapitre 5 présentera quant à lui les exemples de bonnes pratiques relevées en France et à l’étranger, issues d’entreprises comme d’administrations. La palette est large, puisque l’on compte aussi bien des initiatives des pouvoirs publics, des guides pratiques que des actions de communication et de formation. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 60 - www.strategie.gouv.fr
  • 61. Un fort potentiel de développement Ce chapitre a pour objectif d’estimer la part de la population active française potentiellement concernée par le télétravail, aujourd’hui et à l’horizon 2015. Pour mener à bien cette analyse, on étudie la nature des tâches caractéristiques de chaque profession et on détermine leur « télétravaillabilité ». Dans un second temps, on évalue la possibilité de télétravailler pour certaines catégories particulières d’actifs (seniors, femmes enceintes, etc.). 1. Le télétravail pourrait concerner jusqu’à 50 % de la population active en 2015, contre 30 % aujourd’hui 1.1. En 2008, le télétravail concernait potentiellement jusqu’à 30 % de la main-d’œuvre française Les tâches caractéristiques d’une profession déterminent sa « télétravaillabilité » 1 D’un point de vue pratique, le travail à distance est un prérequis au télétravail. Des 2 études indiquent que le travail à distance s’adresse à toutes les catégories profes- sionnelles, depuis les ouvriers jusqu’aux cadres, mais selon des modalités différentes. Ainsi, les cadres et les professions intermédiaires travaillent à distance entre 25 % et 75 % de leur temps de travail, soit entre 1 et 4 jours par semaine. Ces professions se prêtent bien au télétravail car elles correspondent généralement à des activités de service, plus intellectuelles que manuelles, et nécessitent moins de présence physique. 1 Le travail à distance est défini comme le travail ayant lieu hors des locaux de l’employeur. De nombreuses professions le pratiquent depuis longtemps (magistrats, ouvriers travaillant en extérieur, etc.). Le télétravail est une forme particulière de travail à distance qui mobilise les TIC. 2 Anca Boboc, Laurence Dhaleine et Alexandre Mallard, « Travailler, se déplacer et communiquer : premiers résultats d’enquête », Réseaux, n° 140, 2007. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 61 - www.strategie.gouv.fr
  • 62. C’est le cas notamment des fonctions support (services juridiques, ressources humaines, gestion des systèmes d’information, administration générale), des fonctions 1 liées à la conception (études techniques économiques) ou de commercialisation . Néanmoins, ces deux catégories professionnelles ne représentent plus un « gisement » de télétravailleurs puisque, dans les faits, une majorité de cadres et de professions intermédiaires peut déjà télétravailler. Quant aux ouvriers et aux employés, ils représentent la grande majorité (85 %) des travailleurs exerçant leurs fonctions 100 % du temps à distance. C’est le cas des ouvriers travaillant en extérieur (secteur du bâtiment, professions agricoles, etc.) ou des salariés en situation de mobilité permanente comme les techniciens de maintenance ou les livreurs. Ces deux dernières professions sont particulièrement concernées et représentent des « gisements » de télétravailleurs importants. La fonction publique est un « gisement » potentiel de télétravailleurs plus important que le secteur privé De nombreux fonctionnaires pratiquent le travail « hors bureau » depuis longtemps et ont naturellement adopté les technologies de l’information et de la communication pour mener à bien leurs tâches. C’est le cas des magistrats, des personnels d’encadrement, de certains chargés d’études, des diplomates, des rédacteurs-traducteurs, ou encore des fonctions d’inspection. Par rapport au secteur privé, les trois fonctions publiques comptent en proportion davantage de cadres (29,6 % contre 14,6 %), davantage d’employés (40,5 % contre 30,4 %) et moins d’ouvriers (6,6 % contre 31,6 %). A priori, le « taux de télétravailleurs » pourrait donc être plus important dans la fonction publique que dans le secteur privé. Or ce n’est probablement pas le cas, même si l’absence d’instrument de mesure ne permet pas de l’affirmer catégoriquement. Environ 30 % de la population active occupée était potentiellement concernée par le télétravail en 2008 Pour mieux connaître la part potentielle de télétravailleurs dans la population active française, nous avons évalué la « probabilité » de pratiquer le télétravail pour 2 chacune des 82 professions décrites dans la nomenclature FAP de 1993 (tableau n° 14). 1 G. Crague, 2005, op. cit. 2 La nomenclature des familles professionnelles (FAP) est une nomenclature agrégée des métiers mise au point par la DARES, l’organisme chargé des statistiques au ministère du Travail. Une version 2003 a été actualisée récemment ; pour notre estimation, nous conservons cependant l’ancienne version de 1993 afin de pouvoir exploiter les données des travaux du groupe Prospective des métiers et des qualifications (Centre d’analyse stratégique et DARES, Les métiers en 2015, rapport du groupe « Prospective des métiers et des qualifications », Paris, La Documentation française, janvier 2007). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 62 - www.strategie.gouv.fr
  • 63. Méthodologie de l’estimation du nombre de télétravailleurs potentiels Chaque profession se voit affectée d’un coefficient de télétravail, de manière qualitative1 : – « Probabilité forte de télétravail » correspond à la situation où tous les profession- nels exerçant ce métier pourraient effectuer une partie au moins de leur activité en télétravail. Les cadres administratifs, les cadres commerciaux et technico-commerciaux et les informaticiens se trouvent dans cette catégorie en 2008. Ces professions sont affectées d’un coefficient 1 ; – « Probabilité faible ou moyenne de télétravail » correspond aux professions où une partie seulement de la main-d’œuvre pourrait pratiquer le télétravail, y compris à temps partiel. Les secrétaires, les employés administratifs de la fonction publique et les professions intermédiaires du commerce sont classés dans cette catégorie en 2008. Ces professions sont affectées d’un coefficient 0,5 ; – « Probabilité nulle de télétravail » correspond aux métiers pour lesquels la main- d’œuvre ne peut pas travailler à distance car n’utilisant pas d’informatique ou de moyens modernes de communication dans ses activités professionnelles habituelles. Les conducteurs de véhicules, les ouvriers du BTP, les coiffeurs, les assistantes maternelles et aides à domicile sont classés dans cette catégorie. Ces professions sont affectées d’un coefficient 0. Le volume d’emplois de chaque métier est affecté du coefficient identifié, de manière à estimer globalement le nombre d’emplois comptabilisés dans chaque catégorie et donc à mesurer un potentiel total de télétravailleurs. Une telle méthodologie qualitative introduit une marge d’erreur dans l’estimation du potentiel de télétravailleurs en France. En revanche, elle exclut à coup sûr les professions qui n’ont aucune chance d’être concernées par le télétravail. Tableau n° 14 : Probabilité de télétravail pour 82 professions (situation en 2008)* Probabilité faible Probabilité nulle Probabilité forte ou moyenne ou quasi nulle Ingénieurs et cadres techniques Techniciens et cadres de Agriculteurs, éleveurs, de l’industrie l’agriculture sylviculteurs, bûcherons Cadres administratifs et Techniciens et AM du BTP Maraîchers, jardiniers, viticulteurs dirigeants Cadres du BTP Marins, pêcheurs Informaticiens Techniciens et AM électricité ONQ gros et second œuvre Personnels d’études électronique bâtiment et de recherche Techniciens et AM industries ONQ gros œuvre, travaux publics Professionnels du droit (hors mécaniques et extraction juristes en entreprise) Techniciens et AM industries de OQ travaux publics béton, Cadres de la banque et des process extraction assurances Techniciens et AM matériaux OQ gros œuvre ONQ bâtiment, Cadres commerciaux et souples, bois, industries second œuvre technico-commerciaux graphiques OQ bâtiment, second œuvre Professionnels de la OQ maintenance Conducteurs d’engins du BTP communication et de Techniciens et AM maintenance ONQ électricité électronique l’information et organisation OQ électricité électronique Agents administratifs et ONQ travaillant par enlèvement 1 La construction de cette typologie et l’estimation du potentiel de télétravail qui en a été déduite ont bénéficié de l’expertise de spécialistes des métiers de l’AFPA, de Pôle Emploi, du Centre d’analyse stratégique et de chercheurs. Le Centre d’analyse stratégique reste seul responsable des erreurs qui pourraient naître de l’estimation. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 63 - www.strategie.gouv.fr
  • 64. Probabilité faible Probabilité nulle Probabilité forte ou moyenne ou quasi nulle commerciaux des transports et ou formage de métal du tourisme OQ travaillant par enlèvement de Cadres des transports, de la métal logistique et navigants de OQ travaillant par formage de l’aviation métal Secrétaires ONQ mécanique Employés de la comptabilité OQ mécanique Employés administratifs ONQ industries de process d’entreprise OQ industries de process Secrétaires de direction ONQ textile, cuir et bois Techniciens des services ONQ textile et cuir administratifs, comptables et OQ textile et cuir financiers ONQ bois et ameublement Employés administratifs de la OQ bois et ameublement fonction publique (catégorie C) Ouvriers des industries Employés administratifs de la graphiques fonction publique (catégorie B) Ouvriers de la réparation Cadres de la fonction publique automobile Employés et techniciens de la ONQ manutention banque OQ manutention Employés et techniciens des Conducteurs de véhicules assurances Agents d’exploitation des Attachés commerciaux et transports représentants Armée, police, pompiers Maîtrise des magasins et Caissiers, employés de libre- intermédiaires du commerce service Patrons et cadres d’hôtels, Vendeurs cafés, restaurants Bouchers, charcutiers, Enseignants boulangers Formateurs Cuisiniers Employés et AM de l’hôtellerie et de la restauration Coiffeurs, esthéticiens Employés de maison Assistants maternels, aides à domicile Agents de gardiennage et de sécurité Agents d’entretien Employés des services divers Professionnels des arts et des spectacles Aides-soignants Infirmiers, Sages-femmes Médecins et assimilés Professions paramédicales Professionnels de l’action sociale, culturelle et sportive AM : agent de maîtrise ; OQ : ouvrier qualifié ; ONQ : ouvrier non qualifié (*) En rouge figurent les professions dont le volume d’emploi devrait le plus augmenter entre 2010 et 2020. Source : entretiens, analyse CAS Au regard du tableau n° 14, il apparaît que : – 72 % de la main-d’œuvre n’a pratiquement aucune chance de télé- travailler car les tâches des professions correspondantes ne peuvent pas être accomplies en télétravail ; Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 64 - www.strategie.gouv.fr
  • 65. 17 % des emplois ont une probabilité faible ou moyenne de pratiquer le télétravail, même à temps très partiel ; – seulement 11 % de la main-d’œuvre a une probabilité forte de télétravail, au moins partiellement. Figure n° 7 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble de la population active occupée en 2008 Source : INSEE, enquête Emploi 2008, traitement CAS L’analyse précédente indique qu’il y avait 28 % de télétravailleurs potentiels dans la population active française en 2008 (11 % en probabilité forte et 17 % en probabilité faible ou moyenne). Cette estimation concorde avec les données de l’enquête SIBIS de 2002 (cf. figure n° 2), puisque 25 % des salariés français interrogés durant cette enquête déclaraient être en mesure de télétravailler. 1.2. En 2015, d’après les projections, le télétravail concernerait potentiellement jusqu’à 50 % de la population active Dans les dix prochaines années, la part de télétravailleurs potentiels dans la population active est appelée à augmenter, avec la diffusion, dans la plupart des métiers, des technologies numériques et des changements organisationnels associés. À titre d’exemple, l’administration électronique pourrait favoriser le télétravail des agents publics (relations avec les usagers, traitement dématérialisé des dossiers…). À partir des données du rapport Métiers en 2015 et des réponses des experts sollicités, nous avons estimé le potentiel de déploiement du télétravail dans les 1 82 familles professionnelles étudiées à l’horizon des dix prochaines années . Dans 1 Pour cela, nous supposons que les obstacles juridiques, économiques ou sociaux au télétravail sont pour la plupart levés, pour ne retenir que l’évolution des contenus des métiers, notamment leur « numérisation ». Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 65 - www.strategie.gouv.fr
  • 66. cette perspective, de nombreuses professions pourraient passer dans la catégorie « forte probabilité » de télétravail (tableau n° 15). Tableau n° 15 : Probabilité future de télétravail pour 82 professions (situation en 2015/2020)* Probabilité faible Probabilité nulle Probabilité forte ou moyenne ou quasi nulle Ingénieurs et cadres techniques Techniciens et AM électricité, Agriculteurs, éleveurs, de l’industrie électronique sylviculteurs, bûcherons Cadres administratifs et Techniciens et AM industries Maraîchers, jardiniers, viticulteurs dirigeants mécaniques Marins, pêcheurs Informaticiens Techniciens et AM industries ONQ gros et second œuvre Personnels d’études et de de process bâtiment recherche Techniciens et AM matériaux ONQ gros œuvre, travaux publics Professionnels du droit (hors souples, bois, industries et extraction juristes en entreprise) graphiques OQ travaux publics béton, Cadres de la banque et des Attachés commerciaux et extraction assurances représentants OQ gros œuvre Cadres commerciaux et Maîtrise des magasins et ONQ bâtiment, second œuvre technico-commerciaux intermédiaires du commerce OQ bâtiment, second œuvre Professionnels de la Employés et AM de l’hôtellerie Conducteurs d’engins du BTP communication et de et de la restauration ONQ électricité, électronique l’information Agents de gardiennage et de OQ électricité, électronique Techniciens et cadres de sécurité ONQ travaillant par enlèvement ou l’agriculture Médecins et assimilés formage de métal Techniciens et AM du BTP Professions paramédicales OQ travaillant par enlèvement de Cadres du BTP Professionnels de l’action métal OQ maintenance sociale, culturelle et sportive OQ travaillant par formage de métal Techniciens et AM maintenance Vendeurs ONQ mécanique et organisation Ouvriers des industries OQ mécanique Professionnels des arts et des graphiques ONQ industries de process spectacles OQ industries de process Patrons et cadres d’hôtels, cafés, ONQ textile, cuir et bois restaurants ONQ textile et cuir Enseignants OQ textile et cuir Formateurs ONQ bois et ameublement Employés administratifs de la OQ bois et ameublement fonction publique (catégorie C) Ouvriers de la réparation Employés administratifs de la automobile fonction publique (catégorie B) ONQ manutention Cadres de la fonction publique OQ manutention Employés et techniciens de la Conducteurs de véhicules banque Agents d’exploitation des Employés et techniciens des transports assurances Armée, police, pompiers Secrétaires Caissiers, employés de libre- Employés de la comptabilité service Employés administratifs Bouchers, charcutiers, boulangers d’entreprise Cuisiniers Secrétaires de direction Coiffeurs, esthéticiens Techniciens des services adminis- Employés de maison tratifs, comptables et financiers Assistants maternels, aides à Agents administratifs et domicile commerciaux des transports et Agents d’entretien du tourisme Employés des services divers Cadres des transports, de la logis- Aides-soignants tique et navigants de l’aviation Infirmiers, Sages-femmes AM : agent de maîtrise ; OQ : ouvrier qualifié ; ONQ : ouvrier non qualifié. (*) En rouge figurent les professions dont le volume d’emploi devrait le plus augmenter entre 2010 et 2020. Source : entretiens, analyse CAS Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 66 - www.strategie.gouv.fr
  • 67. Sous ces hypothèses, il apparaît que le potentiel de télétravailleurs s’accroît nettement, pour s’établir à 47 % en 2015 (38 % en probabilité forte et 9 % en probabilité moyenne ou faible, cf. figure n° 8). Néanmoins, ce résultat s’explique davantage par la diffusion des TIC dans les entreprises et les administrations que par une évolution structurelle du marché de l’emploi vers une plus grande part d’emplois « télétravaillables ». En effet, entre 2009 et 2020, les emplois en forte progression seront peu susceptibles d’être concernés 1 par le télétravail (secteurs social et médico-social, services à la personne, etc.) . Figure n° 8 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble de la population active occupée en 2015/2020 Part des la population active occupée en fonction de la probabilité de 100% 11 80% 38 17 60% 9 télétravail Probabilité forte Probabilité faible/moyenne Probabilité nulle 40% 72 53 20% 0% Avec évolution de la probabilité de Avec la même probabilité de télétravail télétravail qu'en 2008 Source : CAS-DARES, Les Métiers en 2015, traitement CAS L’essor du télétravail passe donc par des actions ciblées de la part des pouvoirs publics, telles que la diffusion des technologies numériques et les campagnes de communication auprès de métiers et/ou branches bien identifiés. 1 Certes, le nombre d’emplois de cadres créés devrait être important entre 2009 et 2020. Toutefois, les métiers de cadres ont déjà atteint un « palier » dans la diffusion du télétravail. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 67 - www.strategie.gouv.fr
  • 68. 2. Le télétravail ne peut augmenter que marginalement le taux d’emploi des seniors 2.1. Les intentions de départ à la retraite des Français Toutes choses égales par ailleurs, les retraités français ne souhaitent pas poursuivre leur activité professionnelle Seule une minorité de Français souhaitent poursuivre une activité professionnelle après la liquidation de leur retraite, à savoir 10 % des Français de plus de 60 ans et 1 seulement 0,4 % des salariés de plus de 65 ans . Ainsi, la France appartient au groupe des pays du sud de l’Europe dont les salariés âgés de 50 à 59 ans souhaitent partir en 2 retraite le plus tôt possible . Pour les retraités envisageant de poursuivre une activité professionnelle, les déterminants sont certes économiques mais aussi non 3 monétaires, liés à une « préférence au loisir » . Figure n° 9 : Intention de départ en retraite au regard de la santé et des conditions de travail des retraités Lecture : se déclarer globalement satisfait de son travail fait baisser de 14,2 points la probabilité de vouloir partir en retraite au plus tôt. Tous les effets reportés sur ce graphique sont significatifs au seuil de 5 %, sauf pour la variable « faibles chances de pouvoir garder son emploi jusqu’à la retraite ». Les effets sont estimés sur l’ensemble des dix pays couverts, avec contrôle des effets de l’âge, du genre, du pays et des caractéristiques de l’emploi. Source : enquête Share Il est difficile d’établir une hiérarchie des facteurs expliquant le fait de cumuler ou non emploi et retraite. Cependant, on peut dire que l’intention de départ à la retraite est d’autant plus retardée que le salarié se trouve en bonne santé, qu’il est satisfait et reconnu dans un travail peu pénible et peu stressant lui permettant en outre d’acquérir de nouvelles compétences et lui offrant de réelles perspectives d’avancement (figure n° 9). 1 DREES, « Perspectives et comportements en matière de retraite », Dossiers solidarité et santé, n° 3, juillet-septembre 2006. 2 Didier Blanchet et Thierry Debrand, « Aspirations à la retraite, santé et conditions de travail : une comparaison européenne », Économie et Statistique, n° 403-404, 2007. L’enquête européenne SHARE de 2004 indique que 57 % des Français de 50 à 59 ans souhaitent partir rapidement en retraite, contre 31 % des Néerlandais. 3 Didier Blanchet et Thierry Debrand, « Aspirations à la retraite, santé et conditions de travail : une comparaison européenne », Document de travail, INSEE, mars 2007. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 68 - www.strategie.gouv.fr
  • 69. 2.2. Les enjeux du taux d’emploi des seniors et le rôle du cumul emploi-retraite Les enjeux de l’emploi des seniors En 2008, le taux d’emploi des seniors (tranche d’âge 55-64 ans) était de 38,2 % pour la France contre 44,7 % pour l’Europe et 54 % pour la moyenne de l’OCDE. Depuis 1 environ une décennie, les pouvoirs publics français cherchent à augmenter ce taux , à rebours du « consensus social » des années 1970 sur le partage du travail entre les générations. Figure n° 10 : Taux d’emploi des 55-64 ans dans certains pays de l’OCDE (données 2008) Source : Conseil d’orientation des retraites, traitement CAS Un meilleur taux d’emploi des seniors répond à l’objectif d’amélioration de la balance des dépenses sociales, notamment celles de la branche vieillesse, et contribue par corollaire à la pérennité du système de retraite par répartition. Se pose alors la question de déterminer la part de retraités pouvant effectivement poursuivre une activité professionnelle. Le cumul emploi-retraite est une des solutions contribuant à augmenter le taux d’emploi des seniors Le cumul emploi-retraite est apparu comme un outil pertinent pour augmenter le taux d’emploi des seniors. La loi du 21 août 2003 a apporté de premiers changements, en 1 Conseil d’orientation des retraites, « Augmenter le taux d’emploi des seniors – les enseignements des expériences étrangères », colloque du 29 novembre 2007. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 69 - www.strategie.gouv.fr
  • 70. réduisant les contraintes à l’activité des retraités (possibilité de cumuler retraite et revenus salariés, reprise de l’activité après un délai de six mois, etc.). Depuis le er 1 2 1 janvier 2009 , sous certaines conditions , les modalités du cumul emploi-retraite ont été à nouveau assouplies (déplafonnement des revenus du cumul, fin du délai de carence de six mois) pour permettre aux retraités d’exercer une activité profes- sionnelle. La part des cumulants dans la population retraitée est actuellement infime et ne devrait guère augmenter à l’avenir 3 Le recours au dispositif de cumul emploi-retraite est relativement mal connu . On peut toutefois avancer qu’il concerne une part infime des retraités. Dans les années 1995-1996, approximativement 300 000 retraités (soit environ 3 % de la population des retraités) exerçaient une activité professionnelle en plus de leur retraite, répartis entre salariés (70 %) et non-salariés (30 %). Les cumulants dont l’âge est compris entre 54 et 59 ans étaient à 62 % des fonctionnaires (dont 47 % d’anciens militaires). Cette proportion s’inverse pour les cumulants de 60-70 ans, qui à 60 % cotisent au régime général. Même si le taux d’activité des personnes âgées de plus de 60 ans s’est redressé 4 depuis 1995, en passant de 10 % à 15 % pour les hommes , le nombre de cumulants n’a probablement guère progressé. Ainsi, en 2006, d’après la CNAV, seuls 120 000 retraités percevaient un salaire. Certes, le taux d’activité des plus de 60 ans devrait continuer à croître dans les prochaines années, notamment sous l’effet des réformes des retraites de 1993 et 2003, mais pour l’essentiel il s’agira de poursuite d’emploi avant liquidation de la retraite (âge de départ à la retraite retardé) plus que de cumul emploi-retraite. 2.3. Le cumul emploi-retraite représente un faible gisement de télétravailleurs Il existe de nombreux obstacles au développement du télétravail chez les seniors Le cumul emploi-retraite n’est qu’une des possibilités d’associer télétravail et emploi des seniors parmi les pistes d’action suggérées aux entreprises (article L.138-26 du Code de la sécurité sociale) et qui constituent les grands axes du plan national d’action concerté pour l’emploi des seniors 2006-2010. En théorie, le télétravail répond aux aspirations des seniors quant au besoin de changement et aux conditions de travail : moindre pénibilité physique et psychique, 1 Article 88 de la LFSS de 2009. 2 Les trois conditions prévues par la loi sont la rupture du contrat de travail, la liquidation des pensions et la condition d’âge et de durée. Cette réforme s’applique à tous les régimes d’assurance vieillesse, à l’exception de celui des exploitants agricoles. 3 Contrairement à la population active, on ne dispose pas de données précises sur les caractéristiques des retraités, par secteur et/ou catégorie socioprofessionnelle. Il est donc difficile d’évaluer le nombre de télétravailleurs potentiels parmi eux. Tout au plus peut-on dire que le flux annuel de retraités, à savoir 700 000 par an entre 2008 et 2013, se divise à parts égales entre les secteurs secondaire et tertiaire. 4 Claude Minni, « Emploi et chômage des 50-64 ans en 2008 », Premières Synthèses, DARES, n° 39-2, septembre 2009. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 70 - www.strategie.gouv.fr
  • 71. liberté dans le travail, maîtrise des horaires, possibilités de développer de nouvelles compétences (cf. supra figure n° 9). En pratique toutefois, la faible appropriation des TIC par les seniors est un frein à l’essor du télétravail. L’âge apparaît ainsi comme un facteur « très déterminant » pour 1 l’accès à un micro-ordinateur . Ce retard dans l’équipement des plus de 60 ans vaut aussi largement pour la téléphonie mobile ou l’Internet haut débit. 2 Enfin, les seniors peuvent subir des discriminations dans l’accès à l’emploi : a priori des employeurs sur l’inaptitude des seniors à maîtriser les TIC, moindre créativité avec l’âge, appréhensions des seniors eux-mêmes vis-à-vis des TIC, diminution des capacités cognitives… Les changements organisationnels et l’infor- matisation, deux éléments associés au télétravail, ne s’avèrent pas favorables au 3 maintien des seniors dans l’emploi . Les obstacles au déploiement du télétravail parmi les seniors, en emploi ou en cumul emploi-retraite, pourraient néanmoins s’amenuiser à mesure que les générations ayant pratiqué l’informatique pendant l’essentiel de leur carrière professionnelle atteindront 50 ans. Des formations adaptées pourraient également contribuer à réduire l’écart de maîtrise des TIC entre seniors et jeunes publics. 3. Sous certaines conditions, le télétravail peut être une alternative aux congés maladie 3.1. Juridiquement, le travail est proscrit durant les congés Le Code du travail interdit très clairement toute forme de travail durant les 4 congés . En effet, pendant les situations d’arrêt de travail pour maladie ou accident, de congés maternité, paternité ou adoption, de congés ou absences autorisées, d’un congé-formation, le contrat de travail est suspendu. Il existe en outre des règles d’ordre public qui imposent au salarié de prendre ses congés et lui interdisent donc de travailler pendant une période de suspension du contrat. Concernant la maternité, l’article L. 1225-29 du Code du travail prévoit qu’il « est interdit d’employer la salariée pendant une période de huit semaines au total avant et après son accouchement. Il est interdit d’employer la salariée dans les six semaines qui suivent son accouchement ». De même, le caractère d’ordre public du droit aux congés payés fait que l’employeur doit donner au salarié ses congés et que ce dernier est tenu de les prendre. 1 En 2008, 92 % des 12-17 ans disposaient d’un ordinateur contre 17 % des plus de 70 ans. La diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société française, rapport du CREDOC effectué à la demande du CGIET et de l’ARCEP, novembre 2008. 2 Sur l’emploi des seniors, voir Pierre Marioni, « Emploi et travail des seniors : des connaissances à l’action », Synthèse des données pour le colloque « Âge et travail » de mars 2007 », Document d’études, DARES, n° 125, juillet 2007. 3 Sévane Ananian et Patrick Aubert, « Travailleurs âgés, nouvelles technologies et changements organisa- tionnels : un réexamen à partir de l’enquête ‘Reponse’ », Économie et Statistique, n° 397, 2006 ; Sandrine Levasseur, « Progrès technologique et employabilité des seniors », Revue de l’OFCE, n° 106, 2008. 4 Cette section est tirée d’une note de Jean-Yves Kerbourc’h, conseiller scientifique au Centre d’analyse stratégique, professeur de droit social à l’université de Haute-Alsace. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 71 - www.strategie.gouv.fr
  • 72. De leur côté, les règles de la sécurité sociale envisagent la question de la suspension de manière tranchée : le contrat de travail est suspendu ou il ne l’est pas. Les salariés relevant du régime général contraints d’interrompre leur activité professionnelle en raison d’une incapacité physique peuvent prétendre, s’ils remplissent les conditions requises, au versement d’indemnités journalières compensant partiellement leur perte de salaire, sauf faute intentionnelle commise en vue de percevoir ces indemnités (CSS L. 321-1 et L. 375-1). En outre, certaines dispositions légales ou conventionnelles prévoient le maintien du salaire, comme en cas de maladie, d’accidents du travail ou de maladie professionnelle, de congé de maternité (voir encadré). La règle du maintien du salaire en cas de suspension du contrat de travail pour raison de santé L’article L. 1226-1 du Code du travail prévoit le maintien du salaire en cas de maladie ou d’accident (y compris d’origine professionnelle), lorsque les conditions suivantes sont remplies : – ancienneté d’un an au premier jour d’absence ; – justification de l’absence dans les 48 heures et constatation de la maladie par certificat médical et contre-visite ; – prise en charge par la sécurité sociale ; – soins en France ou dans un autre pays membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen. Le Code du travail (art. D. 1226-1 à D. 1226-3) fixe le point de départ de l’indemnisation au premier jour d’absence si celle-ci est consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle (à l’exclusion des accidents de trajet) et au huitième jour d’absence dans tous les autres cas. Pendant 30 jours, le salarié reçoit 90 % de la rémunération brute qu’il aurait perçue s’il avait continué à travailler. Pendant les 30 jours suivants, il reçoit les deux tiers de cette rémunération. Ces durées sont augmentées de 10 jours par période entière de 5 ans d’ancienneté en sus de la durée d’une année exigée, sans que chacune d’elles puisse dépasser 90 jours. Chacune de ces durées d’indemnisation sera donc portée à : 40 jours entre 6 et 11 ans d’ancienneté ; 50 jours entre 11 et 16 ans ; 60 jours entre 16 et 21 ans ; 70 jours entre 21 et 26 ans ; 80 jours entre 26 et 31 ans ; 90 jours à partir de 31 ans d’ancienneté. Des accords de prévoyance conclus en application d’une convention collective de branche (ou autre) sont susceptibles de couvrir la différence importante entre les indemnités versées par le régime général de la sécurité sociale et le coût du maintien du salaire pris en charge par l’employeur. S’agissant des congés maladie ou accidents du travail, une (petite) partie des poursuites menées par la CNAMTS vise ainsi des personnes qui exercent une activité 1 pendant leur arrêt de travail . Cette situation est examinée avec d’autant plus d’attention qu’il s’agit d’un cas où salarié et employeur peuvent s’avérer complices contre l’assurance-maladie. Pour autant, cela n’empêche pas de nombreux salariés de poursuivre leur activité professionnelle, en télétravaillant de manière informelle. Parfois de manière subie, sous la pression plus ou moins directe de leur hiérarchie, mais aussi – probablement dans la plupart des cas – de manière plus ou moins volontaire, par dépendance au 1 Quatorze pénalités en 2007. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 72 - www.strategie.gouv.fr
  • 73. travail ou par (auto)contrainte (souhait de suivre à distance ses dossiers pour bien faire son travail ou ne pas les perdre au profit de collègues). 3.2. Le télétravail est juridiquement incompatible avec le congé maladie mais peut être une opportunité pour certains malades et pour l’assurance-maladie En 2005, environ un actif sur cinq, assuré par le régime général, a bénéficié d’un arrêt de travail pour cause de maladie. Ces arrêts sont majoritairement de courte durée : ceux d’une durée inférieure à 15 jours représentent 63 % des cas, contre 20 % pour 1 les arrêts supérieurs à un mois . Par ailleurs, les données de la CNAMTS font appa- raître une nette corrélation entre syndromes grippaux et arrêts de moins de huit jours. 2 Trois types d’affections représentaient plus de 50 % des arrêts : – les maladies du système ostéo-articulaire, des muscles et du tissu conjonctif (21 % des arrêts) ; – les traumatismes (21 % des arrêts) ; – les troubles mentaux (14 % des arrêts). Dans l’hypothèse où le télétravail viendrait remplacer 5 % ou 10 % des arrêts de travail, des économies substantielles pour l’assurance-maladie seraient envisa- geables. Cela correspondrait également au souhait de certains salariés de poursuivre une activité professionnelle durant leur congé maladie. En pratique, dans la mesure où employeur et employé le souhaitent, le médecin pourrait délivrer au patient un arrêt 3 de travail assorti d’une attestation médicale d’aptitude au télétravail . Cependant, il faut noter qu’aucun dispositif de ce type n’a été identifié dans les pays de l’OCDE étudiés. Le télétravail, notamment à temps partiel, pourrait également – en tant qu’aménage- ment des conditions de travail – assurer la transition entre l’arrêt maladie et 4 l’activité professionnelle, par exemple dans le cas de salariés atteints par un cancer . 5 En favorisant le retour à l’emploi et en répondant mieux aux besoins des malades, le télétravail a un effet positif dans le processus de guérison des maladies chroniques (contacts sociaux, meilleure hygiène de vie, projection dans l’avenir…). Enfin, le télétravail à temps partiel serait une opportunité pour les mi-temps thérapeutiques ou pour un retour au travail à temps complet. La souplesse et la maîtrise des horaires qu’offre le télétravail peuvent faciliter les traitements et les examens médicaux de patients en phase de maladie moins aiguë. Il fournirait des 1 Odile Kusnik-Joinville et al., « Déterminants de l’évolution des indemnités journalières », Points de repère, n° 5, CNAMTS, novembre 2006. 2 Ces données datent de 1993, aucune étude plus récente n’ayant été effectuée sur ce sujet. 3 Un tel dispositif ne constituerait pas forcément une pression supplémentaire sur le médecin qui subit déjà les demandes du salarié-patient confronté à d’éventuelles pertes de droits et de statuts quand il est placé en arrêt de travail. 4 Les données de l’Institut Curie indiquent que de plus en plus de patients atteints d’un cancer poursuivent une activité professionnelle pendant ou après leur traitement. 5 Christine Le Clainche, « Retour au travail après un cancer : impact des aménagements des conditions de travail et des conditions de vie », communication au séminaire DARES-CEE, 16 juin 2009. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 73 - www.strategie.gouv.fr
  • 74. 1 marges de manœuvres au salarié malade ou en phase de guérison , articulant mieux 2 la « trajectoire de la maladie » et la « trajectoire d’emploi » . 3.3. La pratique du télétravail durant les arrêts pour accident de travail semble difficilement envisageable Est considéré comme accident de travail (AT) l’accident, quelle qu’en soit la gravité, survenu par le fait ou à l’occasion du travail, à toute personne travaillant, à quelque titre que ce soit et en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise (CSS, art. L. 411-1). Un AT suppose donc la réunion des deux critères suivants : – un fait accidentel, c’est-à-dire un événement ou une série d’événements survenus à des dates certaines, par le fait ou à l’occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, aussi bénigne soit-elle, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci ; – l’existence d’un lien de subordination entre la victime et son employeur au moment de l’accident. Est constitutive d’un lien de subordination l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, de contrôler l’exécution du travail et de sanctionner les manquements de son subordonné. Cette définition confère à tout accident survenu à un salarié pendant les heures de travail et à un moment où s’exerce l’autorité de l’employeur, même s’il n’est pas causé par un acte strictement lié au travail, une présomption d’imputabilité au travail, à la condition que la victime apporte la preuve de la matérialité de la lésion. De la même manière, un accident survenu consécutivement à un acte d’insubordination peut être reconnu comme AT tant que la victime est restée sous la surveillance et l’autorité de l’employeur. En revanche, si le salarié ne bénéficie pas de la présomption d’imputabilité, il doit apporter la preuve du lien de causalité entre le travail et l’accident pour bénéficier de la législation en vigueur. En 2006, 705 000 arrêts ont été établis suite à un accident du travail, pour une durée moyenne de 45 jours. Les arrêts « courts » (moins de 45 jours), représentant la 3 majorité des AT (81 %) , sont dus à des accidents bénins, tandis que les arrêts longs sont dus à des AT particulièrement graves (chute d’une grande hauteur, etc.), avec des séquelles souvent importantes. Au-delà des difficultés juridiques liées à la suspension du contrat de travail, il semble difficile de proposer à un salarié en AT de télétravailler, alors que l’activité professionnelle est à l’origine de l’arrêt. En outre, l’équilibre du régime juridique de la prise en charge des accidents du travail et des maladies professionnelles, établi depuis 4 1898 , vise à favoriser la prévention par l’employeur des risques professionnels, en lui 1 Sur l’enjeu de trouver des marges de manœuvre dans la gestion de la maladie et des soins tout en travaillant, voir Anne-Marie Waser, « Travailler malgré le cancer, un privilège ? », Santé et Travail, n° 66, avril 2009. 2 Sylvie Célérier, « Santé précaire au travail : quelques perspectives sociologiques », Connaissance de l’emploi, n° 56, CEE, juillet-août 2008. 3 Damien Euzenat, « Les indicateurs accidents du travail de la DARES. Conception, champ et interprétation », Document d’études, n° 150, DARES, juillet 2009. 4 Daniel Couturier, « Les accidents du travail : approche juridique et jurisprudentielle », communication au colloque « Les accidents du travail : rétrospective historique et interrogations contemporaines », Lyon, octobre 2008. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 74 - www.strategie.gouv.fr
  • 75. imposant une obligation de résultats et non seulement de moyens, « récompensée » financièrement par le biais des mécanismes de cotisation à la branche « accident du travail/maladies professionnelles » de la Sécurité sociale. Il faut noter, en outre, qu’aucun pays de l’OCDE étudié n’a mis en place de dispositif substituant le télétravail à l’arrêt de travail après accident du travail. 4. Le télétravail peut contribuer à mieux concilier activité professionnelle et périodes prénatale et postnatale (hors congé maternité) Le Code du travail accorde aux femmes un congé de maternité d’une durée de seize semaines qui commence en principe six semaines avant la date présumée de l’accouchement (congé prénatal) pour se terminer dix semaines après la date de celui- ci (congé postnatal). Pendant cette période, le contrat de travail est suspendu. Certes, l’interdiction de travailler pendant le congé de maternité n’est pas absolue 1 chez nos voisins européens . En Allemagne, pendant le congé prénatal, la femme enceinte peut continuer à travailler si elle en exprime la volonté, tout en ayant la faculté de revenir sur cette décision à tout moment. Le congé postnatal danois, qui dure en principe quatorze semaines, n’inclut de façon obligatoire que les deux semaines qui suivent la naissance. L’Espagne et la Pologne prévoient la possibilité de transférer au père une partie du congé de maternité, le cadre juridique ne faisant en outre pas de différence entre congés prénatal et postnatal. En Espagne, les femmes ont l’obligation de respecter un congé postnatal de six semaines mais elles peuvent faire bénéficier le père du solde de leur congé (dix semaines au maximum). De même, en Pologne, les femmes peuvent transférer au père au maximum six semaines de leur congé de maternité. Néanmoins, il ne paraît pas souhaitable de remettre en cause les principes du droit du travail français concernant le congé de maternité et la suspension du contrat de travail, notamment parce que les mères y sont très attachées. Ainsi, les 2 mères interrogées par la DREES s’arrêtent plus longtemps que la durée légale ou conventionnelle, en cumulant congé maternité et congés annuels par exemple, pour passer du temps avec leur(s) enfant(s). D’après cette même enquête, certaines mères, notamment parmi les cadres, ont cependant déclaré avoir consacré du temps à leur activité professionnelle pendant toute la durée du congé maternité (14 %). D’autres ont repris progressivement leur travail avant la fin du congé (12 %) tandis que la plupart ont maintenu des contacts professionnels avec leurs collègues (77 %). En outre, les périodes avant et après le congé maternité sont souvent synonymes de surcharge de travail, pour les femmes cadres en particulier. Par souci d’une meilleure conciliation entre la vie familiale et l’activité professionnelle, plusieurs entreprises françaises font du télétravail un outil permettant davantage de 1 Sénat, « Les congés liés à la naissance d’un enfant », Les documents de travail du Sénat, série Législation comparée, n° LC 200, octobre 2009. 2 Enquête « Congés autour de la naissance », réalisée en 2004 ; Sophie Pénet, « Le congé maternité », Études et Résultats, n° 531, DREES, octobre 2006. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 75 - www.strategie.gouv.fr
  • 76. souplesse dans l’organisation du travail, donc particulièrement adapté aux femmes enceintes et aux jeunes mères. 1 Telle est l’approche des entreprises signataires de la « Charte de la parentalité en entreprise » qui s’engagent à proposer le télétravail, parmi d’autres dispositifs. L’accord mis en œuvre chez Coca Cola France depuis décembre 2008 permet aux salariées enceintes de télétravailler un à deux jours par semaine dans les deux mois qui précèdent le départ en congé maternité. De même, dans le cadre d’un accord d’entreprise sur « l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes », signé le 13 mai 2009 par l’ensemble des organisations syndicales, Bayer Santé permet un aménagement des conditions de travail par du télétravail dès quatre mois révolus de 2 grossesse, après avis du médecin du travail . 3 Au Royaume-Uni , le télétravail est un outil de conciliation entre vie professionnelle et éducation des jeunes enfants dans le cadre de la loi sur « le droit de demander un 4 travail flexible » . Cette loi introduit le droit pour l’employé, parent d’un enfant de moins de 6 ans ou d’un enfant handicapé de moins de 18 ans, de demander des arrangements spécifiques pour rendre son emploi du temps plus flexible (horaires, durée et lieu de travail). Elle introduit également l’obligation pour l’employeur de considérer cette demande avec sérieux et d’en discuter avec l’employé. En 2007, ce droit a été étendu aux parents d’enfants âgés de moins de 16 ans. En cas de refus d’une demande de flexibilisation du temps de travail, l’employé peut faire appel. La demande sera alors reconsidérée par l’employeur. En cas de second refus, l’employé peut faire un second appel devant un tribunal spécialisé dans le droit du travail (employment tribunal) ou demander un arbitrage qui s’imposera aux deux parties (binding arbitration). L’objectif de la législation sur le travail flexible est d’offrir aux parents un meilleur équilibre entre vie familiale et vie professionnelle et de changer les habitudes culturelles, sans pour autant pénaliser les entreprises. En Allemagne, le télétravail fait partie des mesures de conciliation entre vie familiale 5 et activité professionnelle . Ainsi, la loi sur l’égalité homme/femme dans le secteur public oblige les services à proposer aux salariés des modes d’organisation compatibles avec la vie familiale, dont le télétravail. La Commerzbank, dans le cadre de plusieurs accords collectifs, s’engage de même depuis 2001 à s’efforcer de répondre aux vœux des salariés en matière de télétravail, ne serait-ce que pour faciliter un retour précoce de congé parental. Le télétravail peut aussi favoriser la conciliation entre vie familiale et activité professionnelle pour les salariés qui ont des parents dépendants ou en fin de vie. Or ces situations sont appelées à évoluer avec le vieillissement démographique. 1 120 entreprises signataires au 26 octobre 2009 (www.observatoire-parentalite.com). On note cependant que les entreprises signataires n’identifient pas toutes le télétravail comme un outil favorable à cette démarche ou bien sont en retard dans sa mise en œuvre, d’après une enquête de l’Observatoire de la parentalité. 2 Dépêche AEF n° 121490, 19 octobre 2009. 3 Roland Berger, Le Télétravail en France et dans les pays de l’OCDE. Monographies pays, septembre 2009. 4 Employment Act 2002 – chapitre 479 ; Flexible Working Regulations 200310. 5 Anne-Marie Daune-Richard et Marie-Thérèse Letablier, « Concilier travail et famille : l’engagement des entreprises dans la prise en charge des enfants (Allemagne, France, Italie et Royaume-Uni) », Dossier d’étude, n° 120, CNAF, septembre 2009. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 76 - www.strategie.gouv.fr
  • 77. La nécessaire implication de tous les acteurs 1. Le télétravail procure des avantages décisifs dans de nombreux domaines Dans l’ensemble, le télétravail a des effets bénéfiques sur la performance des entreprises, sur la satisfaction des salariés, sur les émissions de gaz à effet de 1 serre… Ces effets positifs, parfois vantés de manière trop enthousiaste par ses promoteurs, ne doivent pas faire oublier qu’il existe des situations pour lesquelles le télétravail n’est pas adapté, avec des bilans sociaux, économiques et environ- nementaux parfois contrastés. 1.1. Le télétravail se trouve à la croisée de nombreux domaines de politique publique et de ce fait requiert l’adoption d’une « approche systémique » Régi à la fois – entre autres – par le Code du travail et le Code de la sécurité sociale, le télétravail est également au centre d’enjeux de société tels que la lutte contre le changement climatique, la diminution de la pollution urbaine, l’amélioration du bien- être des salariés et des relations sociales, la flexibilité du travail et la compétitivité des entreprises, la réduction des dépenses sociales… Pour avoir une efficacité optimale, les politiques publiques de promotion du télétravail doivent prendre en compte toutes ces dimensions. De la même manière, une organisation qui voudrait adopter ce dispositif devra prendre en compte non seulement les aspects juridiques (clauses du contrat de travail) mais aussi revoir ses modes de fonctionnement (taux de numérisation des documents, procédés collaboratifs, etc.), sa politique de ressources humaines (incita- tions pour les télétravailleurs, identification des postes et agents concernés, maintien 1 Il existe ainsi une certaine « iconographie du télétravail », parfois entretenue par des procédés marketing, représentant des professions intellectuelles supérieures ou des chefs d’entreprise télétravaillant au bord de la piscine de leur maison secondaire… Ce n’est évidemment pas le cas de la grande majorité des télétravailleurs, pour lesquels la réalité est beaucoup plus prosaïque. La diffusion du télétravail passe donc aussi par la description juste des avantages et inconvénients pratiques liés à ce mode de travail. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 77 - www.strategie.gouv.fr
  • 78. de l’équité entre tous les salariés, etc.) ou encore étudier les technologies les plus adaptées au travail à distance, en tenant compte des systèmes d’information existants. 1.2. Malgré certaines incertitudes, les effets du télétravail sont dans l’ensemble positifs Les effets positifs avérés Le potentiel de diminution des émissions de gaz à effet de serre serait de 1 mil- 1 lion de tonnes (Mt) par an pour la France . Selon d’autres sources, les gains pourraient même être plus importants : de 1,5 Mt pour une transposition des chiffres pour les États-Unis et jusqu’à 3,3 Mt selon la Commission européenne. La diminution des déplacements a pour corollaire la réduction de la pollution urbaine 2 (particules émises par les voitures, ozone) et la diminution d’une partie du coût des maladies respiratoires associées, notamment dans les zones urbaines. Si une estimation solide des gains « macroéconomiques » liés au télétravail semble difficile à établir au niveau d’un pays, on dispose néanmoins d’un faisceau concordant d’estimations à un niveau agrégé, qui indiquent un effet globalement positif du 3 télétravail sur la productivité. Selon une enquête menée auprès de 862 télé- travailleurs, le passage au télétravail a permis une augmentation de productivité pour 57 % des salariés. Selon une autre enquête menée dans cinq pays européens, la productivité a augmenté dans plus de 60 % des 30 organisations étudiées. À un niveau plus fin, une augmentation des performances des télétravailleurs a été constatée dans la plupart des cas : augmentation de productivité comprise entre 4 15 % et 31 % pour British Telecom, amélioration de l’efficacité de 16 % chez BMW … Tableau n° 16 : Influence du télétravail sur les conditions de travail de 862 salariés belges Évolution des conditions de travail En Pas de En à la suite du passage en télétravail diminution changement augmentation Productivité 4% 39 % 57 % Opportunités de promotion 59,4 % 8,7 % 31,9 % Charge de travail 18,9 % 67 % 14,1 % Stress 43,5 % 45,7 % 10,8 % Équilibre vie privée/professionnelle 10,7 % 33,7 % 55,6 % Source : Walrave et De Bie (2005) 1 Ce chiffre reprend la valeur consensuelle établie par la mission commune CGTI/CGEDD de décembre 2008 sur les TIC et le développement durable. 2 Selon le deuxième Plan national santé-environnement (PNSE2) de 2009-2013, les particules fines de moins de 10µm seraient responsables de 2 à 31 décès pour 100 000 habitants ; ainsi, le coût de traite- ment du seul asthme imputable à l’environnement serait compris entre 0,2 et 0,8 milliard d’euros en 2006. 3 Laurent Taskin, « Le télétravail en manque de régulation », Regards économiques, 2006. 4 Projet SUSTEL, Is teleworking sustainable? An analysis of its economic, environmental and social impacts, financé par la Commission européenne, 2004. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 78 - www.strategie.gouv.fr
  • 79. Plusieurs causes expliquent cette augmentation de productivité. Tout d’abord, le télétravailleur est généralement mieux formé que le travailleur resté dans les locaux de l’employeur. Il est aussi en général moins perturbé dans l’exécution de ses tâches (bruit, demandes urgentes du manager, nombreuses sollicitations des collègues, etc.). Il travaille sur des plages horaires plus larges, durant lesquelles il est plus concentré et plus efficace. Cette différence de productivité peut être source de tensions entre les travailleurs dans les locaux, régulièrement dérangés par des demandes intempestives, et les télétravailleurs, plus productifs car travaillant au calme et dans de meilleures conditions. Les effets présumés positifs mais difficiles à mesurer L’amélioration générale des conditions de travail (moindres déplacements, meilleure qualité de vie, diminution du stress, équilibre famille/travail, réduction de l’absen- téisme) a probablement des impacts socioéconomiques considérables, tant en 1 termes de productivité que de diminution des dépenses sociales , qu’il est toutefois difficile d’évaluer précisément. Dans une certaine mesure, l’emploi dans les territoires profite de l’essor du télétravail qui permet l’installation de travailleurs en zone rurale. Ce phénomène est probable- ment marginal : le télétravail à domicile (ou à 100 % hors des locaux de l’entreprise) concerne moins de 25 % des télétravailleurs et s’adresse à certaines professions par- ticulières (professions libérales, indépendants, chefs d’entreprises et cadres dirigeants de certains secteurs). L’impact du télétravail sur la localisation de l’emploi et sur l’aménage- ment du territoire réside principalement dans le développement des télécentres. Dans certaines situations, le télétravail peut contribuer à augmenter significativement le pouvoir d’achat, comme le montre l’encadré suivant. Illustration de l’impact du télétravail sur le pouvoir d’achat des salariés télétravailleurs d’une société de téléconseil L’amélioration du pouvoir d’achat pour ses « téléconseillers » à domicile a été évaluée entre 10 % et 20 % suivant les situations personnelles. Le conseiller Le conseiller Le conseiller habite en économise en économise en moyenne à 25 km moyenne 1,5€ par moyenne 1 heure de de son lieu de déjeuner garde d’enfant par travail jour (1) (2) 90 € / mois 20 € / mois 105 € / mois (3) Hypothèses 1 D’après les résultats de l’enquête de Laurent Taskin, le stress au travail a diminué et l’équilibre entre vie familiale et vie professionnelle s’est amélioré. Il y a de fortes chances que ces bénéfices sociaux se traduisent par des diminutions de dépenses sociales (indemnités journalières moins nombreuses, moindres prescriptions de médicaments…). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 79 - www.strategie.gouv.fr
  • 80. 1. Consommation de 6 litres au 100 km avec prix moyen constaté du carburant de 1,20 € et usure véhicule équivalent à 0,05 €/km sur 15 jours ouvrés à domicile par mois : 25*2*15*(6/100*1,2 + 0,05) = 91,5 € 2. Frais de bouche sur site de 4,50 € (restaurant d’entreprise) contre 3 € à domicile : 15*(4,5-3) = 22,5 € 3. Garderie pendant l’heure de transport économisée à 7 €/h : 15*7 = 105 € Source : analyse Roland Berger Le bilan des impacts du télétravail Impacts économiques Valeur ajoutée En règle générale, le télétravail augmente les performances (productivité…), contribue à diminuer l’absentéisme, à améliorer le recrutement et à fidéliser les meilleurs employés. Les gains sont supérieurs aux coûts d’équipement, sauf lorsque le projet est mal préparé en amont Pouvoir d’achat Effets généralement positifs pour les ménages à travers les économies en frais de transport et en garde d’enfant, généralement plus importants que les coûts de chauffage et d’éclairage de l’habitat Résilience de l’organisation Le télétravail permet de contourner les discontinuités de service partielles (transports…). En revanche, il augmente la vulnérabilité de l’organisation aux risques systémiques (perturbations sur les réseaux de télécommunications…) Capital humain Le télétravail a des effets positifs sur l’évolution des compétences et les savoir-faire mais peut avoir un impact négatif sur le déroulement de carrière Emploi Impacts difficiles à estimer de manière définitive bien que le télétravail puisse aboutir à modifier l’implantation géographique (aménagement du territoire…) Impacts environnementaux Transport Diminution des embouteillages et des kilomètres parcourus malgré les déplacements supplémentaires induits parfois par le télétravail. Meilleur usage des infrastructures existantes par optimisation des horaires de déplacements Qualité de l’air en zone urbaine Moins d’émissions de particules car moins de déplacements de véhicules particuliers Consommation de ressources Impact négatif lorsque le télétravail ne s’accompagne pas de réduction des surfaces de bureaux (doublons d’équipement informatique et de consommations énergétiques) Urbanisme Manque de recul pour estimer les effets : réimplantation des bureaux éventuellement contre-productive si les infrastructures de transport ne sont pas adaptées Sécurité Pas d’effet connu Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 80 - www.strategie.gouv.fr
  • 81. Impacts individuels et sociaux Insertion sociale Globalement positive grâce au maintien de certains emplois sinon détruits (handicapés, seniors…) Qualité de vie La plupart des sondés indiquent que le télétravail a amélioré leur quotidien malgré les heures supplémentaires souvent associées Équilibre de vie Une grande majorité des sondés estiment que le télétravail leur permet de mieux concilier vie personnelle et vie professionnelle Santé La plupart des télétravailleurs mentionnent un meilleur état de santé ; ceci est corroboré par la réduction de l’absentéisme Vie sociale Le télétravail a souvent redynamisé les services locaux, voire l’implication dans les activités associatives pour de nombreux télétravailleurs Source : adapté du rapport final du projet européen SUSTEL de 2004 2. Les « success stories » et les bonnes pratiques 2.1. Quelques exemples de success stories La littérature et les auditions ont permis d’identifier un certain nombre d’exemples types du déploiement du télétravail. BMW a été un pionnier dans l’industrie BMW a commencé à développer le télétravail dès 1995 à travers le projet TWIST (Telework in flexible structures). La montée en puissance du nombre de télétravailleurs a été régulière entre 1996 et 2002. Aujourd’hui, l’ensemble des fonctions pratique le télétravail, y compris la production (tâche de rédaction de rapport…). Figure n° 11 : Le télétravail selon BMW Autres Achats 2 000 3% Distribution 1 494 7% R&D 14% Montée en puissance du nombre 26% de télétravailleurs chez BMW 987 619 310 20 78 8% 36% Finance / IT 6% 1996 1996 1997 1998-1999 2000 2001 2002 Production RH Pilote Expansion Généralisation Source : TWIST Telearbeit in der BMW Group, février 2002 Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 81 - www.strategie.gouv.fr
  • 82. 64 % des salariés de British Telecom sont en travail flexible et 12 % télétravaillent depuis leur domicile Au Royaume-Uni, l’exemple de bonne pratique le plus souvent cité en matière de télétravail est le cas de British Telecom (BT) qui a réduit ses effectifs de manière drastique au cours des dernières années, passant de 250 000 à 98 000 employés. L’un des moyens privilégiés pour révolutionner ses ressources humaines a été d’introduire le travail flexible. Aujourd’hui, 63 000 personnes sur le total des employés de BT ont un travail flexible et 12 000 travaillent depuis leur domicile comme télétravailleurs. L’objectif de la société est d’augmenter encore la part des télétravailleurs pour modifier la culture interne de l’entreprise. Une des principales motivations de BT a été la volonté de réduire les coûts des loyers et de mieux rentabiliser les espaces de bureaux. Sur les dix dernières années, BT a ainsi pu économiser 222 millions de livres en charges locatives. Les coûts associés aux transports ont été réduits de 9,7 millions par an. 70 % des télétravailleurs ont constaté une hausse de leur productivité et 65 % ont affirmé pouvoir ainsi économiser 6 heures par semaine en temps de transport. Toutefois, certains détracteurs soulignent que BT, qui vend également à travers sa branche BT Workstyle Solutions des équipements et les technologies nécessaires à des entreprises souhaitant développer le télétravail, aurait modifié ses pratiques en ressources humaines dans un souci d’image plus que par souci de modernité et du bien-être de ses employés. 2.1. Idéalement, un projet de déploiement du télétravail devrait se faire au cas par cas Comme l’illustre la figure n° 12, sur les 60 organisations interrogées dans 11 pays dans le cadre de cette mission, il est difficile d’identifier des cohérences entre le développement du télétravail et d’autres caractéristiques de l’entreprise telles que l’intensité technologique du secteur considéré ou sa taille. En effet, le déploiement du télétravail correspond à une démarche propre à chaque organisation, variable selon les pays, la culture d’entreprise ou le secteur. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 82 - www.strategie.gouv.fr
  • 83. Figure n° 12 : Taux de télétravailleurs selon la taille de l’organisation, le secteur économique et le niveau de maturité du projet de télétravail (11 pays considérés) Source : entretiens, informations des entreprises (rapports annuels…), analyse CAS Guide de lecture de la figure n° 12 En abscisse est indiqué le taux de télétravailleurs dans l’organisation considérée (rapport entre le nombre de télétravailleurs et le nombre total de salariés). En ordonnée est indiquée l’intensité technologique de l’entreprise, sur une échelle allant de 1 (agriculture, BTP) à 10 (R & D en pharmacie, construction de technologies spatiales). Le diamètre de chaque cercle est fonction de la taille de l’organisation, exprimée en échelle logarithmique afin que les entreprises les plus petites restent visibles (la plus petite organisation comprend 100 salariés, la plus importante 320 000). Enfin, la couleur correspond au niveau de maturité atteint par l’organisation dans la mise en place de son projet de télétravail : pilote = noir, pilote/élargissement = rouge, élargissement = orange, élargissement/croisière = jaune, croisière = vert Si la mise en œuvre du télétravail doit se faire de préférence au cas par cas, il n’en demeure pas moins que l’on peut identifier quelques étapes invariantes majeures, que les paragraphes suivants passent en revue.  2.3. Les exemples de bonnes pratiques dans les entreprises Bien qu’il soit difficile d’identifier un schéma universel de déploiement du télé- travail, plusieurs travaux académiques en gestion des organisations et des études menées par des syndicats d’entreprise ont mis en valeur des constantes et des bonnes pratiques. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 83 - www.strategie.gouv.fr
  • 84. La figure n° 13 présente un schéma type de mise en place du télétravail, établi par plusieurs entreprises belges. Figure n° 13 : Schéma de mise en place du télétravail agréé par un regroupement d’organisations belges Source: BTA, Telework in Belgium, synthèse CAS Le même travail a été réalisé par une dizaine d’entreprises américaines du secteur des hautes technologies (figure n° 14). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 84 - www.strategie.gouv.fr
  • 85. Figure n° 14 : Schéma de mise en place du télétravail agréé par treize entreprises américaines du secteur high-tech Source : telcoa.org, synthèse CAS 2.4. Les exemples de bonnes pratiques dans l’administration Les bonnes pratiques issues de l’administration française Il existe peu de cas de mise en place du télétravail dans l’administration française, que ce soit au niveau central ou au niveau des collectivités locales. Au niveau central, trois exemples récents sont ceux de la Direction générale des impôts, du ministère de l’Éducation nationale et du ministère de la Justice. Ce dernier a mis en place un protocole de télétravail dans ses services en novembre 2008, en réponse aux changements organisationnels induits par la réforme de la carte judiciaire. Expérience du télétravail au sein du ministère de l’Éducation nationale Le télétravail est très peu développé dans l’Éducation nationale. Le personnel potentiel- lement concerné est le personnel administratif. Il est à ce stade très difficile d’envisager d’élargir le périmètre des télétravailleurs aux professeurs. La « télétravaillabilité » des activités d’un enseignant est effectivement très limitée en dépit des progrès des TIC ; les préparations des cours et les corrections de copies s’effectuent déjà à distance du lieu d’enseignement (généralement au domicile). Si l’offre en matière de télétravail pour les professeurs n’est pas très importante, il n’y a pas non plus de demande forte. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 85 - www.strategie.gouv.fr
  • 86. Lorsqu’un agent choisit de s’organiser en mode télétravail, l’Éducation nationale fournit le matériel et la connexion Internet au domicile, pour un coût annuel évalué à 700 euros. Les situations d’accidents du travail survenus au domicile sont rares et gérées au cas par cas, à l’amiable. Protocole de télétravail au sein du ministère de la Justice Le ministère de la Justice a mené une expérimentation du télétravail sur les agents des conseils de prud’hommes (11 personnes) supprimés le 3 décembre 2008 (activité de greffe). Ce protocole indique que « le télétravail a pour effet de permettre à l’agent qui en bénéficie d’assurer, de façon régulière, son emploi dans un autre site judiciaire que celui au sein duquel il l’exerce habituellement ». Comme dans le cadre des accords d’entreprise signés entre la direction et les organisations représentatives du personnel, le protocole prévoit : – le caractère volontaire du télétravail ; – le lieu d’exercice du télétravail (en l’occurrence à domicile ou sur un site judiciaire) ; – l’activité exercée ; – les modalités d’organisation du télétravail (qui sont de la compétence du directeur de greffe) ; – la durée de la convention individuelle (12 mois maximum) ; – les modalités de cessation de la convention ; – la répartition du temps de travail entre les sites judiciaires : le télétravail choisi est un travail en alternance, pour une part n’excédant pas 80 % du temps de travail ; la présence aux réunions de service est requise ; – les conditions matérielles d’organisation du travail (mise à disposition d’un poste de travail dans le respect des règles d’hygiène et de sécurité) ; – les modalités d’utilisation des technologies de l’information (utilisation du réseau privé virtuel justice) ; – les horaires de travail (soumis à la charte de temps de sa juridiction de rattachement) ; – la formation au télétravail ; – la prise en charge en cas d’accident de travail, de service ou de trajet ; – les dépenses de fonctionnement (conditions de prise en charge d’une partie des frais liés au télétravail) ; – les modalités de suivi et bilan de l’expérimentation (retour au moins une fois par an). Bien que les expériences précédentes n’aient pas connu de suite, rien ne s’oppose, ni en théorie ni en pratique, à la mise en place du télétravail dans la fonction publique. Un guide pratique, rédigé en 1998 par la DGAFP, a été édité à La Documentation française. Très pragmatique, il présente en une cinquantaine de pages le cadre juridique du télétravail dans la fonction publique et donne des conseils pratiques. Les bonnes pratiques issues des administrations étrangères et des organisations internationales Certaines administrations à travers le monde peuvent être considérées comme des pionnières de la mise en place du télétravail. Ainsi, au début des années 2000, l’administration américaine s’est mobilisée fortement en faveur du télétravail, via la Direction générale des personnels fédéraux (US Office for Personnel Management et Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 86 - www.strategie.gouv.fr
  • 87. US General Services Administration), en fixant une feuille de route à son directeur. Ce dernier doit produire un rapport annuel engageant, devant le Congrès, la respon- sabilité de son organisation dans le déploiement du télétravail au sein des agences fédérales. Des indicateurs sont fixés ex-ante (taux d’agences fédérales ayant mis en place un programme de télétravail, taux de télétravailleurs potentiels et effectifs dans chaque agence, prévisions, etc.). Figure n° 15 : Exemple de plan d’action « Télétravail » pour la fonction publique américaine Source : US OPM, analyse CAS 3. Les initiatives des pouvoirs publics contribuent à l’essor du télétravail 3.1. Les politiques publiques étrangères relatives au télétravail 1 Comme nous l’avons vu précédemment (cf. tableau n° 11), hormis quelques cas , il n’existe pas de législation spécifique au télétravail dans les pays étudiés. Néanmoins, à partir des années 1990, le télétravail a été un sujet d’intérêt pour certains parlements ou gouvernements étrangers, qui ont soutenu son essor de différentes manières : 1 Il existe une législation du télétravail en Norvège, en Colombie et en Argentine, ainsi qu’en Corée du Sud et aux Pays-Bas pour le secteur public. De même, la République tchèque (1er janvier 2007), la Pologne, la Hongrie (mai 2004) et le Portugal (articles 233 à 243, modifiés par la loi 99/2003 du 27 août 2003) ont introduit, sous une forme ou une autre, le télétravail dans leur Code du travail. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 87 - www.strategie.gouv.fr
  • 88. soutien financier, promotion des bonnes pratiques, organisation du dialogue entre les parties, amélioration de la diffusion des technologies… Le soutien des pouvoirs publics peut être financier, en encourageant l’équipement des entreprises et des ménages ou en proposant des déductions fiscales. Dans les années 1990, les gouvernements belge, néerlandais, britannique et suédois ont soutenu l’équipement informatique des ménages et/ou des entreprises, contribuant ainsi au développement de la société de l’information en général et du 1 télétravail en particulier. À partir de 1998, le « PC-privéregeling » a permis annuellement à 400 000 salariés néerlandais d’acheter un ordinateur détaxé jusqu’à un montant de 2 269 euros. Cette mesure coûtant environ 560 millions d’euros par an pour les finances publiques, le seuil de détaxation a été abaissé à 1 425 euros en 2003 avant d’être supprimée en 2004. Les Britanniques et les Suédois peuvent déduire de leurs impôts les frais liés à l’utilisation de leur domicile comme lieu de 2 travail : déductions fiscales en Suède pour la transformation d’une pièce du domicile en bureau, déductions fiscales pour les entreprises britanniques prenant en charge les coûts de leurs télétravailleurs (environ 3 livres sterling par semaine), déductions fiscales pour les particuliers britanniques justifiant les frais supplémentaires liés à l’utilisation du domicile comme lieu de travail… Enfin, le télétravail est récemment devenu un sujet d’intérêt pour le gouvernement coréen qui a mis en place un groupe de travail chargé de réfléchir à d’éventuelles réductions fiscales et à des subventions. Plus régulièrement, les gouvernements étrangers ont tâché d’identifier et de promou- voir les bonnes pratiques. Des guides pratiques ont été édités aux États-Unis, au Japon, en Belgique, aux Pays-Bas… En 2009, le gouvernement finlandais a édité un 3 guide indiquant aux entreprises les neuf étapes à suivre pour mettre en œuvre le télétravail avec succès. Des conférences et des campagnes de promotion ont également été organisées pour vanter les bénéfices du télétravail, dans les années 4 5 1990 mais aussi plus récemment, notamment au Japon et en Finlande . Enfin, les autorités peuvent déléguer la gestion du « thème télétravail » à une structure ad hoc : Japan Telework Association au Japon, Belgian Telework Association en Belgique… Enfin, la diffusion des TIC – à la base de l’essor du télétravail – est souvent encouragée par les gouvernements étrangers. Outre le soutien à l’acquisition d’équipements informatiques, le Japon, la Corée du Sud et la Suède investissent dans les 1 La Belgique a adopté le même type de mesures : les entreprises peuvent accorder une majoration à la rémunération des télétravailleurs à domicile, dans la limite de 10 % du salaire, sans avoir à s’acquitter d’impôts ou de contributions sociales. 2 Notons que de la même manière, rien n’empêche actuellement un télétravailleur français d’indiquer, lors de sa déclaration d’impôt sur le revenu, comme frais réels les coûts de transport, de chauffage, etc., liés à une activité en télétravail… 3 Turku School of Economics, Better job satisfaction through quality of work life; How can telework help?, rapport pour le ministère de l’Emploi et de l’Économie, avril 2009. 4 Le « Plan pour doubler le nombre de télétravailleurs » de 2007 a suggéré de sensibiliser les décideurs, de décerner des récompenses et d’organiser des conférences internationales sur le sujet. 5 « Le 5 octobre 2006, le Conseil d’État a arrêté les objectifs de la politique de la société de l‘information pour la période 2007-2013. L’un de ses objectifs consiste en la promotion du télétravail. Dans le pro- gramme gouvernemental, l’importance du télétravail a alors été soulignée, afin notamment de développer les régions les moins densément peuplées et les plus isolées. Suite à cette décision du Conseil d’État, le ministère du Travail a lancé une campagne d’information sur le travail en ligne et le télétravail, le er 10 décembre 2007. Cette campagne, effective jusqu’au 1 septembre 2008, avait pour objectif de présenter le télétravail comme une modalité flexible d’organisation du travail. Des articles en ligne – étayés par des statistiques et des études récentes – présentaient les atouts du télétravail et son impact sur la productivité, la qualité de vie au travail, le développement régional et l’environnement. » Source : Mission économique d’Helsinki. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 88 - www.strategie.gouv.fr
  • 89. infrastructures numériques (fibre optique, réseaux hertziens, etc.). Les télécentres ont également été développés dans plusieurs pays. Dès les années 1980, les premières expériences de bureaux satellitaires ont eu lieu au Japon (bureaux de NEC et NTT dans la ville de Kichijoji dès 1984). Par la suite, dans les années 1990, des télécentres ont été implantés dans les territoires peu peuplés d’Allemagne (programme Bayern Online sur la période 1996-2000) tandis que l’Autriche disposait aussi de ses Telehaus ou Telezentrum, accueillant seulement 2 % des télétravailleurs autrichiens. À la même période, le principe de « telecottages » suédois a essaimé au Royaume-Uni, qui a compté jusqu’à 200 télécentres organisés en réseau. Plus tard, au début de notre décennie, des télécentres ont été créés aux États-Unis – de manière informelle dans les bâtiments publics ou de manière plus structurée autour de Washington D.C. Enfin, 1 en 2009, l’Australie a mis en place un réseau de 100 télécentres tandis que la Corée du Sud étudie le déploiement à partir de 2011 d’espaces mutualisés de travail administratif intitulés Smart Work Centers. Les télécentres ont parfois connu des échecs rapides (aux Pays-bas, cessation d’activité du « Your-near-home-office » en 1999 et du projet « D-Office » en 2001) ou ont disparu sous l’effet du développement des TIC mobiles (exemple des télécentres japonais en zones périurbaines). L’exemple du plan japonais pour le développement du télétravail Le Japon considère le télétravail comme une réponse à l’accélération du vieillissement de sa population, qui devrait compter en 2030 près de 32 % de citoyens de plus de 65 ans, contre 20 % en 2005. Le gouvernement japonais voit là aussi un moyen d’améliorer la flexibilité du marché du travail et de préserver la compétitivité de l’économie, de concilier vie professionnelle et vie personnelle (soins d’enfants ou de proches âgés), de diminuer les émissions de CO2 et d’aménager le territoire. Pour ce faire, le gouvernement japonais (Cabinet Office du Premier ministre) a initié en 2007 son « plan pour doubler le nombre de télétravailleurs », avec un objectif au niveau national (de 10 % de télétravailleurs en 2005 à 20 % en 2010), relayé par les structures au niveau régional. Les principaux points de ce plan sont les suivants : – mise en place des systèmes de télécommunication ad hoc : développement d’un système de télétravail type applicable à plusieurs sociétés ; – mise en place d’un environnement réglementaire favorable : amélioration de la connaissance du guideline sur le télétravail à domicile, possible révision des standards d’application de l’assurance chômage pour les télétravailleurs à domicile, etc. ; – développement de la promotion du télétravail : organisation de séminaires, création d’un prix aux entreprises introduisant le télétravail, etc. ; – soutien du télétravail par catégorie de population : • contrats de type contractuel (personne employée) : introduction d’un guide de bonnes pratiques sur la sécurité informatique pour le télétravailleur, mise en place d’un centre de conseillers pour le télétravail, etc. ; • femmes avec enfants : aide à la recherche d’un emploi ; aide dans la création d’entreprise ; • personnes âgées et personnes issues du baby-boom. 1 « Le gouvernement du Western Australia a mis en place au début de cette année un réseau de 100 télé- centres destinés avant tout à fournir un accès à l‘information aux communautés isolées grâce à des possibilités d’accès par Internet à différents sites des gouvernements fédéral et fédérés. Par extension, les équipements mis à disposition ainsi que les accès à Internet peuvent être utilisés à des fins commerciales en pratiquant notamment le télétravail. » Source : Mission économique de Canberra. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 89 - www.strategie.gouv.fr
  • 90. Source : Japan Cabinet Office, Mission économique de Tokyo, analyse CAS 3.2. Les télécentres ont un rôle à jouer dans les zones périurbaines et rurales, à condition que les initiatives prennent en compte les besoins des utilisateurs locaux Les projets de télécentres datent des années 1980 Les premiers projets de télécentres remontent aux années 1980 et sont le fait des entreprises japonaises du secteur des TIC (NEC, NTT). En France, dès les années 1990, le télétravail a été imaginé comme un outil d’aménagement du territoire : la DATAR a ainsi lancé son premier appel d’offres pour la création de télécentres en 1990, suivi d’un deuxième en 1992, puis d’un troisième en 1993. En 2005, la DIACT a émis un appel à projets visant à soutenir la création par les collectivités territoriales de 100 télécentres en deux ans. Dans l’ensemble, les télécentres français ont connu un succès mitigé À l’étranger, les télécentres mis en place dans les années 1990, que ce soit au Japon, en Allemagne, en Autriche ou au Royaume-Uni, ont disparu : à mesure que les ménages s’équipaient en TIC à domicile, la valeur ajoutée des télécentres « traditionnels », ne proposant qu’un accès à l’Internet, s’est progressivement réduite. Il semblerait que seuls les télécentres états-uniens – en nombre très restreint et 1 réservés aux fonctionnaires dans leur version « officielle » – et français soient encore 1 Des centres de proximité (« Community Centers »), mis en place à l’initiative des habitants, peuvent faire office de télécentres « informels » aux États-Unis comme au Canada ; ils se trouvent dans des bâtiments ouverts au public (églises, écoles…). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 90 - www.strategie.gouv.fr
  • 91. en activité. L’Australie et la Corée du Sud développent actuellement un réseau de télécentres sur leur territoire. En France, une trentaine seulement de télécentres seraient en fonctionnement en 2009, quand les objectifs initiaux de l’appel à projet de la DIACT de 2005 était de 100, avec mise à disposition de 1 000 postes de travail à l’horizon 2007. Par ailleurs, 1 les espaces publics numériques (EPN) , plus nombreux, semblent rarement réunir les conditions adaptées au télétravail : taille insuffisante des locaux, configuration en openspace inadaptée2, solutions informatiques pour le grand public et non professionnelles, sécurité des systèmes d’information incertaine doublée parfois de 3 l’impossibilité d’établir des connexions sécurisées de type VPN … Un soutien aux télécentres nécessite une implication plus forte des pouvoirs publics, qui doit s’appuyer sur les attentes et initiatives locales Les télécentres doivent donc être redynamisés (moyens immobiliers et techniques supplémentaires, formation des personnels, mise en réseau plus importante au niveau national, actions de promotion) et intégrer les EPN qui satisfont aux critères de la DIACT. Les zones rurales et périurbaines présentent le potentiel le plus 4 5 important ; les télécentres dédiés (IBM , Regus …), situés en banlieue parisienne, semblent procurer un service satisfaisant, tout en étant rentables. Dans les zones rurales, le réseau des accès collectifs aux infrastructures et aux équipements TIC pourra être revitalisé en vue d’attirer et d’accueillir des télétravailleurs, dans une logique d’aménagement du territoire et de revitalisation de zones délaissées. Les cibles sont essentiellement des travailleurs indépendants ou des TPE. Étant donné les progrès constants en équipement TIC des particuliers et l’amélioration des infrastructures haut débit, un EPN ou un télécentre ne sera attractif que s’il apporte une véritable valeur ajoutée. Dans les zones urbaines et périurbaines, on observe un réel besoin et des attentes fortes pour des espaces d’accueil de télétravailleurs. C’est notamment le cas dans les « banlieues dortoirs » d’Île-de-France, qui abritent de nombreux travailleurs ayant des temps de transport souvent supérieurs à 3 heures par jour. Les avantages de ces télécentres résident dans l’amélioration de l’emprunte carbone de l’entreprise, dans la réduction des transports et de la congestion, dans les gains de productivité et sur les 1 Il faut distinguer les télécentres des espaces publics numériques (EPN) : ces derniers proposent des activités d’initiation et de formation aux TIC sans disposer toujours des fonctionnalités propres aux télécentres (salles de réunions, vidéoconférence, etc.). Alors que les EPN (avec le réseau des cyberbases de la Caisse des Dépôts et Consignations) comprennent environ 4 000 lieux répartis sur l’ensemble du territoire, les télécentres ne seraient qu’une trentaine. 2 Le cahier des charges de la DIACT stipule par exemple qu’un télécentre doit disposer de bureaux fermés d’au moins 9 m². 3 Virtual Private Network. 4 IBM France, refusant la logique du télétravail entièrement à domicile, a mis en place depuis une dizaine d’années sept télécentres dédiés à l’entreprise (entre 50 et 100 postes pour télétravailleurs nomades), répartis en Île-de-France (Noisy-le-Grand, Marne-la-Vallée, etc.). Ce changement d’organisation a nécessité un accompagnement des équipes et du management. Le taux d’occupation de ces télécentres serait d’environ 80 %. 5 La société privée britannique Regus (chiffre d’affaires de 557 millions de livres, 1 000 centres d’affaires dans 76 pays et 450 villes, ouverture récente de 112 centres d’affaires pour un investissement de 69,5 millions) propose à Paris et en première couronne 9 télécentres disposant de bureaux individuels, open space ou partagés, pour la direction, pour les équipes, etc. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 91 - www.strategie.gouv.fr
  • 92. coûts immobilier et fiscaux (relocalisation des sites, exonérations liées aux zones de développement prioritaire), dans l’amélioration de l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, ou encore dans l’augmentation des revenus potentiels des zones de développement prioritaire. Une initiative ambitieuse telle que le projet ELMUT du Conseil général de l’industrie, 1 de l’énergie et des technologies (CGIET) pourrait également être examinée . Les bonnes pratiques dans les télécentres existants pourraient être identifiées afin d’être 2 dupliquées sur l’ensemble du territoire. À ce titre, les télécentres du Vercors et du 3 Cantal représentent des exemples intéressants. Dans tous les cas, des études de faisabilité poussées, prenant en compte les besoins locaux, seraient à mener en amont, à l’initiative des collectivités territoriales, en partenariat avec les élus locaux. 3.3. La crise économique et la pandémie grippale peuvent constituer deux leviers conjoncturels, puissants et inédits, au développement à long terme du télétravail Face à la crise économique, de nombreuses entreprises et administrations cherchent à réduire leurs dépenses Confrontées au besoin de réduire leurs frais de fonctionnement, les entreprises ont recours au télétravail pour diminuer les déplacements des collaborateurs (classes affaires des compagnies aériennes, etc.) et les charges immobilières. Un passage efficace en télétravail dépend fortement des secteurs et des pays. Ainsi, Cisco aurait déjà atteint un fort taux de vidéoconférence (jusqu’à 30 % des colla- borateurs) et aurait réduit de près d’un tiers les frais de déplacement en avion de ses collaborateurs. Reste à savoir si ces situations perdureront après la crise économique. Il existe peu de précédents puisque seules quelques crises nationales ou régionales (2001 en Asie après l’éclatement de la bulle Internet) ont eu lieu depuis la démocratisation du télétravail. Une mise en place précipitée du télétravail risque d’avoir les effets inverses de ceux escomptés, surtout s’il est subi. Les gains à court terme de charges immobilières et de transport pourraient être annulés par des pertes à moyen terme (départs de collaborateurs, « relocalisation » après un conflit social). D’où la nécessité, lorsque le télétravail est envisagé, de s’inspirer, même en cas d’urgence, des bonnes pratiques. Durant la pandémie grippale, la continuité de l’activité économique pourrait passer partiellement par le télétravail Les coûts économiques de la grippe H1N1 sont estimés à plusieurs dizaines de milliards d’euros. Or, dans une telle situation de pandémie grippale, le télétravail fait 1 Le projet ELMUT (Espaces locaux mutualisés de télétravail en 2012) vise à créer 10 000 espaces adaptés au télétravail. Ceux-ci disposeraient des infrastructures sécurisées de haute qualité (salles de téléréunions avec téléprésence, très haut débit), seraient aptes à recevoir des agents publics ou privés selon un mode de réservation simple. 10 000 e-apprentis seraient chargés de faire fonctionner ces centres. 2 www.centresdappels.vercors.org/Economie/telespace-vercors.html. 3 www.cybercantal.fr/438/telecentres-cybercantal-presentation-information-teletravail-teletravailleur- cybertravailleur.html. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 92 - www.strategie.gouv.fr
  • 93. partie des outils permettant d’assurer la continuité de l’activité économique. Suite à l’ouragan Katrina, les États-Unis ont mis en place un « Plan de continuité de l’activité économique et des opérations » destiné aux agences fédérales, arguant qu’on « ne peut pas estimer à quel point la continuité de l’activité économique est importante ». Les pouvoirs publics de nombreux autres pays – Belgique, France par exemple – ont ainsi informé la population et les entreprises sur la possibilité de recourir au télétravail. De fait, de nombreuses entreprises et administrations sont contraintes de passer au télétravail pour assurer leur activité. Des entreprises du secteur des télécommu- nications font ainsi de la grippe A un argument de vente pour des solutions de télétravail (clé 3G avec connexion illimitée de quelques mois), en espérant que les services vendus à cette occasion seront maintenus par la suite. Si les grandes entreprises disposent des ressources internes pour mettre en place le télétravail (DRH, juristes, DSI), certaines organisations de plus petite taille semblent également prêtes à 1 l’adopter, même si en 2009 seules 6 % des TPE/PME le pratiqueraient . Comme pour la crise économique, on ne dispose d’aucun précédent sur la pérennité d’un télétravail mis en place pour cause de pandémie. Suite à la grippe aviaire de 2004, un plan de lutte a été mis en place et s’est traduit par la circulaire DGT 2007/18 du 18 décembre 2007. Cette épidémie n’ayant pas touché la France, il est impossible de prévoir avec certitude si la grippe A contribuera à développer le télétravail en France. Toutefois, aucune des entreprises interrogées dans le cadre de l’étude n’a évoqué la réintroduction des plans de continuité d’activité mis sur pied au moment de la grippe aviaire. 3.4. Le « retour sur investissements » du télétravail est maximal sous certaines conditions Le pic de productivité est atteint lorsque le télétravail est pratiqué entre un et deux jours par semaine 2 Une étude menée par le Danish Technological Institute montre que l’introduction d’une part de télétravail à domicile augmente la productivité totale de l’employé. Cette productivité est optimale pour 13 jours de télétravail par mois mais diminue ensuite pour retomber, au-delà d’un certain seuil de jours, au-dessous du niveau de productivité sans télétravail (figures n° 16 et n° 17). 1 Cabinet Adwise, « Les TPE-PME et le télétravail », étude réalisée pour le compte de Keyyo Business, septembre 2009. L’enquête, réalisée par téléphone, a porté sur un échantillon de 501 décisionnaires en TPE/PME. 2 Danish Technological Institute, Labour Productivity and Teleworking, mai 2005. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 93 - www.strategie.gouv.fr
  • 94. Figure n° 16 : Productivité en fonction du nombre de jours télétravaillés par mois Base 100 = Travail au bureau 110 Productivité du télétravail 105 100 95 90 85 80 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30 Nombre de jours télétravaillés par mois Source : Danish Technological Institute, analyse Roland Berger Figure n° 17 : Évolution de la productivité en fonction de la part du temps passé en télétravail Zone de productivité supérieure au travail Productivité traditionnel Productivité Niveau maximal de productivité Produ c tivité to ta le Niveau de productivité Zone de productivité normal au bureau moindre que travail traditionnel margina le bureau Productivité Produc tivité m arginale domic ile 0% au domicile Mix bureau-domicile optimal 100% au domicile 100% au bureau 0% au bureau Source : Danish Technological Institute, analyse Roland Berger Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 94 - www.strategie.gouv.fr
  • 95. Les gains financiers sur les charges immobilières ne sont significatifs qu’à partir d’un certain seuil de télétravailleurs tandis que les autres gains, probablement plus importants, sont difficilement quantifiables Au-dessous d’un certain seuil de télétravailleurs, les gains immobiliers semblent négligeables, puisque la libération de quelques postes dispersés ne permet pas de fermer une unité de travail entière. Figure n° 18 : Exemple d’économies de charges immobilières, selon certaines hypothèses* (en pourcentage des coûts immobiliers) Gains 2 jours de 40% télétravail par semaine ue riq h éo st Ca 20% 1 jour de e télétravail thé oriqu Cas par semaine 25 50 75 100 Part des salariés en télétravail [%] (*) Dans le cas n° 1 (courbe bleue), on suppose que 100 % des salariés sont en télétravail 1 jour par semaine et sont présents dans les locaux de l’entreprise les 4 jours restants. Dans le cas n° 2 (courbe jaune), on considère que 70 % des salariés sont en télétravail 2 jours par semaine et sont présents dans les locaux de l’entreprise les 3 jours restants. Dans les deux cas, on suppose que les jours télétravaillés sont répartis de façon homogène entre les salariés et entre les jours de la semaine (c’est-à-dire qu’il n’y a pas un jour où aucun salarié n’est là). Source : analyse Roland Berger Ainsi, selon certaines hypothèses assez fortes, on peut montrer que la mise au télétravail de 100 % des salariés, à raison de 1 jour par semaine, engendre une économie de coûts immobiliers de 20 % maximum, contre 28 % maximum lorsque 70 % des salariés télétravaillent à raison de 2 jours par semaine. Il existe d’autres gains pour l’employeur, difficiles à estimer précisément car propres à chaque organisation. Le télétravail réduit en effet l’absentéisme, augmente la productivité et dans certains cas la créativité des collaborateurs. Plus satisfaits de leurs conditions de travail, ils sont plus motivés pour exercer leurs fonctions. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 95 - www.strategie.gouv.fr
  • 96. 4. Les facteurs de développement et les cinq facteurs clés de succès d’un projet de télétravail Comme pour les freins, on peut procéder à partir des auditions effectuées à une analyse des facteurs de développement du télétravail (tableau n° 17). Tableau n° 17 : Analyse des principaux facteurs de développement du télétravail Volonté politique de l’Europe (ACE 2002…) JURIDIQUE POLITIQUE Pression politique en faveur d’une organisation du travail plus souple ET Prise en compte du télétravail comme élément favorable d’une politique de développement durable Aspiration sociétale forte pour un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle CULTUREL ET SOCIAL Globalisation des entreprises et croissance du travail en équipe multi-sites « Buzz » médiatique autour du télétravail et lobbying des réseaux et groupes de télétravailleurs dans le monde Impact favorable sur le pouvoir d’achat Développement rapide des TIC ÉQUIPEMENT Investissements dans les infrastructures haut débit comme élément de la politique d’aménagement du territoire Croissance de l’Internet haut débit dans les foyers Baisse du coût total des équipements nécessaires au télétravail Prise de conscience des avantages liés au télétravail MANAGEMENT Communication sur le télétravail en tant qu’avantage concurrentiel Développement d’une politique RH globale favorisant le bien-être au travail Utilisation du télétravail comme outil de réorganisation de l’entreprise Source : entretiens, analyse Roland Berger L’examen des facteurs de développement ci-dessus, doublée de l’analyse croisée du télétravail en France et à l’étranger, ainsi que dans le secteur privé et la fonction publique, fait apparaître in fine cinq facteurs clés de succès dans sa mise en œuvre 1 et sa pratique, que des bonnes pratiques viennent compléter. 1 Rôle faible Rôle important. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 96 - www.strategie.gouv.fr
  • 97. Facteur clé n° 1 : Produire un effort important en matière de communication envers les employés et le management Effort de communication • Plan de communication interne • Organisation de retours d'expérience de la part des télétravailleurs du "pilote" • Brochure sur les droits et devoirs du télétravailleur et du manager • Sponsor DG • Échange des pratiques entre entreprises (retour sur expériences) Le but du plan de communication est de faire connaître le télétravail en mettant notamment l’accent sur la compatibilité de sa pratique avec la dynamique des équipes et les avantages réels pour les salariés. Le soutien de l’institution doit être visible et exprimé pour signifier un a priori positif aux managers et démontrer que le télétravail est une pratique « normale ». Le télétravail pâtit généralement d’un décalage entre l’idée que s’en font les salariés et managers et la réalité de sa pratique. S’appuyer sur des exemples concrets (retours d’expérience d’autres entreprises et des pilotes) permet de donner un aperçu réaliste de ce qu’est le télétravail et de rétablir des idées reçues erronées. L’édition d’une brochure concourt également à ancrer le télétravail dans le concret de sa mise en œuvre matérielle et à se défaire d’une vision idéalisée. Facteur clé n° 2 : Faire évoluer le mode de management en passant notamment du concept de « management présentiel » à celui de « management par objectifs » Nouveau modèle de management • Mode de management par objectif • « Espaces » d’échanges prévus à l’avance ou systématiques • Développement d’une confiance réciproque entre le manager et ses équipes • Trouver le bon équilibre entre les jours de présence au bureau et les jours télétravaillés • Assurer la présence impérative du télétravailleur lors des principaux événements / réunions de l’entreprise • Surveiller les évaluations du télétravailleur pour lui éviter d'être pénalisé • Prise en considération par le management des situations de télétravail d'une partie de l'équipe Le télétravail n’est un mode de travail efficace, et dont les salariés et les organisations tirent les pleins avantages, que lorsqu’il s’inscrit dans un mode de management moderne. Pouvoir quantifier et suivre le travail effectué par les salariés, et fixer des objectifs en laissant un degré de liberté pour les atteindre permet d’introduire de la flexibilité au travail. Pour cela, la confiance et un cadre propice aux échanges sociaux dans l’équipe sont nécessaires. Il faut assurer la présence concomitante des membres d’une équipe, et l’intégration du télétravailleur à la vie de l’équipe (réunions) même en dehors des échanges purement productifs (événements de l’entreprise). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 97 - www.strategie.gouv.fr
  • 98. Facteur clé n° 3 : Investir dans un équipement informatique et dans l’ergonomie du poste de travail à domicile Équipement adapté • Équipement suffisant • Bonne ergonomie de l’espace de travail • Adaptation du logement dans le cas de télétravail à domicile (logements "salubres") • Visite de l'entreprise au domicile (si le collaborateur le souhaite) • Conditions de prise en charge Le télétravail s’appuie par définition sur l’usage de matériel informatique. Celui-ci doit être performant et fiable pour permettre de travailler dans des conditions correctes. Dans les cas de travail à domicile, l’organisation doit s’assurer que l’environnement de travail est conforme à la réglementation et aux standards en place dans l’entreprise. Cette vérification permettra à l’employeur, en cas d’accident ou de panne, d’être couvert et de limiter le risque juridique couru. L’équipement en mobilier ergonomique d’un espace dédié pendant les heures de travail à l’activité professionnelle permet notamment au salarié de « se sentir au travail ». Différents niveaux de prise en charge de ces points par l’employeur existent, le plus important étant de spécifier clairement les conditions appliquées lors de la mise en place du télétravail. Facteur clé n° 4 : Disposer d’un cadre légal pragmatique Cadre légal pragmatique • Outils faciles à utiliser (e.g. contrats types) • Cadre réglementaire clair (périmètre de responsabilité de l’entreprise) • Illustrations et cas (benchmark et études : résultats et impacts) • Accord avec les IRP • Charte du télétravailleur et de son manager Les pays étudiés ne font pas mention du télétravail dans leur Code du travail. Le cadre qui s’applique est celui des accords collectifs, lorsqu’ils existent. L’apport du cadre légal dans le développement du télétravail est de préciser de façon pragmatique les points durs pouvant constituer des sources d’incertitude, par exemple le périmètre de responsabilité de l’employeur en cas d’accident du travail ou de sinistre au domicile. Des études de cas précisant la démarche à suivre dans les cas de litige les plus courants posent un cadre rassurant pour les responsables d’entreprises. De plus, la mise en œuvre du télétravail est grandement facilitée, surtout pour les petites entreprises, par l’existence de formulaires types clairs et faciles à utiliser pour établir les avenants au contrat de travail, les accords d’entreprise et des chartes de bonne conduite. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 98 - www.strategie.gouv.fr
  • 99. Facteur clé n° 5 : Cibler les activités susceptibles d’être réalisées en télétravail Bon ciblage de la population • Sélection des profils (niveau d’expérience et d’ancienneté dans la société, personnalité, etc.) • Analyse des fonctions et tâches adaptées au télétravail • Effort de formation adapté • Effort d'explication vis-à-vis du management et du salarié L’analyse de la télétravaillabilité est essentielle pour garantir la réussite de ce mode d’organisation. En effet, il faut au préalable s’assurer que les tâches à accomplir se prêtent à ce mode d’organisation et que la personne qui les accomplit soit capable de travailler dans ces conditions. Il convient donc d’établir des critères de télétravaillabilité des tâches et des fonctions et cibler les salariés qui, par leur intégration dans l’entreprise, leur autonomie au travail et leur personnalité sauront télétravailler avec succès. Lorsque le passage au télétravail d’un employé a été décidé, un effort de formation doit être fait pour veiller à sa maîtrise des outils informatiques nécessaires (notamment pour la sécurisation des données) et surtout pour assurer le bon fonctionnement de l’équipe : le manager et le salarié doivent être formés à ce nouveau mode d’interaction. A contrario, les entreprises choisissant de pousser une politique de développement du télétravail peuvent faire preuve d’une grande créativité et mettre en œuvre ce mode d’organisation du travail au sein de populations qui a priori en semblaient exclues. Ces cinq facteurs clés permettent d’identifier les leviers à actionner par la puissance publique. Les recommandations suivantes en sont donc largement inspirées. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 99 - www.strategie.gouv.fr
  • 100. Depuis une dizaine d’années, le télétravail se développe moins rapidement en France que dans de nombreux pays de l’OCDE. Pour surmonter les blocages spécifiques à notre pays, le Parlement a élaboré une proposition de loi que le secrétariat d’État à la Prospective et au Développement de l’Économie numérique a souhaité soutenir en adressant au Centre d’analyse stratégique une saisine portant sur l’étude des abus recensés à l’étranger en la matière. Des consultations et des auditions réalisées, il ressort que le développement du télétravail est moins contraint par la technologie et le cadre juridique que par des blocages organisationnels liés au manque d’information et de formation des employés comme des dirigeants. L’analyse fait émerger sept messages clés. 1. Depuis au moins dix ans, la France est en retard sur les principaux pays de l’OCDE, en particulier pour le télétravail dans l’administration. Les principaux leviers ne sont pas d’ordre juridique : évolution de la culture managériale et de l’organisation du travail, meilleure connaissance des avantages permis par le télétravail, besoin d’infrastructures numériques à haut débit symétrique, diffusion et formation aux TIC. 2. Le télétravail – et plus généralement les TIC – bouleverse les relations de travail (concepts de lieux et de temps de travail, nature du travail intellectuel, nature du lien de subordination, etc.). Le télétravail participe à la flexibilité du travail, avec une efficacité maximale s’il est pratiqué un à deux jours par semaine. 3. Le télétravail doit bénéficier de la règle du double volontariat et de la confiance entre les parties plutôt que d’un cadre juridique trop contraignant. 4. La proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale constitue un socle propice au développement du télétravail. Une clarification pourrait toutefois intervenir sur la présomption d’accident du travail et sur la prise en charge de l’assurance. 5. Le télétravail est susceptible de concerner potentiellement jusqu’à 40 % ou 50 % des emplois à 10 ans. 6. Dans aucun des pays de l’OCDE étudiés n’ont été rapportés des exemples de télétravail subi lors d’un congé maternité, d’un arrêt maladie ou accident du travail ; aucun pays n’a légiféré spécifiquement sur ces sujets. Toutefois, le télétravail peut être source de progrès social avant et/ou après le congé maternité. Par ailleurs, pour certaines maladies, en accord avec l’entreprise et si le salarié le souhaite, il pourrait être envisagé de réfléchir à un certificat médical d’aptitude Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 100 - www.strategie.gouv.fr
  • 101. au télétravail, délivré par un médecin, permettant au salarié de poursuivre son activité. 7. Le télétravail n’est pas spontanément évoqué comme moyen de favoriser l’emploi des seniors, ni en France ni à l’étranger (manque de formation aux TIC, besoin pour les retraités de se socialiser par le travail). De ces analyses sont issues dix-neuf recommandations, déclinées parfois en plusieurs mesures et réparties selon quatre axes principaux. La promotion du télétravail est un des axes majeurs car les actions de sensibilisation contribuent à faire évoluer les mentalités au sein des organisations. Le déploiement des infrastructures numériques et la diffusion des technologies sont des prérequis à l’essor du télétravail ; toutefois, aucune recommandation n’a été émise sur le thème des infrastructures, qui n’entre pas dans le cadre de ce rapport. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 101 - www.strategie.gouv.fr
  • 102. AXE 1 : Promouvoir le télétravail et former les acteurs Cet axe est essentiel au développement du télétravail. Les actions de communication et de promotion font connaître ses avantages auprès de l’ensemble des acteurs ; elles renforcent également l’effectivité du droit. La formation permet de surmonter les blocages pratiques – psychologiques, techniques et organisationnels – liés à la mise en place du télétravail. 1. Communiquer auprès du grand public Constat La France est en retard par rapport aux autres pays de l’OCDE dans la mise en œuvre et même dans la connaissance des possibilités offertes par le télétravail (voir les chiffres de l’enquête SIBIS de 2002). Or la demande de télétravail émane souvent des salariés, et non de la hiérarchie, qui y voit un sujet complexe, non prioritaire, pour lequel elle est peu formée. Il faut donc améliorer la sensibilisation à destination des salariés, qui initient les projets de télétravail, et des dirigeants, pour éviter qu’ils ne les bloquent. Mesures 1 Promotion du télétravail par des actions de communication : o campagne de communication grand public sur les possibilités du télétravail ; o campagne de communication ciblée sur certains secteurs et catégories de salariés identifiés dans le rapport (ruraux, seniors, métiers à fort potentiel de télétravail, jeunes parents, etc.) ; o lisibilité des offres d’emplois en télétravail (Pôle Emploi, Maisons de l’emploi, sites professionnels de recrutement) ; o initiative nationale « un jour par semaine, je travaille chez moi ». Exemples Durant les années 1990, de nombreux pays ont assuré la promotion du télétravail auprès du grand public. L’Allemagne a mis en place les campagnes « Initiative Télétravail », « Télétravail pour les grands invalides » ou « Télétravail dans les PME ». Dans le cadre de sa stratégie numérique de 2007 (« New IT Reform Strategy »), le gouvernement japonais a également assuré la promotion du télétravail auprès de la population. Plus récemment, en 2009, la Finlande envisage de lancer une nouvelle campagne nationale d’information sur ce thème1, après une première campagne menée entre décembre 2007 et septembre 2008 qui avait présenté le télétravail comme une modalité flexible d’organisation du travail. 1 Turku School of Economics, Better Job Satisfaction Through Quality of Work Life – How Can Telework Help?, rapport au ministre de l’Emploi et de l’Économie, avril 2009. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 102 - www.strategie.gouv.fr
  • 103. 2. Tenir une conférence de haut niveau sur le télétravail, fortement soutenue par les pouvoirs publics, afin de sensibiliser les cadres dirigeants et l’encadrement intermédiaire Constat L’implication des pouvoirs publics est un élément indispensable pour développer le télétravail. Ce constat de Pierre Morel-à-L’Huissier1, qui date de 2006, est toujours d’actualité. En France, par comparaison avec les pays les plus en pointe, le télétravail n’a pas toujours bénéficié d’un engagement fort et pérenne de la part des pouvoirs publics. L’encadrement intermédiaire apparaît souvent réticent à adopter les projets de télétravail suggérés par les salariés. Dans le même temps, l’impulsion initiale à la mise en place du télétravail provient rarement de la hiérarchie : il n’est pas considéré comme une priorité car il est rarement source de bénéfices opérationnels à court terme. Mesures 2 Conférence de haut niveau regroupant les partenaires sociaux et les décideurs (élus, PDG, DRH, DSI, directeurs d’administration, etc.), accompa- gnée d’une forte implication des pouvoirs publics (présidence par une personnalité politique de premier rang). Le télétravail pourrait par exemple ouvrir une conférence portant plus généralement sur les mutations du monde du travail face à la crise économique. Sensibilisation de l’encadrement intermédiaire et des élus (gestion des administrations territoriales) aux questions du télétravail, éventuellement dans le cadre d’une sensibilisation plus large (droit du travail et droit des TIC, flexibilité du travail). o Implication des associations et syndicats professionnels (CIGREF, G9+, AFEP, APEC, MEDEF, club de dirigeants, etc.) et séminaires au Parlement ; o Présentation des gains opérationnels possibles à moyen et long terme (augmentation de la productivité, diminution de l’absentéisme, etc.). Exemples Au Japon, dans le cadre de la « New IT Reform Strategy » de 2007, des séminaires et symposiums internationaux ont été organisés pour promouvoir le télétravail. Des études de cas et des guides de bonnes pratiques ont été présentés aux décideurs. En Suède, des séminaires ont eu lieu entre 1996 et 2004 dans le cadre d’une plate-forme d’échanges sur le télétravail. 3. Créer un site web institutionnel sur le télétravail exploitant tout le potentiel du web 2.0 et de l’interactivité Constat De l’avis de la plupart des experts, les cadres juridique et technique actuels sont suffisants pour la mise en œuvre du télétravail. Toutefois, des blocages culturels sub- sistent, entretenus par l’absence de source d’information de référence sur le télétravail2. 1 Pierre Morel-à-L’Huissier, Du télétravail au travail mobile, rapport au Premier ministre, 2006. 2 Actuellement, les sources d’information relatives au télétravail sont éparpillées et de qualité diverse, ou à fins commerciales. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 103 - www.strategie.gouv.fr
  • 104. Mesures 3 Création d’un site de référence sur le télétravail, aux fonctionnalités classiques (information juridique, guides de bonnes pratiques, forum, exemples de contrat de travail type, FAQ) et avancées (hotline, calculateur en ligne des coûts-bénéfices du télétravail pour l’organisation, interaction Web 2.0, simulations par monde virtuel, voire e-formation au télétravail utilisant des jeux sérieux). L’élaboration d’un tel site pourrait être confiée à un service de l’administration (SIG…) ou à une association (AFTT, ANDT…) recevant délégation de service public. Un appel d’offres (du type « plates-formes web 2.0 ») pourrait être un outil pertinent. Exemples De tels sites existent à l’étranger : www.telework.gov ; www.telework.net.au, www.telewerkforum.nl, www.ework.ie... Bonnes pratiques étrangères Caractéristiques possibles de www.e-travail.gouv.fr • Fonctionnalités classiques : présentation du télétravail pour les employés, managers intermé- diaires, cadres dirigeants, salariés indépendants (secteurs privé et public) ; FAQ sur le télétravail ; publications classées par thèmes (organisation, aspects juridiques, technologies) avec actualités hebdomadaires ; bibliographie aussi complète que possible… • Fonctionnalités avancées : recherche, forums et zone de témoignage, sondages en ligne, hotline gratuite (orientation vers des experts, conseils élémentaires, etc.), carte interactive (coor- données des télécentres, des experts du télé- travail, des correspondants syndicaux ou en entreprise sur le télétravail, etc.), « calculateur en ligne des bénéfices » liés au télétravail, en fonction de divers paramètres (nombre d’employés, surface de bureau, activité…) et donnant les différents types de bénéfices (gains immobiliers, réduction des émissions de gaz à effet de serre…), modules de formation en ligne (exposé et vérification des connaissances, jeux sérieux…). • Site multilingue (français, anglais, allemand, espagnol…) pouvant servir de vitrine commerciale. 4. Former l’ensemble des acteurs au télétravail Constat Le télétravail ne fonctionne que si la confiance est instaurée entre employeur et employé. Quand bien même l’encadrement intermédiaire et les cadres dirigeants seraient convaincus de l’intérêt du télétravail, ils ne sont pas toujours formés aux enjeux juridiques, technologiques ou organisationnels associés. Cela s’explique notamment par des lacunes sur les thèmes managériaux dans les formations initiales. De même, les salariés qui souhaiteraient télétravailler n’ont pas toujours les arguments pour convaincre leur supérieur hiérarchique ni la formation pour télétravailler Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 104 - www.strategie.gouv.fr
  • 105. efficacement. Il s’agit donc de proposer des modules ou kits de formation à l’ensemble des acteurs, en s’appuyant autant que possible sur les structures existantes. Mesures 4 Mise en place de diverses offres ou kits de formation destinés à tous les acteurs de l’organisation potentiellement concernés par le télétravail : o formation professionnelle pour les dirigeants, en particulier les DRH et les DSI : modules d’e-apprentissage (web 2.0, jeux sérieux…), kits de formation, modules de sensibilisation aux nouvelles méthodes de management dans les universités et/ou les écoles d’ingénieurs et de management ; o formations spécifiques pour les salariés ou les auto-entrepreneurs, adaptées aux différents publics (seniors…), par exemple dans le cadre du CIF ou du DIF. En pratique, de telles formations peuvent revêtir plusieurs formes et/ou avoir plusieurs supports : modules de e-learning (par exemple sur le site www.e-travail.gouv.fr), kits de formation, ajout d’un thème « télétravail » dans l’offre de formation du « passeport pour l’économie numérique » du CEFAC et/ou des CCI, ajout d’un module « télétravail » dans certains stages de perfectionnement transversaux de l’AFPA, etc. Un constat des compétences informatiques nécessaires au salarié pour télétravailler pourrait être réalisé par des organismes spécialisés dans la formation professionnelle ou par le Passeport de compétences informatiques européen (PCIE) ; o formation pour les inspecteurs du travail, les conseillers de prud’hom- mes et les instances représentatives du personnel, notamment pour diffuser le cadre juridique du télétravail et pour leur donner les moyens d’accompagner les salariés dans leurs démarches ou leurs litiges ; o un « quota » de formation au télétravail pourrait éventuellement être intégré dans le taux de participation de l’employeur au financement de la formation professionnelle. Exemples Entre 1996 et 2000, le programme Bayer Online du Land de Bavière a conduit à la création de télécentres et à des actions de formation. Le Japon a ciblé les travailleurs indépendants et les personnes handicapées pour ses actions de formation professionnelle. 5. Éditer des guides de bonnes pratiques Constat Les organisations, en particulier celles de petite taille, sont parfois démunies lors de la mise en place pratique du télétravail. Mesures 5 Édition de guides de bonnes pratiques destinés aux entreprises et aux administrations, s’inspirant des guides français et étrangers existants. Ces guides seraient diffusés le plus largement possible (Maisons de l’Emploi et Pôle Emploi, CCI, partenaires sociaux). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 105 - www.strategie.gouv.fr
  • 106. Exemples De nombreux guides de bonnes pratiques existent, en France comme à l’étranger : « Code of Practice » en Irlande ; Guide de la Belgian Telework Academy ; Guide du télétravail dans la fonction publique, DGAFP, 1998 ; Guide pratique du CATRAL de 1999. Ils pourraient inspirer un guide de référence sur un site institutionnel consacré au télétravail. AXE 2 : Assurer une bonne gouvernance La gouvernance doit s’entendre comme la « structuration » des acteurs de l’organisation et des relations qui les lient. Une bonne gouvernance est importante lorsqu’il s’agit de mettre en pratique efficacement le télétravail. 6. Inscrire le télétravail comme un des critères de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) et mettre en place un « label du télétravail » Constat Les critères environnementaux et sociaux sont des éléments importants de l’image des entreprises. À moyen terme, la RSE pourrait être de plus en plus prise en compte par les investisseurs pour évaluer la valeur ou la performance d’une entreprise et par les meilleurs candidats au recrutement pour choisir leur entreprise. Mesures 6 Inscription du télétravail comme un critère dans la responsabilité sociale des entreprises, selon certains indicateurs : o per se (part de télétravailleurs dans l’entreprise et leurs caractéristiques, régularité et qualité des initiatives de l’entreprise, formation des employés et des employeurs, respect de l’ANI/de la loi…) ; o comme moyen de réduire les émissions de gaz à effet de serre (impacts du télétravail sur le bilan CO2 collectif et individuel…) ; o comme instrument de soutien aux populations les plus fragilisées face l’emploi (handicapés, seniors…). Mise en place d’un « label du télétravail », pouvant s’inspirer des bonnes pratiques étrangères, qui serait attribué aux organisations exemplaires en termes de télétravail. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 106 - www.strategie.gouv.fr
  • 107. 7. Créer un comité de pilotage de haut niveau chargé d’accompagner le développement du télétravail en France Constat Au niveau national, une structure ad hoc pourrait s’assurer du bon déroulement des négociations sur le télétravail et identifier les bonnes pratiques1. Il est également possible d’attribuer cette thématique au Conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT), créé fin 2008. Au niveau de l’organisation, l’une des conditions nécessaires à la mise en place du télétravail réside en la confiance entre tous les acteurs de l’organisation, qui doivent être associés le plus tôt possible au projet de télétravail. Mesures 7 Associer, en amont du projet2, les instances représentatives du personnel (délégués, CE, CHSCT, DS/RS…) et informer les services de l’État chargés de la politique du travail dans les départements. Au niveau national, le sujet du télétravail pourrait être mis régulièrement à l’agenda de la Commission nationale de la négociation collective (CNNC). Mettre en place un Observatoire des pratiques du télétravail, soit au sein du COCT, soit autonome et associant alors les partenaires sociaux, chargé de recenser/propager les bonnes pratiques et identifier les éventuels abus. Annuellement, et éventuellement en partenariat avec la Direction générale du Travail (DGT), cet observatoire pourrait examiner les négociations et accords intervenus sur le télétravail. Désigner un représentant interne à l’organisation chargé des questions liées au télétravail, notamment celles portant sur le Code du travail et le Code de la sécurité sociale. Négocier un contrat d’engagement des syndicats d’employeurs sur la promotion du télétravail dans les entreprises. Exemples Dans de nombreux pays étrangers, les guides de bonnes pratiques édités par les syndicats ont été repris par les acteurs de terrain. Aux Pays-Bas, les premières négociations sur le télétravail (PC-privéregeling 1998) ont eu lieu sous l’égide d’une organisation paritaire de droit privé regroupant les trois principaux syndicats d’employeurs et d’employés. 8. Développer le télétravail dans la fonction publique Constat Le télétravail est une thématique transversale pour l’État, impliquant le MINEFE/Budget, la DGAFP, voire le ministère du Travail… De fait, et bien que les chiffres manquent 1 À l’image du comité de pilotage qui a été créé dans le cadre du Plan national d’action concertée pour l’emploi des seniors 2006-2010. 2 En 2004, le Forum des droits sur l’Internet suggérait de considérer un projet de télétravail comme un « projet important » au sens de l’article L. 432-2 du Code du travail, afin que le CE ou les délégués du personnel soient obligatoirement consultés sur sa mise en place. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 107 - www.strategie.gouv.fr
  • 108. pour le caractériser, la fonction publique est en retard dans la mise en place du télétravail. Pourtant, les gains potentiels en productivité et en bien-être des fonction- naires – mais aussi en charges immobilières et en aménagement du territoire – sont non négligeables. Conformément au souhait du législateur (art. 11 de la proposition de loi adoptée le 9 juin 2009 par l’Assemblée nationale1), une mission pourrait être chargée de promouvoir l’essor du télétravail dans la fonction publique. Mesures 8 Mise en place d’une mission « Télétravail dans la fonction publique » : o pilotée directement par le ministre en charge de la Fonction publique ; o chargée de rédiger le rapport prévu par le législateur ; o devant élaborer un plan de déploiement du télétravail, s’appuyant sur quelques indicateurs simples2 permettant de mesurer régulièrement (trimestriellement ou annuellement par exemple) la diffusion du télétravail, ministère par ministère ; o pouvant dans un second temps être adossée à un programme LOLF3. Il ne s’agit donc pas principalement de modifier le statut général de la fonction publique mais d’identifier les obstacles et les postes adaptés au télétravail (en se basant par exemple sur le Répertoire interministériel des métiers de l’État) pour ensuite promouvoir les bonnes pratiques et les projets pilotes. Les initiatives de télétravail dans la fonction publique (ministère de l’Éducation nationale, ministère de la Justice, Direction générale des impôts…) et les guides existants (DGAFP…) pourraient être pris en compte. Exemples Certains pays ont déjà mené une réflexion à ce sujet : aux États-Unis, l’évaluation par l’US Office of Personnel Management4 des directeurs des agences gouvernementales fédérales prend en compte les indicateurs annuels de performance en télétravail (pourcentage de télé- travailleurs dans l’agence…). L’US OPM rend compte annuellement, devant le Congrès, des progrès du télétravail dans la fonction publique fédérale ; 1 Cet article 11 dit en substance : « dans un délai d’un an à partir de la date de promulgation de la présente loi, le gouvernement présente un rapport au Parlement sur les mesures visant à promouvoir et à développer le télétravail au sein des administrations publiques ». Le présent rapport du Centre d’analyse stratégique ne peut se substituer à une telle mission mais peut en préciser les principales lignes directrices. 2 De tels indicateurs, à identifier par un groupe de travail, pourraient être, à titre indicatif : – évolution du taux de télétravailleurs par rapport au potentiel mesuré ex ante (cf. calculateur en ligne des bénéfices du télétravail) ; – évolution du taux de « formation » des fonctionnaires aux problématiques du télétravail (enquêtes internes, sondages externes…) ; – évolution du nombre de télétravailleurs et de référents télétravail nommés au sein de chaque ministère ; – évolution des résultats des manageurs intermédiaires aux tests de formation en ligne (cf. recom- mandation sur le site www.e-travail.gouv.fr qui pourrait héberger des contenus pédagogiques). Ces indicateurs pourraient être identiques à ceux du secteur privé (inscription dans une charte du télétravail ou dans la RSE). 3 Reste à déterminer la faisabilité dudit programme, par exemple au sein des missions « Administration générale et territoriale » ou « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ». 4 L’US OPM est l’équivalent de la DGAFP aux États-Unis. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 108 - www.strategie.gouv.fr
  • 109. au Japon, 36 mesures ont été imaginées pour développer le télétravail, déclinées ministère par ministère ; la législation sud-coréenne prévoit des dispositions particulières pour la fonction publique ; suite à une expérimentation sur quelques centaines de fonctionnaires, l’Espagne a mis en place un programme de télétravail pour l’ensemble de la fonction publique en 2007. 9. Créer un réseau de « référents du télétravail » au sein des organisations Constat Le télétravail est un sujet à la convergence de plusieurs métiers et fonctions : DSI pour les aspects informatiques et technologiques, DRH pour les aspects juridiques et la gestion des personnels, encadrement intermédiaire pour la gestion de la charge de travail et des objectifs du salarié, et, enfin, les salariés. Le télétravail ne fait pas partie des premières priorités des hauts dirigeants et des personnels d’encadrement : leurs objectifs à court terme n’autorisent que peu de temps pour une réflexion sur le travail à distance. Une personne de référence chargée de promouvoir le télétravail pourrait jouer un rôle d’intermédiaire entre ces acteurs et les décharger de certaines responsabilités. Ce réseau permettrait de diffuser les bonnes pratiques et d’identifier les points de blocages éventuels. Mesures 9 Désignation encouragée d’un « référent du télétravail » dans les organisa- tions, aussi bien publiques (administrations, collectivités locales…) que privées (entreprises, associations…) : o modèle de correspondants existant pour les TIC en entreprises (« correspondants informatique et libertés » de la CNIL…) ; o rôle de point de contact pour les employés, les cadres dirigeants, les pouvoirs publics (DGT…) ; o ces « référents » favoriseraient la transversalité entre DSI, RH, unités opérationnelles… ; o ils seraient structurés en réseau sur l’ensemble du territoire, avec des coordonnées aisément accessibles. Exemples L’administration américaine a identifié pour chaque agence gouvernementale et/ou unité un référent pour le télétravail, dont les coordonnées figurent sur le site web institutionnel. Il est chargé de renseigner, identifier et diffuser les bonnes pratiques dans l’organisation. À l’interface de plusieurs métiers et/ou fonctions (RH, unités techniques, direction générale, DSI…), il promeut le télétravail. Il rend compte au directeur général de l’agence – lui-même comptable auprès de l’US Office of Personnel Management – de l’avancement du télétravail dans son organisation, selon des indicateurs précis. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 109 - www.strategie.gouv.fr
  • 110. 10. Créer des médiateurs du télétravail dans les départements Constat Un salarié victime de pratiques abusives de la part de son employeur (non-respect des dispositions de l’ANI, surcharges de travail, déménagement sans proposition de télétravail, etc.) peut avoir des difficultés à interpréter les textes juridiques relatifs au télétravail. Il n’est généralement pas au fait de la palette de recours à sa disposition (IRP, prud’hommes…) et peut en outre être dissuadé de les mobiliser (peur de représailles de la part de l’employeur, mauvais conseils d’IRP peu formées sur un sujet aussi complexe, etc.). Mesures 10 Désigner un médiateur du télétravail, bien identifié1, dont les prérogatives et les modalités d’intervention seraient à préciser, qui pourrait être saisi pour évaluer, voire régler, les litiges avant toute action devant le conseil de prud’hommes. Avec quelques adaptations, de tels médiateurs pourraient aussi être mis en place dans la fonction publique. Se pose toutefois la question de leur visibilité au sein des organisations – a fortiori pour les télétravailleurs – et de leur périmètre d’action (impossibilité de visiter le domicile du salarié et éventuellement les télécentres…). De tels médiateurs existent déjà sur d’autres sujets (European Ombudsman, Médiateur de la République, médiateur du crédit, médiateur de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur, médiateur des communications électroniques…). Exemples La fonction d’Ombudsman existe dans de nombreux pays (Pays-Bas…). Ce médiateur peut être exclusivement affecté au règlement de litiges concernant le télétravail ou plus généralement aux litiges liés à l’emploi. Son rôle diffère de celui des inspecteurs du travail, qui existent également dans de nombreux pays et disposent souvent des mêmes prérogatives que leurs homologues français. AXE 3 : Sécuriser définitivement le cadre juridique du télétravail L’inscription du télétravail dans la partie législative du Code du travail va concourir à faire connaître le cadre juridique du télétravail issu de l’extension de l’accord national interprofessionnel. Pour répondre aux attentes des entreprises pionnières et sécuriser les salariés, quelques dispositions pourraient venir compléter le dispositif existant. Au- delà de l’action du législateur, il est nécessaire de développer le dialogue social et la négociation collective, en particulier dans les entreprises, pour préciser et adapter le cadre juridique aux situations particulières. Cette palette d’outils normatifs doit être 1 Les médiateurs pourraient être référencés sur le site www.e-travail.gouv.fr ou tout autre site institutionnel de promotion du télétravail, mais aussi par des liens sur le site du Médiateur de la République et des acteurs du télétravail… Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 110 - www.strategie.gouv.fr
  • 111. accompagnée par des outils de type soft law (chartes de bonnes pratiques, codes de bonne conduite…), le télétravail devant demeurer un instrument de souplesse au profit de l’entreprise et des salariés. 11. Expérimenter la présomption d’accident du travail Constat Les partenaires sociaux ont des positions opposées sur le thème de la présomption d’accident du travail. Les syndicats d’employés estiment qu’elle est nécessaire pour rassurer les salariés qui souhaiteraient télétravailler. De leur côté, les employeurs considèrent que la présomption aurait pour conséquence une augmentation du nombre d’accidents du travail (éventuellement opportunistes) et donc une hausse des cotisations des employeurs1. Il est à noter que la plupart des grandes entreprises françaises qui ont mis en place le télétravail ont adopté la présomption d’accident de travail, de jure ou de facto, sans désagrément apparent. Enfin, en 2004, le Forum des droits sur l’Internet préconisait déjà une telle mesure et la soutient encore aujourd’hui, tout comme certains spécialistes du télétravail, Pierre Morel-à-L’Huissier ou le cabinet spécialisé IDC (étude de septembre 2008 pour le compte de l’ADESATT). Mesures 11 Compte tenu des interrogations soulevées par une telle mesure, expérimenter la présomption d’accident de travail (amendement à la proposition de loi). o L’efficacité d’une telle mesure étant discutable, il serait pertinent de mener une phase d’expérimentation avant de la généraliser. o Cette expérimentation devrait être menée sur le fondement de l’article 37.1 de la Constitution, pour une durée limitée (trois ans) et sur un périmètre restreint (les entreprises de plus de 250 salariés). o Des indicateurs clairs de suivi (évolution des accidents de travail à domicile, nombre de télétravailleurs par type d’entreprise…) et des études socioéconomiques pourraient être utilisés pour évaluer l’efficacité du dispositif. 1 Les dépenses liées aux accidents du travail (branche AT-MP), contrairement à celles liées à la maladie et à la maternité, sont financées exclusivement par les employeurs, selon un taux de cotisation de plus en plus individualisé à mesure que la taille de l’entreprise augmente (tarification collective pour les entreprises de moins de 10 salariés en fonction de l’activité, tarification mixte (bonus/malus du type de l’assurance automobile) pour les entreprises de 10 à 199 salariés, tarification individuelle a posteriori pour les entreprises de 200 salariés et plus en fonction des résultats propres à chaque établissement) et selon les risques auxquels sont exposés les employés. Dans le cas des télétravailleurs à domicile, le risque d’accident est faible (moins de 30 accidents du travail à domicile par an depuis 2002). Il est fort probable que les « cotisations » (si l’on considère que le risque global de l’organisation peut être réparti selon les individus) seront équivalentes à celles appliquées aux sièges sociaux et bureaux bénéficiant d’un taux collectif « bureau » peu élevé, eu égard aux faibles risques. Dans le cas du télétravail nomade ou alterné, des calculs de risque pourraient essayer de déterminer l’impact sur les cotisations. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 111 - www.strategie.gouv.fr
  • 112. Exemples La plupart des pays étudiés n’ont pas adopté la présomption d’accident pour le cas spécifique du télétravail : les dispositions générales de l’accident du travail s’appli- quent au télétravailleur, qui est un salarié comme un autre. Seule la Belgique l’a introduit explicitement, dans sa Convention nationale collective n° 85. Contrairement à ce que craignaient les employeurs, les cotisations sociales patronales à la branche « accident du travail » n’ont pas augmenté. Par ailleurs, l’Association belge des Assurances considère que le risque d’accident lié au télétravail n’a pas augmenté ; l’accidentologie montre en effet que, pour un salarié en télétravail, les accidents de trajets diminuent et les accidents au domicile n’augmentent que faiblement. 12. Rédiger une circulaire expliquant clairement le cadre juridique du télétravail Constat Le cadre juridique du télétravail résulte pour l’essentiel de négociations sociales autonomes des partenaires sociaux, au niveau européen puis interprofessionnel, qui s’impose largement aux acteurs sociaux depuis son extension par le ministre du Travail en 2006. La loi votée le 9 juin 2009 en première lecture à l’Assemblée nationale s’est concentrée sur les grands principes du télétravail. L’information et les actions de formation qui sont nécessaires et qui font l’objet des recommandations précédentes doivent pouvoir s’appuyer sur un document juridiquement solide, c’est-à-dire rédigé par l’administration du ministère du Travail. La fiche « télétravail » de la circulaire DGT du 18 décembre 2007 et les indications de la circulaire DGT du 3 juillet 2009 relatives à la pandémie grippale, bien que très claires, ne sont pas suffisantes. Mesures 12 La Direction générale du Travail pourrait rédiger une circulaire expliquant de manière pédagogique le cadre juridique qui résultera de la loi et de l’ANI de 2005, rénovant la fiche « télétravail » élaborée en 2007. Elle doit être un outil opérationnel pour les entreprises comme pour les salariés. 13. Régulariser les situations problématiques d’un point de vue juridique (même si elles n’ont pas encore fait l’objet de recours) Constat Malgré la clarté des dispositions de l’ANI de 2005, des abus sont encore à déplorer (non paiement de l’équipement et de la connexion, surcharge de travail et non-respect des durées légales de repos…). Les contrats de travail et les avenants doivent respecter un certain nombre de principes rappelés par l’accord-cadre européen, l’ANI de 2005, les accords de branche et la proposition de loi actuelle : – le télétravailleur est un salarié comme un autre : il a droit aux mêmes conditions de travail (santé et sécurité, droits collectifs…) que ses collègues et aux mêmes informations (disponibilités de postes, accès à la formation, opportunités de carrière…) ; – le double volontariat et la double réversibilité ; – le remboursement des frais et des équipements du télétravailleur. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 112 - www.strategie.gouv.fr
  • 113. Mesures 13 Inciter les entreprises et les branches à négocier sur le télétravail sans toutefois faire entrer le télétravail dans les thèmes soumis à la négociation annuelle obligatoire. Inciter les entreprises à procéder à la régularisation de la situation des télétravailleurs par un avenant obligatoire au contrat de travail (si celui-ci ne mentionne pas dès l’origine le télétravail), dans le respect strict du Code du travail et de l’accord national interprofessionnel de 2005. o À titre indicatif, les avenants au contrat de travail pourront mentionner les points suivants : - les mesures de protection des données, en particulier en situation de nomadisme ; - les mesures de protection de la vie privée (information du télétravailleur sur les dispositifs de surveillance, plage horaire pour les contacts…) ; o Des actions de promotion auprès des entreprises/secteurs pratiquant massivement le télétravail informel (high-tech, conseil…) peuvent être envisagées, via par exemple le Syntec, le CIGREF ou les partenaires sociaux. Exemples Dans la grande majorité des pays, le télétravail fait l’objet de contrats de travail ou d’avenants particuliers. 14. Clarifier la prise en charge par les assurances Constat L’assurance du télétravailleur explicite rarement les conditions exactes de couverture dans les cas limites. Les assureurs adoptent des principes de prise en charge variables, y compris parfois au sein d’une même compagnie. Le matériel professionnel peut être pris en charge par l’assurance de l’employeur, l’assurance du salarié peut prendre en charge les dégâts à domicile… Pour rassurer les parties prenantes, il semble pertinent de préciser les conditions d’assurance dans le contrat de travail. Mesures 14 Organiser une concertation entre assureurs (associations des assureurs FFSA, GEMA…) et entreprises pour qu’ils étudient les possibles conséquences du passage en télétravail, sur les cotisations de l’employeur et/ou du salarié, et éventuellement fixent des principes de prise en charge et de couverture des risques. Préciser dans le contrat de travail (ou son avenant) les conditions de prise en charge d’assurance, au cas par cas et suivant de bonnes pratiques. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 113 - www.strategie.gouv.fr
  • 114. Exemples Dans la plupart des pays, les assurances sont réparties entre employeurs et employés, de la même manière qu’en France, sans dispositions précisément formalisées sur le contrat de travail. En Belgique, des assureurs proposent aux employeurs et/ou employés des contrats d’assurance « accident du travail » 24h/24 et 7j/7, sans majoration. AXE 4 : Encourager les initiatives Le télétravail se développera d’autant plus que les bonnes pratiques pourront servir d’exemples. Mais pour les PME, notamment, les coûts des matériels et des solutions techniques peuvent apparaître encore trop importants. Le déploiement du haut et très haut débit sur la majeure partie du territoire ainsi que la poursuite d’innovations dans les technologies réseaux et les solutions logicielles constituent des prérequis du développement du télétravail. 15. Soutenir financièrement et matériellement l’essor du télétravail Constat Alors que l’employeur est obligé de fournir le matériel informatique au salarié, les incitations financières ont été couramment utilisées par plusieurs pays étrangers afin de développer le télétravail, et plus généralement la société de l’information. C’est un signal fort pour les entreprises comme pour les particuliers. Mesures 15 Mettre en place des incitations financières et matérielles au développement du télétravail, adaptées selon les situations : o proposer un accompagnement pour les PME, financé par exemple sous la forme d’un « chèque conseil ». Un consultant spécialisé serait chargé d’identifier les besoins et les solutions de télétravail dans les entreprises ; o aide à l’acquisition de matériel neuf, directement pour les salariés ou par mise à disposition/location par l’employeur. Du matériel informatique d’occasion pourra également être fourni, par exemple via l’initiative « Ordi 2.0 » ; o pour les structures concernées, le crédit d’impôt recherche (CIR) pourrait également être utilisé pour financer les dépenses de migration vers des systèmes informatiques collaboratifs (virtualisation, cloud computing, CAO…), qui constituent une partie des dépenses liées au télétravail dans certains secteurs. Nous n’abordons pas la question des taux et des montants d’incitations finan- cières. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 114 - www.strategie.gouv.fr
  • 115. Exemples De nombreux pays ont adopté des dispositions fiscales favorables au télétravail : Belgique : contribution pouvant aller jusque 10 % du salaire du télétravailleur ; Japon : mesure de soutien aux entreprises investissant dans des infrastruc- tures facilitant le télétravail ; Pays-Bas : le PC-privéregeling entre 1998 et 2003 a consisté à payer l’équipement informatique des ménages (coût 500 millions d’euros par an) ; Suède : o mesure d’incitation fiscale à l’équipement informatique des ménages (coût environ 200 millions d’euros par an) : entre 1998 et 2007, 2 millions de PC ont été mis à la disposition (ou location) des employés après achat par l’employeur ; o subvention au raccordement au réseau haut débit ; o déductions fiscales accordées aux télétravailleurs : compensation des travaux pour mise aux normes d’une pièce dédiée au télétravail… 16. Créer les télécentres de l’ère du Web 2.0. Constat Malgré les initiatives de la DATAR dans les années 1990, les télécentres n’ont jamais connu l’essor espéré ; depuis, la notion de télécentre est connotée négativement. Or certains de ces centres fonctionnent correctement (réseaux de télécentres d’IBM…) et disposent d’atouts considérables en termes de prise en charge assurantielle, de socialisation, de sécurité informatique, etc. Selon certains experts, il existe un marché potentiel qui ne pourra décoller sans l’intervention initiale des pouvoirs publics. Deux situations se prêtent particulièrement bien aujourd’hui au développement des télécentres : – la deuxième couronne parisienne : leur développement permettrait au salarié de gagner un temps de déplacement qui peut s’élever jusqu’à une ou deux heures par jour ; – les zones rurales où les télécentres constituent un moyen de favoriser l’emploi. Mesures 16 A minima, redynamiser le réseau de télécentres actuel (financements, promotion, formation des acteurs…). Expérimenter puis éventuellement généraliser de nouveaux projets, en réalisant des montages adaptés à chaque situation associant les acteurs ad hoc (en particulier les collectivités locales) : o télécentres en partenariat public/privé au niveau local, ou opérés par les collectivités locales… ; o mobilisation des entreprises potentiellement concernées (chaînes hôte- lières disposant de salons pour télétravailleur…) ; Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 115 - www.strategie.gouv.fr
  • 116. o exemple du programme ambitieux ELMUT du CGIET : 10 000 espaces locaux mutualisés en 2012 (salle de téléréunion THD, système de réser- vation pour les agents publics ou privés, restauration collective, animation par 10 000 « technologues » secondés par 10 000 jeunes e-apprentis recrutés localement pour des tâches de maintenance…). 17. Favoriser, grâce au télétravail, la conciliation entre la vie familiale et l’activité professionnelle Constat Les salariés français, très attachés au travail, sont aussi, parmi les Européens, ceux qui éprouvent le plus de difficultés à concilier une vie familiale harmonieuse et une activité professionnelle épanouissante. Le télétravail, formidable outil de flexibilité pour le salarié et l’employeur, peut constituer un facteur d’amélioration des conditions de travail. Sans introduire des dispositifs spécifiques qui paraîtraient dérogatoires au cadre général, il peut s’avérer particulièrement bien adapté à certaines situations ou étapes de la vie. Mesures 17 Dans le cadre des accords d’entreprises et dispositifs relatifs à la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, le recours au télétravail pourrait être proposé avant et/ou après le congé maternité (à partir des bonnes pratiques existant en France et à l’étranger). Le télétravail pour le père de famille pourrait également être envisagé plus largement comme outil favorisant la parentalité en milieu professionnel. Par extension, les soins à un ascendant pourraient être visés par le recours à ce mode d’organisation. La pratique ponctuelle du télétravail pourrait être également favorisée pour beaucoup de salariés afin de leur donner une plus grande flexibilité et leur permettre de s’absenter exceptionnellement de leur travail durant les heures normales, notamment pour effecteur une démarche officielle ou pour rendre visite à un parent en maison de retraite, en rattrapant par exemple le temps d’absence le soir. Exemples Au Royaume-Uni, à la suite d’un important débat de société sur le développement de la flexibilité du travail, un texte (Flexible Working Regulations Act) favorise les demandes d’aménagement des conditions de travail formulées par les salariés (obli- gation pour l’employeur de les accepter, sauf raison de tout premier ordre). Le même type de dispositif est utilisé à Singapour (Flexible Work Arrangements) mais sur une base probablement plus informelle (à l’instar de ce qui se passe en France). Coca-Cola France a mis en place le télétravail pour les femmes enceintes, avant le congé maternité. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 116 - www.strategie.gouv.fr
  • 117. 18. Favoriser, grâce au télétravail, l’exercice d’une activité professionnelle Constat Le travail joue un rôle important comme facteur d’insertion sociale des individus. Le télétravail peut constituer un instrument souple contribuant à l’inclusion sociale par l’exercice d’une activité professionnelle. Il peut permettre à des personnes malades de reprendre leur activité professionnelle en favorisant les transitions entre les exigences des traitements et/ou les besoins de repos, d’une part, et une activité professionnelle sur site, dans un cadre collectif avec ses contraintes, d’autre part. Il peut en être de même pour certaines situations de handicap. Mesures 18 Un certificat médical d’aptitude au télétravail pourrait à ce titre être un élément complémentaire à l’arrêt de travail ou au mi-temps thérapeutique, délivrés par le médecin. Cet outil ne serait pas créateur de droit au télétravail pour le salarié, ce qui suppose que le médecin doit conserver l’usage des autres possibilités en dernier recours. Le télétravail pourrait être intégré aux outils mis en œuvre pour répondre à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans les entreprises de plus de 20 salariés. Le contact avec un cadre collectif étant important, le télétravail partiel serait privilégié. Télétravail et développement de l’emploi des seniors : des actions de sensibilisation (« publicité » pour le télétravail lors de la liquidation de la retraite ou de la rupture du contrat de travail…) et de formation aux TIC à destination des seniors semblent pertinentes. Exemples Dans la plupart des pays, le télétravailleur, en tant que salarié comme un autre, est soumis aux mêmes dispositions juridiques que ses collègues (congés maladie, accident, maternité ou cumul emploi-retraite). Dans aucun des 23 pays de l’OCDE étudiés n’a été fait mention d’un télétravail subi lors d’un congé maternité ou d’un arrêt maladie ; aucun de ces pays n’a légiféré spécifiquement sur ces sujets. On peut se demander, en outre, si des dispositions juridiques spécifiques à certaines catégories sont pertinentes pour un pays disposant d’un système social protecteur comme la France. 19. Mieux connaître la situation du télétravail en France Constat La France ne dispose que de statistiques parcellaires et irrégulières sur le télétravail dans le secteur privé, et pratiquement d’aucune dans le secteur public. Les recherches d’ordre socioéconomique sur le télétravail (impact des technologies, sociologie des organisations…) sont peu nombreuses et fragmentaires. De plus, ces travaux sont peu visibles et mal insérés dans les réseaux internationaux de recherche sur le sujet. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 117 - www.strategie.gouv.fr
  • 118. Mesures 19 Financer des recherches académiques et des études pour améliorer la décision publique : o études statistiques régulières sur le télétravail (enquêtes COI, PCV…)1 ; o enquêtes en sociologie des organisations pour mieux comprendre les obstacles à la diffusion du télétravail ; o comparaison internationale des politiques menées en la matière. La recherche interdisciplinaire pourra être redynamisée, à l’image des travaux du Groupement de recherche sur les TIC (GDR-TIC). Financer une évaluation socioéconomique de l’impact de la pandémie grippale sur le développement du télétravail, examinant également les bonnes pratiques en matière de mise en œuvre. Exemples Des pays de taille plus modeste que la France (Pays-Bas, Belgique, Finlande, Suède…) sont mieux représentés dans les réseaux de recherche et les conférences inter- nationales sur le télétravail. 1 Enquête COI : enquête sur les changements organisationnels et l’informatisation. Enquête PCV : enquête permanente sur les conditions de vie (INSEE). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 118 - www.strategie.gouv.fr
  • 119. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 119 - www.strategie.gouv.fr
  • 120. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 120 - www.strategie.gouv.fr
  • 121. Annexe 1 Lettre de saisine Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 121 - www.strategie.gouv.fr
  • 122. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 122 - www.strategie.gouv.fr
  • 123. Annexe 2 Liste des personnes interrogées Administration française Caroline Berteau-Rapin, direction statistiques et prospective, pôle « prévisions », Caisse nationale d’assurance vieillesse, CNAV Joël Blondel, chef de service, Direction générale du travail, DGT Jean Ceugniet, ingénieur général des mines, Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies, CGIET Annelore Coury, sous-directrice des relations individuelles et collectives de travail, Direction générale du travail, DGT Thomas Coutrot, chef du département Conditions de travail et santé, Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, DARES Fabrice Dambrine, ingénieur général des mines, Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies, CGIET Guillaume Destré, chargé de mission, Conseil d’orientation des retraites, COR Nathanaël Grave, chargé de mission, Caisse nationale d’assurance vieillesse, CNAV Jean-Michel Hourriez, chargé de mission, Conseil d’orientation des retraites, COR Vincent Poubelle, chef du service statistique, Caisse nationale d’assurance vieillesse Françoise Roure, présidente, section technologie et société, Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies, CGIET Julien Tiphine, chef du bureau retraites, régimes de base, Direction de la sécurité sociale, DSS Brigitte Zago-Koch, adjointe au chef du bureau relations individuelles de travail, Direction générale du travail, DGT Partenaires sociaux français Chantal Foulon, directrice adjointe, relations sociales, Mouvement des entreprises de France, MEDEF Jean-Pierre Koechlin, délégué, Confédération française des travailleurs chrétiens, CFTC Experts français Denis Bérard, chargé de mission, changement technologique, Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) Nadine Delouche, membre de l’espace RSSI du Clusid, spécialiste aspects sécurité Tic et droit du travail Thibault Grouas, juriste, chargé de mission, Forum des droits sur l’Internet Sylvie Hamon-Cholet, chercheur, Centre d’études de l’emploi, CEE Serge Le Roux, administrateur, Association française du télétravail et des téléactivités, AFTT Jean-Luc Metzger, chercheur, Orange Labs Anne-Marie Nicot, correspondante pour la France de Euro Foundation, changement technologique, Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, ANACT Nadine Pelvillain, chef du département Informatique, direction de l’ingénierie, Association pour la formation professionnelle des adultes, AFPA Philippe Planterose, président, Association française du télétravail et des téléactivités, AFTT Jean-Emmanuel Ray, professeur, université Paris 1-Sorbonne Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 123 - www.strategie.gouv.fr
  • 124. Jérémie Rosanvallon, chercheur, Centre d’études de l’emploi, CEE Nicole Turbe-Suetens, expert européen en télétravail, Distance-Expert Jean-Louis Zanda, chargé d’études, Direction des études et des évaluations, Pôle emploi Experts européens et internationaux Svein Bergum, Eastern Norway Research Institute, Norvège John Gundry, Knowledge Ability Ltd., Royaume-Uni Esther Hoffmann, Tshwane University of Technology, Afrique du Sud Ursula Huws, experte du télétravail, Analytica Social and Economic Research, Royaume-Uni Gareis Karsten, Empirica Gesellschaft für Kommunikations-und Technologieforschung mbH, Allemagne Diana Limburg, Oxford Brookes University, Royaume-Uni Pascale Peters, Institute for Management Research, université Nijmegen, Pays-Bas Sirkemaa Seppo, Turku School of Economics, Finlande Wendy Spinks, Tokyo University of Sciences, Japon Laurent Taskin, directeur adjoint, Louvain School of Management, Center for Research in Entrepreneurial Change and Innovation Strategies et animateur du réseau Belgian Telework Academy, Belgique Diane-Gabrielle Tremblay, professeur à la Télé-université (UQAM), titulaire de la chaire de recherche du Canada sur les enjeux socio-organisationnels de l’économie du savoir, directrice de l’Alliance de recherche Universités-Communautés, ARUC, Canada Michel Walrave, université d’Anvers, Belgique Entretiens par pays (Roland Berger) Allemagne Beatrix Behrens, chef du département politique du personnel, Bundesagentur für Arbeit Christiane Flüter-Hoffmann, experte télétravail, Institut der deutschen Wirtschaft Köln Mme Höhne, Bundesministerium für Arbeit und Soziales Jürgen Kühn, Group Diversity Management, Deutsche Telekom Peter Mohns, chef de bureau, Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend Belgique Robin Bellings, CIO Europe, CISCO Paul Hautekiet, HR manager, Electrabel Philip Vandervoort, Ellke Jorens, CEO, HR manager, Microsoft Corée du Sud Seung-hwan Cha, director of Home-base Call Center, Dongbu Insurance Co., Ltd Hyo-jin Hong, Strategic future planning team, Senior researcher Jong-min Jeon, Human resource part, manager, Samsung SDS Co., Ltd Soon-ho Kwon, HR director, IBM Corée du Sud Joo-hwan Park, Policy planning team, director of Telework management, Dongdaemoon Ward Office Jeong Won, HR director, Korean Airlines Danemark Elizabeth Berents, responsable du programme de formations, Danske fysioterapeuter Winnie Holm, régional HR-director, ALD automotive (filiale SG) Jérémie Millard, Teknologisk Institute Lene Mondrup, HR manager, Boehringer-Ingelheim JL Thomsen, HR manager, SAS Data CSC Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 124 - www.strategie.gouv.fr
  • 125. États-Unis Christine Arnould, HR manager, HP Elizabeth Maden, HR, Goldman Sachs Jozef Roitz, director, AT&T Charlie Wall, VP HR Suez Environnement North America Finlande Thomas Brannbacka, HR manager, Sofia Bank Tamara Carpentier, DRH France, Nokia France Dominique Cervera, responsable des ressources humaines, Téléperformance Brigitte Dumont, directrice du développement et performance des RH, France Télécom Jérôme Filippini, directeur des systèmes d’information et de communication, ministère de l’Intérieur Alexandre Gardet, Direction générale des finances publiques Catherine Jacolot, directrice territoriale Est des opérations France, France Télécom JP Lainé, directeur des services à l’entreprise, Renault Janine Kister, Guy Duplaquet, Direction des services judiciaires, DSI, ministère de la Justice Sébastien Lebreton, juriste social en chef, Alcatel Lucent Emmanuelle Lièvremont, directrice diversité et santé au travail pour le groupe L’Oréal Hélène Martin, référente télétravail France, Michelin Pierre Morel-à-L’Huissier, député de Lozère Gérard Perfettini, directeur de la Caisse régionale des Dépôts et Consignations (Bordeaux) Karine Picot, responsable développement RH, Coca Cola Philippe Planterose, président, Association française des télétravailleurs Jean Rafenomanjato, ex-inspecteur, ministère de l’Éducation nationale Philippe Roux-Comoli, directeur de cabinet, ministère de la Justice Vincent Tachet, directeur général adjoint, Webhelp Nicole Tuerbé-Suetens, avocate experte, Distance Expert Amélie Velly, juriste sociale, Norauto Eloïse Verde-Delisle, directrice des relations sociales et de l’emploi, IBM Italie Piera Albertini, director of Home-base Call Center, BNP Paribas Personal Finance Italy Alessio Bertocco, HR direction, Seat Pagine Gialle S.p.A Umberto Malesci, CEO, Fluid Mesh Networks Elena Sala, Human Resource manager, AstraZeneca Filippo Stefanelli, CEO, New Target Web Japon Yusuke Emi, HR director, Hitachi Akinobu Kanasugi, HR manager, NEC Masahiro Mori, HR manager, Showcase TV Hiroko Nagai, HR manager, Panasonic Taizo Nishimuro, HR director, Japan Teleworkers Association Hajime Takashima, HR manager, NTT Noritake Uji, HR manager, NTT Royaume-Uni Laura White, HR manager, Tesco David Wilson, HR director, British Telecom Suède Gosta Molleby, HR manager, Teliasonera Anna Stellinger, expert, SIEPS (agence gouvernementale) Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 125 - www.strategie.gouv.fr
  • 126. Annexe 3 L’évolution des définitions du télétravail depuis 1993 Afin d’illustrer l’évolution de la notion de télétravail, nous présentons dans cette annexe les six définitions issues des principaux rapports ou textes français sur le télétravail. 1993 : Rapport Breton (cabinet juridique Service Lamy) « Le télétravail est une modalité d’organisation et/ou d’exécution d’un travail exercé à titre habituel, par une personne physique, dans les conditions cumulatives suivantes : D’une part, ce travail s’effectue : – à distance, c’est-à-dire hors des abords immédiats de l’endroit où le résultat de ce travail est attendu ; – en dehors de toute possibilité physique pour le donneur d’ordre de surveiller l’exécution de la prestation par le télétravailleur. D’autre part, ce travail s’effectue au moyen de l’outil informatique et/ou des outils de télécommunications ; il implique nécessairement la transmission au moyen d’une ou de plusieurs techniques de télécommunications au sens de l’article L32 du Code des Postes et Télécommunications, y compris au moyen de systèmes informatiques de communication à distance : – des données utiles à la réalisation du travail demandé ; – et/ou du travail réalisé ou en cours de réalisation ». 2002 : Accord-cadre européen sur le télétravail « Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les technologies de l’information, dans le cadre d’un contrat ou d’une relation d’emploi, dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière. Le présent accord couvre les télétravailleurs. On entend par télétravailleur toute personne qui effectue du télétravail tel que défini ci-dessus. » Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 126 - www.strategie.gouv.fr
  • 127. 2004 : Rapport du Forum des droits sur l’Internet « Le télétravail peut être défini comme étant le travail qui s’effectue, dans le cadre d’un contrat de travail, au domicile ou à distance de l’environnement hiérarchique et de l’équipe du travailleur à l’aide des technologies de l’information et de la communication. » 2005 : Accord national interprofessionnel en France « Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de travail et dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière. Cette définition du télétravail permet d’englober différentes formes de télétravail régulier répondant à un large éventail de situations et de pratiques sujettes à des évolutions rapides. Elle inclut les salariés « nomades » mais le fait de travailler à l’extérieur des locaux de l’entreprise ne suffit pas à conférer à un salarié la qualité de télétravailleur. Le caractère régulier exigé par la définition n’implique pas que le travail doit être réalisé en totalité hors de l’entreprise, et n’exclut donc pas les formes alternant travail dans l’entreprise et travail hors de l’entreprise. On entend par télétravailleur, au sens du présent accord, toute personne salariée de l’entreprise qui effectue, soit dès l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que défini ci-dessus ou dans des conditions adaptées par un accord de branche ou d’entreprise en fonction de la réalité de leur champ et précisant les catégories de salariés concernés. » 2006 : Rapport de Pierre Morel-à-L’Huissier Le député reprend la définition « fonctionnelle » du Forum des droits sur l’Internet et la typologie des télétravailleurs. Il précise toutefois que « le télétravail est d’abord une modalité d’organisation du travail, parmi d’autres et en concurrence avec d’autres ». 2009 : Proposition de loi « pour faciliter le maintien et la création d’emplois » « Sans préjudice de l’application, s’il y a lieu, des dispositions du présent code protégeant les travailleurs à domicile, le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail, qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur, est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire en utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de travail ou d’un avenant à celui-ci. Le télétravailleur désigne toute personne salariée de l’entreprise qui effectue, soit dès l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que défini au précédent alinéa ». Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 127 - www.strategie.gouv.fr
  • 128. Annexe 4 Tableau récapitulatif des définitions du télétravail pour la France Source Définition télétravail / télétravailleur Date Champ Proposition Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un de loi travail, qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur, Code du est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon régulière et volontaire Salariés travail en utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de 2009 secteur privé (Partie 1, travail ou d’un avenant à celui-ci. uniquement Livre 2, Le télétravailleur désigne toute personne salariée de l’entreprise qui effectue, Titre 2, soit dès l’embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que défini au Chap. 2) précédent alinéa. Une entreprise pratique le télétravail si elle a des personnes qui travaillent au INSEE Étude portant moins une demi-journée par semaine en dehors de ses locaux, en ayant enquête TIC 2009 seulement sur accès au système informatique de l’entreprise par des réseaux 2008 les entreprises électroniques. Le télétravail est une forme d’organisation du travail recouvrant quatre Reprend la formes d’organisation : Rapport distinction faite – le télétravail à domicile ; Morel-à- 2006 par le Forum – le télétravail nomade ; l’Huissier des droits sur – les télécentres ; l’Internet – le travail en réseau. Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les technologies de l’information dans le cadre d’un contrat de travail et dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière. Salariés ANI On entend par télétravailleur, au sens du présent accord, toute personne 2005 secteur privé salariée de l’entreprise qui effectue, soit dès l’embauche, soit ultérieurement, uniquement du télétravail tel que défini ci-dessus ou dans des conditions adaptées par un accord de branche ou d’entreprise en fonction de la réalité de leur champ et précisant les catégories de salariés concernés. Le télétravail peut être défini comme étant le travail qui s’effectue, dans le Forum des Salariés cadre d’un contrat de travail, au domicile ou à distance de l’environnement Droits sur 2004 secteur privé hiérarchique et de l’équipe du travailleur à l’aide des technologies de l’Internet uniquement l’information et de la communication. INSEE, Le télétravailleur utilise dans son travail les technologies de l’information tous enquête per- les jours ou plusieurs fois par semaine, pour un usage supérieur à cinq Salariés et manente sur 2004 heures par semaine, se déroulant au moins pour partie loin de son agents publics les conditions responsable hiérarchique ou de son équipe de travail. de vie Le télétravail est une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, Plus large : utilisant les technologies de l’information, dans le cadre d’un contrat ou Accord-cadre contrat ou d’une relation d’emploi, dans laquelle un travail, qui aurait également pu être 2002 européen relation réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de d’emploi façon régulière. The broadest definition of eWork encompasses any work that is carried out Extrêmement Projet 2002- away from an establishment and managed from that establishment using ICT large (inclut EMERGENCE 2003 for receipt or delivery of the work. l’outsourcing) Tout type de travail qui fait usage d’outils de traitement de l’information et de Extrêmement télécommunications pour en livrer le produit à un employeur ou un client distant. Caisse des large (inclut Le télétravail devient alors un sous-ensemble de l’e-travail, dans lequel un Dépôts et 2002 l’outsourcing) individu (salarié ou non) travaille ailleurs que dans les locaux standards de Consignations pris du projet son employeur ou de l’entreprise avec laquelle il est en contrat, et reste en Emergence relation avec l’entreprise grâce aux TIC. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 128 - www.strategie.gouv.fr
  • 129. Annexe 5 Quelques définitions du télétravail à l’étranger Nous avons recensé les définitions du télétravail adoptées à l’étranger. Comme pour la France, plusieurs sources sont disponibles pour chaque pays. Nous avons donc choisi de ne faire figurer que la définition la plus communément admise, à savoir celle des institut nationaux de statistiques dans la majorité des cas. Ces définitions peuvent ensuite varier selon les enquêtes statistiques (cf. annexe 7). Organisme Définition Champ Mémento « télétravail » Le télétravail est toute activité, basée sur les technologies de 2001 publié de l’information et de la communication, accomplie par les minis- exclusivement ou à temps partiel sur un poste de travail Allemagne tères fédéraux situé hors de l’établissement central. Ce poste de travail du travail, de est relié par des moyens de communications électroniques l’économie et à l’établissement central. de l’éducation Le travail entrepris soit à plein temps soit à temps partiel, Australian par un employé ou un travailleur indépendant, qui est Telework effectué à distance de l’environnement traditionnel du Australie Advisory bureau de l’entreprise, y compris à domicile, et qui est Committee facilité par le recours aux TIC telles que la téléphonie (2005) mobile ou l’Internet. Ministère de l’Économie et Réalisation d’un travail à distance avec l’aide de systèmes Autriche du Travail de communication. (2003) Une forme d’organisation et/ou de réalisation du travail, Les télétravailleurs utilisant les technologies de l’information, dans le cadre mobiles sont exclus Convention d’un contrat de travail, dans laquelle un travail, qui aurait (commerciaux, Belgique collective de également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, techniciens, travail n° 85bis est effectué hors de ces locaux de façon régulière et non infirmières à occasionnelle. domicile…) Le télétravail désigne le travail effectué en dehors du lieu Partenaires de travail habituel et transmis vers ce lieu par sociaux l’intermédiaire d’un PC et d’une connexion internet. Le (transposition télétravail doit avoir un caractère récurrent et régulier pour Secteur privé de la définition être couvert par l’accord et ne peut avoir lieu que pendant de l’ACE de les heures de travail sur lesquelles se sont accordés au 2002) préalable l’employé et l’employeur. Le télétravail est un travail pouvant être effectué dans un Danemark lieu différent du lieu de travail habituel à l’aide d’un ordinateur personnel et de moyens de communication électroniques et/ou téléphoniques fournis par l’employeur. Direction Le télétravail et le travail à domicile doivent avoir un du personnel caractère récurrent et être compris dans les heures de Secteur public (secteur travail du contrat de travail. L’accord n’inclut pas le travail public) à distance effectué lors de voyages d’affaires. Il se distingue en outre du « travail mobile » c’est-à-dire effectué dans plusieurs lieux distincts comme par exemple le travail d’un commercial. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 129 - www.strategie.gouv.fr
  • 130. Il y a une distinction1 sur le régime de travail et sur les conditions de travail entre télétravailleur (qui effectue la totalité de son travail depuis son domicile ou un site à World at Work Secteur privé distance des locaux) et « telecommuter » (qui travaille périodiquement ou régulièrement depuis son domicile ou États-Unis un site distant). Le télétravail est un aménagement du travail dans lequel US Office of un employé effectue régulièrement des tâches profession- Secteur public Personnel nelles, depuis son domicile ou depuis les locaux (de (agences fédérales) Management l’administration) proches de son lieu de résidence. Le télétravail est une modalité d’organisation du travail. Il s’agit d’un travail qui pourrait être réalisé dans les locaux de l’employeur, mais qui est régulièrement effectué en dehors du lieu de travail, en utilisant les technologies de l’information et de la communication. Sont inclus dans la définition, par exemple : Accord entre – le travail à temps plein ou partiel effectué à partir d’un partenaires ordinateur à domicile ou dans d’autres locaux que ceux sociaux du Finlande 23 mai 2005 de l’employeur : travaux de planification, de recherche, etc. (transposition – le travail réalisé dans un lieu où de nombreux employés de l’ACE 2002) de l’entreprise travaillent au même moment, en utilisant les technologies de l’information et de la communication. Ne sont pas inclus dans la définition retenue : – les travaux ménagers traditionnels ; – le travail dans les centres d’appel et de contact. Le « e-work » est défini non comme un emploi mais Ministère de la comme une méthode de travail ayant recours aux TIC, Science, de la selon laquelle le travail est accompli indépendamment Technologie et d’un lieu donné. Ces méthodes de travail recouvrent : Secteurs privé Irlande du Commerce – le travail chez soi, à temps plein ou à temps partiel ; et public (« Code of – le « telecommuting » à savoir l’alternance entre le practice » de domicile et le bureau ; 2002) – le travail mobile. Typologie de prestation de services qui s’effectue en Institut national dehors des limites traditionnelles de l’entreprise sans de protection Secteur privé impliquer de transformation des rapports de travail en sociale vigueur. Réforme Un travail effectué par un salarié dans l’une des Italie Bassani 1998 administrations publiques, dans n’importe quel lieu estimé (art. 4 loi compatible avec ce type de prestation, et en dehors du n° 191) et siège de travail, où la prestation sera techniquement Secteur public décret possible grâce à l’utilisation de supports technologiques présidentiel et informatiques permettant de mettre en liaison les n° 70 de 1999 différents sièges du travail. 1 La définition de World at Work est la suivante : Telecommute: To either periodically or regularly perform work for one’s employer from home or another remote location ; Telework: To perform all of one’s work either from home or another remote location, either for an employer or through self-employment ; Employee Telecommuter: A regular employee (full or part time) who works at home or another remote location at least one day per month during normal business hours ; Contract Telecommuter: An individual who works on a contract basis for an employer or is self-employed, and who works at home or at a remote location at least one day per month during normal business hours ; Employed Telecommuters: Individuals (either employees or contractors) working at home or remotely at least one day per month during normal business hours; the sum of “employee telecommuters” and “contract telecommuters”. Les critères étant très larges (travail à distance périodique avec les TIC, inclusion de toutes les catégories de travailleurs…), le nombre de télétravailleurs est relativement important aux États-Unis (21,5 % de la population active, soit 14,2 % de l’ensemble de la population en 2008. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 130 - www.strategie.gouv.fr
  • 131. Méthode de travail qui, grâce à l’utilisation des moyens Japan d’information et de télécommunication, n’est pas Japon Telework soumise à des conditions d’exercice liées au lieu et à la NC Association1 durée du travail. Ministère des Travail effectué à distance, le salarié effectuant son Affaires Pays-Bas sociales et de travail à domicile sur son ordinateur au lieu d’aller au bureau. l’Emploi Les télétravailleurs sont des personnes qui travaillent principalement depuis leur domicile ou sur différents Office of Royaume- lieux lorsqu’ils sont en déplacement en utilisant leur Secteurs privé National Uni domicile comme base et qui ont recours à la fois au et public Statistics téléphone et à un ordinateur pour poursuivre leur activité depuis leur domicile. Ministère du Le télétravail est une forme de travail flexible quant au Travail lieu de travail , et où le travail est effectué grâce à Singapour (Statistiques l’utilisation des TIC, qui peuvent aller des ordinateurs et Secteur privé de l’emploi - modems personnels aux installations électroniques 2009) complexes permettant le travail en réseau. Suède Identique à l’accord-cadre européen de 2002. Source : Missions Economiques, synthèse CAS 1 La Japan Telework Association est un organisme sous tutelle du Ministry of Internal Affairs and Communications, du Ministry of Economy, Trade and Industry, du Ministry of Health, Labour and Welfare et du Ministry of Land, Infrastructure, Transport and Tourism. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 131 - www.strategie.gouv.fr
  • 132. Annexe 6 Les éléments de jurisprudence La jurisprudence du télétravail concerne des faits relativement anciens et peu nombreux, étant donné que les télétravailleurs ne représentent environ que 8 % de la population active. Si les exemples suivants ne présentent probablement pas de manière exhaustive les litiges liés au télétravail, ils donnent un bon aperçu de la 1 jurisprudence qui s’est élaborée au cours des dix dernières années sur ce thème . Les trois arrêts de Cour de cassation Cour de cassation, chambre sociale, 31 mai 2006 Un employeur et sa salariée étaient convenus que cette dernière exercerait ses fonctions de responsable de communication à partir de son domicile en ne se présentant au siège de l’entreprise qu’une fois par semaine, l’ensemble de ses frais de déplacement étant pris en charge par son employeur. Au retour du congé maternité de la salariée, l’employeur lui demanda de reprendre ses fonctions tous les jours de la semaine au siège social de la société. Suite à son refus, la salariée fut licenciée pour faute grave (abandon de poste). La Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt du 16 mars 2004, décida que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse considérant que « le fait pour l’employeur d’imposer [à sa salariée] de travailler désormais tous les jours de la semaine au siège de la société constituait, peu important l’existence d’une clause de mobilité, une modification du contrat de travail que la salariée était en droit de refuser ». La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 31 mai 2006, a rejeté le pourvoi de la société SCC considérant que « lorsque les parties sont convenues d’une exécution de tout ou partie de la prestation de travail par le salarié à son domicile, l’employeur ne peut modifier cette organisation contractuelle du travail sans l’accord du salarié ». Cour de cassation, chambre sociale, 13 avril 2005 Un directeur commercial avait été autorisé, dès son embauche, à effectuer des tâches administratives de sa prestation de travail à son domicile. Son employeur, considérant les résultats commerciaux de son salarié insuffisants, décida qu’il devait dorénavant venir travailler au siège social de la société, situé à plus de 200 km de son domicile, deux jours par semaine. Le salarié, refusant cette mesure, fut licencié pour faute. La Cour d’appel d’Amiens, dans un arrêt du 27 novembre 2002, a considéré que le salarié avait commis une faute grave. En effet, elle a estimé que l’employeur n’avait 1 Les paragraphes suivants reprennent les travaux de veille juridique, notamment du Forum des droits sur l’Internet, et des articles de la presse spécialisée dans les questions sociales. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 132 - www.strategie.gouv.fr
  • 133. pas modifié unilatéralement un élément essentiel du contrat de travail mais procédé à un changement de ses conditions de travail. La faute grave du salarié est caractérisée, ce dernier ne respectant pas la mesure décidée par l’employeur et ne communiquant pas à celui-ci les renseignements réclamés. La Cour de cassation, dans un arrêt du 13 avril 2005, au visa de l’article 1134 du Code civil, a cassé l’arrêt de la Cour d’appel. Elle a considéré que « […] le fait pour l’employeur de lui imposer de se rendre désormais deux jours par semaine au siège de la société situé à plus de 200 km pour exécuter ce travail constituait une modification de son contrat que le salarié était en droit de refuser, ce dont il résultait qu’il ne pouvait se voir reprocher une faute grave ». Cour de cassation, 3 novembre 2004 La Cour a arrêté que le salarié n’est ni tenu d’accepter de travailler à son domicile, ni d’y installer ses dossiers et ses instruments de travail, retenant toutefois qu’une société n’a pas d’intérêt illégitime à muter une salariée de Paris à Aix-en-Provence, alors que son emploi de téléprospectrice peut s’effectuer à domicile. Cour de cassation, chambre sociale, 2 octobre 2001 (arrêt « Abram ») Dans cet arrêt déjà ancien, la chambre sociale de la Cour de cassation, sans faire directement référence au télétravail au domicile, a visé cette organisation du travail. Elle a décidé que « le salarié n’est tenu ni d’accepter de travailler à son domicile, ni d’y installer ses dossiers et ses instrument de travail ». Cette décision signifie que le passage au télétravail à domicile est un changement important dans l’organisation du travail d’un salarié, qui doit par conséquent faire l’objet d’un avenant au contrat de travail. Les trois arrêts de Cour d’appel La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 16 septembre 2005, considère qu’un salarié travaillant à domicile ne peut être licencié pour avoir : – refusé de se soumettre au contrôle et au suivi du travail à domicile, alors que les échanges réguliers de e-mail attestent du contraire et qu’aucun avertissement n’a été adressé par l’employeur ; – dépassé son forfait Internet deux mois avant les poursuites judiciaires par son employeur ; – modifié son mot de passe pour des raisons de sécurité. La Cour d’appel de Paris, dans son arrêt en date du 15 décembre 2004, considère que la salariée, VRP et cadre autonome en situation de télétravail, ne rapportant pas la preuve d’un harcèlement moral, la rupture du contrat de travail produit les effets d’une démission. En effet, les changements technologiques imposés concernaient l’ensemble du personnel, restaient mineurs et ne visaient pas spécialement la salariée. Selon les magistrats, il lui appartenait, en sa qualité de cadre, d’organiser son temps Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 133 - www.strategie.gouv.fr
  • 134. de travail. Elle ne saurait s’appuyer sur des e-mails envoyés occasionnellement le soir ou le dimanche sans sollicitation urgente de son employeur. La Cour d’appel de Douai, dans un arrêt du 30 mai 2008, considère que l’employeur peut verser une indemnisation forfaitaire non soumise à cotisation sociale à ses salariés pour compenser les frais occasionnés par le télétravail à domicile, même partiel. La prise en charge des frais engagés par le salarié en situation de télétravail ne doit pas être incluse dans l’assiette des cotisations sociales en vertu d’un arrêté du 20 décembre 2002 sur les frais professionnels, y compris quand le télétravail est partiel. En effet, les frais engagés par le salarié pour aménager son domicile (installation informatique, connexion Internet…) sont les mêmes dans les cas de télétravail à temps complet ou à temps partiel. L’entreprise attribuait à ses cadres télétravailleurs une allocation forfaitaire mensuelle, dans la limite de 152,45 euros, contre justificatifs des frais engagés. Ces dépenses avaient fait l’objet d’un redressement de l’Urssaf. Suite à l’arrêt de la Cour d’appel de Douai, l’Urssaf n’ayant pas déposé de pourvoi en cassation, cette décision est devenue définitive. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 134 - www.strategie.gouv.fr
  • 135. Annexe 7 Tableau détaillé des chiffres relatifs au télétravail, par catégorie de télétravailleurs Explication du contenu du tableau Le tableau suivant présente, de manière aussi exhaustive que possible, les chiffres les plus récents, selon une gradation allant de « 0 % en télétravail » au télétravail à domicile à temps complet. Nous avons choisi un chiffre de référence utilisé pour le comparatif international, il s’agit généralement de la donnée issue de l’institut de statistique national (lorsque la définition retenue le permet). Si besoin, les chiffres du tableau sont précisés par des notes de bas de page. Certains pays sont décrits dans le tableau par plusieurs lignes : – la première présente les chiffres du cabinet spécialisé Gartner en première colonne (synthèse consolidée en 2007) et les chiffres les plus récents fournis par les instituts statistiques nationaux (collectés par les Missions économiques) ; – la seconde ligne (en bleu) rappelle les chiffres 2002 de l’enquête SIBIS, dont la méthodologie harmonisée autorise la comparaison entre pays ; – la troisième ligne (en jaune) rappelle les chiffres 2005 de l’enquête européenne sur les conditions de travail menée par la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (Eurofound). Ces trois sources principales permettent donc à la fois d’évaluer les limites métho- dologiques de chaque enquête et de constater l’évolution de la diffusion du télétravail entre 2002 (chiffres SIBIS), 2005 (chiffres Eurofound) et 2007 (chiffres Gartner). Ce tableau doit être pris avec précaution, puisqu’il présente des éléments souvent non comparables entre eux. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 135 - www.strategie.gouv.fr
  • 136. Forme de travail 1-2 jours > 2 jours TOTAL > 8 h par À Nomades Indépen- Pays par par (définition de mois 1 domicile Mobiles dants semaine semaine référence) 8.4 1 - 1 5 - 72-12 3 4 France - 2.2 2.3 - 15.5 - 6.3 5 - 5.26 1.8 - - 7 18.8 - - - - - - Allemagne - 1.6 6.3 - 16.3 - 16.6 - 7 1.5 - - 8.5 - 2.0 4.7 - 13.7 - 13.8 Autriche - 9.0 5.2 - - 14.2 30.0 - - - - - - Belgique - 2.2 5.3 - 12.5 - 10.6 - 11.0 3.7 - - 14.7 Canada 12.3 8.0 5-6 - - 9.8 7 17.4 16.5 10.0 - - - 25.7 8 Danemark - 4 21.7 - 13.9 - 21.5 - 12.8 3.2 - - 16.0 6.2 - - - - - - Espagne - 0.3 2.0 - 9.1 - 4.9 - 6.6 1.8 - - 8.4 27.6 - - - - 10.4 21.5 États-Unis - 5.1 12.2 - 18.9 - 24.6 17.7 - - - - - - Europe - 6.2 2.1 - - 8.3 9 1 Pour l’ensemble de cette colonne, les chiffres sont issus d’une enquête de 2005 du cabinet Gartner, mise à jour en 2007, intitulée « Teleworking, the quiet revolution ». Le cabinet spécialisé s’est appuyé sur les chiffres des instituts de statistiques nationaux, consolidés et complétés par sa connaissance des marchés. 2 Ces chiffres proviennent de l’étude de la DARES de 2004 (Premières information, Premières synthèses, « Le télétravail en France ») sur la base des chiffres 1999-2002 de l’Enquête permanente sur les conditions de vie des ménages (enquête dite « PCV ») de l’INSEE. 3 Chiffre 2005 de l’enquête Conditions de travail menée par la DARES. Il correspond à la « proportion de salariés qui utilisent à leur domicile un ordinateur pour leurs activités professionnelles ». 4 Selon l’enquête SIBIS de 2002, les télétravailleurs mobiles sont ceux qui travaillent, au moyen des TIC, plus de 10 heures par semaine, à distance de leur lieu de travail ou de leur domicile. 5 Les chiffres à l'intersection des dernières colonnes et des lignes de couleur bleue sont issus de l’enquête SIBIS de 2002, menée selon une méthodologie fiable et harmonisée au niveau européen. Pour ces deux raisons, malgré leur relative ancienneté, ces données sont considérées comme des chiffres de référence, dans ce tableau et dans la figure n° 2. 6 Dans l’enquête européenne sur les conditions de travail, le nombre total de télétravailleurs est divisé en deux catégories : ceux travaillant en quasi-totalité à domicile et ceux y travaillant entre un quart et trois quarts du temps. 7 Chiffres de 2005 issus de l’enquête sociale générale de Statistique Canada. Les chiffres de 2008 sont en cours de traitement. 8 Chiffres de 2006 issus de l’enquête de l’Agence danoise des statistiques (Danmarks Statistik). 4 % des personnes actives interrogées déclarent « télétravailler régulièrement depuis leur domicile » (nous assimilons cela à plus de deux jours par semaine) contre 21,7 % qui déclarent « télétravailler occasionnellement depuis chez elles » (nous assimilons cela à un ou deux jours de télétravail). 9 Chiffres Eurofound (Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail) 2005, pour l’UE-27. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 136 - www.strategie.gouv.fr
  • 137. Forme de travail 1-2 jours > 2 jours TOTAL > 8 h par À Nomades Indépen- Pays par par (définition de mois 1 domicile Mobiles dants semaine semaine référence) 32.4 - - - - - 14 1-25 2 Finlande - 4.7 11.0 - 19.7 - 21.8 - 11.0 2.0 - - 13.0 5.0 - - 4.3 - - 7.1 3 Italie - 0.8 1.7 - 14.1 - 9.5 - 2.9 1.0 - - 3.9 Japon 24.0 - - - 12.4-37.4 2.7-8.6 15.2-46 4 Monde 3.5 - - - - - - - - - 2 - - 8-10 5 Norvège - - - - - - 11.6 6 9.0 11.6 19.6 26.4 Pays-Bas 11.2 2.8 14.0 22.3 - - 2.2 6.67 - 8.8 8 Royaume- - 2.4 8.5 - 18.9 - 17.3 Uni - 6.1 3.5 - - 9.6 9 26.8 3 1 1.6 18 - 5.4 10 Suède - 5.3 9.5 19.3 - 18.7 - - - - - - 15 11 - - - 0.5 8.2 - - Suisse - 4.2 7.1 - 16.8 - 16.8 - 6.7 1.6 - - 8.3 1 Ce chiffre est considéré comme le chiffre de référence par la Mission économique finlandaise. 2 Le chiffre de 25 % de télétravailleurs en Finlande est fourni par l’étude européenne sur les conditions de travail (Eurofound). 3 Chiffres pour 2005. 4 Pour l’année 2008, le ministère japonais du Territoire, des Infrastructures et des Transports a estimé à 15,6 % la part des télétravailleurs dans la population active au sens restreint (travailleurs utilisant des TIC à des fins professionnelles en dehors de leur lieu de travail au moins 8 heures par semaine) et à 46 % au sens large (travailleurs qui utilisent des TIC pour travailler en dehors de leur lieu de travail). 5 Chiffres de 2007. 6 Chiffres 2005 de Eurofound. 7 Télétravailleurs travaillant dans différents endroits mais utilisant leur domicile comme base. 8 Hormis pour la colonne 1, ces chiffres de 2007 sont issus de l’Office for National Statistics (ONS), qui retient une définition très large du télétravail (« les télétravailleurs sont des personnes qui travaillent principalement depuis leur domicile personnel ou sur différents lieux lorsqu’elles sont en déplacement en utilisant leur domicile comme base et qui ont recours à la fois au téléphone et à un ordinateur pour poursuivre leur activité depuis leur domicile »). 9 Selon l’agence suédoise chargée de l’environnement (Arbetsmiljöverket), 18 % des employés. 10 En 2005, il y avait 5,4 % de télétravailleurs au sens strict selon l’office suédois des statistiques (SCB), contre 6,8 % en 2003. 11 Chiffres de 2006 issus de l’enquête suisse sur la population active (ESPA) menée par l’Office fédéral de la statistique (OFS). Le télétravail à domicile pur est peu développé (0,5 % de la population active) ; en revanche, le télétravail mobile représentait 8,2 % de la population active en 2006, selon la définition de l’OFS (« le télétravail partiel à domicile, utilisé dans les cas où une partie seulement du travail peut être effectué à la maison »). Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 137 - www.strategie.gouv.fr
  • 138. Annexe 8 Les corrélations entre l’essor du télétravail et quelques indicateurs socioéconomiques En étudiant les données d’une vingtaine de pays, il apparaît que l’essor du télétravail 1 est corrélé : a. faiblement avec le climat (coefficient de corrélation C = – 0,24 pour les tempé- ratures moyennes, C = 0,03 pour l’amplitude des températures, C = – 0,16 pour le minimum des températures…), la densité de population (C = 0,27), le degré 2 de tertiarisation de l’économie (C = 0,3), le taux de syndicalisation (C = 0,12) ; b. moyennement avec le travail d’équipe (C = 0,4), la rotation et la complexité des tâches (respectivement C = 0,48 et C = 0,42) ; c. fortement avec le management par objectifs (C = 0,67), l’accès à l’Internet (C = 0,68) et les contacts professionnels hors des horaires normaux de bureau (C = 0,59) ; d. très fortement avec le déploiement des infrastructures numériques (C = 0,81 pour accès à l’Internet à haut débit, C = 0,8 pour accès à bas débit pour les chiffres de 2002). Le développement est donc faiblement lié – contrairement à ce que l’on pourrait croire a priori – aux paramètres géographiques au sens large et à la macrostructure de l’économie. En revanche, l’incidence du management par objectifs et de l’accès à l’Internet semble importante, ils peuvent constituer les deux facteurs clés de l’essor du télétravail. 1 Pour C = [0,20-0,40] corrélation faible, C = [0,4-0,6] corrélation moyenne, C = [0,6-0,8] corrélation bonne, C > 0,8 corrélation élevée. Selon les paramètres étudiés et la disponibilité des données pour l’année 2002, le nombre de pays pris en compte pour les corrélations varie. 2 Le taux de syndicalisation pourrait indiquer la nature du dialogue social. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 138 - www.strategie.gouv.fr
  • 139. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 139 - www.strategie.gouv.fr
  • 140. Sources : enquête SIBIS 2002, Eurostat, Eurofound, CIA Worldbook, OCDE, World Economic Forum, The Economist, Bureau International du Travail Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 140 - www.strategie.gouv.fr
  • 141. Annexe 9 Liste des tableaux et figures Tableau n° 1 : Comparaison des principaux éléments du cadre juridique français relatif au télétravail ............................................................................................................... 15 Tableau n° 2 : Nombre de télétravailleurs dans les pays de l’OCDE, comparaison des principales sources disponibles (données en pourcentage) ........................................ 19 Tableau n° 3 : Définitions du télétravail retenues pour les enquêtes ........................................ 19 Tableau n° 4 : Part des entreprises pratiquant le télétravail selon leur secteur d’activité et leur taille (France, entreprises de plus de 10 salariés, 2008 ; données en pourcentage) .... 22 Tableau n° 5 : Le télétravail selon la catégorie socioprofessionnelle, le sexe et l’âge (période 1999-2003 – données en pourcentage)................................................................. 24 Tableau n° 6 : Usages professionnels de l’Internet et besoins de bande passante associés ............................................................................................................................... 38 Tableau n° 7 : Freins à l’essor du télétravail, classés selon quatre thèmes .............................. 40 Tableau n° 8 : Prise en charge des équipements informatiques par les entreprises françaises des secteurs des études, du conseil et de l’informatique ................................. 45 Tableau n° 9 : Formalisation du travail à domicile aux horaires de bureau............................... 46 Tableau n° 10 : Caractéristiques du télétravail .......................................................................... 47 Tableau n° 11 : Comparatif du cadre juridique du télétravail dans 23 pays de l’OCDE ........... 49 Tableau n° 12 : Conditions de travail des télétravailleurs français............................................ 56 Tableau n° 13 : Prise en charge assurantielle du domicile en cas de télétravail, pour les secteurs français de l’informatique et du conseil .................................................. 60 Tableau n° 14 : Probabilité de télétravail pour 82 professions (situation en 2008) ................... 63 Tableau n° 15 : Probabilité future de télétravail pour 82 professions (situation en 2015/2020).... 66 Tableau n° 16 : Influence du télétravail sur les conditions de travail de 862 salariés belges ... 78 Tableau n° 17 : Analyse des principaux facteurs de développement du télétravail.................. 96 Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 141 - www.strategie.gouv.fr
  • 142. Figure n° 1 : Historique du développement du télétravail en France ........................................ 13 Figure n° 2 : Position des pays de l’OCDE en matière de télétravail au début des années 2000.................................................................................................................. 17 Figure n° 3 : Population salariée pratiquant le télétravail plus de 8 heures par mois sur la période 2000-2010 (données en pourcentage).......................................................... 18 Figure n° 4 : Diffusion du télétravail dans les pays de l’OCDE.................................................. 20 Figure n° 5 : Corrélation entre management par objectifs et télétravail .................................... 35 Figure n° 6 : Corrélation entre densité de population et télétravail ........................................... 39 Figure n° 7 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble de la population active occupée en 2008 ................................................................................................................. 65 Figure n° 8 : Potentiel de télétravailleurs dans l’ensemble de la population active occupée en 2015/2020 ........................................................................................................ 67 Figure n° 9 : Intention de départ en retraite au regard de la santé et des conditions de travail des retraités.......................................................................................................... 68 Figure n° 10 : Taux d’emploi des 55-64 ans dans certains pays de l’OCDE (données 2008) ..... 69 Figure n° 11 : Le télétravail selon BMW..................................................................................... 81 Figure n° 12 : Taux de télétravailleurs selon la taille de l’organisation, le secteur économique et le niveau de maturité du projet de télétravail (onze pays considérés) ....... 83 Figure n° 13 : Schéma de mise en place du télétravail agréé par un regroupement d’organisations belges......................................................................................................... 84 Figure n° 14 : Schéma de mise en place du télétravail agréé par treize entreprises américaines du secteur high-tech ....................................................................................... 85 Figure n° 15 : Exemple de plan d’action « Télétravail » pour la fonction publique américaine.... 87 Figure n° 16 : Productivité en fonction du nombre de jours télétravaillés par mois.................. 94 Figure n° 17 : Évolution de la productivité en fonction de la part du temps passé en télétravail ......................................................................................................................... 94 Figure n° 18 : Exemple d’économies de charges immobilières, selon certaines hypothèses (en pourcentage des coûts immobiliers).............................................................................. 95 Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 142 - www.strategie.gouv.fr
  • 143. Annexe 10 Abréviations, sigles et acronymes ACE Accord-cadre européen (intervenu entre partenaires sociaux européens en 2002) ADESATT Association d’étude et de suivi de l’aménagement du temps de travail dans les métiers du savoir ADSL Asymmetric digital subscriber line AFEP Association française des entreprises privées AFPA Association nationale pour la formation professionnelle des adultes AFTT Association française du télétravail et des téléactivités ANDT Association nationale pour le développement du télétravail et de la téléformation ANI Accord national interprofessionnel (transposition de 2005 par les partenaires sociaux français, de l’accord européen de 2002) APEC Association pour l’emploi des cadres ARCEP Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes AT/MP Accident du travail / maladie professionnelle BIT Bureau international du travail CAO Conception assistée par ordinateur CAS Centre d’analyse stratégique CATRAL Agence régionale pour l’aménagement du temps de travail CCI Chambre de commerce et d’industrie CDD Contrat à durée déterminée CDI Contrat à durée indéterminée CEEP Centre européen des entreprises à participation publique et des entreprises d’intérêt économique général CEFAC Centre d’études et de formation des assistants techniques du commerce, des services et du tourisme CE Comité d’entreprise CES Confédération européenne des syndicats CFE-CG Confédération française de l’encadrement – Confédération générale des cadres CFDT Confédération française démocratique du travail CFTC Confédération française des travailleurs chrétiens CGIET Conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies CGPME Confédération générale des petites et moyennes entreprises CGT Confédération générale du travail CHSCT Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 143 - www.strategie.gouv.fr
  • 144. CIGREF Club informatique des grandes entreprises françaises CIF Congé individuel de formation CIR Crédit d’impôt recherche CNAF Caisse nationale d’allocations familiales CNAMTS Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés CNAV Caisse nationale d’assurance vieillesse CNIL Commission nationale de l’informatique et des libertés CNNC Commission nationale de la négociation collective COCT Conseil d’orientation sur les conditions de travail CPAM Caisse primaire d’assurance maladie CREDOC Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie DARES Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques DATAR Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale DGAFP Direction générale de l’administration et de la fonction publique DGI Direction générale des impôts DGT Direction générale du travail DIACT Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires DIF Droit individuel à la formation DREES Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques DRH Direction des ressources humaines DS Délégué syndical DSI Direction des systèmes informatiques ELMUT Espaces locaux mutualisés de télétravail FAP Familles professionnelles FAQ Frequently asked questions – Foire aux questions FDI Forum des droits sur l’Internet FFSA Fédération française des sociétés d’assurances FO Force ouvrière GDR Groupement de recherche GEMA Groupement des entreprises mutuelles d’assurance GPS Global positioning system INSEE Institut national de la statistique et des études économiques IRP Instances représentatives du personnel LOLF Loi organique relative aux lois de finances LTE Long term evolution MEDEF Mouvement des entreprises de France OCDE Organisation de coopération et de développement économiques OFS Office fédéral de la statistique ONQ Ouvrier non qualifié Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 144 - www.strategie.gouv.fr
  • 145. OQ Ouvrier qualifié PME Petite et moyenne entreprise RS Représentant syndical RSE Responsabilité sociétale des entreprises SESSI Service des études et des statistiques industrielles SIBIS Statistical indicators benchmarking the information society (Indicateurs statistiques comparatifs de la société de l’information) SIG Service d’information du Gouvernement THD Très haute définition TIC Technologies de l’information et de la communication TPE Très petite entreprise UEAPME Union européenne de l’artisanat et des petites et moyennes entreprises UNICE Union des confédérations de l’industrie et des employeurs européens Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 145 - www.strategie.gouv.fr
  • 146. Annexe 11 Références bibliographiques ANACT, « Le télétravail en question, Analyse critique à partir de 10 cas d’entreprises », coordonné par Denis Bérard, Études et Documents, 2002. Aouici S. et Carillon S., avec la collaboration de Mette C., « Les motivations de départ à la retraite », Les Cahiers de la CNAV, L’assurance retraite caisse nationale, mai 2008. Aubert P., Caroli È. et Roger M., Nouvelles technologies et nouvelles formes d’organisation du travail : quelles conséquences pour l’emploi des salariés âgés ?, INRA, LEA, septembre 2006. Beer (de) A., « Le télétravail en perspective », Futuribles, n° 317, mars 2006. Besnard S., Chevalier P., Victor P., Guillemot D. et Kocoglu Y., « Des TIC de plus en plus diversifiées dans les entreprises », INSEE Première, n° 1126, mars 2007. Besnard S., Biré C. et Victor P., « L’intégration des TIC est encore incomplète dans les entreprises », INSEE Première, n° 1184, avril 2008. Bigot R. et Croutte P., La diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société française, rapport réalisé à la demande du Conseil général des technologies de l’information et de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, CREDOC, novembre 2008, Blanchet D. et Debrand T., « Aspirations à la retraite, santé et conditions de travail : une comparaison européenne », Économie et Statistique, n° 403-404, 2007. Boboc A. et Dhaleine L., « Faire du privé au bureau, une question de genre ? », Réseaux, n° 145-146, 2007. Boboc A., Dhaleine L. et Mallard A., « Travailler, se déplacer et communiquer : premiers résultats d’enquête », Réseaux, n° 140, 2007. Breton T., Les téléservices en France, rapport au ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire et au ministre des Entreprises et du Développement économique, Paris, La Documentation française, 1993. Broughton A., Place of work and working conditions, European Foundation for the improvement of Living and working conditions, 2006. Centre d’études de l’emploi, enquête COI (développée par plusieurs institutions de la statistique publique) : www.enquetecoi.net/fr2006/cadre1.htm. CITICA, Rendu intermédiaire de la mission « Entreprises en télécentres » pour le Réseau national des télécentres (RNA), Ruralitic, TIC et territoires ruraux, Aurillac, 28 août 2008. Colombier N., Martin L. et Pénard T., « Usage des TIC, conditions de travail et satisfaction des salariés », Réseaux, n° 143, 2007. Commission européenne, Implementation of the European Framework Agreement of Telework, Rapport des partenaires sociaux européens, adopté par le comité de dialogue social le 28 juin 2006. Centre d’analyse stratégique Novembre 2009 - 146 - www.strategie.gouv.fr
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